Saint-Denis | Deux enfants tombées dans les griffes de leur oncle

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Il utilisait la parole de Dieu pour parvenir à ses fins
Camille* et Lola* ont été abusées par leur oncle à partir de leurs dix ans. Profitant de la vulnérabilité de ses victimes, Johny L. a agi en véritable prédateur avec ces jeunes filles déboussolées et sous emprise.

Chemise blanche imprimée, posture droite et mains croisées dans le dos.

Il donne son maximum pour faire bonne impression au démarrage de son audience devant le tribunal judiciaire du chef-lieu.

Johny L., 53 ans. “Tonton” particulièrement présent pour sa famille.

Un homme pieux qui passe la majeure partie de son temps à prêcher la parole de Dieu sur les ondes d’une radio associative.

Il martèle :

“Je suis quelqu’un de bien”

En dépit de ce dont on l’accuse : avoir eu une liaison avec sa nièce Lola* pendant plusieurs années, initiée en 2013 alors que la petite avait onze ans.

Des rapports consentis, certes, mais répréhensibles aux yeux de la loi.

Une “atteinte sexuelle”, soit des relations entre un mineur de moins de 15 ans et un adulte.

Faits qualifiés ainsi car se déroulant avant le passage de la loi de 2021.

Pour les cas d’inceste désormais : la notion de consentement n’est plus envisageable avant d’avoir atteint l’âge de 18 ans.

Aujourd’hui : Johny Lebon irait directement devant la cour criminelle.

En préambule le président du tribunal, Stéphane Duchemin, d’emblée agacé semble-t-il, tient à rappeler :

“Viol aggravé, c’est 20 ans de réclusion”

Une fois les bases posées, le magistrat déroule la procédure lancée en mars 2019 à la suite d’un dépôt de plainte… d’une autre nièce de Johny.

Depuis ses dix ans, Camille* décrit le même processus utilisé par son tonton avec sa grande sœur.

Des sms et autres messages d’apparence anodine aux débuts, puis peu à peu sexualisés au fil des échanges.

Son oncle lui envoie une image de son sexe, lui demande des photos d’elle nue.

Il la “harcèle”, alors elle finit par céder.

Johny lui propose une relation sexuelle.

Si la petite refuse : “Je ferais du mal à ta sœur”.

La cadette craque lorsqu’elle découvre la liaison entre son oncle et sa grande sœur, alors âgée de 17 ans.

Des “je t’aime” et autres échanges sans équivoque.

Entre les deux, une jalousie malsaine s’installe.

L’existence d’une “faille psychologique” douloureuse chez cette petite qui développait peu à peu, à son tour, des sentiments ambivalents envers son oncle.

Situation dont elle peine encore aujourd’hui à s’extirper.

À 15 ans, la jeune fille est déscolarisée, suivie médicalement et souffre de phobie sociale.

À l’audience, timidement, elle déclare :

“Je suis triste et en colère. Depuis, je ne suis pas bien”

SE PROTÉGER

Une vulnérabilité enfantine dont Johny s’est servi pour commettre sur elle des agressions sexuelles.

Au tout début des investigations, l’aînée a d’abord pris la défense de son oncle chez qui elle s’était installée à l’âge de onze ans pour se rapprocher de son école.

Une jeune fille “inquiète” des retombées judiciaires, se présentant comme “amoureuse”.

Puis le vernis craque à mesure que l’enquête avance.

Elle déclare :

“Je croyais l’aimer. C’était, je pense, pour me protéger”

Grâce à sa psychologue, elle prend conscience avoir été “manipulée”, notamment par le biais de la religion.

Croyances qu’ils partageaient tous deux avec une grande ferveur.

Son avocate, Me Settama plaide :

“Il a fait irruption dans leur vie et a tout détruit. Au nom de quoi ? De Dieu, qu’il utilisait pour parvenir à ses fins”

Johny disait que si la société interdisait les relations incestueuses, le Tout-Puissant, lui, les acceptait.

“Il lui a mis en tête que Dieu l’avait choisi lui. Et c’est comme ça que ma cliente va se construire.”

Le prévenu reconnaît avoir eu une relation suivie avec Lola.

Concernant les faits d’agressions sexuelles sur la petite Camille, la quinquagénaire a toujours nié en bloc.

Du moins jusqu’à ce vendredi.

Face aux nombreuses sollicitations des avocats et magistrats, Johny avoue du bout des lèvres ou se contente de hocher la tête.

La substitute du procureur, Léa Filippi lance :

“Après trois ans d’enquête, il aura fallu trois heures” pour avoir un début de reconnaissance des faits

La magistrate demande neuf ans de prison pour répondre à la gravité du dossier.

Soit presque le maximum de la peine encourue : dix ans.

Face à ces réquisitions, le prévenu reste littéralement bouche bée.

Son avocat étant indisponible au cours de l’audience, c’est seul qu’il doit assurer sa défense.

Il déclare :

“Je vous ai fait du mal sans le vouloir. J’en assume les conséquences, mais maintiens que je suis quelqu’un de bien”

Johny L. écope de huit années de prison, assorties de cinq ans de suivi socio-judiciaire : interdiction d’exercer des activités en présence des mineurs et d’entrer en contact avec les victimes, entre autres.

Il sera également fiché comme délinquant sexuel et devra indemniser les parties civiles à hauteur de 20 000 euros au total.

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