Oise | Quatre jeunes condamnés pour proxénétisme aggravé

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C’est au cours d’une enquête sur un réseau de stupéfiants que tout commence
une enfant dans la rue la nuit avec des talons aiguilles beaucoup trop grands
Quatre jeunes majeurs de Beauvais et Clermont étaient jugés pour proxénétisme aggravé à travers toute la France ce mercredi 22 novembre.

Quatre prévenus tout juste majeurs sont jugés à Beauvais ce mercredi 22 novembre.

Ils doivent répondre de proxénétisme aggravé.

C’est-à-dire d’avoir aidé, assisté, protégé, transporté, profité du produit de la prostitution.

Ils comparaissent sous contrôle judiciaire.

Sauf l’un d’eux qui est détenu dans le cadre d’autres affaires jusqu’au 17 octobre 2025.

C’est au cours d’une enquête sur un réseau de stupéfiants, menée par les gendarmes de Clermont, que tout commence.

Des écoutes téléphoniques entre Medhy Hatron, 24 ans, et Joël Kayembé-Ilunga, 23 ans, deux anciens amis d’école, font penser à l’existence d’un réseau de prostitution.

Il est en effet question de gains financiers, de prénoms féminins et des noms de lieux.

Medhy Hatron se tient informé de la bonne marche de l’affaire et de son évolution grâce à sa compagne, Sandra Aissiou, 19 ans qui, prostituée elle-même, s’occuperait du recrutement.

Une histoire d’amis

L’enquête des gendarmes établit ainsi plusieurs protagonistes.

L’ami d’enfance de Medhy Hatron, Joël Kayembé-Ilunga, lui envoie régulièrement de l’argent en prison.

Ce 22 novembre il est prévenu d’avoir entraîné une mineure dans la prostitution, d’avoir assuré sa sécurité et son transport sur des lieux de prostitution…

Mais aussi d’avoir bénéficié de la moitié de ses gains jusqu’en avril, date à laquelle elle s’est rebellée, estimant qu’elle l’avait suffisamment payé.

C’est la seule victime de ce dossier.

Il est alors redevenu chauffeur VTC. Et c’est un autre prévenu, Sofiane Bouchareb, un étudiant âgé de 23 ans, encore un ami d’école des deux autres, qui prend sa place.

Il assure la logistique de la jeune prostituée qu’il est allé chercher à Cognac.

Interpellés fin mai 2023

Au cours des conversations téléphoniques qui ont été transcrites, les prévenus emploient un langage codé.

Ils se désignent pas leurs initiales : S pour Sofiane, par exemple.

Et utilisent des mots de substitution communs au langage en usage chez les jeunes.

Langage que les gendarmes n’ont pas eu de mal à décoder.

La prostitution se fait par un site spécialisé, Sex Model.

La prostituée crée son profil où elle détaille ce qu’elle fait et ce qu’elle ne fait pas.

Les clients n’ont qu’à choisir et à entrer en contact par messagerie.

L’interpellation a eu lieu le 30 mai 2023 et les prévenus ont été présentés en comparution immédiate le 2 juin.

Après plusieurs renvois dont un pour supplément d’information, l’affaire est enfin jugée ce 22 novembre à 14 h.

«Je suis amoureux d’elle ; c’est un métier comme un autre»

Medhy Hatron raconte sa rencontre avec Sandra Aissiou :

«Je savais qu’elle se prostituait dans un hôtel de Clermont et j’ai tout fait pour la sortir des mains des proxénètes. Elle m’a parlé de son métier, qu’elle avait commencé alors qu’elle était mineure. Je lui ai dit de faire attention à elle et on s’est mis en couple en 2022 et il ne m’a jamais donné d’argent sauf une centaine d’euros au début de mon incarcération. C’est Joël qui m’envoyait des mandats de toute ma famille, pour des raisons de facilité administrative».

Il explique qu’il a touché une grosse somme d’argent après le décès accidentel de sa mère et de son frère.

Somme qu’il a investi en motos et voitures, afin d’échapper aux saisies des huissiers qui le traquent pour des sommes dues au Trésor Public pour ses condamnations passées.

Il reconnaît avoir conseillé des lieux «pour sa sécurité».

Il ne se souvient pas lui avoir dit :

«Tu as fait ton mini, pas ton maxi»

Il commente :

«Son argent c’était pour elle, c’est son affaire. Je suis amoureux d’elle ; c’est un métier comme un autre. Moi, j’ai accepté.»

«Pendant la prestation, je restais dans ma voiture.»

Joël Kayembé-Ilunga n’est d’accord qu’avec une partie de la prévention.

Il a bien aidé la prostituée mineure mais, c’est elle qui l’a approché :

«Je ne l’ai ni recrutée ni forcée. Je l’ai rencontrée à Saint-Maximin fin 2022. On s’est revu plusieurs fois et elle m’a dit qu’elle se prostituait, raconte-t-il. Je n’y ai rien vu de choquant, je suis assez ouvert. Elle m’a dit qu’ayant des problèmes chez elle, elle a voulu en sortir.»

Il poursuit :

«Elle m’a demandé de l’aider en la protégeant. Je l’ai déposée plusieurs fois à des centaines de kilomètres. J’allais la chercher à Creil, elle était toujours seule. Une fois, comme elle avait des problèmes de carte de crédit, elle a payé la location sur Booking,com, d’un appartement à Nantes, avec mon téléphone. Je l’y ai accompagnée. Pendant la prestation, je restais dans ma voiture. C’est elle qui payait le carburant et les repas. Elle m’a offert une paire de baskets, je me doutais que c’était avec de l’argent de la prostitution… Ça n’a duré que quelques mois. Je suis allé voir ailleurs et ça ne lui a pas plu».

Selon lui, c’est par jalousie et pour se venger que son ex-protégée l’a accusé.

Il ignorait que son copain d’école était en couple avec Sandra Aissiou.

Il dit qu’il ne savait pas que Sofiane Bouchareb, avec qui il jouait au foot, avait pris sa succession auprès d’elle.

Prostituée à l’âge de 14 ans

Sandra Aissiou explique de son côté qu’elle a fugué de chez sa mère dès l’âge de 14 ans.

C’est là qu’elle a fait des rencontres qui l’ont initiée à la prostitution.

Elle avait arrêté après sa rencontre avec Medhy Hatron mais a dû reprendre après son arrestation pour cause de soucis financiers.

Elle a maintenant trouvé un emploi de serveuse.

Elle s’est débrouillée toute seule pour créer son profil et s’occupait seule de sa gestion.

Elle a débuté à Paris, mais la capitale lui a déplu.

L’ex de Joël Kayembé-Ilunga, la jeune fille qu’il est accusé d’avoir engagé, l’a contacté par les réseaux sociaux.

Elle se renseignait sur le métier.

«Je lui ai donné deux ou trois conseils, dit Sandra Aissiou. Sans savoir que c’était la compagne de Joël. On a travaillé ensemble une ou deux fois, c’était comme une collègue de travail, on avait chacune notre chambre, elle me tenait compagnie».

À propos des conversations téléphoniques elle indique :

«Je parlais de mon travail à mon mari, comme une fleuriste ou une coiffeuse qui rentre du travail. Je n’ai eu besoin de personne pour apprendre. Il y a longtemps que je le fais»

Elle ne se considère pas comme une victime.

Il dit avoir rendu l’argent dès qu’il s’est fait griller par sa mère

Le dernier prévenu, Sofiane Bouchareb reconnaît avoir gardé l’argent de la vente de la voiture utilisée pour tous ces déplacements.

Mais il assure l’avoir rendu dès que sa mère l’a découvert et a dit :

«Pas de ça ici»

Il a été arrêté en pleine période d’examen ; du coup, il perd un an.

Il a côtoyé les deux autres jusqu’au collège.

Lui, il s’est orienté vers les études supérieures.

«Je me suis intéressé au milieu de la prostitution comme d’autres s’intéressent à la comptabilité, dit-il au président. Mais l’interpellation m’a donné une grande claque. Je perds un an, mais j’ai de la chance. Je ne me suis pas rendu compte des risques que je prenais».

La procureure demande la prison ferme

Medhy Hatron totalise neuf condamnations sur son casier judiciaire.

L’enquêteur social considère qu’un aménagement de peine est difficilement envisageable.

Joël Kayembé-Ilunga a été condamné trois fois.

Il a un travail et envisage de devenir ambulancier.

Il affirme que sa période de détention provisoire l’a fait réfléchir.

Sonia Aissiou possède un casier judiciaire vierge.

Sa mère l’a définie comme une tornade gentille qui fait ce qu’elle veut.

La procureure de la république n’a aucun doute sur la culpabilité de chacun.

Elle demande une peine de six ans de prison ferme, avec mandat de dépôt pour Medhy Hatron ; cinq ans, ferme, pour Joël Kayembé-Ilunga et, deux ans, dont un avec sursis pour Sandra Aissiou et Sofiane Bouchareb.

Des peines moins sévères

Un peu après minuit et plus de dix heures d’audience le tribunal a rendu son délibéré.

Medhy Hatron écope de 10 mois de prison, avec mandat de dépôt, interdiction de détenir une arme pendant cinq ans.

Joël Kayembé-Ilunga écope de 12 mois de prison avec détention à domicile sous surveillance électronique et interdiction de détention d’arme pendant cinq ans.

Sandra Aissiou est condamnée à six mois de prison avec sursis et interdiction de détenir une arme pendant cinq ans.

Sofiane Bouchareb, écope de huit mois de prison avec sursis.

Les trois premiers sont également inscrits au Fichier national des personnes interdites d’acquisition et de détention d’armes (Finiada).

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