Royaume-Uni | L’ancien entraîneur Barry Bennell devant la justice
- La Prison avec sursis... C'est quoi ?
- 16/01/2017
- 00:00
Catégories :
Mots clés :
L’ancien entraîneur de football anglais Barry Bennell, déjà condamné pour des agressions sur mineurs au Royaume-Uni et aux États-Unis mais jamais dans le cadre de ses fonctions, comparaît à partir de lundi 16 janvier devant la Cour de la couronne de Chester, dans le centre-ouest de l’Angleterre.
L’homme de 62 ans, qui a travaillé dans les clubs de Manchester City, Stoke City et Crewe Alexandra est soupçonné d’avoir abusé de dizaines de jeunes joueurs dans les années 1980 et 1990.
Ce procès met en évidence les dysfonctionnements de la fédération anglaise de football et des clubs. Plusieurs responsables sont accusés d’avoir acheté le silence des victimes. Ce scandale de pédophilie est parti du témoignange d’Andy Woodward. Ancien joueur professionnel, victime présumée lorsqu’il était adolescent, il a décidé cet automne de sortir du silence. franceinfo l’a rencontré.
Quand il prend la parole, ses yeux rougissent un peu. Andy Woodward ne prononce jamais le nom de Barry Bennell. Il n’est d’ailleurs jamais retourné à Crewe, dans le club où l’entraîneur l’a recruté. Il évite même de traverser la ville en voiture. Cette ville où ses parents, pour qu’il progresse, le laissaient dormir dans la maison de Barry Bennel avec d’autres enfants.
“Quand ça a commencé, j’avais 11 ans et ça a duré pendant quatre ans, tous les week-ends, pendant toutes les vacances. Il menaçait de ruiner ma carrière”, raconte-t-il.
Pour m’effrayer, il me mettait contre le mur et il me lançait des étoiles de ninja. Il avait des nunchakus. C’est ce type de comportement qu’il utilisait pour que j’ai peur de lui
Andy Woodward à franceinfo
“Ça a bousillé ma vie pendant trente ans. J’ai été marié trois fois, j’ai cinq enfants, j’ai souffert de crises de panique, de problèmes de santé mentale, de stress post-traumatique. Tout ça, c’est à cause de ce qui m’est arrivé”, poursuit Andy Woodward, âgé aujourd’hui de 43 ans.
Des centaines de témoignages
Andy Woodward n’est pas le seul. En quelques semaines, près de 400 témoignages, messages et plaintes ont été enregistrés. Dix-sept brigades de police travaillent sur l’affaire. Au moins dix personnes sont soupçonnées d’avoir commis des actes pédophiles. Un ancien cadre de club affirme qu’il a alerté sa direction dans les années 1990 sans succès. Un ex-joueur de Chelsea explique aussi qu’il a reçu près de 60 000 euros pour garder le silence.
En racontant sa dépression, Andy Woodward n’espérait pas un impact aussi gigantesque.
“C’est incroyable le nombre de gens qui se sont manifestés en aussi peu de temps. Ce qui est arrivé, on ne peut rien y changer. Mais avec une enquête indépendante, on va pouvoir savoir ce qui s’est passé”, espère-t-il.
Je savais qu’il y en avait plein d’autres que moi. Parce qu’avec les tournois auxquels on participait à Southampton, Ipswich, Norwich… Même avec mes yeux d’enfant, je voyais bien qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas
Andy Woodward
“Aujourd’hui je vois toutes les pièces du puzzle qui s’assemblent et on va essayer de mettre de la sécurité là-dedans et d’aider les autres. C’est tout ce que je veux faire dans la vie maintenant”, affirme l’ancien joueur.
La crainte des parents sur le bord du terrain
C’est toute la structure du football anglais qui se voit remise en cause. Un système cloisonné, où tout s’organise autour des scouts, les recruteurs, chargés de détecter les jeunes talents. Face à l’ampleur du scandale, la fédération a ouvert sa propre enquête et écrit une lettre à tous les clubs du pays.
Même si l’affaire Woodward a plus de trente ans, les parents sur les bords des terrains restent inquiets.
“Au football, il y a beaucoup de jeunes garçons au même endroit. Ils doivent respecter l’entraîneur et cela peut les rendre plus vulnérables”, redoute une mère de famille à la petite structure de Camden au nord de Londres, où plusieurs dizaines d’enfants viennent à l’entraînement chaque week-end.
Le papa d’un autre jeune joueur se veut lui plus confiant. “Ça continue de se passer mais pas aussi fréquemment parce que les gens en sont plus conscients et parce qu’il y a des règles”, souligne-t-il.
Tous les clubs impactés par le scandale
Des règles simples, comme ne jamais laisser un enfant seul avec un adulte. Pas de sortie ou d’activité de groupe non plus si elle n’est pas encadrée par plusieurs adultes… Avec l’affaire Woodward, la législation pourrait encore se durcir.
“On est très stricts sur les vérifications d’antécédents judiciaires, les licences… En tant qu’entraîneurs, on est tous très conscients du problème. On a deux stages sur la protection de l’enfance organisés par la fédération. Mais d’un autre côté, c’est très frustrant”, souligne David, l’entraîneur du petit club de Camden.
Pour moi, les quelques personnes qui posent ces problèmes sont un cauchemar pour les petites structures. Maintenant il va y avoir beaucoup plus de réglementation
David, entraîneur à Camden “C’est évident, il faut faire quelque chose. Mais ça va poser des problèmes à tout le monde”, redoute-t-il. Andy Woodward, lui, veut faire évoluer la réglementation du football au niveau mondial.“J’ai reçu, dit-il, des messages de victimes qui habitent un peu partout sur la planète.”
Source : francetvinfo.fr
Source(s):