Paris – Philippines | Condamnation de Bouhalem Bouchiba à 25 ans de réclusion criminelle
- La Prison avec sursis... C'est quoi ?
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- 01/11/2024
- 22:18
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Mise à jour du 03/11/2024:
Une affaire aussi “exceptionnelle” qu’”extraordinaire”.
Le procès de l’Angoumoisin Bolhem Bouchiba, jugé entre le 29 et le 31 octobre dernier devant la cour d’assises de Paris, s’est révélé en tout point fidèle aux qualificatifs graves choisis par Philippe Courroye, l’avocat général, au moment de sa plaidoirie, jeudi dernier.
Jusqu’à 500 victimes
“Exceptionnelle”, elle l’a été, en raison de la nature des faits. L’accusé, un graphiste “star” dans le cinéma d’animation, sollicité par les studios Disney et Pixar, âgé de 59 ans, né à Melle, dans les Deux-Sèvres, était poursuivi pour avoir commandé entre février 2012 et septembre 2021 des shows sexuels en direct mettant en scène des mineures, depuis les Philippines par webcam, via des applications telles que Whatsapp ou Skype.
“Extraordinaire” aussi, pour le nombre de victimes potentielles, variant de plusieurs dizaines à près de 500, selon les différentes estimations possibles, établies par les enquêteurs. L’affaire était également “inédite” car jugée devant une cour d’assises en France, les faits de pédocriminalité étant traditionnellement jugés en correctionnelle.
À cette liste, il convient d’ajouter la situation de “récidive” de l’accusé, condamné une première fois à Poitiers en 2014 pour l’agression de la fillette de l’une de ses ex-compagnes.
Jusqu’au bout, l’affaire aura fortement marqué les enquêteurs et l’institution judiciaire.
Des commandes en ligne “passées à des milliers de kilomètres, comme pour des objets de consommation quotidienne”, rappelle l’avocat général, qui insiste : “Neuf années de faits, avec, au bout, la figure de l’enfance.”
Un procès sans les victimes
À l’audience, une évidence s’impose. Le procès se déroule sans les victimes, des fillettes “dont nous ne connaissons ni les noms, ni les visages”, poursuit l’avocat général. Ces enfants sont âgées de moins de 10 ans, et se révèlent parfois très jeunes, “entre 2 et 3 ans“, reconnaît l’accusé. Des “victimes qu’il nommait sous le vocable de porcs”, pointe le procureur.
Elles sont les grandes absentes de ces trois jours de procès d’assises, représentées par sept associations parties civiles, telles que La voix de l’Enfant, L’Enfant bleu ou encore Agir contre la prostitution de l’enfant.
Au deuxième jour du procès, le président du tribunal, Mahrez Abassi, qui, mène les débats d’une voix de velours, demande à ce que les échanges sur Whatsapp de l’accusé avec ses contacts aux Philippines soient diffusés sur les écrans géants dans la salle.
Des écrits crus, très directifs, défilent et révèlent l’horreur des instructions données par l’accusé aux femmes qui, depuis les Philippines, organisaient les shows sexuels pour lesquels il payait des sommes variants de 20 euros à 100 euros.
Des sommes présentées à l’audience comme colossales au vu de l’extrême pauvreté des familles des jeunes victimes et du salaire moyen de 300 euros dans le pays, et qui, cumulées, atteignent le montant d’au moins 50 000 euros sur neuf ans.
Interrogé en 2021, pendant sa garde à vue, sur ces sommes dépensées, l’accusé s’était alors dit “surpris”, semblant découvrir les montants exorbitants envoyés à ces contacts philippins et en prendre soudainement la mesure, ou plutôt, la démesure.
A l’audience, il réitère. Mais il assure aussi que sur l’ensemble des transferts,
“il y avait d’autres paiements pour aider les familles à acheter à manger et pour la scolarité des enfants”.
Il ajoute avoir aussi envoyé un virement pour aider à “reconstruire un toit de maison détruit par un typhon”. Le tribunal écoute, prend note. L’avocat général manque, lui, s’étrangler : ”
Et en plus, c’est un humaniste ! (…) Qu’il ait donné de l’argent sans visionnage, j’ai du mal à y croire”.
L’accusé se perd ainsi ponctuellement dans des explications, parfois hésitantes et confuses, destinées, selon l’avocat général, à “minorer ce qu’il s’est passé”.
Comme lorsqu’il explique au tribunal qu’il s’est retrouvé “harcelé” de demandes par “les money runner”, ses contacts aux Philippines, ou piégé par des envois d’images pédopornographiques, dont certaines, douze en tout, ont pu être récupérées depuis le cache des applications de son smartphone.
Son avocat, Me Romain Ruiz, aura beau lister les numéros de téléphone philippins blacklistés par l’accusé, la cour ne se montrera guère convaincue par l’argument.
“Quand on va sur le darknet, on sait ce qu’on va y trouver”, estimera l’avocat général. “Car c’est là que se retrouvent les criminels qui, comme lui, viennent chercher ce type d’images !”
Images pédopornographiques
Pour que l’ensemble des parties comprennent de quel “type d’images” il est question, le président du tribunal ordonne leur diffusion.
L‘horreur des photos ne laisse aucune place au doute.
Les fillettes photographiées ont été victimes de viol, d’agression, voire, même, d’actes de torture.
Dans ses déclarations, l’accusé admet qu’il
“demandai[t] aux mamans d’écarter les jambes de leur enfant, pervers que j’étais”. Il reconnait aussi avoir “demandé des tortures, mais je coupais la caméra tout de suite, j’étais dégoûté”. Puis il ajoute : “Et, j’envoyais l’argent”.
Le tribunal s’attarde ainsi longuement sur les récits insoutenables des actes de torture pratiqués.
Une lame de couteau est ainsi dangereusement approchée du sexe d’une enfant. Il demande aussi à ce que l’on découpe l’enfant. L’acte est simulé par de la viande de poulet déposé sur le corps de la fillette qui semble alors servir de planche à découper.
Interrogé sur l’effet que ses actes ont pu provoquer sur ces jeunes victimes, Bolhem Bouchiba reconnaît qu’il n’a “pas été humain, ni réceptif à la détresse des enfants”. À chaque fois, il reconnaît les faits. Mais jamais, pourtant, au cours de ses neuf années, il n’a semblé prêt à ne plus solliciter les services de ses contacts aux Philippines.
Lorsque le tribunal l’interroge sur les raisons pour lesquelles il demandait toujours plus de prestations, “de nouveaux viols !”, “alors qu’il y a déjà plein de vidéos en ligne”, il déclare :
“Je pense que je m’adaptais à ce que les femmes philippines me proposaient. Je ne réfléchissais pas, je ne me posais pas de questions.”
Expulsé des États-Unis
Seuls son contrôle à l’aéroport de San Francisco, en Californie, le 25 janvier 2020, État américain où il réside alors depuis deux ans pour son travail chez Pixar, et son placement en garde à vue en France le 4 octobre 2021, mettront un terme à ses agissements.
Ce jour de 2020, les autorités américaines saisissent son matériel informatique, découvrent des images pédocriminelles et l’expulsent.
À l’audience, le premier jour des débats, l’enquêtrice de la police judiciaire explique que l’enquête française débute alors par l’examen des “transferts d’argent depuis les comptes” de Bolhem Bouchiba.
Elle révèle des virements à destination de “81 ressortissants philippins”, “pour 50 000 euros au moins”. Une ressortissante retient particulièrement l’attention des enquêteurs français : une femme connue pour “l’exploitation sexuelle de mineures”.
Pendant ses premières auditions en garde à vue, Bolhem Bouchiba expriment des regrets et
“reconnaît son attirance pour les petites filles et leur sexe sans poil”, déclarera-t-il aux enquêteurs, tout en exprimant alors le “souhait d’être jugé”.
“Être derrière un écran lui donnait le droit de tout”, expliquera l’enquêtrice de la police judiciaire à l’audience, visiblement très marquée par l’affaire. “Au fil de cette enquête difficile, j’ai vu des choses de plus en plus horribles arriver jusqu’à moi”, confiera-t-elle à la barre.
Également sollicitée au premier jour du procès, la cheffe de section pédocriminalité en ligne de l’OFMIN (l’office de protection des mineurs) vient expliquer à la cour le mode opératoire des pédocriminels qui désormais utilisent le livestreaming pour commettre leurs crimes.
“Tout est mis en place pour que les scénarios demandés par les pédocriminels soient mis en scène”, détaille-t-elle. “Les violences sont effectuées par un membre de la famille, à la demande du pédocriminel. En raison du décalage horaire avec les Philippines, les enfants peuvent être réveillés en pleine nuit, habillés pour le show. Parfois, on va même chercher un enfant dans la rue. Le coût est moindre pour le pédocriminel – pas besoin d’aller aux Philippines ! – et, le profit maximum pour l’intermédiaire et la famille. Derrière son écran, le pédocriminel se sent protégé. Il se déculpabilise en se sentant gentil donateur”.
L’enquêtrice évoque les difficultés rencontrées tout au long de son travail “avec des législations différentes d’un pays à l’autre”.
Si son service est alerté lorsqu’une “personne est arrêtée aux Philippines”, interpeller un criminel ne peut se faire là-bas “qu’en flagrant délit”.
Elle dit aussi la difficulté à identifier les victimes.
“Dans le phénomène de livestreaming, le plus souvent, rien n’est enregistré. Mais nous travaillons avec les autorités philippines pour arrêter les intermédiaires et sauver des enfants”, assure-t-elle.
Elle explique encore que seule la coopération des “auteurs” permet d’identifier les victimes.
La violence des faits présentés tout au long du procès sera explicitée par l’expert psychiatre à travers un diagnostic posé chez l’accusé de “déviance sexuelle pédophilique et sadomasochiste, soit le fait d’avoir du plaisir dans le sadisme”.
Pour lui, si l’accusé se révèle “intelligent”, rien ne permet d’affirmer que les premiers troubles pédophiles qu’identifie Bolhem Bouchiba remontent effectivement à la mort de sa mère et de l’un de ses frères. “Les fantasmes pédophiles commencent généralement à l’adolescence”, explique-t-il.
L’envahissement du trouble pédophile
Impossible pour l’expert d’établir de liens entre les possibles traumatismes de l’enfance évoqués dans le parcours de vie de Bolhem Bouchiba en ouverture de procès (des premières années dans la misère, une mère dépressive mariée à 14 ans en Algérie, un placement à la DDASS, un divorce) et les faits qui lui sont reprochés.
L’accusé raconte avoir grandi en se construisant “une bulle” pour se protéger, avec pour seule figure paternelle, celle du frère aîné lui ramenant des cadeaux en lui rendant visite ponctuellement. Mais, face à l’attitude “autocentrée” de l’accusé, l’expert se dit “inquiet” du risque élevé de récidive et préconise des “soins” et une “confrontation à la sanction pénale”.
Interrogé sur “l’envahissement” que l’accusé dit ressentir face à son trouble pédophile, l’expert psychiatre est formel :
“il peut y avoir une altération du libre arbitre, mais pas au point d’altérer le discernement”.
Au moment des plaidoiries, l’avocat de L’Enfant bleu, Me Jean-Christophe Boyer, insistera auprès des jurés sur ce point.
“Les experts vous ont dit les choses : la négation de l’existence des enfants chez l’accusé”. Et l’avocat de se tourner vers le banc des parties civiles occupé par les avocats des sept associations représentées : “Si on savait qui sont les victimes, vous auriez ici un avocat par victime. Imaginez, 300 victimes ! Là, on passe trois jours ensemble et rien ! J’ai le sentiment d’un simulacre de débat. Il est où le débat ? On n’a que ça ! On fait ça pour vous parler des viols ! Si les victimes étaient toutes là, vous seriez là deux mois aux assises pour écouter tout le monde !”
Sa consoeur, Me Nathalie Bucquet, qui représente l’association Innocence en danger, aura ces mots :
“Je cherche à donner une voix aux enfants victimes”. Et elle cite ce chiffre : “sept millions d’enfants seraient victimes de violences sexuelles par an aux Philippines et il y a ce silence autour de ces faits”. “Nous sommes là pour juger les faits qu’il a commis”, ajoute-t-elle, “pas pour faire de M. Bouchiba ou du phénomène de livestreaming des symboles”.
A la fin de ses réquisitions, l’avocat général insistera sur la portée du verdict à venir.
“Au-delà de ces murs, la cour d’assises enverra un message à l’humanité. Car dans ce dossier, c’est l’enfance toute entière, transfrontalière, qui est concernée. L’impunité, c’est fini !”
L’accusé craque
Dans le box des accusés, Bolhem Bouchiba craquera à deux reprises.
La première fois à l’évocation de son enfance miséreuse.
La seconde lorsque le président le confrontera à l’horreur des faits et lui demandera simplement et le plus doucement du monde : “Que pouvez-vous nous dire sur les victimes, M. Bouchiba ?”
Crane dégarni, barbe grisonnante, l’accusé se lèvera, dos vouté au dessus du micro, et répondra à la cour.
“Les victimes ont souffert, psychologiquement, physiquement, manipulées par des adultes. Elles sont malheureusement encore victime, ne sachant nullement pourquoi elles se mettent nues devant une caméra. Je ne sais pas comment elles vont grandir, comment elles vont se souvenir d’elles dans leur enfance, si elles ne vont pas avoir des traumatismes sévères, une vie horrible, sans argent, sans soutien. Elles ont donné leur corps à des caméras, à des téléphones…”
Bolhem Bouchiba s’assied alors pour prendre sa tête entre ses mains et fondre en larmes.
Sa défense mettra en avant que l’accusé a toujours reconnu l’ensemble des faits qui lui sont reprochés et plaidra pour une peine “juste”, dans la “nuance”. “On nous dit qu’il a essayé de se faire passer pour un gentil donateur, mais ce n’est pas sa ligne de défense et ça ne l’a jamais été !”
Je demande pardon
Bolhem Bouchiba prendra la parole le dernier pour redire qu’il est “responsable (…) de ce qui m’est reproché”.
“Je prends conscience de tout ce que j’ai fait. Il faut protéger les enfants. Je demande pardon aux victimes.”
Après une longue délibération, les jurés suivront les réquisitions de l’avocat général et condamneront Bolhem Bouchiba à 25 ans de réclusion assortis d’une période de sûreté aux deux tiers.
Il est aussi reconu coupable de complicité de viols et d’agressions sexuelles sur mineurs en récidive et de traite d’êtres humains aggravée sur mineurs en récidive et consultation habituelle de contenu pédopornographique en ligne.
Articles du 01/11/2024:
Bouhalem Bouchida a été reconnu coupable de complicité de viols et d’agressions sexuelles sur mineurs en récidive, mais également de complicité de traite d’êtres humains aggravée sur mineurs en récidive et consultation habituelle de contenu pédopornographique en ligne.
La cour a également retenu la circonstance aggravante d’actes de torture et de barbarie qui lui avait été soumise par le parquet concernant les faits de complicité de viols, d’agressions sexuelles et de traite d’êtres humains.
Il a toutefois été relaxé des faits de détention d’images pédopornographiques « au bénéfice du doute ».
La cour d’assises de Paris a également prononcé un suivi sociojudiciaire de 20 ans, l’obligation d’indemniser les parties civiles et l’interdiction définitive d’exercer une profession avec des mineurs
Des actes horribles et dégueulasses, selon l’accusé lui-même
Lors de sa dernière prise de parole, Bouhalem Bouchiba, crâne dégarni et barbe grisonnante avait une nouvelle fois reconnu sa culpabilité.
« Je prends conscience de tout ce que j’ai fait. Je demande pardon aux victimes », avait-il ajouté.
L’homme de 59 ans était jugé depuis mardi pour avoir, entre 2012 et 2021, payé des femmes philippines pour qu’elles violent et agressent sexuellement des fillettes philippines, âgées de cinq à 10 ans, et au moins une fois une petite fille de deux ans, devant une webcam via la pratique du « live streaming ».
De l’autre côté de l’écran, l’accusé donnait les ordres, qu’il qualifiait lui-même d’« horribles » et « dégueulasses » et se masturbait.
Plus tôt dans la journée le ministère public avait requis la même peine à l’encontre de l’accusé. « Côté jardin, vous avez le graphiste qui émerveille les enfants (…) puis côté cour, Bouhalem Bouchiba est un metteur en scène pédophile qui scénarise ses propres films d’horreur », avait déclaré l’avocat général Philippe Courroye
L’accusé reconnaît tous les faits reprochés
La défense, elle, avait plaidé en faveur de la « nuance » dans cette affaire où l’accusé avait reconnu « tous les faits reprochés », appelant également à prendre en considération « son évolution psychologique ».
Pendant trois jours, plusieurs experts se sont succédé, détaillant l’histoire de cet homme devenu une « sommité internationale du dessin », selon le président de la cour Mahrez Abassi, mais au passé « complexe » et à la « sexualité dérangée ».
Lors de son interrogatoire, l’accusé avait spontanément reconnu être coupable de « tous les faits » reprochés et mis en avant « les bienfaits de la prison » dans son parcours de rédemption.
« Pendant trois ans, je ne me suis pas masturbé en pensant à un enfant », avait-il assuré.
Pour parler de ces enfants, Bouhalem Bouchiba, décrit par les experts comme « pédophile » et « sadique », avait admis employer le terme de « porcs » et ordonné des actes violents et « scénarisés » à leur encontre
Entre 50 et 100 euros
Il avait par exemple ordonné de mettre « un tee-shirt dans la bouche du porc », de trouver « un porc pour le couper entièrement » ou d’utiliser un couteau sur le sexe d’une enfant. Selon lui, ces directives avaient pour but « de (se) faire peur », mais il a reconnu qu’elles s’apparentaient à « de la torture ».
C’est une fois la vidéo terminée qu’il envoyait l’argent. Entre 50 et 100 euros. Une manière, selon lui, de se dédouaner.
« À chaque fois que j’envoyais de l’argent, ça me procurait une déresponsabilité psychologique », avait-il argué.
Selon l’enquête, Bouhalem Bouchiba aurait déboursé plus de 50 000 euros sur la période.
Son nom était inscrit au Fijais, le fichier des délinquants sexuels, après une première condamnation en 2014 pour avoir agressé sexuellement sa belle-fille de 9 ans
Articles du 31/10/2024:
À travers des témoignages et un réquisitoire accablant, le procès a mis en lumière la double vie de l’accusé, entre son parcours artistique et des agissements d’une violence extrême orchestrés à distance.
Une peine de 25 ans de réclusion criminelle assortie d’une période de sûreté des deux tiers a été requise.
« Côté jardin, vous avez le graphiste qui émerveille les enfants (…) puis côté cour, Bouhalem Bouchiba est un metteur en scène pédophile qui scénarise ses propres films d’horreur », a déclaré l’avocat général Philippe Courroye, en introduction de son réquisitoire.
Le ministère public a également requis à l’encontre de l’accusé un suivi socio-judiciaire de 10 ans prévoyant une obligation de soins, ainsi que l’interdiction d’exercer une profession en lien avec des mineurs.
Le verdict est attendu ce jeudi.
Actes de torture et barbarie
L’ancien graphiste de 59 ans est jugé depuis mardi devant la cour d’assises de Paris pour complicité de viols et d’agressions sexuelles en récidive sur mineurs.
Il est aussi poursuivi pour complicité de traite d’êtres humains aggravée sur mineurs en récidive, détention d’images pédopornographiques en récidive et consultation habituelle de contenu pédopornographique en ligne.
Bouhalem Bouchiba est accusé d’avoir, entre 2012 et 2021, payé des femmes philippines pour qu’elles violent et agressent sexuellement des fillettes, majoritairement âgées de cinq à 10 ans, en direct devant une webcam via la pratique du « live-streaming ».
De l’autre côté de l’écran, à plusieurs milliers de kilomètres, l’accusé donnait les ordres et se masturbait.
« Si ces petites victimes sont absentes, je suis certain que vous avez entendu, au cours de cette audience, leurs cris, leurs souffrances et leurs sanglots », a déclaré l’avocat général.
L’ajout de la circonstance aggravante d’actes de torture et de barbarie aux faits de complicité de viols, d’agressions sexuelles et de traite d’être humains a également été requis
Reconnaissances des faits
Plus tôt jeudi, les parties civiles ont demandé à ce que « la voix des grands oubliés » de ce procès, les enfants victimes « qui n’ont ni âge ni visage », soit entendue, selon Me Inès Davau, avocate de l’association La Voix de l’enfant.
« Nous sommes là pour vous rappeler que ces enfants sont de vrais enfants, pas des personnages animés », a déclaré Me Céline Astolfe de la Fondation de l’enfance, plaidant en faveur d’une décision « punitive, dissuasive » et à la « vertu restaurative ».
Lors de son interrogatoire mercredi, Bouchiba, décrit par les experts comme « pédophile » à dominante « sadique », avait reconnu « tous les faits » reprochés parmi lesquels les demandes qu’il avait pu formuler, allant jusqu’à « de la torture ».
Emploi du terme de porc
Mardi, c’est son enfance « complexe » qui a été abordée, marquée par la pauvreté, une recherche identitaire, un père alcoolique, puis absent, et un beau-père violent.
Pourtant, Bouhalem Bouchiba l’affirme : ce qui s’est passé dans son enfance « n’est pas une excuse aux crimes » qu’il a commis.
« Je n’ai pas été humain », a-t-il concédé.
Petites filles dénudées ou mises en scène dans des positions sexuelles…
La cour avait projeté mardi certains clichés retrouvés en sa possession.
L’accusé, dont les yeux n’avaient pas quitté l’écran, a indiqué avoir ressenti « du dégoût » en revoyant ces images.
À l’audience, il assure également avoir eu conscience de la peur des petites filles lors des shows, soutenant que leurs pleurs le « sortaient de ce délire malsain ». Il disait couper systématiquement la caméra, n’étant plus capable de regarder.
Pour parler de ces enfants, Bouhalem Bouchiba, décrit par les experts comme « pédophile » et « sadique », a également admis employer le terme de « porcs » et ordonné des actes violents et « scénarisés » à leur encontre.
« Vous étiez le metteur en scène », l’a interpellé l’avocat général Philippe Courroye.
Couper la tête d’une fillette
L’accusé avait par exemple ordonné de mettre « un tee-shirt dans la bouche du porc » ou de trouver « un porc pour le couper entièrement ». D’autres demandes, comme celle d’utiliser un couteau sur le sexe d’une enfant ou de « couper la tête » d’une fillette, avaient selon l’accusé pour but « de (se) faire peur », reconnaissant toutefois qu’elles s’apparentaient à « de la torture ».
Une fois le show terminé et ses fantasmes exécutés, il envoyait l’argent. Entre 50 et 100 euros.
Une manière, selon lui, de se dédouaner.
« À chaque fois que j’envoyais de l’argent, ça me procurait une déresponsabilité psychologique », a-t-il argué.
Sur l’apparition de ses premières pulsions, Bouhalem Bouchiba a maintenu tout au long de l’interrogatoire « ne pas avoir connu de signes » avant 2009, et le passage à l’acte sur sa belle-fille pour lequel il avait été condamné le 8 avril 2014 à deux ans de prison avec sursis et une mise à l’épreuve de trois ans
Une peine qu’il estime insuffisante pour stopper ses déviances.
« Si j’avais fait au moins un an de prison, la prise de conscience aurait été différente », a-t-il assuré.
Selon lui, c’est grâce à la détention depuis son incarcération en 2021 à la prison de Fleury-Merogis qu’il connaît « une transformation ».
Éloigné de sa famille et loin du « tourbillon malsain » dans lequel il s’était enfermé, Bouhalem Bouchiba a déclaré ne plus pouvoir redevenir « l’homme qu’(il était) avant d’être incarcéré ».
« Pendant trois ans, je ne me suis pas masturbé en pensant à un enfant », a-t-il assuré.
Ratatouille, Les Indestructibles, Là-Haut… Bouhalem Bouchida, artiste reconnu dans le cinéma d’animation à Angoulême et ex-graphiste de Disney et Pixar, a comparu du mardi 29 octobre au jeudi 31 octobre, devant la Cour d’Assises de Paris
Déjà condamné pour agression sexuelle sur mineure en 2014, Bouhalem Bouchida *, un Français de 59 ans, ancien graphiste pour des dessins animés de Pixar et Disney célèbres, est jugé ce mardi par la cour d’assises de Paris pour complicité de viols et d’agressions sexuelles sur de très jeunes filles.
L’univers des enfants dans lequel évoluait Bouhalem Bouchida se déployait en deux dimensions.
L’une, officielle, divertissante et valorisante, a permis à ce compétent graphiste français de travailler avec succès pour les plus grands studios américains d’animation de dessins animés.
L’autre, cachée, perverse et effroyablement illégale, vaut à cet homme de 59 ans de comparaître devant la cour d’assises de Paris, à partir de ce mardi 29 octobre.
En détention provisoire depuis trois ans, le natif de Melle (Deux-Sèvres) est principalement accusé de s’être, depuis ce département puis des États-Unis, pays où il a résidé à compter de décembre 2019, rendu complice de viols et d’agressions sexuelles perpétrés aux Philippines sur de très jeunes mineures, le tout en récidive légale.
Entre 2012 et 2021, année de son arrestation, Bouhalem Bouchida aurait ainsi payé et orchestré à distance les abus sexuels infligés par des adultes, les parents dans la plupart des cas, à des fillettes, scènes filmées et souvent diffusées en direct.
Cet homme à la personnalité « à connotation pédophile mais aussi sadique », comme l’a souligné une expertise psychiatrique, a, selon ses aveux, dépensé 10 000 euros, représentant environ 200 abus sexuels.
Une « estimation basse », note l’acte d’accusation en affirmant que les investigations financières ont relevé « 50 000 euros de fonds suspects, soit 1 000 abus sexuels en moyenne ».
Un chiffre « délirant » aux yeux de Me Romain Ruiz qui assurera, avec Me Jane Peissel, la défense de l’accusé qui encourt la prison à vie lors d’un procès dont toutes les parties soulignent la nature inédite ou spécifique.
Les jeunes victimes absentes du procès
Dans ce procès, sept associations de défense des droits de l’enfant se sont portées partie civile, comme la Voix de l’enfant, Innocence en danger, L’Enfant bleu ou encore la Fondation pour l’Enfance.
“Notre rôle dans ce procès, c’est d’être la voix de toutes les victimes qui n’ont pas pu être présentes, mais dans un second temps, il s’agira d’effectuer un travail un peu plus long de recherche et d’identification des victimes qui sont encore aux Philippines afin qu’elles puissent être reconnues comme victimes et leur apporter une aide”, explique Inès Davau, représentante de l’association La Voix de l’enfant.
« Ce procès revêt une importance particulière au regard de la personnalité de l’auteur mais aussi en raison des qualifications criminelles retenues et qui témoignent d’une évolution du traitement des dossiers de cyber pédocriminalité », observe Me Nathalie Bucquet, conseil d’Innocence en danger.
Le graphiste, qui a notamment collaboré avec Pixar et Disney, est jugé également pour complicité de traites des êtres humains aggravée.
« Les faits ont été commis dans le cadre d’activités criminelles aux Philippines »
synthétise la juge d’instruction qui a renvoyé Bouhalem Bouchida devant la cour d’assises, rappelant qu’il a lui-même parfaitement détaillé l’existence d’un réseau.
En payant des prestations sexuelles en direct à un adulte, l’intéressé ne « peut ignorer l’exploitation économique du mineur derrière cet acte », argumente encore la magistrate pour étayer ce chef d’accusation.
« Nous parlons d’un dossier de traite des êtres humains, viols, agressions sexuelles et détention de fichiers pédocriminels. En clair : la commission d’abus sexuels sur des mineurs, diffusés en live streaming contre rémunération. Il était impensable pour la Fondation pour l’enfance de laisser vide le banc de toutes ces si jeunes victimes non identifiées », justifie de son côté Me Céline Astolfe, conseil de cette autre association partie civile.
Car Bouhalem Bouchida sera bien le seul à comparaître à ce procès, en l’absence des femmes philippines qui l’ont mis en relation avec les personnes qui suppliciaient les enfants en suivant les ordres et les caprices désaxés du Français.
Des fillettes dont l’accusé lui-même a décrit les visages déformés par la peur.
Des fillettes pendues par les pieds.
Des fillettes dont on ne sait rien, sinon les cris de terreur et de douleurs que le dossier laisse sans peine imaginer.
Une affaire, dont le Figaro.fr a révélé l’existence, qui vient illustrer un phénomène épouvantable en pleine expansion : les abus sexuels via le « live streaming ».
Le live streaming au service du tourisme sexuel
Comme le rappelle l’ordonnance de mise en accusation, qui reprend à quelques modifications près la synthèse du parquet dans son réquisitoire définitif, cette activité criminelle consiste en l’exploitation sexuelle d’un enfant qui subit des abus sexuels « commandés à distance » par des ressortissants occidentaux.
Le live streaming connaît un développement important, dopé depuis que la crise sanitaire et ses restrictions de voyages internationaux ont rendu la tâche plus compliquée aux adeptes du tourisme sexuel.
La juge d’instruction précise que les Philippines sont particulièrement touchés par ce phénomène « organisé par des réseaux mafieux locaux, mais aussi par des familles défavorisées dans une des zones les plus pauvres du monde ».
L’argent de Bouhalem Bouchida qui a permis de corrompre ces adultes et faire souffrir ces enfants a également permis de le confondre.
En juillet 2019, Europol signale des mouvements de fonds suspects de ce Français vers les Philippines.
L’Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) hérite de l’enquête.
Les policiers découvrent assez vite que Bouhalem Bouchida est en contact avec une ressortissante philippine, réputée pour travailler comme « money-maker ».
En clair, elle se charge de centraliser la réception des flux financiers transférés dans le but d’exploiter sexuellement des mineurs.
Cette femme aurait ainsi, à elle seule entre 2009 et l’été 2016, fait été destinataire de 70 transactions d’un montant total de 19 000 euros.
Les investigations révéleront que le graphiste était en lien avec plusieurs autres « money-maker » afin d’assouvir ces pulsions les plus perverses.
Son téléphone rempli d’images pédopornographiques
Outre les envois d’argent, l’accusé a commis une imprudence lourde de conséquences pour lui.
Il a tenté de tromper les autorités américaines en leur cachant son passé de délinquants sexuel.
Erreur fatale.
Contrôlé le 25 janvier 2020 à l’aéroport de San Francisco, Bouhalem Bouchida se fait démasquer.
Les Américains découvrent qu’il a violé les règles en prétendant ne pas avoir d’antécédents judiciaires lors de sa demande de visa.
L’homme a en effet été condamné en 2014 pour des agressions sexuelles commises par ascendant sur mineure de 15 ans (sa belle-fille) à deux ans d’emprisonnement assortis d’un sursis avec mise à l’épreuve pendant trois ans (d’où la récidive légale).
Il s’est retrouvé inscrit au Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (Fijais).
À ce titre, il était justement recherché par la justice française pour défaut de justification de domicile…
Ce faux pas à San Francisco a donc précipité sa chute.
Les Américains saisissent et exploitent alors son matériel informatique.
Ils ne retrouvent « que » des images pédopornographiques dans son téléphone, des photos scabreuses de jeunes filles asiatiques.
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Le tout est transmis aux Français qui cherchent toujours à localiser le condamné coupable d’une entorse à ses obligations de déclarer où il vit.
« Show-mineurs »
Rentré en France, ce dernier finit par se rendre le 4 octobre 2021.
Au total, les enquêteurs vont l’entendre à cinq reprises.
Le graphiste reconnaît sans difficulté consulter des sites pornographiques, mais aussi des shows sexuels dévoilant via des webcams des Philippines.
Avec la même facilité, il évoque sa paraphilie pédophile et raconte s’être masturbé « devant des shows en direct d’enfants philippins de 3 à 15 ans à qui l’on fait subir des tortures, des viols avec les doigts ».
D’emblée, Bouhalem Bouchida, qui relate la phase suivante de sa dérive perverse — à savoir payer pour son premier « show-mineurs » où une gamine de 8-9 ans a été violée en Asie devant ses yeux — accepte d’endosser la responsabilité de ces faits.
« Ces actes barbares », selon ses termes.
Car l’homme, « pervers comme j’étais, j’avais envie de voir », a renouvelé l’expérience, à un rythme de 3 à 4 fois par semaine depuis 2017.
Il explique avoir versé de 50 à 100 euros pour ces shows, parfois beaucoup moins.
Quant aux instructions qu’il donnait, celles-ci allaient des actes sexuels les plus insistants et abjects aux sévices physiques les plus écœurants.
Le graphiste de dessins animés devenu le marionnettiste de l’horreur, cite des vidéos sadiques avec une lame de couteau s’approchant du sexe des petites victimes, des visages momifiés d’adhésif ou encore des simulacres d’éventration à l’aide de viande crue sur les chairs exhibées.
« J’ai cherché à profiter de la faiblesse de ces adultes, pour avoir des shows avec des enfants qui sont dégueulasses, je devrais finir mes jours en prison », s’autoflagelle Bouhalem Bouchida lors de sa deuxième audition.
Des enfants désignés par le mot « porcs » lors de ses négociations préalables aux abus sexuels.
De ses instructions qu’il donnait, en refusant de payer si elles n’étaient pas exécutées, le Français admet qu’il en tirait une jouissance physique, aussitôt suivie par un sentiment de dégoût accablé.
De son propre aveu, la distance géographique entre lui, ses complices bourreaux et les fillettes victimes, l’aidait à se réfugier dans le déni.
Et il récidivait encore et encore.
« Les femmes (les bourreaux) n’agissaient donc pas spontanément, mais bien sous les ordres de Bouhalem Bouchida lequel les poussait à commettre ces crimes en les rémunérant », relève la juge pour démontrer l’infraction de complicité par instigation.
« Face à l’explosion du phénomène des live streaming pédocriminels, la réponse pénale s’adapte pour sanctionner les auteurs qui, non contents de télécharger massivement du contenu pédopornographique, sont à l’origine de la production de tels nouveaux fichiers, participent à la commission d’agressions sexuelles et viols, et permettent leur diffusion sans fin », reprend Me Nathalie Bucquet, insistant sur le caractère emblématique de ce procès.
Il assume l’intégralité des faits
“Il y a beaucoup de ressorts psychologiques dans ce dossier qui peuvent expliquer le fait qu’il y ait eu cette ambivalence, entre dessinateur de génie le jour et pédocriminel la nuit”, raconte Romain Ruiz, l’avocat du prévenu.
Lors de l’audience, Bouhalem B. assume les faits qui lui sont reprochés :
“C’est rare, mais ça dit quelque chose de sa sincérité. C’est quelqu’un qui ne s’est jamais caché, qui n’a jamais tenté de minimiser quoi que ce soit depuis la première minute de sa garde à vue”, déclare Romain Ruiz. “Il a dit qu’il avait fait ces choses-là, qu’il souhaitait s’en expliquer et guérir. Il a cette honnêteté de dire que quand il ne sait pas, il ne sait pas. Il est sincère et il essaye lui-même de comprendre ce qu’il s’est passé”.
En défense, on s’attarde aussi sur le côté sans précédent.
Avec d’autres objectifs.
« Parce qu’il est le premier du genre devant la cour d’assises, ce dossier est une page blanche pour le monde judiciaire. Pendant trois jours, les jurés devront s’interroger sur une complicité d’un nouveau genre, au confluent du droit et de la morale, et qui, parce qu’elle est particulière, doit nous incliner à la réflexion et à la nuance », argumentent Mes Romain Ruiz et Jane Peissel.
Pour ces crimes, l’accusé encourt 20 ans de réclusion, le maximum doublé du fait de la récidive, soit 40 ans.
Le verdict est attendu mercredi.
* On trouve cet individu sous le prénom de “Bolhem” dans plusieurs autres articles.
Sources: Enfance en danger:
https://t.me/pedocriminalite/14046 https://t.me/pedocriminalite/14047 https://t.me/pedocriminalite/14059
https://t.me/pedocriminlite/14060 https://t.me/pedocriminalite/14071 https://t.me/pedocriminalite/14072
https://t.me/pedocriminalite/14073 https://t.me/pedocriminalite/14074
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