Le texte sur “l’information de l’administration” par l’institution judiciaire adopté à l’Assemblée

Le projet de loi, qui doit surtout protéger, selon les mots de la ministre de l’Éducation, “les enfants des prédateurs”, concerne également les agents territoriaux et les salariés ou bénévoles associatifs.

L’Assemblée nationale a adopté le 8 décembre en première lecture le projet de loi déposé par Christiane Taubira et Najat Vallaud-Belkacem suite à l’affaire de Villefontaine*. Écarté par le Conseil constitutionnel le 13 août 2015 pour un vice de forme, les ministres de la Justice et de l’Éducation nationale ont réussi à glisser le texte dans un calendrier parlementaire serré.

Ce texte définit pour la première fois un cadre juridique précis régissant les modalités de communication entre le ministère public et l’autorité administrative en cas de mises en cause, de poursuites ou de condamnations de personnes exerçant une activité soumise à l’autorité ou au contrôle des autorités publiques.

Le texte, qui doit surtout protéger, selon les mots de la ministre de l’Éducation, “les enfants des prédateurs”, prévoit notamment l’obligation pour le procureur de la République d’informer l’administration des condamnations et de certaines mesures de contrôle judiciaire prononcées à l’encontre des personnes exerçant une activité les mettant en contact habituel avec les mineurs, notamment pour des infractions sexuelles ou commises contre les mineurs.

Une faculté d’information est également reconnue au ministère public au stade de la garde à vue ou de l’audition libre dès lors que les mises en cause résulteront d’indices graves et concordants.

Les exécutifs locaux directement informés

Les personnes concernées sont principalement celles exerçant “des activités, professionnelles ou bénévoles, dans des établissements d’enseignement, dans des lieux accueillant des mineurs relevant du code de l’action sociale et des familles et dans le cadre d’activités physiques, sportives ou socio-culturelles concernant des mineurs”, selon le rapporteur Erwann Binet (PS). Le cadre du texte dépasse donc largement celui des seuls enseignants et de l’Éducation nationale.

En termes statutaires, sont notamment concernés : les agents des trois fonctions publiques, les contractuels de droit privé employés par une structure publique, mais aussi “les personnes de statut privé dont l’activité professionnelle ou sociale est placée sous le contrôle ou l’autorité d’une personne publique, d’une personne morale de droit privé chargée d’une mission de service public ou d’un ordre professionnel”.

Dans le champ des collectivités territoriales, la notice d’impact accompagnant le projet de loi précise que les “autorités administratives” destinataires de l’information par l’autorité judiciaire pourront notamment être : l’exécutif de la collectivité (maire ou président) pour les agents territoriaux exerçant une activité dans un établissement scolaire ou dans un établissement “d’animation, culturel, des sports, social et de santé” relevant de la collectivité ; le président du conseil départemental pour les personnes exerçant une activité dans les établissements ou services prenant en charge habituellement, y compris au titre de la prévention, des mineurs dans le cadre de l’aide sociale à l’enfance.

Bientôt un décret

Un autre article du texte reprend une proposition de loi du député LR Claude de Ganay visant à rendre automatique l’interdiction d’exercer une profession en contact avec des mineurs pour des personnes définitivement condamnées pour faits de pédophilie ou de détention d’images pédopornographiques. Claude de Ganay s’est réjoui que le gouvernement reprenne une proposition de l’opposition car “l’école est un sanctuaire où la violence des hommes n’a pas sa place”. L’adoption de cette proposition de loi par l’Assemblée nationale à l’unanimité des suffrages consacre, pour le député du Loiret, “la victoire du bon sens, au-delà des clivages partisans, dans le seul souci de l’intérêt général et de la protection de l’enfance”.

Par ailleurs, un décret publié dans les tout prochains jours permettra aux administrations de l’État, aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, ainsi qu’aux établissements de santé, sociaux et médico-sociaux de demander le bulletin numéro deux du casier judiciaire pour le contrôle de leurs agents ou de tiers intervenant dans leurs services et exerçant un emploi ou une activité impliquant un contact habituel avec des mineurs, non seulement au moment de leur entrée en fonction, mais, en cas de besoin, tout au long de leur carrière.

Dans un communiqué du 8 décembre les deux ministres “tiennent à saluer l’esprit de responsabilité qui s’est manifesté lors de l’examen du texte en Commission des lois et lors des débats en séance publique, et relèvent avec satisfaction le consensus qui s’est créé parmi les parlementaires autour de ce texte très attendu par les familles comme par les administrations”.

* En février 2015, un directeur d’école et instituteur de Villefontaine (Isère) a été mis en examen pour le viol de onze enfants et est soupçonné de plusieurs dizaines d’agressions. Condamné en 2008 à de la prison avec sursis pour avoir téléchargé des images pornographiques, cette condamnation n’avait pas été communiquée à l’Education nationale, qui avait donc continué à l’employer.

Source: http://www.localtis.info/

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