Indre | le père auteur de viols incestueux condamné à vingt ans de réclusion

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L’avocat général avait requis trente ans de réclusion criminelle.
La cour d’assises de l’Indre a condamné, ce mercredi, un homme de 57 ans à vingt ans de réclusion pour des viols répétés sur sa fille, mineure au moment des faits (13 ans). La mère, coupable de non-dénonciation, prend deux ans de prison avec sursis et échappe à ma prison ferme.

Covid oblige, les fenêtres du palais de justice s’entrouvrent et plongent la salle d’audience dans le froid.

Le ton est donné, ce mercredi 10 février, pour cette troisième et dernière journée des assises de l’Indre. Trois jours glaçants, théâtre de l’exposition au grand jour d’une famille peu ordinaire.

Le père, 57 ans, est accusé de viols répétés sur sa fille, aujourd’hui âgée de 21 ans mais qui avait 13 ans quand tout a commencé.

Et enfin la mère, poursuivie elle aussi pour non-dénonciation des crimes de son mari.

Après deux jours à entendre les intéressés ainsi que les témoins, issus du cercle familial ou non, ce dernier jour est celui des plaidoiries et des réquisitions.

Me Christel Jousse défend la jeune victime. « Victime oui, je veux le rappeler, malgré le trouble porté par certains témoignages. Pourtant, elle se tient devant nous, affrontant ses deux parents, dans cette épreuve terrible ».

S’agissant du père, l’avocate parle « d’un homme dangereux, amoral, mythomane, qui inflige à ses enfants sa pseudo-liberté sexuelle ».

Pour la mère, les mots sont durs : « Placée quand elle avait un an et demi, la victime a été récupérée par sa mère à 13 ans. Finalement, sa mère n’a fait que la livrer à son père ».

Les discussions depuis lundi ont beaucoup tourné autour de ce mois de septembre 2015, quand une première enquête tente de savoir ce qu’il se passe dans cette famille mais se retrouve face au mutisme de la victime.

« Elle était sous une emprise psychologique énorme, à laquelle on finit tristement par s’habituer. Il la traitait comme un chien, comme sa chose. Cela prend du temps de mettre des mots sur tout ça ».

Entre 2012 et 2017, il y a eu des relations sexuelles, parfois presque quotidiennes. Le père les a reconnus, mais seulement après les 15 ans de sa fille. 

“Le tour de la table, à quatre pattes, nue et attachée à un collier”

L’avocate générale, Carine Mazat, veut d’abord éclairer les jurés, peu rompus à l’exercice judiciaire, sur les différents chefs d’accusations et des peines qui peuvent en découler.

Revenant aux faits, elle veut d’abord confirmer que « la victime a bel et bien pris ses premières pilules de contraception à 13 ans, une ordonnance le signale ».

Puis elle met des mots sur une situation qui, là encore, était très difficile à comprendre pendant le procès.

« Quand le père dit à sa fille que si elle parle, il ira en prison et la famille sera détruite, cela s’appelle du chantage affectif pour une victime qui, placée pendant douze ans, rêvait d’une famille. » 

Puis Carine Mazat aborde le plus effroyable, en revenant sur le témoignage, toujours précis, de la victime :

« Le tour de la table, à quatre pattes, nue et attachée à un collier, ou encore la demande du père, celle de manger des croquettes pour chien. »  

L’avocate générale requiert trente ans de réclusion assortie d’une période de sûreté de quinze ans à l’encontre du père. Ce dernier, dans son box, reste stoïque.

La mère, elle, est coupable « d’attention fautive, en refusant de considérer son mari comme l’auteur de ces faits. D’autant qu’elle éprouve de la jalousie pour la victime, qu’elle voit comme une rivale.

D’ailleurs elle n’a exprimé à aucun moment de l’empathie pour sa fille durant ce procès ».

Il est requis, contre elle, deux ans d’emprisonnement dont six mois avec sursis.

Elle a voulu en rajouter pour que son père soit condamné à une lourde peine. Me Alban Briziou, avocat du prévenu.

Parole ensuite à la défense, à commencer par Me Alban Briziou, avocat du père :

« Selon plusieurs témoignages familiaux, il y avait une volonté pour la jeune fille de s’accaparer son père. Elle était jalouse quand il portait son attention d’autres filles. Et surtout, elle a tenu des propos très sexualisés en indiquant souhaiter faire des enfants avec son père à sa majorité. Je m’interroge. »

L’avocat revient aussi sur cette fameuse enquête de 2015 : « Des mains lui ont été tendues, plusieurs fois. Elle disait que tout allait bien. Une expertise psychologique avait été demandée. Là encore, rien à signaler ».

Pour Me Alban Briziou, son client « vouait une admiration pour sa fille, il était fier d’elle ».

Une situation qui, selon lui, « profitait à la jeune fille, elle jouait un rôle actif dans la famille ».

« Mais tout cela s’est brisé quand elle a fugué. À son retour, elle était tombée de son piédestal. À partir de là, elle a voulu effacer cette période et en rajouter pour que son père soit condamné à une lourde peine ».

Plaidant des actes consentis, il a demandé l’acquittement de son client.

La mère évite la prison ferme

Enfin, Me Aurore Cédié a plaidé, longuement, pour la mère, s’adressant aux jurés :

« Vous êtes ici pour vous prononcer sur l’absence de dénonciation d’un crime dont ma cliente aurait eu connaissance. Déjà, il faut reconnaître le crime, c’est une chose. Ensuite, la connaissance n’est pas le doute. La mère savait que sa fille dormait avec père. Mais était-elle au courant des relations sexuelles ? Non, car personne ne lui parle, ni le père, ni la fille ».

Me Cédié rappelle ensuite la situation actuelle de sa cliente.

« Elle vit seule depuis trois ans, avec deux garçons à charge. La condamner à de la prison ferme reviendrait à laisser ces deux petits bonhommes sans leur maman ».

L’acquittement a aussi été demandé s’agissant de la mère.

Après plusieurs heures de délibérations, le jury civil et les juges condamnent le père à vingt ans de réclusion.

Il lui est en outre interdit d’entrer en contact avec sa fille et d’exercer une activité en lien avec des mineurs.

La mère est condamnée de son côté à deux ans d’emprisonnement assortis d’un sursis probatoire de trois ans. Elle évite donc la prison ferme.

Au civil, le père et la mère devront solidairement verser 20.000 euros à leur fille au titre du préjudice subi.

Ils disposent de dix jours pour faire appel de leurs condamnations.

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