Charente-Maritime | Accusé d’agressions sexuelles sur 11 garçons âgés de 11 à 17 ans

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Un super éducateur, l’inquiétante double vie d’Axel
La petite ville charentaise de Courçon est sous le choc depuis la mise en examen d’un éducateur sportif et assistant scolaire très apprécié, mis en examen pour viols et agressions sexuelles sur 11 enfants

Ce village de 2 000 habitants situé près de La Rochelle a découvert avec effroi ces derniers jours la face sombre et criminelle d’Axel P., l’un des entraîneurs officiant auprès des adolescents.

« Un coach rigoureux et déconneur. Je tombe de haut »,

se désole une mère de famille.

« Un super éducateur, les enfants ont toujours progressé avec lui »,

constate, abasourdi, un membre du FC2C, le club de football de Courçon.

Lorsqu’il n’évoluait pas sur les terrains de football, au contact de plus de 260 mineurs, Axel P. exerçait aussi la profession d’assistant d’éducation (AED) au sein du collège Jean-Monnet de Courçon, un établissement public comptant plus de 750 élèves.

Le 17 septembre, cet homme de 29 ans, sans casier judiciaire, a été placé en garde à vue. Il a depuis été mis en examen pour de multiples viols et agressions sexuelles ainsi que pour corruption de mineurs.

Selon le parquet de La Rochelle, 11 victimes ont été identifiées à ce stade de l’enquête. Des garçons, âgés de 10 à 17 ans au moment des faits qui auraient débuté dès 2019 pour se prolonger jusqu’à l’été 2025.

Le 19 août, un adolescent dépose une première plainte à la gendarmerie de Marans. Le surveillant de son collège lui réclame sur la messagerie Snapchat des photos dénudées.

Il s’agit d’Axel P., qui lui adresse aussi des images de son sexe en érection. Une « rumeur » se propage dès lors, à bas bruit, sur les réseaux sociaux.

Les jeunes s’alertent mutuellement. Les gendarmes, eux, préviennent le club de football de Courçon. C’est la consternation.

Axel P. est immédiatement « mis à pied », commente un membre du club. La suite ?

« Rien, on s’est retrouvé seuls durant plus de deux semaines, sans savoir quoi faire », résume-t-il.

Les dirigeants de l’association sportive sont rapidement auditionnés sans connaître la gravité des faits reprochés à Axel P. Dès lors, que dire aux parents, aux enfants ?

Le 8 septembre, une semaine après la rentrée scolaire, le collège Jean-Monnet adresse à son tour un « courrier » aux parents d’élèves. Le message s’apparente davantage à un courriel adressé via… Pronote, le logiciel de gestion de la vie scolaire majoritairement utilisé par l’Éducation nationale.

Des « faits répréhensibles » concernant « un ancien surveillant du collège » sont évoqués. Tous se seraient déroulés « en dehors du cadre scolaire », précise cette note, en rappelant la nécessaire application de la présomption d’innocence.

Un « copain » souriant et « blagueur » invité aux barbecues

Par définition, les parents d’élèves ayant quitté l’établissement en juin 2025 ne reçoivent pas cette « information ». D’autres n’en mesurent pas la portée.

Il faut attendre le 30 septembre pour que l’affaire éclate au grand jour. Ce jour-là, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Poitiers est saisie d’un appel formé par le parquet de La Rochelle.

Le 19 septembre, à l’issue de sa garde à vue, Axel P. n’avait pas été incarcéré mais placé sous contrôle judiciaire et prié de déménager à… Tours (Indre-et-Loire).

Intolérable, pour le procureur de La Rochelle, Arnaud Laraize, qui avait donc fait appel de cette décision, dénonçant « les risques de pression sur les mineurs qu’il connaît parfaitement » et « les victimes potentielles restant à identifier ».

Publique, l’audience est relatée par la presse locale. Les Courçonnais découvrent l’ampleur du drame.

« Proches des jeunes », Axel P. l’était aussi des parents. Un « copain » souriant et « blagueur » invité aux barbecues, aux fêtes de famille. En aparté, le vingtenaire multipliait les conversations privées avec certains mineurs, via les réseaux sociaux.

Des envois de photos et de vidéos — humoristiques d’abord puis pornographiques — avant de passer à des attouchements et agressions, suivis de fellations et de pénétrations imposées à des jeunes placés sous son autorité.

Entendue par les gendarmes, son ex-compagne a fini par l’identifier sur… certaines images. Selon le parquet de La Rochelle, elle l’accuse aussi d’attouchements sur ses enfants (sans lien de parenté avec Axel P.).

Lui affirme depuis avoir été violé en 2015 alors qu’il était apprenti, engagé dans un BTS en commerce.

Me Anne Glaudet, l’avocate d’Axel P., justifie le contrôle judiciaire initialement ordonné par le juge des libertés et de la détention.

Le vingtenaire « a avoué des faits bien au-delà de ceux qui l’incriminaient avec la volonté de tout dire. Il a totalement conscience de leur gravité. Ce positionnement est plutôt rare pour être souligné », estime-t-elle.

Soupçonné d’un viol, Axel P. en a reconnu trois et « l’essentiel des faits », indique le parquet de La Rochelle.

En apprenant l’existence d’une plainte dès la mi-août, Axel P. aurait immédiatement engagé des soins psychologiques et psychiatriques, précise Me Anne Glaudet, en défendant des « garanties de représentation » suffisantes.

Finalement, à la suite de l’appel du parquet de La Rochelle, les magistrats de Poitiers ont décidé le 30 septembre de placer Axel P. en détention provisoire.

« Les profils criminels manipulent aussi les adultes pour piéger les enfants »

L’Éducation nationale a ouvert une « cellule d’écoute » le mercredi 1er octobre au collège de Courçon, pour « anticiper une éventuelle réactivation des besoins suite à la récente médiatisation ». Le 8 septembre, le courrier initial évoquait seulement, outre « l’assurance d’une vigilance permanente », la possibilité de « s’adresser aux adultes de l’établissement ».

Totalement démuni, le club de football de Courçon s’est finalement tourné vers l’association Colosse aux pieds d’argile, spécialisée dans la lutte contre les violences sexuelles, le harcèlement et le bizutage en milieu sportif.

Fin août, ses juristes et psychologues sont intervenus pour épauler les dirigeants associatifs et ont même « doublé » les signalements auprès des autorités compétentes « pour éviter toute perte d’informations ». Une forme de pression, en somme, pour accélérer le mouvement et soutenir le club de foot.

Ses membres « sont dans la culpabilité parce qu’ils n’ont rien vu. Mais la stratégie des profils criminels est souvent identique : ils manipulent aussi les adultes pour piéger les enfants. Dès lors, les mineurs ont peur de ne pas être crus »,

explique Violaine Chabardes, la directrice de l’accompagnement des victimes de Colosse aux pieds d’argile. Son conseil ?

« Un adulte, a fortiori en position d’autorité, ne doit jamais être isolé avec un mineur physiquement mais aussi sur les réseaux sociaux. Un autre adulte doit être dans la boucle : un parent, un entraîneur, un dirigeant. »

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