La Ville-du-Bois | Un cyber-prédateur s’attaque à 18 adolescentes d’un collège

Un homme de 21 ans vivant à Fréjus a été interpellé pour corruption de mineur. Il avait réussi à obtenir des images dénudées sur Snapchat et Instagram de 18 jeunes filles âgées de 12 à 15 ans, scolarisées dans le collège privé de La Ville-du-Bois.

La Ville-du-Bois, mercredi 13 février 2019. Voilà plusieurs semaines, les parents d’élèves ont été informés par la direction de l’établissement qu’une enquête de gendarmerie était en cours. LP Gérald Moruzzi

Il se faisait passer pour un ado de 16 ou 17 ans sur les réseaux sociaux Snapchat ou Instagram où il parvenait à séduire ses victimes.

Derrière ce faux profil se cachait un prédateur et redoutable manipulateur.

Cet homme de 21 ans, qui vivait chez ses parents à Fréjus (Var), est suspecté d’avoir réussi à soutirer des photos intimes de jeunes filles âgées de 12 à 15 ans, scolarisées à l’Institut du Sacré-Cœur à La Ville-du-Bois.

Après les avoir menacées, il avait parfois diffusé des images dénudées à des proches de ses victimes, pour les obliger à aller encore plus loin. Le 17 janvier, six d’entre elles ont brisé l’omerta et déposé plainte à Nozay. Elles seront dix-huit au total à dénoncer les faits.

Après trois semaines d’investigations, les gendarmes de Palaiseau et Nozay ont interpellé à Fréjus le jeune homme le 6 février. Placé en garde à vue, notamment pour corruption de mineur et diffusion d’image pédopornographiques, le suspect, inconnu de la justice, a été remis en liberté le week-end dernier et placé sous contrôle judiciaire. Il sera jugé par le tribunal correctionnel d’Evry en juin.

Il réclame des photos dénudées de ces victimesTout commence fin 2018. Une élève de l’Institut du Sacré-Cœur est contactée sur Snapchat. Un garçon qu’elle ne connaît pas la complimente.

Ils passent en discussion privée sur les réseaux sociaux. Il est un peu plus âgé, et parvient à gagner la confiance de sa victime.

Rapidement, il demande à la jeune fille de lui envoyer des clichés. D’abord en sous-vêtements. Puis nue. Pour la rassurer, il envoie aussi des photos de lui dans le plus simple appareil.

Quand les mineures lui résistent, le maître chanteur n’hésite pas à envoyer des photos aux camarades de ses victimes.

« C’est du cyber-harcèlement, il manipule, puis menace. Une fois rentré dans son jeu, on ne peut plus en sortir, relate-t-on à la gendarmerie de l’Essonne. Il a fallu agir très vite, car il y a eu des drames, des suicides dans d’autres affaires de ce type. »

« Les élèves se sentaient coupables, elles étaient fragilisées »Le groupement de gendarmerie de l’Essonne a créé voici plus d’un an une équipe de cinq personnels qui mène des opérations de sensibilisation dans les écoles sur les dangers d’Internet. Près de 25 000 jeunes ont été concernés :

« Tout ce qui est envoyé sur le Net reste sur le Net. Même si on échange avec quelqu’un pendant plusieurs mois, cela reste une personne que l’on ne connaît pas », met en garde la colonelle Karine Lejeune, commandante du groupement de gendarmerie de l’Essonne.

Cette équipe de prévention a été déployée à l’Institut du Sacré Cœur. « Les élèves se sentaient coupables, elles étaient fragilisées, déstabilisées, il a fallu leur faire comprendre qu’elles avaient été victimes d’un prédateur, d’un manipulateur, indiquent les gendarmes.

« Il faut absolument que les parents fassent attention à l’utilisation d’Internet pour leurs enfants, que ce soit sur les ordinateurs, mais surtout sur les téléphones, reprend une source proche du dossier. Ça peut aller tellement vite… »

Le volet essonnien de cette affaire ne constitue que le début d’une enquête parallèle menée désormais par le parquet de Draguignan.

« Lors de son interpellation, son ordinateur a été exploité, et plusieurs autres groupes de jeunes filles mineures réparties sur toute la France auraient aussi été attaquées par cet homme », indique une source proche du dossier.

Les élèves choqués par cette affaire.

Aux abords de l’institution privée du Sacré-Cœur, élèves et parents abordent avec retenue cette affaire de corruption de mineures. Agée de 15 ans, Manon* ne fait pas partie des victimes, mais elle connaît bien l’une d’entre elles et les tourments qui animent sa camarade.

« Je sais qu’elle pense sérieusement à changer d’établissement, même en cours d’année, confie l’adolescente, qui met en avant « les regards, les remarques et les rumeurs » qui entourent sa copine depuis que tout a éclaté.

Surprise par l’ampleur de cette affaire, Lola*, 14 ans, a échangé avec plusieurs des victimes. Pour l’une de ses amies, qui avait envoyé des photos sous la pression, la réaction de ses parents a été radicale. « Elle n’a plus de téléphone », indique-t-elle.

Si Sarah* n’a pas été touchée, ses parents ont aussi pris des dispositions sans tarder. « Ils m’ont pris mon smartphone et m’ont donné un téléphone qui ne permet que d’appeler et d’envoyer et recevoir des SMS », indique-t-elle.

Comme l’ensemble des parents d’élèves, Stéphanie, 42 ans, a été informée par la direction de l’établissement qu’une enquête de gendarmerie avait été lancée. Quelques semaines ont passé et elle ne semble pas plus inquiète que cela pour sa fille de 13 ans. « Elle ne va pas sur les réseaux sociaux », pointe-t-elle.

Pas d’inquiétude non plus du côté de Frédéric, 45 ans, dont la fille est en 4e.

« Elle n’utilise pas Snapchat et n’a pas de compte Facebook, souligne-t-il. Surtout, elle est bien au courant des dégâts que peuvent engendrer les réseaux sociaux. »

* Les prénoms ont été changés

Source : leparisien.fr

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