
Evry | 10 mois de bracelet pour voyeurisme aggravé
- La Prison avec sursis... C'est quoi ?
oui
Pédocriminel En liberté
- 24/01/2025
- 22:55

Depuis une aire d’autoroute de Janvry, un homme appelle la police.
Il vient d’apercevoir un curieux manège qui le fait pâlir.
Alors qu’il était à proximité des toilettes, il a remarqué un homme debout et immobile, appuyé contre une paroi, fumant une cigarette, comme s’il attendait quelque chose.
Cet homme a vu un petit garçon se rendre aux urinoirs, a posé sa cigarette et l’a suivi.
Puis, il est revenu, a repris sa cigarette et attendu qu’un autre enfant se rende aux toilettes, en suivant du regard, dans la foule agitée d’un jour de vacances scolaires, les petits garçons qui s’écartaient seuls du groupe pour aller satisfaire un besoin pressant.
Après avoir observé l’homme répéter la même opération quatre ou cinq fois, le témoin l’a suivi jusqu’à son véhicule, a noté la plaque d’immatriculation et a appelé la police.
Quelques jours plus tard, Jean-Paul*, 46 ans, a été interpellé à son domicile, où il vit en collocation avec le propriétaire des lieux.
Face au témoignage précis, il a tout de suite admis suivre des enfants aux toilettes pour regarder leur sexe. Ce jour-là, il revenait de son travail à Rungis.
12 000 fichiers pédopornographiques
La perquisition de son ordinateur a permis de trouver 12 000 fichiers pédopornographiques ainsi que le logiciel Thor, qui permet d’accéder au darknet.
Dans son téléphone, les policiers ont trouvé 43 vidéos mettant en scène des enfants prépubères nus, mais aussi des photos prises par lui-même dans des cabines de piscine.
C’était à l’été 2022, avoue Jean-Paul, au camping d’Argentat-sur-Dordogne où il avait l’habitude de se rendre « avec papa » dans le passé.
Jean-Paul se douchait, il a vu un trou dans la paroi de séparation et pris des photos d’enfants nus dans la cabine de douche adjacente.
Jean-Paul, qui admet tous les faits reprochés, a un sérieux problème avec sa sexualité, et il a déjà fait des victimes.
Le 29 juillet 2009, il a été condamné définitivement à cinq ans d’emprisonnement pour des agressions sexuelles incestueuses sur ses petits cousins.
Depuis 2012 et pendant dix ans, il était astreint à un suivi socio-judiciaire strict.
Il suivait un groupe de parole dédié à ceux qui souffrent précisément des mêmes troubles, à savoir l’envie forte de voir des sexes de jeune garçon.
Il vivait une vie solitaire, mais équilibrée ; entre travail et thérapie, Jean-Paul avait sa vie en main.
« Vous n’avez pas peur de retomber dans une agression ? »
Un évènement l’a bouleversé.
« En mai 2022, j’ai perdu mon papa dans des circonstances tragiques. Il est mort dans l’incendie de sa maison. »
Comme il n’a plus aucun contact avec sa famille depuis sa première condamnation, Jean-Paul s’est retrouvé complètement seul.
« Ça m’a affecté. Ayant des tendances alcooliques, comme mon papa, j’ai perdu pied. Et j’ai dû essayer de m’en sortir tout seul.
— C’est-à-dire ?
— Résister à mes pulsions, reprendre ma vie en main. Je n’y suis pas arrivé. En décembre, je me suis arrêté sur une aire d’autoroute, il y avait des enfants, et…
— L’homme qui appelle la police vous décrit comme en position d’attente en train de guetter une potentielle proie. C’est un peu inquiétant.
— J’attendais qu’un garçon aille aux toilettes pour le regarder.
— Votre seul projet, c’est de le regarder ?
— Oui, je n’ai pas l’intention d’entrer en contact avec les enfants de quelque manière que ce soit. »
Une juge assesseure insiste : « Est-ce que vous n’avez pas peur de retomber dans une agression ?
— J’ai bien compris, avec le premier suivi, que j’avais fait du mal à mes cousins, et aujourd’hui, je ne pourrais plus faire la même chose. Je préfèrerais en finir que de faire ça.
— (Présidente) Pourquoi n’avez-vous pas demandé de l’aide ?
— J’ai eu peur d’être dénoncé et de retourner en prison. »
On l’interroge désormais sur ses pratiques numériques : il se rend sur un blog et télécharge des fichiers vidéos et des images via des liens à dispositions.
Il ne diffuse rien, ne va pas sur les tchats et n’a jamais été sur le Darknet. Thor ? « Je l’ai téléchargé, mais je ne sais pas l’utiliser. »
Que fait-il devant ces images ? Cela tracasse la même juge assesseure, qui a du mal à exprimer son idée frontalement :
« Peut-on dire que ce n’est pas seulement pour regarder des films coquins ? Est-ce qu’il y a une stimulation à un acte sexuel ? C’est pas seulement pour regarder, c’est bien pour obtenir une situation sexuelle ?
— Oui.
— Est-ce que vous avez une petite idée de pourquoi ? Comment ça vient, tout ça ? Vous avez commencé à quel âge ?
— À l’âge de 9 ans, j’étais à l’école primaire. »
Depuis son interpellation, il a repris les soins dans un suivi de groupe, en attendant qu’une place se libère pour un suivi individuel.
« Ça ne s’arrêtera jamais »
La procureure s’avoue déroutée :
« Vous avez été suivi pendant dix ans et, un mois après, vous recommettez des faits. Les faits de juillet 2022 ont même été commis pendant le suivi.
— C’est ça le problème, les soins s’arrêtent et on pense qu’on est guéri.
— Mais monsieur, vous vous connaissez !
— Je suis d’accord. J’aurais dû continuer à suivre des soins.
— Donc c’est quoi la suite ? Même si vous êtes condamné, après la fin de l’obligation de soins, vous recommencez ?
— Il faut que je continue à me soigner.
— C’est important que vous le sachiez : ça ne s’arrêtera jamais. »
« Vu son profil, il est possible que ça recommence », craint-elle.
Elle requiert une peine de huit mois de prison aménagés sous la forme d’un bracelet électronique, cinq ans de suivi sociojudiciaire (deux ans de prison en cas de non-respect de ce suivi) et une inscription au FIJAIS
L’avocate de Jean-Paul souligne la souffrance personnelle de son client, sa prise de conscience profonde et la volonté de ne plus jamais passer à l’acte.
Les soins qu’il s’apprête à suivre sont les meilleurs qui soient, et il a prouvé par le passé qu’il était en mesure de les suivre assidûment.
Cela dit, au vu du passif de son client, elle ne s’oppose pas à la peine requise, et le tribunal non plus.
Jean-Paul est condamné à une peine de dix mois de prison, aménagée sous la forme d’un bracelet électronique, et cinq ans de suivi socio-judiciaire.
*Le prénom a été changé
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