Amiens | Deux personnes condamnés à du sursis pour avoir prostitué un dizaine d’adolescentes

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La prostitution était accompagnée de fréquentations d’hommes connus de la justice et violents
Un homme de 33 ans et une femme de 24 ans ont été “condamnés” à du sursis ce 16 avril pour proxénétisme. La majorité des victimes, une dizaine d’adolescentes âgées de 14 à 18 ans, toutes provenant de familles d’accueil ou de foyers de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) n’avaient pas déposé plainte.

Clara, (1) 23 ans, vit désor­mais loin d’Amiens. Et mardi, si elle a fait des centaines de km pour ce procès, c’est qu’elle espère que la sanction que va prononcer la justice «va lui faire du bien»

“Le 1er client que j’ai eu, je n’avais jamais eu de rapport, j’ai eu mal”.

Parce que 7 ans après être tombée dans l’enfer du proxénétisme des cités, la page n’est pas encore totalement tour­née.

«Ça va mieux, mais ce n’est pas encore le grand bonheur», dit son avocat Me Jérôme Crépin.

C’était en 2017, elle avait 16 ans, et ça a duré un mois. En fugue de sa famille d’accueil, elle s’est retrou­vée à Amiens, SDF.

Flavy, 18 ans, lui a proposé de la loger dans son studio, en centre­-ville. Et c’est à partir de là qu’elle a été contrainte de se prostituer.

Flavy lui avait acheté des sous-­vêtements, elle passait les annonces sur le web, recevait les clients, la frappait si elle ne s’exécutait pas. 100 euros le rap­port, 50 euros la fellation, avec un temps limité à 30 mn.

Elle sera emmenée à Lille pour en­chaîner les passes pendant 10 jours.

Elle profitera d’une opportunité pour prendre la fuite.

À cette époque, cela faisait de longs mois que Flavy faisait l’objet d’une attention particulière. Que sa mère se démenait comme elle le pouvait pour la sortir de la spirale infernale. Dès 2015, les autorités savaient et enquêtaient sur des faits de prosti­tution.

Une dizaine de jeunes filles mineures confiées à l’ASE, vivant en familles d’ac­cueil ou en foyer étaient concer­nées.

De longues investigations ont été menées. «On découvre un univers très sombre, ou tout s’accompagne d’alcool, de drogue et de violences impor­tantes», expose la présidente Rae­ckelboom.

Flavy, assistée de Me Stéphane Da­quo, est jugée en tant que victime et auteur de proxénétisme.

Contrairement à ce que soutient Clara, elle nie l’avoir forcée à se prostituer. En revanche, elle main­tient que c’est Moussa, 34 ans, qui l’a initié à cet «argent facile»

Ça avait duré 1 mois, en 2015, quand il habitait rue Lemerchier. Lui, épaulé par Me Guillaume Combes, nie ferme­ment :

«Ça m’est arrivé de faire des bêtises (NDLR: il est actuellement en prison pour vol avec violences), mais je ne suis pas quelqu’un comme ça»

Dans cette affaire, un autre Amiénois de 28 ans sera, lui, jugé en octobre. Son avocat était souf­frant. S’il nie lui aussi, l’enquête a conclu qu’il avait orga­nisé et profité de la prostitution de Flavy & de 2 autres adolescentes à Amiens, et lors de séjours à Cannes & à Lyon.

Bien que les investigations de cette affaire à tiroirs aient été poussées, les autorités s’étaient heurtées à une omerta. La majorité des Amiénoises concernées avaient nié se prostituer, malgré leurs passages dans des hôtels de Longueau ou de région parisienne, et elles n’avaient pas déposé plainte.

Âgées entre 14 et 18 ans, elles fai­saient l’objet d’une surveillance particulière en tant que mineur en danger. Elles l’étaient véritable­ment, puisque la prostitution était accompagnée «de fréquentations d’hommes plus âgés, connus de la justice, violents».

En 2018, l’une d’elles, 16 ans, a été poignardée devant un hôtel d’Aubervilliers (Seine­ Saint­-De­nis).

En 2016, Flavy, avait un jour téléphoné à sa mère, en pleurs, des voix d’hommes autour d’elle. Elle était à Roubaix, ne savait pas exac­tement où et disait être violentée.

À son retour à Amiens, elle n’expliquera rien et fuguera encore de son foyer.

Flavy est maintenant une jeune maman isolée. Le père est en pri­son. Elle parle peu à la barre, dit que ça va.

En condamnant Moussa à 8 mois de prison avec sursis, elle est reconnue comme victime. Elle écope pour sa part de 3 mois de prison avec sursis.

(1) Tous les prénoms ont été modifiés

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