Valognes | Un homme condamné pour viol sur mineure 20 ans après les faits

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Si elle perdait, elle devrait se soumettre à ses désirs et lui faire une fellation
La cour criminelle de la Manche, à Coutances, a condamné ce mardi 19 septembre 2023 un homme qui avait violé la sœur de sa compagne, mineure, près de Valognes… en 2004.

Près de 20 années séparent les faits de viol qu’un jeune de 20 ans a commis sur une fille de 13 ans et demi en juillet 2004, près de Valognes (Manche), et le procès du même, mais aujourd’hui âgé de 39 ans.

Le même homme, mais forcément différent au bout de tant d’années.

C’est bien toute la difficulté de ce procès, soulignée par l’avocat général, procureur de la République à Cherbourg : trouver une réponse pénale qui tienne compte de ces longues années qui ont façonné l’accusé et qui, jour après jour, ont marqué d’une lancinante souffrance et de perte de confiance en soi la vie de la plaignante jusqu’à aujourd’hui.

Un dominant avec des fantasmes

Il avait 20 ans. Le jeune homme était le petit ami de la sœur aînée de la plaignante, 17 ans.

Le garçon était apprécié des parents des deux sœurs, et le bienvenu, mais pas au point de le laisser avoir des relations avec l’aînée.

Quand il venait à la maison, sa nuit était sur le canapé. Il dormait. Parents naïfs ?

C’était début juillet 2004.

Les parents laissaient les filles seules pour quelques jours.

C’était pour le jeune compagnon de l’aînée deux proies pour assouvir ses fantasmes.

Il avait une obsession : faire « un plan à trois », lui, sa compagne et une autre fille.

Il en avait parlé à l’adolescente.

Mais celle-ci, petite fille renfermée dans sa bulle, perturbée par son physique de « garçon aux cheveux courts et aux kilos en trop », avait refusé de s’y intéresser.

Ce 3 juillet, il avait amené une console de jeux et il avait proposé un challenge à la plus jeune : si elle perdait, elle devrait se soumettre à ses désirs, et lui faire une fellation, ce qu’elle avait refusé farouchement.

Mais le jeune, imposant par sa force physique, adulateur de sa propre virilité, qui exerçait une emprise totale sur les deux sœurs, les emmène dans la chambre qu’elles partageaient.

Il avait exigé que la petite se mette à nu et il avait tiré sur ses sous-vêtements parce qu’elle résistait.

Et pour lui montrer ce qu’il attendait d’elle, il en avait fait démonstration avec l’aînée, silencieuse, livrée, absente.

La petite avait perdu au jeu, il fallait qu’elle s’exécute.

Exerçant un chantage, il s’est servi d’elle comme d’un pantin sexuel, la soumettant à ce que la justice définit comme des viols.

Parler et courir le risque de l’exclusion

Elle n’en a jamais parlé pendant plus de dix ans, murée dans son silence, son malaise grandissant au fil des années.

L’aurait-on écoutée ? La maison était une famille de taiseux, un monde dans lequel rien ne se dit, rien ne filtre.

La mère de l’enfant lui était hostile, et lorsqu’elle a fini par parler de ce qu’elle avait subi, elle l’a invitée à ne pas semer le désordre dans la famille.

Et le nouveau compagnon de sa sœur – elle avait rompu après les faits de 2004, parce qu’il usait de violences et de relations non consenties avec elle – lui avait lui aussi vertement demandé de se taire, l’accusant, comme la mère, d’être une semeuse de désordre.

Seul son père avait écouté sa souffrance. Ainsi, pour elle, parler, c’était risquer l’exclusion.

Elle a fini par prendre la décision de révéler sa détresse malgré le rejet familial, si difficile à vivre.

C’était en 2017. Depuis, elle a vécu avec sa honte, son manque de confiance en soi, ses moments dépressifs latents, le trouble dans sa sexualité, sa peur des hommes, sa peur de toucher leur corps.

Enfant, elle s’était scarifiée.

Au cours du procès, les magistrats lui ont répété que c’était elle la victime, qu’il fallait chasser la honte qui l’habitait parce qu’elle lui était étrangère, que c’était à l’accusé de l’assumer.

La mère, elle, n’a pas pu aller au bout du procès : désavouée, elle a quitté la salle d’audience.

Le père, lui, est resté.

Trois ans ferme

L’homme, reconnu coupable de viols sur mineure de moins de 15 ans, a été condamné à 5 ans de prison dont 2 ans avec un sursis probatoire de 2 ans comportant une obligation de soins, et l’obligation d’indemniser sa victime.

Son nom figure désormais dans le fichier des délinquants sexuels, pour 20 ans.

Et un mandat de dépôt à l’audience a été décerné à son endroit par la cour, ce qui signifie qu’à l’issue du procès, il a été conduit en prison, sans transition, théoriquement pour 3 ans.

Il n’avait jamais été incarcéré.

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