Moulins | Un professeur de chant, que ses élèves devaient appeler «Papa d’amour», sera jugé pour viols

Ce professeur de chant, qui se faisait surnommer de ce sobriquet par ses élèves, est renvoyé aux assises pour avoir abusé de certaines d’entre elles alors qu’il dirigeait la chorale d’un centre scolaire catholique de Moulins.

Jean-Philippe Galerie exerçait une forte attraction sur ses jeunes élèves, qui l’admiraient et le craignaient.ELEPHANT & CIE

Elles devaient l’appeler Papa d’amour. En échange, il leur offrait bijoux, parfums, sous-vêtements, leur écrivait des lettres enflammées et, surtout, les faisaient se sentir « importantes ».

Un statut privilégié que ces jeunes filles âgées d’une quinzaine d’années n’obtenaient en réalité qu’en contrepartie de relations et d’attouchements sexuels avec cet homme de vingt ans leur aîné, qu’elles admiraient et qu’elles craignaient tout à la fois.

Jean-Philippe Galerie, 45 ans, devra répondre de viols, d’agressions sexuelles par personne abusant de l’autorité que lui confèrent ses fonctions et de corruption de mineurs sur dix jeunes femmes devant les assises de Moulins (Allier), des faits passibles de vingt ans de prison, survenus entre 2008 et 2011.

Ainsi en a décidé, le 12 septembre dernier, la juge d’instruction en charge de ce dossier qui avait créé un fort émoi localement.

L’accusé, détenu depuis mars 2016, avait en effet agi à la faveur de ses interventions au centre scolaire Saint-Benoît, établissement privé catholique réunissant près de 700 élèves, de la maternelle à la terminale, dans le centre-ville de Moulins.

Recruté à titre d’intervenant extérieur sur les conseils d’une enseignante en musique — une autre de ses conquêtes —, il était chargé d’organiser de grands spectacles de fin d’année qui faisaient la fierté de l’établissement.

Son atelier de chant, le bien nommé Atout cœur, était le point de départ d’une mise en condition progressive sur certaines élèves, qu’il connaissait souvent depuis leur entrée en classe de 6e.

«Fonctionnement sectaire»

Toutes décrivent un même modus operandi : arrivées à la fin du collège, elles se voyaient offrir les premiers rôles dans les spectacles, et une attention soutenue de Jean-Philippe Galerie qui échangeait avec elles en dehors, par e-mail (il avait ouvert à chacune un compte dédié) et webcam.

Il se disait amoureux, leur demandait de se déshabiller devant la caméra et s’exhibait, sexe en érection.

L’ancien pizzaïolo et secrétaire des scouts de France en Isère, devenu compositeur-interprète de musique religieuse, exerçait une telle attraction sur ses ouailles — toutes parlent d’emprise et de « fonctionnement sectaire » — qu’il était parvenu à les inviter pour des « stages » de chant chez lui, dans le Maine-et-Loire, où il vivait avec femme et enfants.

C’est là que se sont produits la majeure partie des faits, à l’occasion de siestes ou de soirées tardives dans son studio de musique, sur des jeunes filles vierges et « tétanisées » : baisers, caresses, relations sexuelles — non protégées —, parfois à plusieurs…

Des faits que Jean-Philippe Galerie légitimait, fustigeant un « excès de rigueur morale » dans la société.

Sa compagne, ancienne élève et victime présumée

En juillet 2010, celui-ci prend toutefois peur et supprime toutes les boîtes e-mail alors que la famille d’une jeune fille porte plainte après être tombée sur des messages explicites.

Il sera condamné en 2011 pour corruption de mineur à cinq mois de prison avec sursis, sans que le centre scolaire Saint-Benoît en soit avisé.

« Un loupé préjudiciable à tous », reconnaît l’avocat du chanteur, Me Denis Dreyfus.

Car il faut attendre mai 2015 pour qu’une autre jeune femme ait le courage de porter plainte.

Elle livrera alors une dizaine d’autres noms, des victimes qui, pour la plupart, ont confirmé ses dires.

« Certaines n’ont pas souhaité parler, face à ce prédateur raffiné qui les a envoûtées », déplore Me Gilles-Jean Portejoie, avocat de plusieurs parties civiles.

D’abord dans la dénégation, Jean-Philippe Galerie a reconnu l’intégralité des faits, ajoutant même des noms et des agissements à ce sordide inventaire… démarche rarissime dans ce genre de dossier.

« Il est dans une dynamique de vérité, il a compris qu’en tant qu’adulte il aurait dû mettre des barrières et il poursuit le travail sur lui-même, détaille son défenseur, Me Denis Dreyfus.

Il y a, il le sait, un vertige entre les faits qu’il a commis, sa vie de famille de l’époque et les valeurs qu’il prônait dans son investissement religieux. »

Sa défense viendra sans doute, à l’audience, de sa compagne actuelle.

Ancienne élève de Saint-Benoît et victime présumée, elle a néanmoins toujours contesté ce statut, expliquant avoir été parfaitement consentante…

Source : Le Parisien

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