Condé-sur-l’Escaut | Vincent Bailly, récidiviste, condamné à 28 ans de prison pour viols sur mineurs

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Onze enfants agressés sexuellement depuis 2005
Illustration | Assises Nord - La Voix du Nord
Incarcéré depuis 2018, Vincent Bailly comparaissait ce lundi devant les assises du Nord pour répondre de viols et d’agressions sexuelles perpétrés à Lille sur son neveu, en 2011, et sur le fils d’un couple d’amis qu’il hébergeait en 2018.

Les parents de ce dernier sont poursuivis pour non-dénonciation de crime et délaissement de mineurs.

Le 6 juillet 2018, la disparition inquiétante du foyer de jeunes de Condé-sur-l’Escaut d’un enfant âgé de 8 ans est signalée. Certes coutumier des fugues, il rentre généralement le soir-même. Pas cette fois. Le lendemain, les policiers font appel à un chien pour le retrouver, en vain.

L’appel d’un certain Agostino qui s’inquiète de savoir si la victime est rentrée au foyer les met sur la piste de l’accusé. Ce dernier, Vincent B. qui avait donné un faux nom, est retrouvé sur la voie publique avec un autre enfant, âgé lui de 10 ans. Si l’accusé nie accueillir le fugueur, le jeune qui l’accompagne a le courage de démentir. Il indique aux enquêteurs que l’enfant qu’ils recherchent est chez le suspect âgé de 32 ans, en compagnie de son petit frère. Sur place, ils retrouvent effectivement le duo enfermé dans un studio en présence d’un labrador et d’un huskie.

En état de récidive légale

Passé au fichier des délinquants sexuels, il s’avère que l’accusé, déjà condamné pour des faits de viols et d’agressions sexuelles sur mineurs, est sous le coup d’une interdiction de contact. Durant les auditions, le plus jeune des deux frères indique vivre chez lui depuis trois mois.

À l’issue de la garde à vue, de laquelle rien ne sort, les frères sont rendus à leurs parents avec la consigne de ne plus approcher l’individu.

On apprendra que le comportement hypersexualisé de ce dernier inquiétait déjà les encadrants du centre éducatif pour jeunes sourds d’Arras qui l’hébergeait étant jeune.

Des images à caractère pédopornographiques

Toujours en juillet, le propriétaire du studio du Condéen indique aux enquêteurs avoir aperçu par la fenêtre un ordinateur sur lequel apparaissaient des images à caractère pédopornographiques. Le PC est retrouvé chez les parents des deux frères. La mère finira par avouer avoir vu ces images.

Certaines concernent le plus jeune de ses fils qui avait séjourné chez l’accusé. Les parents habitant dans un véritable capharnaüm, selon les enquêteurs, la garde des trois enfants, la petite soeur de 10 mois également, leur est retirée.

Lors de la seconde garde à vue, le 25 juillet 2022, le plus jeune des garçons dénonce des faits de viols et d’agressions sexuelles répétées durant les trois mois chez celui qui se présentait comme son parrain.

Onze enfants agressés

Dans sa plaidoirie, Me Dartigeas, cahier d’écolier de la dernière victime à la main, cite le prénom des onze enfants agressés depuis 2005. Sept pour lesquelles il a déjà été condamné et les quatre plaignants qui « attendent dans le couloir de la vérité d’entendre qu’on les croit  ».

Si l’accusé reconnaissait l’agression sexuelle du fils de leur ami qu’il avait hébergé durant trois mois en 2018, il contestait tout viol, que ce soit sur celui-ci et sur son neveu en 2011.

Pour son avocat,Me Bruno Pietrzak, les photos présentées à l’audience ne constituent pas un viol :

« Sur la première, il n’y a pas de pénétration au sens strict du terme.   »

Après une semaine de procès, qualifiée d’exténuante par Me Frédéric Dartigeas, avocat de la défense, les six jurés, la présidente Martine Brancourt et ses deux assesseurs ont statué sur le sort de Vincent Bailly.

Le Condéen, âgé aujourd’hui de 35 ans, est reconnu coupable de l’ensemble des chefs d’accusation : viols, agressions sexuelles et corruption de mineurs, détention et utilisation d’images pédopornographiques. Alors que le parquet avait requis la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une période de sûreté de 18 ans, le tribunal l’a condamné à 28 ans de prison.

« Il traque la faille »

Pour l’avocate générale, Pauline Lequien, « Vincent Bailly n’a eu de cesse de traquer la faille  », celle qui lui permettait d’accéder aux enfants.

« Lorsqu’on lui interdit d’être en contact avec des mineurs dans le cadre d’une activité extérieure, il se rapproche des enfants de ses proches les plus fragiles. Il n’a pas de limite.  »

Pour son avocat, Me Bruno Pietrzak, « rien de tout cela ne se serait produit si mon client avait été correctement suivi depuis ses premiers agissements  ».

Il a questionné aussi la parole des enfants. « Le neveu en 2011 a pu être manipulé par sa maman désireuse de s’éloigner définitivement de Vincent Bailly. Le frère de la victime de 2018, qui aurait vu les agissements incriminés, s’est fait tirer les vers du nez à l’audience.  »

Le jury a cru les enfants

Après deux heures trente de délibéré, le jury a cru les enfants. Leurs témoignages, les photos compromettantes, les expertises médicales de l’accusé, les traces ADN mélangées de l’enfant et de l’accusé retrouvées dans une goutte de sang et une tache présentes sur les fauteuils de Vincent Bailly auront eu raison de son innocence présumée.

Celui qui a été présenté comme un pervers pédophile dormira en prison pendant au moins dix ans avant de pouvoir demander une libération conditionnelle. Il doit 30 000 euros de dommages et intérêts à son neveu et 40 000 euros au fils de ses amis. Il a dix jours pour faire appel de la décision.

Clémence de la cour pour les parents passifs et désœuvrés

Au début de la semaine, les parents de la dernière victime de Vincent Bailly, enfermés dans leur mutisme et la passivité, donnaient l’impression d’avoir « offert en pâture leur enfant au délinquant sexuel  ».

L’étude de leur histoire familiale, la précarité extrême de leurs conditions de vie, leurs capacités intellectuelles limitées ont fait basculer le procès en leur faveur. Pour Me  Magalie Delcourt, avocate de la mère, sa « cliente effectue sa peine depuis quatre ans. Elle n’a plus le droit de voir son conjoint et ses enfants lui ont été retirés. Elle s’est fait manipuler par Vincent Bailly ».

Me  Grégory Frère, avocat du père, utilisera cette comparaison : « Vincent Bailly, c’était comme Kaa dans le Livre de la jungle. Il hypnotise, non pas Mowgli pour le livrer à Shere Khan, mais les parents de la victime afin qu’ils acceptent de lui confier leur fils. »

Jusqu’à ce qu’il élise domicile chez lui et s’adonne à ses actes pervers.

Coupables de soustraction à leurs obligations parentales, ils écopent chacun de huit mois de prison avec sursis. Ils doivent en outre solidairement 10 000 euros à leur plus jeune fils à titre de dommages et intérêts.

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