Tours | Agressée sexuellement par son grand-père, Charlène parle

Petite fille, Charlène a été victime d’agressions sexuelles imposées par son grand-père, à Lémeré. La justice est passée mais les blessures sont profondes

Charlène, victime de son grand-père, avait « mis cette histoire dans un coin de [sa] tête. J’avais fini par l’occulter, presque ». © Photo NR

La première fois, c’était à bord de son tracteur, en pleine moisson à Lémeré, entre Richelieu et Chinon. La seconde, dans un garage, surprise alors qu’elle pliait du linge. Entre ses 10 et 13 ans, Charlène a subi les agissements de son grand-père.

Des caresses, des scènes de masturbation, des pénétrations digitales « et plein de trucs dégueulasses », décrit-elle.

Mère de deux enfants, la victime sans défense est devenue une femme de conviction, en même temps que la parole s’est libérée.

« Je savais que j’allais détruire ma famille » Car son secret si douloureux, elle l’a longtemps tu. « J’ai tenté d’aborder le sujet avec ma sœur quand nous jouions : “ Papy m’a touchée ”… Mais cela paraissait incroyable ! J’étais une petite fille, mes mots n’avaient pas de poids face au papy rigolo qu’il était. »

Cette histoire enfouie, Charlène a pu la raconter à la barre du tribunal correctionnel de Tours, fin octobre. « Contente » de pouvoir enfin exhumer ses souffrances publiquement, vingt ans après les faits. Pour être entendue, « prise au sérieux et reconnue » dans son statut de victime.

Elle est ressortie de l’audience durant laquelle était lu le délibéré, la semaine dernière, effondrée : quatre ans de prison dont un avec sursis ont été prononcés à l’encontre de son grand-père. Malgré la condamnation, le prévenu a regagné son domicile et relevé appel de la décision dans la foulée.

L’annonce d’une nouvelle audience, dans plusieurs mois. Comme un supplice prolongé pour celle qui dit « avoir appris à vivre avec », d’abord loin de sa terre natale. Avant de lâcher.

« J’ai tout gardé pour moi parce que je savais que j’allais détruire ma famille. J’avais peur pour elle, pour moi, j’ai tout fait pour l’éviter. »

Jusqu’au déclic. Un déclic nommé Manon, une fille du village, d’une douzaine d’années sa benjamine. Qui dénonce en 2017 les attitudes du vieil homme à son égard.

Les mêmes que celles imposées à Charlène. « Si Manon n’avait pas témoigné, je ne l’aurais jamais fait », assume la jeune maman.

La trentenaire se décide alors à dépasser les menaces. « La troisième fois qu’il a tenté quelque chose, je l’ai éloigné en criant que j’allais tout dévoiler. Il m’a dit : “ Si tu parles un jour, je te tue ! ” » Aujourd’hui, « je n’ai plus honte », affime Charlène. Comme pour montrer que « la culpabilité » a changé de camp.

Pétillante, elle n’en garde pas moins une face sombre. Celle des crises d’angoisse quand, grimée pour s’offrir une balade en campagne, elle craint de croiser à nouveau son grand-père.

Le temps judiciaire définitivement passé, viendra celui de la reconstruction. Un combat personnel résumé en un message : « Que les enfants victimes d’adultes prennent la parole et dépassent la crainte de ne pas être crus. »

Source : lanouvellerepublique.fr

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