St-Etienne | Victime de viol, sa famille n’a pas été informée du crime qu’elle a subit
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Pédocriminel En liberté
- 17/02/2021
- 10:00
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Agressions sexuelles pédophiles : une Savoyarde dénonce l’omerta de son ancien club de gymnastique
Juliette Drahi a seulement 11 ans lorsqu’elle affirme être témoin de l’agression sexuelle de son amie Caroline Jacquey par un bénévole du centre d’élite de gymnastique de Saint-Etienne en 1988.
Pour cette résidente chambérienne, la parole doit désormais se libérer pour protéger les enfants.
Briser l’omerta pour protéger les mineurs. Voilà l’objectif de Juliette Drahi, résidente de Curienne, au-dessus de Chambéry en Savoie, qui raconte avoir été témoin d’une agression sexuelle pédophile sur son amie
Les faits, que les victimes remontent à 1988. A l’époque, Juliette Drahi habite à Bourgoin-Jallieu en Isère avec sa mère, et la famille de Caroline Jacquey lui servait de famille d’accueil.
Toutes deux gymnastes au centre d’élite de Saint-Etienne, elles se retrouvent à dormir chez un bénévole du pôle, alors âgé de 46 ans, un soir après un évènement qui se termine tard :
“Il est rentré dans le lit de mon côté, il s’est collé à moi, et il a commencé à me tripoter les seins, en bas…. Quand je me protégeais en haut, il me touchait le sexe, et […] il essayait de rentrer ses doigts dans mes fesses. Je pleurais, et je lui disais, “Non arrêtez, s’il vous plait, arrêtez”, mais je ne criais pas, j’avais peur de réveiller ma copine. À un moment je ne pouvais plus encaisser ça, et je suis sortie du lit, et je suis allée m’enfermer dans les toilettes”.
A côté d’elle dans le lit, Juliette Drahi est sidérée, et comprend que quelque chose ne vas pas, même sans rien voir. Elle finit par rejoindre Caroline dans les toilettes, où elles restent prostrées toute la nuit sur le carrelage.
Après cela, les deux amies rompent tout lien.
Juliette Drahi raconte :
“On a plus jamais pu se regarder avec Caroline. On a perdu le contact du jour au lendemain, alors qu’on était vraiment frangines.”
S’en suit un terrible silence de 30 ans, rompu par un message de Caroline à Juliette à la vue de tous sur les réseaux sociaux.
“Elle m’a écrit “Pourquoi tu n’as rien dit, je ne t’en veux pas”, et j’ai entendu “je t’en veux””.
Car, pendant toutes ces années, Juliette Drahi a gardé le silence, avant de réussir à admettre qu’elle était victime et non fautive.
“Je n’en ai pas parlé à ma famille, pas même à ma sœur jumelle, par honte parce que j’avais été vrament une lâche.”
Des années marquées par une dépression, et un passage de deux ans en hôpital psychiatrique à la fin de l’adolescence.
Caroline Jacquey, elle, avait pourtant parlé. Dès le lendemain, elle déballe à son entraîneuse :
“Tout de cette nuit-là, etc. Et en fait, elle a eu une réaction que je n’oublierai jamais, c’est à dire pas une main sur l’épaule, elle ne m’a pas prise dans ses bras, elle ne m’a pas dit “ça va aller, on va t’aider”. Elle est restée super froide, super distante, elle n’était pas du tout choquée”.
Elle raconte également que sa famille n’a même pas été mise au courant, et que le bénévole est revenu au centre d’élite.
Aujourd’hui, briser cette omerta est devenu le combat de Juliette Drahi. Elle-même devenue psychothérapiste, qu’elle qualifie de “métier de réparation”, elle estime que la parole est la seule façon de se libérer :
“Si on ne parle pas, le traumatisme reste un choc, une impression. Il ne se dénoue qu’avec la parole. En échangeant avec Caroline, je suis passé de la tristesse à la colère. Je suis sortie de la dépression depuis que j’ai parlé”.
A l’époque en revanche :
“Aucun adulte ne nous aidait dans le langage, à mettre des mots sur nos émotions”.
Pour Caroline Jacquey, c’est :
“Une peur inscrite dans la chair, une peur du viol”*.
De son côté, Juliette Drahi estime qu’elle avait :
“Peur de mourir. Je me disais : “Je sais quelque chose, et il va me tuer pour ça”.”
Pire que la peur du danger :
“On savait que plein de gens savaient et nous laissaient dans une situation de mise en danger”.
L’homme ayant continué à être au contact d’enfants et d’adolescents au sein du centre pendant plusieurs années après le signalement que Caroline Jacquey affirme avoir réalisé. Car l’omerta présente au sein du centre d’élite de Saint-Etienne n’était qu’une des diverses faces des violences exercées par l’institution et que racontent les anciennes gymnastes, entre maltraitances et harcèlement.
Juliette Drahi assure :
“On se prenait des coups de corde à sauter, on se faisait pincer, on se faisait insulter. Il n’y avait tellement aucune limite par la peur induite par les adultes” que la fillette “savai[t] que rien ne serait fait”.
Dans un tel cadre, comment dénouer la parole ? A qui faire confiance, lorsqu’une victime n’a pas encore l’âge de mettre des mots sur la violence qu’elle subit, et que l’institution est du côté de l’agresseur plutôt que de l’agressée ? Aujourd’hui, Juliette Drahi veut ainsi s’assurer que l’enquête administrative – déclenchée par une plainte de la fédération française de gymnastique – “ne soit pas pour défendre une institution, mais pour protéger les mineur.es”.
Contacté, l’homme a nié l’entièreté des faits qui lui sont reprochés.
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