Royaume-Uni | Des personnalités mises en cause par l’opération Hydrant

Pédophilie au Royaume-Uni

Britain's former Prime Minister Sir Edward Heath arrives at 10 Downing Street, in London Monday, April 29, 2002, where Prime Minister Tony Blair was hosting a celebratory royal Golden Jubilee dinner. Britain's Queen Elizabeth II, the Duke of Edinburgh and four former Prime Ministers were attending along with the relatives of five other prime ministers who held power during the Queen's 50-year reign but have since died. (AP Photo/Max Nash)
L’ancien Premier ministre, conservateur, Sir Edward Heath, mis en cause dans l’enquête Hydrant, en avril 2002 arrivant au 19 Downing Street pour un dîner offert alors par le Premier ministre, travailliste, en place Tony Blair. AP Photo/Max Nash

La Police des Polices britannique a ouvert une nouvelle enquête le 3 août 2015 impliquant un ancien Premier ministre aujourd’hui décédé. L’opération”Hydrant”, lancée en 2012 révèle des milliers d’affaires de pédophilie plus sordides les unes que les autres.

Les 100 000 plaintes devraient être dépassées cette année, et la classe politique britannique largement mise en cause.

Des réseaux de prostitution infantile impliquant des centaines de personnalités publiques ont été découverts depuis que l’opération Hydrant a été lancée en 2012. Le responsable en chef de cette opération de police avait fait sensation, le 20 mai dernier, en annonçant que 1 400 individus de sexe masculin faisaient l’objet d’enquêtes pour des abus sexuels pédophiles.

Les chiffres ne peuvent pas résumer la réalité sordide que la police anglaise découvre, mais dévoilent l’ampleur de cette affaire : au moins 75 foyers de l’enfance, 40 institutions religieuses et 154 écoles sont concernés, de même que des casernes et des centres sportifs…

Sur les 1400 suspects, 250 sont des personnalités publiques dont 43 sont issues de l’industrie musicale, 135 de l’univers de la télévision, du cinéma ou de la radio, et 76 du monde politique…

Les plaintes affluent, et souvent remontent à plusieurs années, voire des décennies. La dernière en date concerne un homme politique décédé en 2005, l’ancien Premier ministre britannique Edward Heath en poste de 1970 à 1974 (dont la dame de fer Margaret Thatcher dénonçait le socialisme sournois – sic). La nouvelle enquête de la Police des Polices ouverte le 3 août dernier laisse supposer de multiples complicité policières ou de l’aministration qui auraient permis d’enterrer les plaintes à l’encontre de Heath durant des années.

Un réseau pédophile politique ?

C’est la déclaration d’un parlementaire travailliste, Tom Watson qui a mis le feu aux poudres en 2012, obligeant la justice britannique à ouvrir une première enquête, puis à lancer l’opération Hydrant. Tom Watson avait dénoncé alors “Un puissant réseau pédophile lié au Parlement et au 10 Downing Street (le domicile du Premier ministre, ndlr)”.

L’affaire du prédateur sexuel Jimmy Savile, ce célèbre animateur de la BBC était à cette époque dans toutes les têtes.

 

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Les célébrités Fred Talbot, Gary Glitter, Jimmy Savile, Rolf Harris, Stuart Hall, Max Clifford : tous sont suspectés d’avoir violé des enfants. (Montage photo : The Guardian)

Plus les multiples enquêtes s’accumulent, plus la théorie de Watson devient crédible. Les révélations sur l’implication de nombreux députés du Parlement britannique (le Palais de Westminster) dans des affaires de pédophilie, en juillet 2014, ont accrédité la thèse qu’un réseau pédophile y était en place depuis les années 70. Les plaintes qui parfois parvenaient jusqu’aux autorités étaient systématiquement enterrées par l’administration.

L’article du Courrier International — au moment de la révélation de ce scandale — indique sans détours cette implication des politiques :

“Le ministère de l’Intérieur est désormais accusé d’avoir systématiquement caché des preuves d’abus sexuels impliquant des personnalités de tout premier plan.” Une autre opération de police a alors été lancée, nommée “Midland”.

Cette opération a dévoilé un réseau pédophile qui sévissait durant la décennie 1970-80, composé de ministres, de députés, de membres des services secrets, de militaires ou bien encore de juges et d’avocats. Les viols d’enfants ou d’adolescents impliquant les personnalités politiques avaient lieu dans des appartements de luxe près de Westminster, des centres pour orphelins…

L’ex Premier ministre Edward Heath n’est plus là pour témoigner, mais les plaintes à son encontre s’accumulent toujours. Le système judiciaire britannique ne connaît pas de prescription des faits, dans la durée, à l’inverse du système judiciaire français.

Heath aurait violé un enfant de 12 ans en 1961 selon le Daily Mirror, et les principales accusations qui ont conduit à l’ouverture de l’enquête du 3 août se situent dans les années 90. Une tenancière de maison de passe exploitant des jeunes filles mineures avait cité Edward Heath comme l’un de ses clients au cours d’une investigation : le nom de l’ex-Premier n’est pourtant jamais apparu au cours des procès qui suivirent. De hauts gradés sont soupçonnés, encore une fois, d’avoir étouffé de façon systématique toutes les implications de l’homme politique.

 

Lowell Goddard, la juge néo-zélandaise à laquelle le dossier Hydrant a été confié, s'attaque à une tâche immense... Home Office/PA via AP
Lowell Goddard, la juge néo-zélandaise à laquelle le dossier Hydrant a été confié, s’attaque à une tâche immense…
Home Office/PA via AP

Une enquête nationale indépendante

La juge néo-zélandaise Lowell Goddard (première magistrate du Commonwealth d’origine maori) a été nommée début  juillet 2015 pour entamer une très vaste enquête nationale — indépendante — sur les abus sexuels à l’encontre des enfants. Elle succède à deux autres juges ayant été écartés après des soupçons de collusion avec la classe politique. Cette enquête touchera à tous les secteurs, activités et personnels suivants :

— Les personnels politiques d’importance, les services de sécurité et de renseignement, les branches spéciales.
— Les structures rééducatives, y compris l’éducation spécialisée, les écoles religieuses et les écoles privées
— La police et le service d’enquête de la Couronne, avec aussi les dossiers clos, et les échecs de procédures.
— Les autorités locales et les organisations bénévoles, y compris les orphelinats gérés par l’État, les familles d’accueil et les services d’adoption.
— Le NHS (National Health Service, équivalent des hôpitaux publics), le ministère de la Défense et des forces armées, les fournisseurs d’accès Internet, les entreprises d’assurance et les médias nationaux.

L’opération Hydrant est devenu une véritable boite de Pandore qui ne semble pas prête de se refermer. La société britannique commence à entrevoir l’étendue de centaines de milliers de crimes sexuels impunis durant des dizaines d’années, visiblement couverts pour une partie par les autorités aux ordres de personnels politiques. Le juge Lowell Goddard, si elle n’est pas démise de ses fonctions, a un travail colossal devant elle, avec presque certainement de nouvelles découvertes… encore plus sordides et inquiétantes que les autres.

Source : http://information.tv5monde.com

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