Reims | Procès de l’affaire du petit Tony

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“Moi j’ai mis les coups et elle l’a pas protégé”, explique l’accusé
Loïc Vantal comparaît depuis le 1er février devant les assises de la Marne pour avoir battu à mort le fils de sa compagne, Tony, 3 ans, en 2016 à Reims. Ce jeudi, l’accusé a reconnu les coups, sans épargner la mère de l’enfant, qui comparait pour “non dénonciation de mauvais traitements”.

Après l’interrogatoire de la mère de Tony, Caroline Létoile, plus tôt dans la journée, la cour d’assises de la Marne a entendu ce jeudi Loïc Vantal, le beau-père de l’enfant accusé, d’avoir porté les coups qui ont été fatals à Tony. L’enfant, âgé de 3 ans et demi, est mort le 26 novembre 2016 au CHU de Reims, après une rupture de la rate et une fracture du pancréas. 

Loïc Vantal répond à toutes les questions, n’en balaye aucune. Carrure imposante, voix forte, les mains appuyées sur la barre, il explique d’abord sa relation avec le petit Tony lorsqu’il se met en couple avec la mère de l’enfant :

“Je l’amenais parfois à l’école, je m’occupais de lui parce que je voyais que sa mère s’en sortait pas…” .”Il répondait à sa mère, il parlait mal”,

explique Loïc Vantal, qui reconnaît des addictions au cannabis et à l’alcool depuis l’âge de 14 ans, 15 ans.

On est tous les deux responsables, moi j’ai mis les coups, et elle, elle l’a pas protégé — Loïc Vantal

La présidente de la cour d’assises lui rappelle le poids de l’enfant -17 kilos- et lui demande la taille de Tony, comme pour faire comprendre la disproportion entre l’enfant et son beau-père. “98 centimètres”, répond du tac au tac Loïc Vantal. La fréquence des coups ? “pas tous les jours, souvent”.

“Vous lui portez des coups qui le font voler contre les meubles, et comment vous analysez ?” interroge la présidente.

“C’est pas normal”, répond l’accusé,” mais étant jeune, c’était comme ça avec mon père, alors j’ai cru que c’était normal ».

Et pourquoi il s’énerve ? “J’avais l’impression qu’il se foutait de moi le petit, Caroline me disait d’arrêter, mais je me rendais pas compte de tout”.

Le papa de Tony, partie civile, sort de la salle d’audience

Loïc Vantal confirme les insultes, “bâtard”, “petit con”, et puis ce moment où tout bascule trois jours avant la mort de l’enfant :

“C’est vraiment le mercredi que j’ai pété un câble, j’ai mis des claques, j’ai mis des coups de poing, quand il est au sol, j’ai continué…”

Interrogé sur les coups de pied, il répond :

«”Jamais un coup de pied ! juste une fois dans le cul”.

Le récit est éprouvant, pour certains dans le public, mais surtout pour le père de Tony qui quitte la salle d’audience.

“Quand il a le nez cassé, il a dû hurler ?” interroge la présidente ? – “Il a pas hurlé, il était pas bien”.

Mais Loïc Vantal explique que l’enfant avait peur de lui, oui il le ressentait, presque dès le début en septembre 2016.

A chaque fois je me suis excusé, mais c’est pas excusable, c’est impardonnable – Loïc Vantal

Jusqu’au 26 novembre, pourquoi ni Loïc Vantal ni Caroline Létoile n’ont-ils pensé à amener Tony chez un médecin, alors qu’il vomissait et ne mangeait quasiment plus depuis quelques jours ?

Caroline Létoile prétend que son compagnon l’en a empêché.

 “Je l’ai pas empêché d’aller chez le médecin”, répond l’accusé,

“je lui ai juste expliqué les conséquences… ça aurait été mieux pour elle, que les services sociaux lui enlèvent le petit, qu’elle me foute dehors, et le petit il serait encore là”.

“J’ai jamais empêché quoi que ce soit, je l’ai jamais empêcher de téléphoner, je lui ai rien interdit”, insiste encore Loïc Vantal à propos de son ex-compagne.

Sur le jour de la mort de Tony, il dit se souvenir avec précision de l’état du petit garçon :

 “Il était mal, j’ai compris qu’il était dans un était grave, elle voulait l’amener chez sa mère et je lui ai dit d’appeler les pompiers”.

Interrogé par l’avocat général sur sa culpabilité, Loïc Vantal explique qu’il a beaucoup réfléchi depuis plus de quatre ans, depuis le début de sa détention.

“J’ai entraîné sa mort, je l’ai battu… je l’ai pas tué”, dit l’accusé, qui est en effet jugé pour “violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner” et non pour meurtre. Il encourt 30 ans de réclusion criminelle.

A la barre, il ajoute : “Je mérite d’être condamné”.

Condamnation

Loïc Vantal, le beau-père du petit Tony mort à trois ans sous les coups en 2016, a été condamné hier soir à 20 ans de réclusion criminelle.

La mère de l’enfant, Caroline Letoile, a écopé de quatre ans d’emprisonnement dont un avec sursis probatoire pour “non-dénonciation de mauvais traitements” et “non-assistance à personne en danger”. Un verdict jugé satisfaisant par la défense.

La cour d’assises de la Marne a assorti la condamnation de Loic Vantal, 28 ans, reconnu coupable de “violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner sur un mineur de 15 ans” et “violences habituelles”, d’une peine de sûreté des deux-tiers et d’un suivi socio-éducatif de 7 ans.

“Un soulagement”

“Les juges et les jurés ont tenu compte de l’humanité de Loic Vantal. Je suis satisfait. C’est aussi un soulagement pour lui”, a réagi son avocat, Me David Scribe.

“Notre décision de faire appel est en suspens […] Caroline Letoile continue de pleurer. C’est le poids de l’émotion qui la fait craquer après ces cinq jours. Elle ne pleure pas sur sa peine”, a rapporté son avocate Me Pauline Coyac.

L’avocat général Matthieu Bourrette avait requis 30 ans de réclusion criminelle à l’encontre du beau-père “tueur” et cinq ans d’emprisonnement, dont un avec sursis, pour une mère au silence “complice”, dont la défense a plaidé la relaxe.

Selon lui, les coups qui ont plu sur l’enfant, jusqu’à ce qu’il succombe à un éclatement de la rate et du pancréas le 26 novembre 2016, étaient mus par une “méchanceté gratuite” associée à “l’égocentrisme” de l’accusé, condamné sept fois pour violences, après avoir été lui-même battu enfant par son père.

“Je regrette tout ce qui s’est passé, d’avoir fait du mal aux deux familles. J’ai eu un comportement inacceptable. Je mérite d’être condamné. Je travaille et continuerai de travailler sur mon comportement”, a déclaré Vantal avant que le jury ne se retire.

“Nous sommes un peu déçus. On espérait un peu plus pour les deux au vu des violences qui ont été exercées sur Tony”, a réagi Me Chalot Olivier, avocat du père et de la grand-mère de l’enfant.

Pour Me Jean-Baptiste Rozes, pour l’association Innocence en danger, “il y a certes la culpabilité pour les deux accusés. Mais je trouve que c’est un jugement relativement clément”.

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