La Réunion | Le prédateur multi-récidiviste et le “petit bonhomme” fracassé

Le tribunal de Saint-Pierre

Jean-Pascal Icoute-Revolte, Sainte-Suzannois de 50 ans, a été condamné à 5 ans ferme pour agression sexuelle imposée à Jimmy (*), un garçon de 12 ans déjà “perdu” et”fracassé” par la vie, désormais “broyé” à jamais, selon les mots du Parquet.

La victime n’a pas assisté à l’audience, jeudi.

Aujourd’hui âgé de 15 ans, Jimmy a récemment demandé son placement en hôpital psychiatrique, après plusieurs placements en foyer et en famille d’accueil.

Sa maman, qui s’est constituée partie civile, est présente au procès depuis la métropole par la magie de la visio-conférence.

Pour les besoins de ce dispositif, l’audience se déroule autour d’une grande table ovale, dans une petite pièce à l’étage du tribunal de Saint-Pierre.

Les juges, le substitut du procureur, les gendarmes, le prévenu, son avocat et celui de la partie civile, sont resserrés à un bout de la table, afin d’entrer dans le cadre de la caméra.

Les faits remontent au 27 juin 2015.

Ce jour-là, le jeune garçon est examiné au CHU de Saint-Pierre.

Il explique être monté dans la voiture d’un homme qui l’a emmené chez lui, qu’ils ont bu de l’alcool en regardant des films pornographiques.

Que l’homme l’a masturbé, qu’il l’a ensuite pénétré, avant de lui faire une fellation.

Jimmy est déjà très instable à cette période.

Il souffre de graves problèmes comportementaux.

Placé en foyer, il avait fugué le soir de cette mauvaise rencontre.

Alors que médecins, la police et les enquêteurs cherchent à recueillir des preuves de ses affirmations, la maman de Jimmy a l’idée de faire examiner ses vêtements.

Et c’est à l’intérieur de son caleçon, au niveau de l’entrejambe, qu’on découvrira l’ADN de Jean-Pascal Icoute-Revolte.

L’homme a déjà 10 mentions à son casier judiciaire.

Il a notamment été condamné pour des violences sur mineur de 15 ans et pour agression sexuelle en récidive en 1996.

Lors de son interpellation, en garde à vue et lors de ses premiers interrogatoires, le suspect décide de se taire.

Puis au fil de l’instruction, il finit par donner sa propre version, à nouveau livrée jeudi à la barre, avec un calme déconcertant.

“J’ai vu ce petit bonhomme sur la route du Tampon.

J’étais en voiture, il m’a fait signe.

Je lui ai dit de monter rapidement, parce qu’il y avait des voitures derrière.

Il m’a dit que ses parents étaient décédés et qu’il était à la rue.

Il m’a dit qu’il avait faim.

À la case, j’avais de la bouffe que j’avais préparé la veille.

Je lui ai dit de s’asseoir un instant sur le lit que j’ai installé sous la mezzanine, pendant que je prenais ma douche.

Quand je suis revenu, j’ai vu que mon paquet de cigarettes avait bougé et que des cigarettes étaient sorties.

Mon portefeuille aussi avait été déplacé et un billet de 20 euros dépassait.

Du coup, il y a eu une altercation verbale, entre lui et moi.

Et puis mon téléphone a sonné, alors je lui ai demandé de se doucher, comme il sentait mauvais, pendant que je montais sur la mezzanine pour répondre au téléphone.

Quand je suis redescendu, il s’était rhabillé.

Je lui ai fait un steak haché.

Et puis il m’a demandé de le déposer à Saint-Pierre en voiture, ce que j’ai fait.

Il devait être 20h, ou 20h15”.

Pour expliquer la présence de l’ADN sur le caleçon de Jimmy, M. Icoute-Revolte explique avoir l’habitude de regarder des films pornos en se masturbant sur ce petit lit sous la mezzanine, après le déjeuner, ce qu’il avait fait ce jour-là.

Il est donc possible que Jimmy se soit assis sur une trace récente de sperme, selon lui.

“Mais comment expliquez-vous, Monsieur, que cette trace se trouve à l’intérieur du caleçon et au niveau de l’entrejambe’”, interroge le substitut du procureur Benoît Bernard.

La question reste sans réponse.

Et quand Nathalie Pothin, l’avocate de la partie civile, tente de l’interroger sur sa condamnation pour agression sexuelle en récidive, il y a plus de 20 ans, le prévenu rétorque qu’il a cherché à “effacer les moments douloureux”, et qu’il n’en a pas souvenir.

Un comportement d’autant plus préoccupant au vu des rapports d’experts, qui font état d’une personnalité :

“égocentrique, peu encline à l’autocritique”,

“d’un sujet peu anthentique et rendant tout suivi psychologique aléatoire”

et d’un profil “inquiétant en matière de sexualité”.

Bruno Raffi, l’avocat de M. Icoute-Revolte, a mis en avant les différents mensonges du jeune garçon et sa personnalité instable.

“L’enfant a raconté à plusieurs reprises que ses parents étaient morts, ce qui est faux.

Il a donné trois versions différentes” de l’agression.

Aussi, l’ADN retrouvé sur le caleçon est le seul élément à charge du dossier, selon lui.

Le viol a été requalifié en agression sexuelle au cours de l’instruction.

“Devant une cour d’assises, ce genre de dossier ne tient pas”, a-t-il plaidé.

Mais pour le parquet, nous avons bien affaire à un «prédateur sexuel qui a choisi un gamin perdu, fracassé par la vie».

Le tribunal a finalement suivi la réquisition du parquet :

5 ans de prison ferme puis 4 ans de suivi socio-judiciaire, avec obligation de travailler et d’indemniser les victimes.

Il sera aussi inscrit au fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles (FIJAIS).

(*) le prénom de la victime a été modifié

Source : Clicanoo

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