Chauvigny | Les retards et ratés d’une enquête pour viols sur mineurs

Un Chauvinois accusé d’atteintes sexuelles sur des enfants depuis cinq ans vient juste d’être incarcéré alors que l’enquête n’a guère avancé.

C’est un dossier assez emblématique des ratés que peut connaître l’institution judiciaire, qui arrivait hier devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Poitiers.

Et, une fois de plus, son président n’a pas pris de pincettes pour le dire. Ce qui vaut d’ailleurs de solides inimitiés au sein même du palais de justice à Pierre-Louis Jacob pour ses remises en liberté à répétition.

Ce mardi, il a dénoncé « les retards très importants » d’une instruction portant sur des accusations de viols et agressions sexuelles sur des enfants en étrillant « la gestion de l’institution judiciaire ». Il faut dire qu’il y a à dire et à redire et que la voix des familles des jeunes plaignants ne porte pas avec la même force.
Le septuagénaire chauvinois, qui contestait, hier, sa mise en détention toute fraîche dans une affaire où les dénonciations remontent à cinq ans, n’a pas eu gain de cause.

Son incarcération faisait suite à la révélation de nouveaux faits découverts… il y a un an et demi, lesquels n’avaient pas mis fin à son contrôle judiciaire.

Le président a expliqué au prévenu que « le contexte de dysfonctionnement n’enlève rien à votre libre arbitre » et que la priorité du jour c’était d’assurer la protection des enfants. Il demande à ce que l’instruction soit bouclée dans les trois mois.

Six mille photos d’enfants nus retrouvées C’est au-delà du simple coup d’accélérateur pour un dossier qui semble être tombé dans l’oubli malgré la gravité des accusations contestées par le septuagénaire.
L’affaire débute en juillet 2014, quand une employée de l’ADMR apprend, lors d’une de ses missions dans une famille, qu’un Chauvinois accueille fréquemment des enfants à son domicile où il pratiquerait des attouchements.

La plainte d’une autre famille arrive rapidement à la gendarmerie. Une enquête est ouverte et la perquisition du domicile du suspect permet de retrouver de nombreux clichés à caractère pédopornographique.

L’homme est alors mis en examen plus d’un an après, en octobre 2015, pour viols et agressions sexuelles sur mineurs.

La justice décide, contre toute attente, de laisser libre sous contrôle judiciaire cet homme déjà condamné trois fois pour des faits de nature sexuelle (attentat à la pudeur et corruption de mineur en 1986, 1987 et 1995).

Et puis, le dossier reste en l’état au sein d’un cabinet d’instruction qui va voir défiler les magistrats… mais pas les actes d’enquête, s’énerve l’avocat du septuagénaire.

Il rebondit à la fin du mois de novembre 2017 quand les cyber-enquêteurs d’un office central de lutte contre la criminalité repèrent des téléchargements de fichiers pédopornographiques par l’homme placé sous contrôle judiciaire. Ils le signalent… et rien ne se passe avant sept mois.

Le 27 juin 2018, le septuagénaire est placé en garde à vue pour s’expliquer sur ces faits. Ils lui valent une nouvelle mise en examen et un nouveau placement sous contrôle judiciaire.

Ce n’est que ce mois-ci, encore un an après, qu’il se retrouve en détention provisoire. Une situation qui doit sembler incompréhensible pour les familles.

Elle l’est tout autant pour la défense pilonnant une instruction en panne. « Il attend de pouvoir s’expliquer depuis le début, il conteste les faits qui lui sont reprochés », réagit Me Hélène-Marie Dieumegard.

Maintien en détention

Au cours des investigations, ce ne sont pas moins de 6.000 clichés à caractère pédopornographique qui ont été retrouvés.

Après avoir dit, l’an dernier, que c’était pour se documenter et écrire un livre sur la pédopornographie, il vient d’expliquer que ces clichés lui servaient de modèle pour des dessins. Le fait que les enfants soient nus n’avait aucune importance.

L’explication artistique n’a pas convaincu l’avocat général qui a requis, et obtenu, le maintien en détention.

Source : lanouvellerepublique.fr

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