Chartres | Quinze ans de réclusion criminelle pour le père violeur de ses trois filles et un an et demi avec sursis pour la mère qui ne l’a pas dénoncé.

Lui est jugé pour les viols de ses trois filles, elle pour non-dénonciation de crime. La fille aînée du couple explique qu’elle ne disait « pas non, de peur de le décevoir ».

« J’ai eu deux pères », témoigne la fille aînée du couple, à la barre de la cour d’assises, à Chartres : « L’un était aimant, attentionné et gentil. L’autre nous a fait du mal. »

C’est elle qui, en 2016, a déclenché la procédure qui conduit aujourd’hui son père devant la cour d’assises d’Eure-et-Loir, pour le viol de ses trois filles, alors mineures.

Ces agressions se seraient produites sur une période de seize ans.

La mère est, quant à elle, jugée pour non-dénonciation de crime.

À la barre, la fille aînée explique que depuis l’âge de 6 ans, son père lui aurait imposé des relations sexuelles :

« Ça s’est arrêté quand j’ai eu 14 ans.

Je lui ai dit non.

Il n’a pas insisté. »

Aujourd’hui âgée de 24 ans, elle précise :

« II ne m’a jamais forcée.

Je ne lui disais pas non, de peur de le décevoir. »

Plus tard, en discutant avec l’une de ses sœurs cadettes, elle a réalisé, explique-t-elle, « qu’elles aussi étaient en danger ».

Elle décide de parler, à une psychologue puis aux gendarmes :

« Ma mère était au courant depuis 2015.

J’espérais qu’elle aurait fait quelque chose.

Elle a préféré se taire. »

Son témoignage est plein de retenue.

Entre deux larmes, celle qui vient de terminer de brillantes études explique :

« Je pensais qu’en continuant à me donner à lui, je protégerais mes deux sœurs. »

« Avez-vous eu l’impression de vous sacrifier ? », l’interroge Me Élise Meine, son avocate.

La réponse vient dans un souffle :

« Oui. »

Elle explique aujourd’hui être tiraillée entre deux sentiments :

« Je sais que, dans le fond, j’ai bien fait.

Mais d’un autre côté, j’ai brisé notre famille. »

C’est bien une famille brisée qui est réunie dans la salle de la cour d’assises.

Les trois sœurs sont côte à côte sur le banc des victimes.

Les deux plus jeunes n’ont pas porté plainte.

« On sentait qu’elles voulaient protéger leur père, tout faire pour ne pas briser la famille », explique un enquêteur.

La mère est soupçonnée de ne pas avoir protégé ses enfants :

« Pourtant, pour moi, mes enfants passent avant tout. »

Dans le box des accusés, le père déploie son 1,92 m pour répondre aux questions.

« Comment voyez-vous l’avenir de votre couple ? », interroge le président.

« Je ne sais pas ce que ma femme aura décidé à ma sortie de prison. »

La femme est plus claire :

« Nous ne serons plus ensemble. »

« Ça a permis d’arrêter l’engrenage dans lequel j’étais »

Dès son placement en garde à vue, en 2017, le père de famille a avoué les viols sur ses trois filles.

Les deux parents sont d’accord sur un point.

Tous les deux ont remercié leur fille aînée d’avoir parlé :

« Je regrette de ne pas avoir fait ce qu’il fallait quand je l’ai su », explique la mère de famille.

Son mari, à l’issue du témoignage de sa fille aînée, se lève, les yeux embués de larmes :

« Je m’excuse de ce que je vous ai fait subir. Et je te remercie d’avoir tout dit. Ça a permis d’arrêter l’engrenage dans lequel j’étais. »

Pourtant, rien ne semblait destiner ce père de famille, au casier judiciaire vierge, à être jugé un jour par une cour d’assises.

Les jurés devront peut-être chercher les raisons de ses actes dans son enfance, entre un père « absent et qui ne s’occupait pas de nous », et une mère décrite comme « autoritaire et parfois violente ».

« Dans ma famille, il n’y avait aucune affection », livre l’accusé, après avoir révélé que, lui aussi, aurait été victime de viol par l’un de ses cousins :

« J’avais 11 ans, et ça s’est arrêté quand j’avais 15 ans. »

Elle est condamnée à un an et demi de prison avec sursis.

Son mari, en détention depuis près de deux ans, est condamné à quinze ans.

À sa sortie de prison, il sera astreint à un suivi sociojudiciaire pendant cinq ans, sous peine de retourner cinq ans de plus en prison.

Source : L’écho Républicain & L’écho Républicain

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