Villez-sur-le-Neubourg | 10 mois de sursis pour agression sexuelle sur son ex-belle-fille

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Pédocriminel En liberté

Il assure avoir touché le sein de Laure « sans faire exprès »
Près du Neubourg, un sexagénaire condamné pour agression sexuelle sur son ex-belle-fille

Le 30 août 2022, le tribunal d’Évreux a condamné un homme à 10 mois de prison avec sursis pour attouchements sur sa belle-fille, mineure.

Les faits remontent au 3 janvier 2019.

Les faits jugés mardi 30 août par le tribunal d’Évreux remontent à deux ans et demi.

Lors d’un déménagement le 3 janvier 2019, à Villez-sur-le-Neubourg, Didier*, aujourd’hui âgé de 60 ans, a commis des attouchements incestueux sur sa belle-fille, Laure*, qui venait d’avoir 14 ans.

Le prévenu a été jugé coupable, à l’issue de l’audience.

Les juges ont décidé notamment d’une peine de dix mois d’emprisonnement avec sursis, supérieure à celle requise par le parquet, comme l’explique le juge Franck Doudet, qui présidait l’audience :

« La peine est supérieure à celle requise, car nous avons été stupéfaits de votre comportement à l’audience, vos hésitations, vos contradictions… »

Face aux contradictions de l’adulte, les juges et la substitut du procureur ne pouvaient que croire en la version de l’adolescente, de 17 ans aujourd’hui, présente à l’audience.

Tout au long de l’audience, le président Franck Doudet a reconstitué les faits rapportés par Laure et les personnes auxquelles elle s’est confiée, même s’ils sont des témoins indirects.

En deux ans et demi, sa version n’a pas changé.

Ce dernier jour de congé de fin d’année, Didier et Laure participent à un déménagement.

Pendant ces vacances, Laure vit chez sa mère et son beau-père, le couple étant séparé depuis peu.

En temps normal, c’est son père qui a la garde de Laure.

« La parole de l’un contre la parole de l’autre »

À un moment de la journée, Laure et son beau-père se retrouvent seuls dans une chambre, où ils viennent de poser un meuble.

En attendant Didier, Laure s’est assise au bout d’un canapé.

Une fois le meuble placé, le beau-père s’approche et s’assoit à la droite de l’adolescente.

Sur un temps assez bref, il passe sa main sous le haut de pyjama de Laure, lui touche le sein gauche en disant :

« C’est mignon, ça ! »

Au cours de l’audience, le président Doudet demande d’autres précisions à la victime, rappelant que Didier a également posé « une main au-dessus de ses hanches ».

Puisqu’aucun témoin n’a vu la scène, défense et partie civile assurent que cette affaire repose sur « la parole de l’un contre l’autre ».

Cependant, Laure a rapidement le réflexe, peu après les attouchements, de se confier à une de ses cousines et à son père, permettant aux enquêteurs de prouver le sérieux des témoignages.

« Votre version change tout le temps ! »

En un temps presque aussi prompt, Didier prend des décisions qui vont peser dans le jugement.

Le 5 janvier 2019, il envoie un SMS à Laure pour lui proposer un « rendez-vous clandestin » – dixit le président Franck Doudet – devant la mairie du Neubourg.

Il veut s’expliquer, juste entre elle et lui, mais Laure vient accompagnée de sa cousine.

Quand le beau-père lui propose de monter dans la voiture pour discuter, elle refuse.

Le président insiste :

« Elle ne se sentait pas tranquille de monter »

Et Laure ne va obtenir aucune explication à ce moment.

Les quelques minutes où ils restent ensemble, Didier demande à Laure d’effacer tous les SMS qu’ils ont échangés depuis les faits, puis lui propose un dédommagement financier.

Le juge renchérit, dénonçant un « chantage » :

« C’est pour qu’elle se taise ! »

Didier et son avocat, Me Mehdi Mokhtari, tentent d’évoquer la maladresse.

Le prévenu prétend que, sur le canapé, Laure est une fois assise, une autre fois allongée.

Hésitant à plusieurs reprises, il assure avoir touché le sein de Laure « sans faire exprès ».

Puis, il nie avoir glissé sa main sous le t-shirt, il explique qu’en fait, ils avaient « chahuté ».

« J’attends dans la chambre, parce que je m’entends bien avec lui. »

Laure* la victime dans sa déposition

Le président ne cache pas son agacement face à cette « version édulcorée ».

Il s’exclame en demandant au prévenu d’expliquer pourquoi Laure aurait menti et dans quel intérêt :

« Votre version change tout le temps ! »

Didier réplique :

« Elle voulait aller chez son père, car on lui interdisait des choses »

Plus tard, le propos fait rebondir la substitut du procureur, Stéphanie Palpacuer :

« Pourtant, c’est son père qui a la garde de Laure. Elle était en vacances chez vous et la rentrée avait lieu le lendemain ! Quel intérêt avait-elle de vouloir retourner chez son père ?

Alors qu’elle l’a dit : elle s’entendait bien avec sa mère.

Elle a également dit dans sa déposition : « J’attends dans la chambre, parce que je m’entends bien avec lui. »

« Conséquences en cascade sur l’organisation familiale »

Pour Me Xavier Hubert, l’avocat de Laure:

« un certain nombre d’éléments garantissent la réalité de ce qui s’est passé, à cent pour cent du côté de la victime. Ces explications maladroites sont des blessures nouvelles pour Laure et ne sont absolument pas convaincantes ».

Puis, une juge assesseur feint l’étonnement sur le comportement de Didier :

« Pourquoi, si vous vouliez être sûr de ne pas être mal compris, vous n’en avez pas parlé à quelqu’un d’autre, à sa mère ? Pourquoi n’avez-vous pas dit que vous n’aviez pas de mauvaise intention ? »

Le juge rappelle :

En ce qui concerne les blessures, la jeune plaignante n’a pas pu, pendant deux ans et demi, compter sur le soutien de sa mère ni de sa sœur, qui jugeaient le comportement de Laure excessif.

Me Xavier Hubert précise :

Mère et fille ne se sont retrouvées que très récemment, à la demande de l’adolescente en évoquant ces « conséquences en cascade sur l’organisation familiale ».

Me Mehdi Mokhtari rappelle, lui aussi, le « contexte familial », qu’il qualifie de conflictuel entre la mère et le père, il ajoute :

« un père qui cherche à couper tout contact entre Laure et sa mère »

« J’ai vu les SMS, j’ai eu la même interprétation que vous tous : Didier cherche à dissimuler quelque chose. Sauf que, quand on l’entend, quand on le connaît, on se rend compte qu’il n’est pas un mauvais bougre, on a plus affaire à quelqu’un de simple qu’à un délinquant sexuel. »

Pour ce qui est de l’intention de Didier, Me Mehdi Mokhtari parle d’erreurs d’interprétation et de maladresse :

« Il panique, il envoie un SMS, il fait l’inverse de ce qu’il devrait faire. »

Plus tard, il assure que son client n’a « jamais eu d’intention sexuelle », que tous les deux chahutaient.

« J’ai vu les SMS, j’ai eu la même interprétation que vous tous : Didier cherche à dissimuler quelque chose. Sauf que, quand on l’entend, quand on le connaît, on se rend compte qu’il n’est pas un mauvais bougre, on a plus affaire à quelqu’un de simple qu’à un délinquant sexuel. »

Me Mehdi Mokhtari rappelle ainsi que le beau-père est inconnu de la justice, son casier judiciaire est vierge et l’expertise psychiatrique ne révèle aucun trouble.

« C’est la première fois qu’il met les pieds dans un tribunal, plaide l’avocat. L’analyse de son ordinateur et de son téléphone portable ne révèle aucune trace de site pornographique ou pédopornographique. »

« Tournure malsaine de l’affaire »

L’avocat poursuit, estimant que « les témoignages de Laure n’apportent rien, ils n’étaient que deux dans cette pièce.  Mais, les interrogations de Laure sont légitimes, on peut interpréter ces faits de façon choquante. Mais si Didier s’est enfui, c’est parce qu’il savait l’erreur d’interprétation de Laure. »

Avocat de la partie civile et parquet ne partagent pas la démonstration de Me Mokhtari.

Me Xavier Hubert réclame 1 500 € de dommages et intérêts, ainsi que le remboursement des frais de justice de Laure.

Sa plaidoirie va d’ailleurs fournir des arguments tant aux juges qu’à la substitut du procureur.

Me Hubert souligne :

« On a la panoplie de ce que les agresseurs sexuels font à l’égard de leur victime : ils disent « n’en parle à personne », ils veulent effacer les preuves et ils offrent de l’argent, ce qui est peu courant, ce qui donne une tournure très malsaine de l’affaire, pour acheter son silence »

« Votre rôle était de l’éduquer, pas de la conduire devant un tribunal par un après-midi d’été. En audition, Laure a expliqué qu’elle était en pyjama. C’était le signe de la confiance qu’elle avait en vous. »

Parce que Didier n’est pas connu de la justice avant cette affaire et que son casier judiciaire est vierge, la substitut Stéphanie Palpacuer requiert sept mois de prison avec sursis et une mention au Fichier des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (FIJAIS).

La procureure adjointe souligne « le courage » de Laure, parce qu’« elle a parlé », déplorant en même temps les contradictions et les changements de versions du prévenu :

« Votre rôle était de l’éduquer, pas de la conduire devant un tribunal par un après-midi d’été. En audition, Laure a expliqué qu’elle était en pyjama. C’était le signe de la confiance qu’elle avait en vous. »

Stéphanie Palpacuer tranchera, pour sa part :

« Il ne donne pas la vérité à Laure. Moi, je la crois. Ce qui s’est passé, c’est la version qu’elle a racontée »

Ce que confirment les juges en condamnant l’homme de 60 ans plus sévèrement que ce qu’a requis la substitut du procureur (dix mois avec sursis au lieu de sept).

Le tribunal valide aussi la mention au FIJAIS et oblige Didier à déclarer son adresse tous les ans.

Le sexagénaire devra également 8 000 € de préjudice moral et 500 € de frais de justice à son ex-belle-fille.

* Les prénoms ont été changés.

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