Saint-Malo | Une fille de 4 ans, victime d’inceste, a-t-elle été considérée comme «consentante» par le tribunal ?

Le tribunal de Saint-Malo a condamné un homme à huit mois de prison avec sursis pour «atteinte sexuelle et délaissement» sur sa fille de 4 ans.

Une association de soutien aux victimes d’inceste déplore que l’homme n’ait pas été condamné pour agression sexuelle

Saint-Malo, le 2 novembre 2018. Photo Damien Meyer. AFP

Dans un article publié le 6 septembre, Ouest-France rapporte qu’un homme a été condamné la veille pour «atteinte sexuelle et délaissement» sur sa fille de 4 ans à huit mois de prison avec sursis et à une mise à l’épreuve pendant deux ans, avec obligation de soins.

Une association de victimes d’inceste critique la décision du parquet de Saint-Malo

Sur Twitter, l’Association Internationale des Victimes d’Inceste (AIVI) a relayé cette décision en interprétant que «la fille de 4 ans [a été] considérée comme “consentante” à l’inceste par le tribunal de Saint-Malo qui condamne pour atteinte sexuelle et non agression sexuelle».

Une fille de 4 ans considérée comme “consentante” à l’#inceste par le tribunal de Saint-Malo qui condamne pour atteinte sexuelle et non agression sexuelle. 8 mois avec SURSIS pour le père qui conserve l’autorité parentale. Bienvenue à #pedolandhttps://t.co/CcQECPLtZs

— AIVI #inceste #MeToo (@Asso_AIVI) 7 septembre 2019

Vous semblez étonnée par cette interprétation puisque l’article d’Ouest France, ne mentionne à aucun moment le fait que le parquet de Saint-Malo ait présenté l’enfant comme consentant ou non consentant.

Dans une série de messages, l’association AIVI explique la différence entre l’atteinte sexuelle et l’agression sexuelle. L’atteinte sexuelle est définie dans le code pénal comme «le fait, par un majeur, d’exercer une atteinte sexuelle sur un mineur de quinze ans» et se distingue du viol ou de l’agression sexuelle par le fait qu’elle n’est pas «commise avec violence, contrainte, menace ou surprise» et qu’il n’y a pas d’acte de pénétration sexuelle (qui caractérise le viol).

L’atteinte sexuelle est punie de sept ans d’emprisonnement et de 100000 euros d’amende ; ou de dix ans d’emprisonnement et de 150000 euros d’amende dans certains cas particuliers, notamment «lorsqu’elle est commise par un ascendant ou par toute autre personne ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait». Dans les mêmes conditions, l’agression sexuelle sur mineur de 15 ans peut être punie de sept ans d’emprisonnement et de 100000 euros d’amende et le viol de 20 ans de réclusion criminelle.

Pour l’AIVI, le fait que le parquet de Saint-Malo ait décidé de condamner le père uniquement pour atteinte sexuelle, et non pas pour agression sexuelle ou viol, revient à dire que la justice ne reconnaît pas la contrainte exercée sur la fille de 4 ans et donc qu’elle aurait été consentante.

8 mois de sursis pour un acte unique

Contacté par CheckNews pour connaître les raisons de cette condamnation, le parquet de Saint-Malo insiste sur le fait qu’à «aucun moment au cours des débats, il n’a évidemment été question d’un “consentement” de la fillette», et répond : «Les faits ont été commis en 2017 avant l’entrée en vigueur de la loi d’août 2018 qui indique que le jeune âge d’une victime suffit à caractériser la contrainte ou la surprise permettant de qualifier les faits en agression. A l’audience, le tribunal n’a pas requalifié compte tenu semble-t-il de la nature des faits reprochés s’agissant d’un acte unique : le père de l’enfant dans un contexte d’alcoolisation ayant pris la main de la fillette pour la poser sur son propre sexe. Aucune autre agression n’est ressortie de l’enquête.»

Concernant la condamnation à de la prison avec sursis, considérée comme trop clémente par certains, le parquet explique que «la peine prononcée de 8 mois d’emprisonnement assortis d’un sursis avec mise à l’épreuve durant deux ans apparaît en regard avec la gravité des faits et la personnalité de l’auteur. Elle n’aurait pas été différente si la qualification retenue avait été celle d’agression. Il a par ailleurs fait l’objet d’une inscription au Fichier des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes».

La porte-parole du parquet de Saint-Malo note enfin que «la mère de l’enfant a demandé et obtenu 1 euro de dommages et intérêts ce qui à mon sens restitue également l’exacte teneur de cette affaire».

Source : liberation.fr

 

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