Paris | Victime d’un violeur en série à l’âge de 9ans, Adélaïde Bon témoigne (vidéo)
- La Prison avec sursis... C'est quoi ?
- 20/05/2019
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Adélaïde Bon raconte le viol qu’elle a subit à l’âge de neuf ans et l’amnésie traumatique qui a suivi. Les policiers ont dénombré 72 victimes sur 10 ans imputées à ce violeur en série et estime à au moins un millier le nombre de ses victimes.
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Adélaïde a été victime d’un viol à l’âge de neuf ans et a fait une « amnésie traumatique ». Après cet événement, elle n’avait pas les mots pour raconter correctement ce dont elle se souvenait aux policiers, explique-t-elle à Olivier Delacroix sur Europe 1.
À neuf ans, Adélaïde Bon a été victime d’un violeur en série, un dénommé Giovanni Costa (jugé coupable et condamné à dix-huit ans de réclusion en avril 2016). Victime d’amnésie traumatique, elle n’a réalisé que bien plus tard la portée de son traumatisme et de ce qu’elle avait vécu.
Elle a raconté son histoire dans un livre, « La petite fille sur la banquise » (Grasset) et déplore le fait que le vocabulaire français manque de mots pour décrire ce genre d’actes criminels.
« Comme la plupart des violeurs en série, il avait un mode opératoire qui était souvent le même et qui était de se faire passer pour un électricien, un concierge ou quelqu’un qui travaillait dans l’immeuble et de demander de l’aide aux petites filles qui étaient là ».
Les policiers ont dénombré 72 victimes sur 10 ans. L’immense majorité des victimes n’a pas porté plainte et ce n’est que sur dix ans alors que l’on sait qu’un pédocriminel sévit à partir de 15 ans. Il a été emprisonné à 72 ans donc on estime à au moins un millier le nombre de victimes.
Le jour où c’est arrivé, mes parents m’ont vue rentrer et aller directement dans ma chambre, ce qui ne m’arrivait pas parce que j’étais une petite fille très joyeuse qui racontait tout le temps tout à tout le monde.
Ils se sont douté de quelque chose et m’ont un peu tiré les vers du nez mais moi j’étais dissociée, j’étais en amnésie traumatique donc je ne leur ai raconté que ce dont je me souvenais. Comme j’étais extrêmement calme étant dissociée, ils se sont dit : « On a échappé au pire ».
« C’est des années plus tard que j’ai compris qu’il y avait eu pénétration et donc que c’était un viol »
À l’époque, je n’avais pas la mémoire de la pénétration. Ils m’ont emmenée au commissariat et les policiers ont appelé ça des attouchements sexuels. C’est des années plus tard qu’une partie de la mémoire traumatique est remontée et que j’ai compris qu’il y avait eu pénétration et donc que c’était un viol.
« Un enfant n’a pas de mots pour raconter ça. D’ailleurs il en manque dans la langue française. Je me souviens avoir raconté à la policière qu’il m’avait forcée à lui toucher le sexe de haut en bas. Je ne savais pas comment appeler ça, je n’avais pas le mot ».
Elle m’avait dit : « C’est une caresse ». Je lui ai dit : « Non ! Ce n’est pas ça une caresse ». Et elle avait écrit « caresse » parce qu’elle n’avait pas d’autre mot non plus à disposition.
Ça fait partie des énormes problèmes de la libération de la parole. Le vocabulaire que l’on a est celui du désir, de la sexualité, de la relation. Or, il n’y a pas de désir, il n’y a pas de relation, il n’y a pas de plaisir dans la violence sexuelle. Pour le qualifier, pour une victime, c’est extrêmement difficile parce qu’elle ne dispose pas de mots pour dire ce qui lui est arrivé.
Pour que les souvenirs reviennent, j’ai fait des années et des années de thérapie. Je ne faisais pas les liens entre cet événement de mon passé et tous les symptômes dont je souffrais, que je n’appelais pas symptômes à l’époque.
Je pensais que j’étais folle, que j’étais violente. Je pensais que j’étais perverse et je me haïssais férocement. Dans le même temps, je me doutais bien qu’il y avait quelque chose là dedans qui n’était pas tout à fait normal donc j’ai essayé par tous les moyens d’aller mieux.
« C’est dans une thérapie corporelle que le premier souvenir est remonté. Il m’a pénétrée de diverses manières mais l’une d’entre elles a été une pénétration digitale. À l’époque, je n’ai pas pu mettre le nom « viol » dessus parce que je ne savais pas ».
C’est des années plus tard, quand j’ai lu la définition du mot viol que j’ai pu pour la première fois me saisir du mot et me dire :
« En fait, c’est normal que tu aies eu mal. Quelqu’un t’a fait ce mot-là. Toute cette souffrance elle a un sens parce qu’on t’a fait ce mot-là. (…) Ce mot m’a sauvée, j’avais vraiment besoin de mettre les bons mots aux bons endroits. Ça a été très important dans ma reconstruction »
Dans La petite fille sur la banquise, je me bats contre des méduses. Je cherchais quelque chose qui puisse expliquer comment on peut passer une journée ensoleillée avec des amis, aller bien et tout à coup, la vie ne vaut plus d’être vécue. On a des images de mort, de violence, de haine.
C’est comme si on marche à l’endroit et d’un coup le monde entier bascule et tout est sombre. Les méduses attaquent sans qu’on les voit venir, elles sont transparentes.
L’autre raison pour laquelle j’ai choisi cette métaphore, c’est que les symptômes qui ont été si difficiles à vivre ont été des indices au moment de ma guérison. Et les méduses sont des créatures magnifiques, très belles. En regardant mes symptômes, ça m’a permis de retrouver petit à petit la mémoire qui avait été enfouie par l’amnésie. C’est en suivant mes méduses que j’ai retrouvé ma vie en entier, ma vie à l’endroit .
Retrouvez l’intégralité du témoignage d’Adélaïde en cliquant ici
Source : europe1.fr
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