Chartres | Un père condamné pour agression sur sa fille

Elle n’avait que 11 ans. Au bout de longues années passées à se reconstruire, elle a décidé de porter plainte contre son père. Lui nie l’avoir agressée sexuellement.

Photo d’illustration © Jérémie FULLERINGER

À la barre de la petite salle d’audience du tribunal de Chartres, Michel, bientôt 61 ans. À quelques mètres derrière lui, sa fille Sandrine, la trentaine, qu’il n’a pas vue depuis longtemps, accompagnée de son avocate.

Un peu plus en arrière, assis au fond de la salle, un frère de Michel, Robert, et une sœur, Sonia, avec qui il n’entretient plus de relation depuis 1995.

Michel, séparé de son épouse, avait la garde de Sandrine à Sainte-Mesme (Yvelines), près de Dourdan (Essonne). Il est soupçonné de l’avoir agressé sexuellement. Elle avait 11 ans à l’époque.

Le juge relate ce qui se serait passé : « Le corps de Sandrine changeait et elle ne le supportait pas bien. Tous les jours, elle se passait une crème sur les hanches et sur les jambes. Un soir, elle demande à son père de lui passer la crème.

Et, ce soir-là, son père lui aurait enlevé sa culotte l’aurait massée et aurait introduit un ou plusieurs doigts dans son vagin. »

Quelques jours plus tard, la jeune Sandrine se confie à sa tante Sonia, la sœur de Michel, qui prend les dires de sa nièce très au sérieux. Elle-même aurait été victime d’abus sexuels de la part de son frère. Elle organise, alors, une réunion de famille. Lors de cette rencontre, Michel aurait reconnu des faits commis sur sa sœur, mais nié ceux dénoncés par sa fille.

Un parcours chaotique pour la jeune SandrineSonia décide alors de sortir la jeune Sandrine de son univers familial. Elle l’envoie en pension dans une autre école. Le week-end, elle est prise en charge par ses grands-parents ou par Sonia elle-même. La scolarité de Sandrine devient chaotique. Son comportement aussi : toxicomanie, conduite sexuelle débridée dès 13 ans…

Ce n’est que bien plus tard qu’elle songe à porter plainte, aidée dans sa réflexion par des psychiatres. « Je me suis rendu compte qu’il n’était pas possible d’effacer un acte et d’effacer des mensonges », indique Sandrine aux juges.

« Pensez-vous que le massage au Synthol ait pu être mal interprété par votre fille ? », demande le juge à son père. « Ça a l’air. » « Pourquoi Sandrine aurait-elle raconté ça ? » « Aucune idée. » Les réponses de Michel restent toujours très brèves.

– Pourquoi Sandrine aurait-elle raconté ça ?
– Aucune idée

« C’est aujourd’hui que l’on pouvait espérer une explication », regrette la procureur stagiaire, estimant qu’aucun élément ne permettait de « contredire les dires de la victime. » Elle requiert dix-huit mois de prison ferme avec inscription au fichier des délinquants sexuels.

Crédibilité et véracité des faits

Pour l’avocat de la défense, il ne faut pas confondre « crédibilité et véracité des faits ». Dans une démonstration habile, il explique que, dans ce dossier, « la mémoire des faits a été suggérée et le dossier a été construit là-dessus.

Sandrine est crédible, mais dit-elle la vérité ? On a construit un dossier à partir d’un massage au Synthol ! » D’autant qu’une expertise a montré que Sandrine souffrait d’une certaine « versatilité et d’une notion de théâtralisme… »

L’argument n’a pas été reçu par les juges qui sont allés au-delà des réquisitions du ministère public en condamnant Michel à une peine de trois ans de prison dont un an avec sursis, avec inscription au fichier des délinquants sexuels.

Le nom du prévenu n’est pas mentionné et les prénoms modifiés par respect pour la victime.

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