Suisse | Quatre femmes offertes en esclavage dès leur adolescence

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Pédocriminel En liberté

Verdict : L’accusation de traite d’êtres humains n’a pas retenu pour le clan des Balkans
Un clan familial kosovar aurait maltraité 4 femmes, forcées à travailler pendant 16 ans dans le Jura bernois.

Actualisation du 5 décembre :

Le tribunal régional de Moutier (BE) a condamné jeudi un père et ses quatre fils originaires des Balkans à des peines de prison avec sursis.

Il n’a pas retenu, dans son verdict, l’accusation de traite d’êtres humains.

Le père de famille, sur qui pesait les plus graves accusations, a été condamné à une peine privative de liberté de 150 jours avec sursis pendant quatre ans pour infractions à la loi sur les étrangers.

Il échappe à une expulsion de Suisse.

L’un des fils a écopé d’une peine de prison de 100 jours-amende à 50 francs avec sursis pendant deux ans pour injures et menaces.

Il écope d’une autre peine de prison de 120 jours avec sursis pendant trois ans pour acte d’ordre sexuel avec enfant.

“Des groupes qui ont eu le temps de s’entendre”

Le bénéfice du doute a profité aux cinq prévenus.

Le président du tribunal Josselin Richard a déclaré :

“Avant d’enfermer des gens, il faut une base solide pour avoir une conviction”

Il a expliqué que les juges étaient face à des versions contradictoires, celle des prévenus et celle des victimes.

Il a souligné :

“Des groupes homogènes qui ont eu le temps de s’entendre”

Le tribunal a estimé que les déclarations des plaignantes avaient évolué dans le sens d’une aggravation des accusations contre les époux et qu’elles étaient parfois ambiguës ou manquaient de crédibilité.

Si elles avaient été reconnues victimes de traite d’êtres humains, elles auraient bénéficié d’un titre de séjour.

L’image d’une intégration ratée en Suisse

Le président n’a pas pour autant épargné les prévenus :

“Ils ont une conception bornée de la femme au foyer, les maris sont influencés par leurs traditions”.

Pour Josselin Richard, les prévenus ont donné l’image d’une intégration ratée en Suisse avec une impression de renfermement sur la famille et la communauté.

Dans son réquisitoire, le procureur avait déjà abandonné les accusations les plus graves de traite d’êtres humains et de viols par manque de preuves.

Il avait estimé que le dossier ne permettait pas d’établir les éléments constitutifs de ces infractions, ajoutant que les témoins externes manquaient dans ce huis clos familial.

Faits sur quinze ans dans le Jura bernois

Le père et ses quatre fils devaient répondre à des degrés divers de traite d’êtres humains, de mariage forcé, de lésions corporelles, de viols et de séquestration à l’égard de quatre jeunes femmes.

Le patriarche aurait arrangé le mariage de ses fils en faisant venir depuis les Balkans des jeunes filles mineures.

Les faits se seraient déroulés durant une quinzaine d’années dans des villages du Jura bernois.

Lors de ce procès très médiatisé, il a souvent été question de traditions ancestrales, de droit coutumier médiéval albanais (kanun), de code d’honneur ou de la place des femmes au sein de la famille.

Article du 15 novembre :

Le père, Albrahim F.*, aurait fait venir les adolescentes (âgées de 14 à 17 ans) depuis les Balkans, pour les marier à ses fils.

Elles auraient été réduites en esclavage, violentées et violées.

Du 7 au 11 Novembre, ils comparaîtront devant le tribunal régional de Moutier.

La 1ère victime présumée est arrivée en Suisse en 2003, en provenance d’Albanie, à 17 ans. Le mariage aurait été arrangé avec ses parents, à qui Albrahim F.* aurait promis une vie meilleure pour leur fille.

Selon le même schéma, ce dernier aurait acheté une enfant de 14 ans cette fois, en versant la somme de 300 euros à sa modeste famille.

Mais la promesse d’un quotidien plus radieux s’est vite transformée en cauchemar.

Selon l’acte d’accusation, le patriarche, aujourd’hui sexagénaire, aurait explicitement demandé à ses fils de violenter leurs «femmes» tant psychiquement que physiquement.

Résultat, elles auraient été régulièrement battues, humiliées, menacées de mort, isolées et violées.

Les témoignages détaillés font froid dans le dos.

Albrahim F. est notamment accusé d’avoir frappé sa belle-fille jusqu’à ce qu’elle saigne et de l’avoir étranglée des 2 mains alors qu’elle était enceinte.

Chaque soir, l’une des victimes présumées aurait aussi été forcée à laver les pieds de son beau-père et de son beau-frère.

Durant toutes ces années, les jeunes femmes n’auraient presque pas été autorisées à quitter l’appart.

Leurs familles, au pays, n’auraient quasiment reçu aucunes nouvelles.

Du matin au soir, elles auraient été obligées à travailler sans être payées. L’une d’entre elles ne parle toujours aucune langue nationale et séjournait illégalement en Suisse.

Elles sont désormais placées en lieu sûr.

«Elles sont bien protégées par la justice»,

se réjouit Dominic Nellen, avocat de 2 d’entre elles.

Quid de la dizaine d’enfants mis au monde durant cette décennie de l’horreur ? Pour des raisons de sécurité, l’homme de loi n’en dira pas davantage.

Ses clientes seraient gravement traumatisées.

«Elles sont arrivées alors qu’elles étaient encore mineures,

amorce-t-il.

Pour traverser la frontière, elles ont dû marcher toute la nuit dans la forêt.

Et, dès leur arrivée, elles ont été violées par leur mari respectif.

Ces femmes sont brisées.»

Comment expliquer une telle violence?

Pour l’avoat,la réponse est à chercher du côté du «Kanun», le droit coutumier médiéval albanais, toujours appliqué par certains clans dans les Balkans. Avec, comme dans le cas d’espèce, un patriarche.

Si les 4 jeunes femmes ont réussi à se sortir de cette situation, c’est notamment grâce aux autorités bernoises.

«Les services sociaux ont commencé à s’intéresser de plus près à la famille et ont par exemple demandé qu’elles suivent des cours de langue et s’efforcent à chercher un emploi.»

Un premier pas vers la liberté:

«Les fonctionnaires ont remarqué qu’il y avait quelque chose d’anormal et des abus.»

C’est en 2019 qu’elles ont finalement réussi à s’enfuir. Un service d’aide aux victimes a été impliqué, note le Ministère public.

A ce stade, aucun des accusés n’a passé plus d’un jour derrière les barreaux.

Au grand dam de Dominic Nellen.

«Ils nient avoir commis des actes illicites et soutiennent qu’elles étaient consentantes»,

déplore l’homme de loi.

Les 4 prévenus devront répondre de traite d’être humains, de mariage forcé, de coups et blessures, de contrainte, de viol et d’actes d’ordre sexuel avec des enfants. Les peines pourraient être lourdes.

L’avocat de l’un des fils indique qu’il plaidera l’acquittement.

Egalement contactés, les autres conseils des accusés n’ont pas donné suite à nos demandes d’interview ou n’ont pas souhaité faire de commentaires.

*Prénom d’emprunt

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