Avignon | Un pédocriminel récidiviste piégé en ligne par des membres de la “Team Moore”

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On l’enfermera quand il passera à l’acte ?
Le trentenaire a été condamné à six mois de prison aménagés sous bracelet électronique et 30 mois avec sursis, après des propositions sexuelles formulées à “Lou”, 11 ans, un profil leurre.

Quelques centaines de messages échangés, et, en quelques jours, l’Avignonnais formule des propositions sexuelles à une enfant.

Baptisée Lou, la fillette a 11 ans.

Aux demandes insistantes du prédateur qui prétend avoir 16, puis 17 ans, elle répond: “J’ai pas du tout envie de ça”, ou “ça fait peur”. Mais il insiste et réitère: “Je veux voir tes seins stp”, “Tu sèches les cours pour qu’on aille baiser”, “Le pied serait de le faire avec d’autres filles de ton âge, en plus de toi”.

Derrière ” Lou”, un profil leurre piloté par l’un des 53 bénévoles de l’association ” La Team Moore ” qui, depuis 2019, piège des pédophiles en ligne.

“Sur les réseaux sociaux, on crée des profils de mineurs de 11 à 13 ans. On utilise des photos de nos visages, que l’on rajeunit via un logiciel. Ensuite, on se comporte comme un enfant. Et surtout, on laisse le prédateur entrer en contact”, explique, sous pseudonyme, Neila Moore, présidente fondatrice de l’association.

L’action des bénévoles s’inscrit dans le cadre légal, en est lien avec les forces de l’ordre et les autorités judiciaires: pas d’usurpation d’identité ou d’atteinte au droit à l’image, les photos transmises étant des portraits retouchés des bénévoles ; pas non plus d’incitation au délit, dans la mesure où ce ne sont pas les faux profils qui prennent l’ initiative du contact.

“Au début, on était montrés du doigt et taxés d’être hors-la-loi. Mais les prises de position publiques de procureurs ont permis d’accélérer les choses. Aujourd’hui, on réclame une collaboration officielle avec les autorités”, poursuit Neila, dont l’association n’est, pour l’heure, pas subventionnée, alors qu’elle “pallie des carences en matière de lutte contre la pédocriminalité en ligne”.

Les échanges s’interrompent dès qu’une proposition sexuelle est formulée, ou une photo à caractère sexuel transmise.

“Lorsqu’on a assez d’éléments, on enquête sur son identité et on effectue un signalement (auprès du procureur de la République ou de la gendarmerie). On ne prend pas le risque d’attendre, en supposant qu’il y a peut-être déjà des victimes.

Dans cette affaire, jugée jeudi, à huis clos, devant le tribunal correctionnel d’Avignon, le traitement des autorités judiciaires a été particulièrement rapide, salue Neila Moore: des échanges démarrés en janvier, un dépôt de plainte en février auprès du procureur, puis, un placement en garde à vue au mois de mars.

Jeudi, il a écopé de 6 mois ferme, aménagés sous bracelet électronique, et 30 mois avec un sursis probatoire pendant 3 ans (avec obligations de soins, interdiction d’exercer une activité en lien avec des mineurs, et inscription au fichier des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes).

La peine, supérieure aux réquisitions formulées par le procureur (30 mois avec sursis), demeure insuffisante pour l’assossiation, alors que le prévenu a déjà été condamné en 2016 pour des faits similaires (corruption de mineur et détention d’images pédopornographiques).

“À nouveau, il va être détenu chez lui, derrière un ordi… On l’enfermera quand il passera à l’acte ?”, regrette Neila Moore. “On milite pour que les peines soient durcies, eu égard aux récidives”

Dans ce dossier, l’expertise psychiatrique a conclu à une altération du discernement du prévenu.

Sous curatelle, il indique souffrir du syndrome ” KBG” (la mutation d’un gène, qui se traduit par un retard global du développement) et avoir agi sous la pulsion.

Il reconnaît les faits et évoque une attirance pour les mineures, sous prétexte de difficultés à entretenir des relations avec des majeures.

Dans son ordinateur, ont également été retrouvées des images à caractère pédopornographique, ” classées par prénom et par ordre alphabétique”.

Un type de dossier malheureusement courant pour l’association, qui effectue des dizaines de signalements par mois (76 depuis le début de l’année, 374 depuis 2019).

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