Val-d’Oise | Un éducateur condamné pour tentative d’agression sexuelle sur une adolescente

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Pédocriminel En liberté

Il a nié en bloc au tribunal, mais avait avoué en garde à vue
Un éducateur de 32 ans condamné, notamment, à 10 mois de prison avec sursis et à l’interdiction de travailler avec des mineurs pendant 3 ans par le Tribunal de Pontoise pour tentative d’agression sexuelle sur une adolescente de 16 ans. Il a nié en bloc au tribunal, mais avait avoué en garde à vue.

Le 6 octobre, 2022, Marie, tout juste 16 ans, pousse la porte du commissariat d’Enghien-les-Bains et demande à être auditionnée.

Elle relate des faits qui se sont déroulés du 1er juillet au 30 septembre 2022, selon la période de prévention (un peu large) retenue par le parquet. Elle raconte sa relation avec Oumar, 30 ans, éducateur depuis dix ans.

L’homme se présente un jour au domicile de sa mère pour récupérer des affaires personnelles dont Marie et sa petite sœur ont besoin au foyer.

La mère, qui n’a plus la garde de ses filles depuis qu’elle a été condamnée pour les avoir violentées, le supplie de veiller sur elles.

Oumar voit une femme alitée, en proie au désarroi, qui lui semble sincère et lui fait pitié. Il repart comme investi d’une mission auprès de ces deux jeunes filles qu’il ne connaît pas très bien à ce moment-là, sinon qu’elles sont dans ce foyer d’accueil d’urgence et qu’elles ont vécu différents traumatismes qui les rendent vulnérables.

« Il a pris son rôle au sérieux », relate Marie aux policiers.

Elle doit bientôt partir dans son nouveau foyer.

Ils échangent leurs numéros et sont en contact régulier par SMS.

Lorsqu’ils se voient, Oumar est très « protecteur ».

« Il me fait des câlins mais à ce moment, je ne vois pas le problème », précise-t-elle.

Oumar lui dit parfois des choses un peu étranges.

« Il me disait à chaque fois ‘ça reste entre nous, les autres ne doivent pas le savoir sinon elles vont être jalouses’. Il me disait que je lui devais fidélité et loyauté ».

Un jour, il lui sort en rigolant :

« Je peux être tout pour toi, ton éduc’, ton frère ou même ton homme ».

Elle rit aussi pour masquer son malaise, et elle passe vite à autre chose.

Le 20 septembre, c’est son anniversaire. Elle a réuni une petite somme, mais c’est insuffisant pour acheter un nouveau portable.

Elle demande par téléphone à Oumar s’il ne pourrait pas lui faire un petit cadeau, il répond bien sûr et lui donne rendez-vous aux abords de son nouveau foyer, où il lui donne 300 euros.

Elle est choquée mais évidemment, trop contente, prend les sous. Il lui demande un bisou sur la joue, elle s’exécute volontiers.

« Bon maintenant tu peux me faire un vrai bisou.

— Pour toi c’est quoi un vrai bisou ?

— Un smack

— Non, je ne peux pas ».

Oumar tente de l’embrasser sur la bouche mais elle se détourne et le baiser se pose sur sa joue.

« On ne m’avait jamais donné autant d’argent », précise-t-elle aux policiers.

Puis, elle leur tend les 300 euros, qui sont placés sous scellé.

Il a toujours été bizarre

L’acte d’enquête suivant intervient 6 mois plus tard, quand les policiers convoquent la petite sœur de Marie.

Ils n’étaient pas aussi proches, car elle se méfiait de lui.

« Une fois au foyer, à 7 heures du matin, il est rentré dans ma chambre et m’a demandé de m’asseoir sur ses genoux. J’ai trouvé ça louche. J’ai dit ‘non’, il a dit ’t’es sûre’, j’ai dit ‘oui’, il est parti. »

Elle précise :

« Il a toujours été bizarre, je ne sais pas si c’était qu’avec moi ou avec tout le monde, c’était malsain, c’est tout. »

Elle a 13 ans.

Dans la foulée, Oumar est convoqué.

Il est placé en garde à vue et, au terme de la procédure, est renvoyé devant le tribunal correctionnel de Pontoise pour corruption de mineure et agression sexuelle sur mineure de plus de 15 ans.

C’est à la barre qu’il a entendu le récit des faits reprochés et de la procédure, ce mardi 3 septembre

Il donne un peu de contexte : arrivé récemment dans ce foyer, il a passé 10 ans à la protection judiciaire de la jeunesse, essentiellement dans des centres éducatifs fermés (CEF).

C’était presque la première fois qu’il travaillait avec des filles.

Comme sa femme avait mis au monde leur premier enfant au mois de février, il avait besoin de suppléments de revenus et avait accepté ce poste d’éducateur à la MDE de Cergy.

J’étais dans une grande empathie

Il admet que ce n’est pas commun de s’investir autant dans une relation avec une fille placée sous sa surveillance et son autorité.

La mère lui a vraiment fait de la peine et il a pris son rôle très à cœur.

L’argent ? C’est une tradition de faire un cadeau aux mineurs quand ils quittent le foyer, dit-il.

« Je lui ai dit que c’était pour elle et sa sœur » (ce qui ne ressort pas de la procédure, ndlr).

Le président l’interroge :

— Ni bisou sur la joue, ni smack. Je lui ai donné 300 euros, on a parlé de sa situation, ça a duré 15 minutes.

— Le cadeau ça n’avait rien à voir avec l’anniversaire

— Non, c’était un plus.

— Que vous fassiez des cadeaux, ok, mais 300 euros, c’est une grosse somme. C’était quoi vos revenus ?

— C’est vrai que c’était une grosse somme, je me suis beaucoup investi, c’était un symbole de nouveau départ. Elle était en grande difficulté matérielle.

— C’est commun que ces jeunes soient dans une situation de précarité.

— C’était vraiment extrême. J’étais dans une grande empathie. C’était la dernière fois qu’on se voyait. »

C’est la position désormais ferme d’Oumar.

C’était également sa position initiale, mais sa 2e audition de garde à vue est très différente.

Il s’explique : en cellule, il aurait discuté avec un policier qui l’aurait convaincu d’admettre les faits, car sinon on lui prendrait son enfant, et ça, c’est la pire chose qui pourrait lui arriver, rapporte Oumar.

En somme, c’est mû par l’amour de son fils qu’il a admis avoir agressé sexuellement une adolescente.

Le président incrédule lui demande :

« Et vous en avez parlé avec votre avocat ?

— Non, on est allés directement en audition.

— Vous ne vous êtes pas dit ‘On me conseille d’avouer quelque chose que je n’ai pas fait, c’est une bonne idée d’en parler à mon avocat.’ J’ai du mal à comprendre.

— Moi, ma famille c’est ma priorité, si je dois perdre un bras pour ma famille je le fais sans hésiter. Je suis dans un moment de vulnérabilité, on me fait comprendre que j’ai le choix entre perdre mon job ou mon fils. »

Je voulais me charger pour préserver ma famille

Le président lit les déclarations :

« Je reconnais les faits. Ça s’est bien passé comme Marie l’a dit, je voulais juste que ça ne soit pas dit à ma famille. J’ai une addiction au sexe, donc je suis dans une posture de séduction. » Il regarde le prévenu : « Vous y êtes allé franco tout de même.

— Je voulais juste couper court, me charger pour préserver ma famille par rapport à ça. C’est la stricte vérité.

— Pourquoi vous vous dénoncez pour d’autres faits ? Vous dites : ‘J’ai eu un ennui similaire avec une jeune dénommée Loubna dans les Yvelines’, vous dites ça spontanément. Vous comprenez que ça peut paraître étrange ? Vous rajoutez des choses dont on n’a pas entendu parler. J’ai du mal à comprendre.

— Moi à ce moment-là, je suis vraiment perdu, je mélange tout. »

Quand il comprendra qu’il s’est fait avoir, Oumar recollera à sa version initiale maintenant défendue.

Le président demande alors au prévenu pourquoi elle aurait dit ça à la police.

« Ces jeunes-là une fois qu’elles vous ont dans le viseur elles peuvent être très vindicatives », répond-il. 

Il raconte que la fille disait que sa mère la coursait avec des couteaux.

« Quand j’ai vu la mère, alitée, j’ai compris que ce n’était pas possible », ose-t-il.

La mère a été condamnée à de la prison ferme pour des faits de violence sur ses filles.

C’est la victime qui ment

La procureure prend son tour de questions :

« Vous vous souvenez comment vous justifiez ces faits quand vous ‘avouez’ ? Vous dites que vous avez subi des faits dans votre famille

— C’est complètement faux.

— Et aujourd’hui, il faut vous croire ? C’est la victime qui ment ?

— Si c’était réel je n’aurais jamais pu bosser pendant 10 ans et je n’aurais pas un casier vierge.

— Ça ne veut rien dire ça Monsieur. La victime qui avait 15 ans à l’époque et a inventé que vous lui aviez dit que vous vouliez réserver une chambre d’hôtel ?

— Oui, bien sûr.

— Ok, je n’ai plus de question. »

 

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