Aixe-sur-Vienne | Gérard Bouton, condamné à 10 ans de réclusion pour viols sur mineure, sort de prison dans l’attente de son procès en appel

Entre ses six et ses huit ans, la victime aurait vécu à de multiples reprises ce même cauchemar.

Attention Danger Pédocriminel en liberté !

Un retraité de 74 ans, condamné à dix années de réclusion criminelle pour des viols sur mineurs commis à Aixe-sur-Vienne, a été remis en liberté et placé sous contrôle judiciaire dans l’attente de son procès en appel. Il clame toujours son innocence.

Son passage par la case prison n’aura été que de courte durée.

Le 11 décembre 2019, Gérard Bouton est condamné à dix ans de réclusion criminelle pour viol et tentative de viol sur mineur.

Mais, quelques semaines plus tard, le septuagénaire est remis en liberté dans l’attente de son procès en appel.

La partie civile, Me Xavier Nogueras, tempête :

“Non seulement je ne me l’explique pas, mais je m’insurge contre cette décision que personne ne peut comprendre, eu égard à la gravité des faits, mais aussi à la peine prononcée”.

Selon son avocat, la victime est “dans une incompréhension totale face à ce yoyo judiciaire”.

Plus de 35 ans après les faits, l’expert psychologue mandaté par la justice avait détecté chez elle “les traces d’un traumatisme sexuel subi dans l’enfance” et avait attesté de la sincérité de ses propos.

A la barre, elle avait dû revivre les viols que lui aurait fait subir l’accusé en 1983 et 1985.

A l’époque, elle n’est qu’une toute petite fille. Gérard Bouton, de 30 ans son aîné, habite la maison voisine de celle de ses parents.

Ce quartier d’Aixe-sur-Vienne forme alors un petit village, soudé autour de quatre couples de jeunes parents.

“Les témoins ont décrit une communauté de vie basée sur la confiance et permettant le passage des enfants d’une maison à l’autre sous la surveillance supposée bienveillante des adultes”, relate la Cour d’Assises.

C’est ainsi qu’au printemps 1983, Gérard Bouton aurait attiré chez lui la victime, âgée d’à peine six ans.

D’après l’accusation, l’homme l’entraine jusque dans sa chambre à coucher pour l’agresser, avant de la conduire au sous-sol du petit pavillon afin de la violer.

Entre ses six et ses huit ans, la victime aurait vécu à de multiples reprises ce même cauchemar.

Gérard Bouton profitait, selon les enquêteurs, des fêtes qu’il organisait avec sa femme pour piéger l’enfant, l’emmener au sous-sol et lui faire subir des pénétrations digitales, ainsi que des tentatives de fellation.

Ces récits de viols ont été confortés par la déposition à la barre de la propre fille de l’accusé.

Aujourd’hui âgée de 51 ans, elle avait décrit devant la Cour, réunie à huis clos, deux agressions sexuelles survenues entre 1978 et 1982.

Ces faits, désormais prescrits, seraient peut-être à jamais restés dans l’oubli.

Mais Gérard Bouton se trahit dès son placement en garde à vue, le 6 janvier 2015.

Spontanément, et sans que les enquêteurs n’y fassent mention, l’homme s’emporte et conteste formellement avoir abusé de sa fille.

Face à lui, les enquêteurs cachent leur surprise et ne tardent pas à remarquer le petit papier que le suspect tient entre ses mains, tel un pense-bête :

“1981 Baléares, 1982 Ax les Thermes”.

C’est là qu’auraient eu lieu les deux agressions commises sur sa fille, alors âgée de 6 et 7 ans.

Gérard Bouton explique alors que, depuis de longues années, existe un litige en lien avec “des gestes à connotation sexuelle” qu’il aurait eu avec sa fille.

Les enquêteurs abattent enfin leurs cartes et l’informent des véritables raisons de son placement en garde à vue.

Immédiatement, Gérard Bouton jette les jalons de son système de défense, dont il ne déviera jamais.

Le septuagénaire niera en bloc les faits, en contestant la description des lieux dépeints par la victime.

Comment avait-elle pu voir le chauffe-eau alors même qu’il avait été installé dans une pièce entièrement murée à l’époque des faits ?

Comment pouvait-elle se souvenir des framboisiers dans le jardin alors que le terrain n’avait pas encore été défriché ?

De dénégation en dénégation, l’accusé paraîtra borné, incapable de se remettre en question et de prendre “conscience de la gravité de son comportement”, selon la Cour.

Gérard Bouton était même allé jusqu’à accuser le père de la victime, estimant que la jeune femme avait pu “transférer” des souvenirs d’inceste sur lui. Une hypothèse battue en brèche par les expertises psychologiques.

Las, l’avocat général avait requis une peine de dix ans de réclusion criminelle. Au terme de cinq heures de délibéré, la Cour d’assises avait suivi les réquisitions du ministère public, estimant que la “personnalité du prévenu”, “qui n’a pas commencé la moindre introspection”, ne permettait pas de “s’assurer de la non réitération des faits”.

Et pourtant… Un mois et demi plus tard, devant la chambre de l’instruction, le parquet général requiert la mise en liberté de Gérard Bouton et son placement sous contrôle judiciaire.

Le septuagénaire a interdiction d’entrer en contact avec la victime ainsi qu’avec sa propre fille.

“Cette décision n’est en rien rendue au regard de l’évaluation de sa culpabilité, estime Me Xavier Nogueras, mais probablement pour des raisons touchant à l’organisation judiciaire, à savoir l’incapacité d’audiencer des affaires criminelles dans des délais raisonnables.”

Qu’un accusé comparaissant libre à son premier procès – comme ce fut le cas de Gérard Bouton – soit libéré et placé sous contrôle judiciaire dans l’attente de son appel, cela n’a rien d’étonnant. Mais, que le ministère public requiert sa mise en liberté… C’est autrement plus rare.

La Cour d’appel de Poitiers a-t-elle craint de ne pas pouvoir juger en appel Gérard Bouton à temps ? En effet, tout accusé, qui fait appel d’une condamnation, doit comparaitre dans un délai de deux ans maximum, faute de quoi il doit être remis en liberté.

Par exemple, un homme condamné à 30 ans de réclusion avait obtenu sa libération en cassation, car la Cour d’appel de Montpellier n’avait pu le juger dans un “délai raisonnable”.

Contacté par mail, le parquet général n’a pas donné suite à notre demande d’interview. Quant à l’avocat de la défense, il a contesté cette lecture de l’arrêt de la chambre de l’instruction dans les colonnes du Populaire du Centre :

“Les faits ont plus de 35 ans, commente Me Hervé Blanché. Il a toujours clamé son innocence. Il a fait appel, donc il est toujours présumé innocent.”

Et d’ajouter :

“Cet appel fait qu’il était placé en détention provisoire, régie par des règles strictes. De plus, il a toujours respecté son contrôle judiciaire et il habite loin de la victime.”

Gérard Bouton coule sa retraite en Charente-Maritime, entre Rochefort et La Rochelle.

“C’est un monsieur de 74 ans et je ne vois pas ce que pose comme difficulté cette remise en liberté”, déclare Hervé Blanché.

Source : francetvinfo.fr

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