Montrichard | 14 ans de réclusion pour le père incestueux

Le père de famille a contesté les ultimes révélations de sa fille sur les viols subis pendant son adolescence. L’accusation a requis une peine de 18 ans.

“Tu as volé mon innocence et mon enfance […] Tu n’imagines pas combien j’ai mal. Je ne trouve pas les mots pour te montrer à quel point tu as détruit ma vie. Je te déteste, mais je t’aime et je t’aimerai toute ma vie parce que tu es mon père.”

Le temps est resté comme suspendu, hier après-midi, dans la salle d’audience où un père incestueux comparaissait pour avoir violé sa fille pendant quatre ans, dans les environs de Montrichard.

Jurés, magistrats, avocats, proches, tous avaient le visage fermé à l’écoute de ces mots écrits par la jeune victime et lus par son avocate, Me Émilie Halbardier. Impassible depuis le début de son procès, l’accusé a fondu en larmes.

En fin de matinée, la présidente Patricia Renzi-Goillot l’avait interrogé sur les faits révélés en janvier 2017 par la découverte inopinée de photos de ses actes sur son téléphone portable.
Le quadragénaire a expliqué que sa femme ne répondait plus à ses attentes sur le plan sexuel et qu’il s’est senti attiré par sa fille qui n’avait pas encore 12 ans.

Ce furent d’abord des douches, puis des massages, des épilations du pubis et, enfin, les attouchements auxquels succéderont les viols.

Obéissant au même rituel, le père venait chercher sa fille par la main et l’entraînait dans la chambre parentale où il lui faisait subir ses abus, en l’absence de la mère partie au travail tandis que les frères jouaient à l’extérieur.

Poussé par l’avocate générale Béatrice Pavie, l’accusé a reconnu que sa fille l’accompagnait sous la contrainte :

« Elle ne voulait pas me décevoir et avait peur de me désobéir. »

Les photos prises avec son téléphone ? « Je les regardais, puis je les effaçais. » Celles retrouvées par son épouse sont réapparues à son insu à la faveur d’une mise à jour.

Indignation et tristesse

Sans elles, l’affaire n’aurait peut-être jamais été révélée. Mais alors que l’adolescente l’a accusé la veille et pour la première fois de lui avoir infligé des pénétrations péniennes, le père a de nouveau formellement contesté.

« Je m’interdisais de la pénétrer avec mon sexe »,

a-t-il répété

« Alors pourquoi votre fille en parle-t-elle ? » demande la présidente

« Je ne sais pas. Peut-être pour me punir et se venger pour que je reste plus longtemps en prison »,

avance l’accusé.

Ce qui révolte l’avocate de la partie civile.

« Je peux comprendre la difficulté d’un père à reconnaître l’abomination de ses actes, mais pas qu’il adopte encore une position de victime et qu’il transfère sa culpabilité sur sa fille parce qu’elle n’aurait pas su lui dire non, et sa femme parce qu’elle n’aurait pas répondu à ses attentes. Sa fille n’a pas pu tout dire avant, ce procès est pour elle le moment ou jamais de tout expliquer et non pas de se venger. »

Bouleversée par la lecture de la lettre de l’adolescente à son père, la représentante du ministère public a expliqué aux jurés qu’il fallait mettre de côté le sentiment d’indignation et de tristesse inspiré par le dossier pour examiner objectivement les faits.

« L’accusé a fait passer ses fantasmes avant le bonheur et l’intégrité de sa fille. Il lui a fait subir ce qu’il ne pouvait pas obtenir de sa femme. Ses regrets sont-ils sincères ou stratégiques ? Lui seul le sait. Mais en contestant les pénétrations péniennes, il fait passer sa fille pour une menteuse. »

“Ce n’est pas un monstre”

Béatrice Pavie s’est interrogée sur la réinsertion du père car dans la matinée, l’expert psychologue n’a pas exclu d’éventuelles tendances pédophiles. L’avocate générale a requis une peine de 18 ans de réclusion.

Un quantum jugé trop élevé pour l’avocate de la défense, Me Sandrine Audeval qui s’est adressé directement aux jurés.

« Ce n’est pas un monstre qu’il faut écarter parce qu’il fait peur. Je vous en conjure, acceptez de voir en lui un être humain ! »

La défense s’est appuyée sur les conclusions du psychiatre :

« L’expert indique que l’accusé n’est pas un pédophile et que le risque de récidive chez les pères incestueux est faible. Depuis son incarcération, il a engagé un travail pour comprendre pourquoi il s’est comporté en père indigne. Soyez justes, ne lui infligez pas une peine excessive. »

L’accusé a ensuite demandé pardon à sa fille.
Le verdict est tombé peu avant 18 h : 14 ans de réclusion assortis d’un suivi sociojudiciaire de 7 ans.

Source : lanouvellerépublique.fr

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