Royaume-Uni | Affaire James Bulger, les meurtriers sortent de prison sous une nouvelle identité
- La Prison avec sursis... C'est quoi ?
- 09/08/2017
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En 1993, le meurtre du petit James Bulger, 2 ans, et le procès de ses jeunes meurtriers, 10 ans, ont horrifié l’Angleterre. Robert et Jonathan ont été libérés en 2001 à leur majorité et ont bénéficié d’une nouvelle identité. Mais la maman de James continue de se battre pour que soient levée l’anonymat des deux assassins de son fils.
A l’issue de leur procès et de leur condamnation à huit ans de prison pour avoir kidnappé le petit James Bugler, 2 ans, Robert et Jonathan furent envoyés dans des unités de sécurité pour mineurs, Robert Thompson à Barton Moss, près de Manchester, Jonathan Venables dans le Lancashire, à Vardy House.
Une bataille acharnée commença à propos de la durée de la détention.
Cette peine, qui impliquait de libérer les garçons à leur majorité était jugée trop modérée et scandalisa l’opinion publique.
Une pétition de protestation, lancée par The Sun et soutenue par les parents de James, recueillit plus de 250 000 signatures.
Mais on estima qu’envoyer deux jeunes dans des prisons pour adultes après leur avoir fourni pendant des années une éducation visant à leur réinsertion aurait été absurde : quelques mois en prison auraient suffi à balayer tous les progrès éventuellement accomplis.
On sait peu de chose sur la détention des deux garçons, très surveillés et soumis à des rapports quotidiens sur leur comportement.
L’un et l’autre poursuivirent leur scolarité. Vers l’âge de 14 ans, des sorties – en compagnie d’éducateurs – leur furent accordées. Ils allaient au théâtre, faisaient des courses…
Autant de détails insupportables pour la mère de la victime : avoir tué son fils, releva-t-elle, aura permis aux deux criminels d’accéder à une éducation à laquelle ils n’auraient sans doute pas pu prétendre.
En 2010, l’assistant social de Robert Thompson à Barton Moss a livré au Mail on Sunday un portrait du garçon pendant ses années d’incarcération. Il y décrit un enfant attachant qui, d’abord mutique, s’était vite révélé futé, sûr de lui, parfois drôle.
Cette nouvelle affaire provoque le déchaînement des médias
“Il n’a jamais montré de remords”
Personne ne le voyait jamais pleurer, et si le meurtre de James Bulger venait dans les conversations, sa réponse, accompagnée d’un haussement d’épaules, était toujours la même :
“C’est quelque chose qui est arrivé, je ne veux pas en parler avec vous.”
Toujours d’après son assistant social, il s’était comme coupé de son crime :
“Il n’a jamais montré de remords, du moins explicitement.”
Habile et astucieux, il avait obtenu des avantages, comme le droit de se coucher plus tard que les autres pensionnaires, de regarder la télé plus longtemps.
Il était très proche du directeur, qui semblait l’apprécier et discutait souvent avec lui. Il était une sorte de star, le type d’enfant dont une institution ne veut surtout pas se séparer.
Grâce à sa présence, les subventions du centre augmentaient ; Barton doubla sa capacité d’accueil durant les années où il y fut enfermé.
Anne, sa mère, lui rendit visite tous les trois jours pendant huit ans.Les liens entre eux se resserrèrent. Robert était plus proche d’elle que jamais.
Robert et Jonathan furent libérés en 2001, à leur majorité.
Ils demeuraient soumis à des conditions très strictes : interdiction de quitter le territoire britannique, de revenir dans le comté où se trouve Liverpool, d’entrer en contact l’un avec l’autre, obligation de se soumettre à un couvre-feu et, jusqu’à la fin de leur vie, à un contrôle judiciaire.
On leur fournit de nouvelles identités pour les protéger de représailles ; une injonction fut envoyée aux médias leur interdisant de révéler leurs noms actuels.
Les familles Venables et Thompson avaient été relogées loin de Liverpool. Elles aussi bénéficiaient de nouvelles identités. Traquées par les médias, elles auraient cependant été contraintes de déménager à intervalles réguliers – neuf fois entre 1993 et 2001 pour Anne Thompson.
Avoir peur d’être démasqué n’est pas aberrant, lorsqu’on connaît l’histoire sinistre de Scott Brad-ley. En 2005, Scott quitte l’Angleterre pour s’installer auprès de sa mère en Ecosse, à Garlieston. En 2010, il commence à souffrir de maux de dos et d’une infection des voies respiratoires. Sous l’influence de puissants analgésiques, il se met à avoir des comportements bizarres, une démarche étrange. Il commet de petits larcins. En 2011, il est arrêté et emprisonné quatre mois pour vol. Quand il ressort, la rumeur s’est répandue qu’il est Robert Thompson.
Un an durant, Scott Bradley ne cesse d’être harcelé. En août 2012, il se pend dans l’escalier de la maison familiale. Il laisse une lettre dans laquelle il écrit :
“Ils m’appellent par tous les noms – un pédophile, un type qui suit les jeunes filles… La liste est sans fin. Je suis supposé être un tueur d’enfants. Qui pourrait en supporter davantage ?”
Jonathan a dû changer quatre fois d’identité
En 2010, l’affaire refait brutalement surface. Jonathan Venables vient d’être à nouveau arrêté. La Grande-Bretagne est sous le choc :
Jonathan a été trouvé en possession d’images pédopornographiques. Cette découverte avait eu lieu un peu par hasard, lors d’une visite chez lui de son officier de probation, venu à sa demande parce que son anonymat était menacé, et qui, en arrivant, l’avait surpris en train de détruire son disque dur à coups de marteau.
L’officier ayant pu mettre le disque à l’abri, celui-ci avait été expertisé.
Sur Internet, Jonathan se faisait passer pour une femme au foyer de 35 ans censée maltraiter sa fille de 8 ans et l’offrir en échange de fichiers pédophiles. Lesquels s’étaient accumulés sur son ordinateur.
Cette nouvelle affaire a provoqué le tollé qu’on imagine. Les médias se déchaînent. Jonathan est condamné à deux ans de prison.
Quand il en ressort en 2013, on lui fournit une autre identité. Au total, il en aura eu quatre, impliquant la recréation d’un passé, de numéros de sécurité sociale, de papiers d’identité, etc.
Tout cela coûte cher, et la polémique enfle une nouvelle fois. Lui qui, lors du procès, avait été considéré comme le moins coupable des deux enfants, apparaît maintenant comme un pervers irrécupérable, qu’il devient scabreux, pour beaucoup, de protéger à grands frais.
Denise, la mère de James Bulger, mène toujours une croisade pour la levée de l’anonymat des deux meurtriers.
L’affaire Bulger, par son horreur extrême, a démontré avec force ce qui n’allait pas dans le système judiciaire britannique de l’époque.
Notamment le fait de traiter des enfants comme des adultes et les asseoir sur le banc des accusés pendant des semaines.
En Grande-Bretagne, l’anonymat des mineurs est désormais préservé dès la révélation de leur crime.
Si James Bulger était tué aujourd’hui, on ne saurait rien de Robert Thompson et Jonathan Venables.
Source : CloserMag
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