Suisse | Structures inadaptées pour un récidiviste de 67 ans qui défraie même le milieu carcéral

Un pédophile détenu en EMS a scandalisé les pensionnaire. Le procès de ce récidiviste de 67 ans a révélé l’absence de structures adéquates pour les détenus âgés et malades psychiques.

Un pédophile âgé peut-il faire une partie de sa préventive en EMS (milieu carcéral) ?

Avec une certaine surprise, nous avons appris que oui.

Il est même apparu que ce prévenu de 67 ans – condamné mercredi à un an de prison ferme et à une mesure thérapeutique en milieu fermé – a créé le scandale durant cette préventive au milieu de personnes âgées et parfois démentes.

Il s’est masturbé devant une très vieille dame qui en a été totalement choquée.

La directrice de l’établissement l’a confirmé à la barre du Tribunal correctionnel.

En précisant d’ailleurs qu’une autre personne condamnée et présentant le même profil séjourne actuellement dans cet EMS sécurisé.

Un cas exceptionnel ?

La pratique est-elle courante?    Il semble que non.

Interrogé à ce sujet, l’avocat et curateur du pédophile, Me Philippe Juvet, explique que son client a commencé par passer quelques mois de préventive à Champ-Dollon avant d’être admis en EMS.

«J’ai dû faire plusieurs demandes au Ministère public et au Tribunal des mesures de contrainte (TMC) avant que cette solution ne soit acceptée.

Le but étant que mon client commence à se soigner le plus vite possible, ce qui était plus difficile à Champ-Dollon.»

Les familles des autres pensionnaires, qui paient plusieurs milliers de francs par mois pour leurs aînés, ne devraient-elles pas être informées du fait que leurs proches côtoient une personne au passé pénal?

«Oui, l’information devrait en principe être donnée, indique Me Juvet. Mais c’est très délicat car nous nous trouvions au début de la procédure. Il n’y avait encore que des soupçons. Pouvait-on passer outre la présomption d’innocence ?»

Le gros problème, selon le pénaliste, réside dans le fait «qu’on manque de lieux à Genève pour accueillir des auteurs d’infractions liées à un trouble mental».

Surtout lorsqu’ils sont âgés.

La solution vaudoise : «  CURABILIS »

«Les solutions qui existent sont médiocres, confirme l’expert psychiatre Panteleimon Giannakopoulos. On a le choix entre la peste et le choléra.»

Curabilis, dont il est le responsable médical, ne représente-t-elle donc pas la solution?

«A Curabilis, les détenus ont vingt ans de moins que le prévenu, ils sont plus agissants. Les interactions seront difficiles pour lui.»

Selon l’expert psychiatre, le Canton de Vaud aurait trouvé la solution avec des EMS fermés.

Ces établissements privés travaillent en collaboration avec l’Etat et le service de psychiatrie pénitentiaire.

Ils sont exclusivement destinés à des prisonniers âgés sous le coup d’une mesure thérapeutique destinée à soigner le trouble mental qui les a conduits à commettre des infractions.

«A Genève, il existe des EMS fermés pour des personnes âgées atteintes de démence, mais pas pour l’exécution de mesures, poursuit le médecin.

Et le Sapem (Service d’application des peines et mesures) a d’énormes difficultés à faire accueillir par le Canton de Vaud (qui est déjà sous pression) des prévenus condamnés à Genève.»

Il ira à Curabilis

Laurent Forestier, directeur de la communication à l’Office cantonal de la détention, confirme que la pratique des EMS fermés pour ce genre de situation n’existe pas à Genève.

«Quel que soit leur âge, le lieu prévu pour ce type de condamnés est Curabilis.

Et en cas de manque de place, Champ-Dollon. Mais d’autres solutions pour les prisonniers âgés sont actuellement à l’étude.»

Il y a quelques mois, Ueli Hostettler, anthropologue social au Département de droit pénal et de criminologie à l’Université de Berne, qui travaille sur le vieillissement de la population carcérale, se demandait dans nos colonnes:

«Si des prisonniers seniors ne peuvent plus sortir de prison parce que les juges les considèrent trop dangereux, que fait-on sur le plan institutionnel?»

Pour lui, le problème, de plus en plus fréquent, se pose en termes d’organisation et d’éthique.

En ce qui concerne l’accusé jugé mercredi par le Tribunal correctionnel, il a été condamné à un an de prison et à une mesure thérapeutique en milieu fermé.

Il sera probablement placé à Curabilis. En tout cas dans un premier temps.

(TDG)

Source : http://www.tdg.ch/geneve/actu

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