Mayenne | Elle veut adopter une petite orpheline placée chez elle et on lui arrache

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Le tort de cette petite ? Etre trop attachée à sa famille d’accueil
En Mayenne, une petite fille placée dans une famille d’accueil alors qu’elle était bébé, lui a été retirée brutalement au bout de sept ans. Orpheline, son assistante familiale souhaitait l’adopter. Elle a saisi la justice. Son histoire n’est plus un cas isolé.

Actualisation du 10 janvier 2025

L’histoire d’Élodie a eu un retentissement jusque dans le sud de la France.

Depuis la publication de son histoire, plusieurs familles d’accueil ont contactés le journal pour témoigner de la violence institutionnelle qu’elles affirment avoir subie de la part de l’ASE de leur département.

“C’est moi qui pose les questions. Maintenant, vous allez exécuter ce que je vous demande”

Il y a d’abord Isabelle.

Cette femme de 42 ans, assistante familiale depuis 2021, nous contacte depuis la Creuse.

En 2023, la quadragénaire a la garde de trois enfants, dont un bébé d’un an et demi qu’elle souhaite adopter.

Mais tout bascule le jour de la rentrée scolaire, quand l’assistante familiale reçoit un appel du chef de service de l’Aide sociale à l’enfance de la Creuse.

“Il me dit “Bonjour madame, est-ce que les enfants sont à l’école ?”

Je réponds que oui, ils ont fait leur rentrée.

Il me dit alors “Ils sortent à quelle heure ?” Je réponds “16 h 30”, et lui demande pourquoi.

“C’est moi qui pose des questions. Maintenant vous allez exécuter ce que je vous demande, vous irez les chercher à l’école et vous les ramenez à l’aide sociale à l’enfance”, et il me demande de les emmener tous les trois”, raconte-t-elle avec émotion.

La famille d’accueil raconte avoir eu seulement quarante minutes pour réunir les affaires des trois enfants.

“Et là, tout s’écrase, tout s’écrase d’un coup. Vous ne comprenez pas, vous ne savez pas pourquoi, vous ne savez pas ce qui se passe et on ne vous donne pas d’explications. Ça a été  horrible”, témoigne Isabelle.

L’assistante familiale est soupçonnée de maltraitance.

Des faits qu’elle nie en bloc.

“Une scène d’horreur”

Elle remet donc les trois enfants à l’ASE, dont ce bébé et un enfant autiste qu’elle accueille depuis petit.

“Et ça, je me le rappellerai toute ma vie. Le bébé était dans les bras de mon conjoint, il pleurait. L’enfant autiste pleurait. Une scène d’horreur. Rien que d’en parler, ça me remet les larmes aux yeux.”

La famille d’accueil raconte avoir “à peine eu le temps de leur dire au revoir”, avant que les trois enfants ne soient emmenés en voiture, et placés dans différentes familles d’accueil.

Il y a six mois, le tribunal administratif de Limoges a estimé qu’Isabelle devait retrouver son agrément, mais aujourd’hui, le département ne l’a toujours pas réintégrée.

Pourtant, Isabelle encourage Élodie, l’assistante familiale mayennaise, à se battre, elle aussi.

“Il faut qu’elle tienne, il faut qu’elle aille au bout. Parce que c’est un système dans lequel ils ont tellement l’habitude que les gens baissent les bras. Il faut qu’elle tienne, ne serait-ce que pour la petite.”

De son côté, Isabelle a de nouveau rendez-vous avec la justice dans les prochains mois.

Des combats parfois victorieux

Si l’assistante familiale creusoise y croit, c’est aussi parce que d’autres histoires se sont bien terminées, comme celle de cette assistante familiale de La Ciotat dans les Bouches-du-Rhône.

Armelle nous a contactés car elle a vu passer l’histoire d’Élodie, et ses difficultés avec l’Aide sociale à l’enfance de la Mayenne.

Une histoire similaire à la sienne : la sudiste a pu adopter sa fille Sabrina après avoir été sa famille d’accueil.

Comme Élodie, elle commence les démarches d’adoption quand Sabrina a cinq ans, après que les parents de la petite fille ont renoncé à leurs droits.

Pourtant, quelques semaines plus tard, l’Aide sociale à l’enfance émet un avis défavorable pour cette adoption, et place Sabrina dans une autre famille d’accueil.

“Pourtant Sabrina disait aux psychologues qu’elle avait trouvé des nouveaux parents, que c’était nous…”, se souvient Armelle.

Pendant plus d’un an, l’assistante familiale se bat, attaque le Conseil départemental des Bouches-du-Rhône devant la justice, et obtient finalement gain de cause.

Avec son mari, ils adoptent Sabrina, aujourd’hui âgée de 19 ans.

Après avoir entendu l’histoire d’Élodie, la mère et sa fille lui proposent aujourd’hui leur aide, et sont prêtes à témoigner devant la justice de leur expérience pour aider l’assistante familiale mayennaise dans son combat.

Sources

France Bleue

Enfance en danger

 

Article du 13 décembre 2024

C’est l’histoire d’une famille d’accueil mayennaise qui se bat pour adopter une petite fille. Sarah (prénom choisi pour préserver son anonymat) a été confiée à Elodie à l’âge de six mois.

Sa mère biologique ne pouvant pas s’en occuper, la fillette a été placée chez cette assistante familiale par les services sociaux du Département.

Depuis, l’enfant n’a plus de maman, décédée en janvier dernier.

Le 12 Aout 2024, la famille d’Elodie rentre de leurs vacances en Mayenne en compagnie de la petite Sarah*, le Service de la Protection de l’Enfance, lui informant le départ brutal de Sarah* dans une autre famille d’accueil sous moins 48h.

Sarah* est placée dans une autre famille d’accueil car le Conseil de famille en a décidé autrement pour le sort de la petite fille.

Car Sarah* s’est trop attachée à sa famille d’accueil et qu’Elodie lui a parlé du sujet de l’adoption.

Julie Ducoin, la présidente de la Commission Protection de l’Enfance au Conseil départemental, justifie sa décision :

“Je reconnais que le laps de temps entre la décision et le départ de cette jeune peut être court. Je ne vais pas rentrer dans les détails, mais des fois, pour le bien des enfants, c’est bien que ça se fasse rapidement. On a commencé à voir des difficultés et c’est ça qui peut mettre à mal un projet d’adoption. On se pose la question si oui ou non l’enfant est susceptible d’être adopté. Est-ce que nous, on perçoit ça comme bon pour cette jeune et ensuite on demande un bilan d’adaptabilité.”

Ce mardi, l’avocate de la famille d’accueil s’est exprimée sur France Bleu Mayenne.

Me Marie Cacciapaglia a saisi le Tribunal administratif de Nantes et le Conseil d’Etat, la plus haute juridiction administrative en France.

France Bleu Mayenne : Y avait-il un danger à laisser cette enfant dans cette famille d’accueil ?

Me Marie Cacciapaglia : Aucun danger à mon sens. Le danger, c’est justement d’avoir retiré cette petite fille qui n’avait que trois mois quand elle est arrivée. Elle a aujourd’hui sept ans et il a fallu deux jours pour qu’on l’enlève de sa maison.

Alors pourquoi cette séparation ?

J’attends toujours la réponse de la part du Conseil départemental qui, je le précise, ne s’est pas déplacé à l’audience. In fine, ce qui était reproché, c’est qu’il y avait des liens, peut être un attachement trop fort entre cette petite fille et son assistante familiale et que ça pouvait nuire éventuellement au bon développement de cette petite fille.

Attachement trop fort ?

C’est un problème général dans la protection de l’enfance, et ça concerne essentiellement ce qu’on appelle les pupilles de l’État, c’est à dire les enfants qui sont soumis à l’adoption. Parce que ce qui est dramatique pour cette petite fille, c’est qu’elle n’a pas de parents. Elle est donc seule. Sa seule personne ressource, c’était sa famille d’accueil et ses enfants .

Il faut savoir quand même que du haut de ses sept ans, cette petite fille a demandé au Conseil de famille (l’organe qui gère les adoptions) à être entendue. C’était le 11 octobre 2024, et elle a exactement formulé les paroles que je vais vous dire : jusqu’à quand je suis chez Marie-Laure, c’est sa nouvelle famille d’accueil. Quand est-ce que je rentre à ma maison ?

Que vaut la parole d’un enfant dans ce genre d’affaire ?

Il n’y en a pas parce que l’enfant n’est absolument pas consulté. Il faut savoir que la préparation de l’enfant s’est faite en même pas 48 h. C’est à dire qu’elle a rencontré sa nouvelle assistante familiale de 9 h à 12 h dans un café et puis le lendemain, elle s’en allait.

C’est très violent. Comment va votre cliente ?

L’assistante familiale va extrêmement mal, vous l’imaginez bien. Elle s’était effectivement positionnée pour adopter cette petite fille. C’est une professionnelle qui a onze années d’expérience, quelqu’un d’aguerri et à qui on a jamais rien reproché. C’est ça qui est terrible. Au contraire, le Conseil départemental la poussait sans arrêt vers l’adoption de cette petite fille. C’est ça qui est incompréhensible.

Avez-vous des nouvelles de Sarah qui ne voit plus du tout son ancienne famille d’accueil, qui vit ailleurs et qui a dû changer d’école ?

On a aucune nouvelle. Pire encore, son assistante familiale n’en a pas non plus parce que c’est interdit. Voilà, C’est mieux pour elle en fait, qu’elle soit totalement isolée, parce qu’apparemment elle se reconstruirait mieux comme ça, coupée de tous ses liens après sept ans.

Votre cliente a décidé de porter l’affaire devant la justice. Quelles sont les procédures que vous avez ou que vous allez intenter ?

On a intenté une procédure devant le tribunal administratif de Nantes en référé, c’est à dire en urgence. Malheureusement, le tribunal administratif de Nantes en référé a estimé qu’il n’était pas compétent. Je précise que deux mois avant, pour une histoire similaire, j’avais saisi le tribunal administratif de Caen qui, lui, s’est déclaré parfaitement compétent. On a aussi saisi le Conseil d’Etat, et on ira jusqu’au bout pour l’intérêt de cette petite fille.

S’il faut saisir la Cour européenne des droits de l’homme, on ira. Parce que si son assistante familiale ne se bat pas pour elle, personne n’entendra. Et cette petite fille sera mise aux oubliettes.

A l’annonce du départ de sa petite Sarah, Elodie s’effondre :

“Ce n’était pas logique en fait, il n’y avait rien de logique et on a moins de 48 heures pour la faire partir, emballer ses affaires et qu’elle aille chez quelqu’un qu’elle ne connaissait pas. C’était très violent, autant pour elle que pour mes enfants et pour moi. C’était très violent.” Élodie se met à pleurer : “Le jour du départ, je l’ai réveillée pour qu’elle puisse partir. La veille, elle m’avait acheté une petite peluche avec un de mes fils. Elle a pris la peluche contre elle et je lui dis ‘mais tu ne vas pas me piquer ma peluche ?’ Elle m’a dit ‘non, je la remplis d’amour comme ça si t’as besoin, t’auras tout mon amour dans le doudou’. Elle ne voulait pas partir…”

Elodie n’a aucune nouvelle de la petite Sarah*, car elle n’a pas le droit de rentrer en contact avec elle.

Depuis 5 mois, Elodie remue terre et ciel pour adopter cette petite puce âgée de 7 ans en ce jour.

On ose parler du bien-être de l’enfant avant tout, mais quel traumatisme pour cet enfant ! Mais ou est le bien-être de l’enfant d’être enlevé en moins de 48h sans pouvoir la préparer psychologiquement ?

Pourquoi la priver d’être adoptée si l’enfant est orpheline ?

Si cette histoire fait un maximum de bruit, Elodie et Sarah* gagnerons ce combat.

N’hésitez pas à faire circuler la Pétition dans la France entière et même au-delà, afin que Sarah* et sa famille d’accueil retrouvent sa joie de vivre, la paix et la sérénité.

Mille merci d’avance pour elles !

* Nom emprunt pour garder l’anonymat de cette petite fille

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