Pradines | 15 mois avec sursis pour les agressions sexuelles du masseur
- La Prison avec sursis... C'est quoi ?
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- 26/02/2024
- 20:12
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Ce jeudi 22 février 2024, K., âgé de 53 ans, propriétaire d’un institut de bien-être « A fleur de peau » avec son épouse, a été appelé à la barre du tribunal correctionnel de Cahors, pour répondre d’agression sexuelle à l’encontre de 13 personnes ; des accusations que le prévenu a toujours contestées, y compris à l’audience.
Les faits reprochés se seraient déroulés au cours de l’année 2022.
13 femmes, 12 adultes et une mineure de 15 ans, se sont plaintes des pratiques du masseur.
Cet institut est basé à Pradines, près de Cahors.
Il s’agit d’un centre privatisé, avec sauna, hammam, jacuzzi et salle de massages…
Elle se retrouve tétanisée par les massages subis…
Le président Philippe Clarissou déclare:
« Tout part de la plainte déposée par Mme B, 27 ans, qui explique au commissariat de police de Cahors, ce qu’elle vient de subir à l’institut de bien-être A fleur de peau »
Cette dame, s’était vu offrir une Carte cadeau pour une séance de massage bien-être.
Elle explique qu’après s’être déshabillée, elle s’est sentie gênée en se retrouvant nue, sans serviette pour dissimuler ses parties intimes.
Plus encore, après s’être allongée sur la table de soins, elle indique qu’elle ne s’attendait pas à recevoir des massages sur le ventre.
K. commençait à la pointe des pieds et remontait jusqu’à la tête. Classique !
Mais là où la pratique était inattendue pour Mme B., c’est au niveau du passage sur les fesses, qui, selon ses dires, se transformait en caresses, ce qui avait pour effet « de la crisper ».
Mme B. affirme qu’elle a été littéralement sidérée de recevoir de tels massages.
Ensuite, K. se serait attardé en passant ses mains entre les cuisses de Mme B. et en effleurant son sexe.
Elle assure que K. lui a aussi fait des caresses sensuelles au niveau des seins.
Enfin, elle aurait senti que K. était en érection lorsqu’il se frottait à elle, tout en pratiquant les massages…
Mme B. aurait été tétanisée suite à tous ces massages déplacés.
Les enquêteurs découvrent 13 plaignantes
À l’issue de cette première plainte, les enquêteurs ont pris contact avec 164 clientes de cet institut, dont 13 d’entre elles ont confié avoir subi les agissements de K. sans avoir osé porter plainte.
Au fur et à mesure que le président Clarissou effeuille le dossier, il apparaît des similitudes entre les réactions de ces femmes…
Toutes font état de la gêne qu’elles ont endurée, chacune pointant un aspect particulier.
« Lorsque j’ai pris rendez-vous, j’ai eu une femme au bout du fil, et j’ai été surprise que ce soit un homme qui pratique les massages ! » précise l’une d’elles.
Toutes décrivent une situation anormale avec des attouchements à caractère sexuel, « subis par surprise ».
Le président demande au prévenu de préciser les caractéristiques du type de massage qu’il pratique.
K. explique qu’il s’agit de massage Abhyanga ; un massage à l’huile de sésame réputé pour ses vertus relaxantes ; un massage complet qui traite le corps dans sa globalité.
Il est précisé que ce massage se reçoit nu ou avec un string jetable fourni.
Devenu masseur en reconversion professionnelle
Suite à une reconversion professionnelle, K. pratique les massages bien-être depuis une dizaine d’années.
Il a suivi plusieurs formations, lui permettant de procéder au moins à 5 techniques de massage énergisant ou relaxant : Abhyanga, Ayurvédique, Californien, Suédois, Thaïlandais…
K. répond pied à pied aux questions du président et met en avant le protocole du massage, qu’il suit à la lettre.
Il explique avec force détails et même en gestuelle, la pratique de ses massages.
« Le protocole est une chose, le consentement des personnes en est une autre », s’exclame le président.
K. relève le fait que les clientes se sentent tellement bien, notamment en sortant du sauna, qu’elles ne prêtent pas attention à ce qui leur est dit.
Le président veut des précisions. Il questionne :
– Avez-vous obligé ces femmes à se déshabiller ?
– À aucun moment ! répond K.
– Avez-vous pratiqué des massages au niveau des seins ?
– Selon le protocole, je contourne les seins, c’est exactement ce que je fais ! assure K.
Quant au fait que ces dames se soient retrouvées nues, K. soutient que 9/10 des femmes qui fréquentent l’institut ne se couvrent pas, alors que dans la salle de soins, il y a trois serviettes mises à leur disposition.
Avant de donner la parole à Me Émilie Geffroy, représentant les parties civiles, le président Clarissou évoque trois faits antérieurs à cette affaire, pour lesquels K. avait été mis en cause, avant que les plaintes aient été classées sans suite, faute d’infraction insuffisamment caractérisée.
Pour avoir touché des parties interdites !
« À fleur de peau, c’est bien ce qu’on lui reproche, des effleurements, des caresses, sur des parties interdites ! » déclare Me Geffroy.
L’avocate dénonce véhémentement les massages pratiqués par K. et fait valoir les plaintes déposées par 13 victimes.
Selon elle, K. se sert de cette profession, pour assouvir une pulsion.
Elle soutient que toutes ces femmes se sont senties salies et elle demande des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.
Les sommes pour chacune des plaignantes oscillent en fonction des circonstances, entre 800 et 2000 €.
« Ne pas mélanger les genres ! »
Pour Mme Brigitte Lanfranchi, magistrate honoraire, substitute générale, la question est de savoir si K. a ou non adopté des gestes qui n’ont rien à voir avec les massages auxquels avaient souscrit les femmes qu’il a eues entre ses mains.
La magistrate estime que la gestuelle de K. constitue une agression sexuelle.
Elle requiert à son encontre une peine de 15 mois de prison avec sursis et interdiction d’exercice professionnel dans le domaine du massage, pendant 5 ans et interdiction de toute activité auprès de mineurs, avec inscription au fichier des délinquants sexuels…
« Je demande le bénéfice du doute ! »
Me Laurent Belou, avocat de la défense, observe que son client n’a pas varié dans ses déclarations, niant toute volonté de porter atteinte à l’intimité de ses clientes.
L’ancien bâtonnier regrette que n’aient pas été entendues d’autres clientes sur les 164 contactées.
L’avocat aurait souhaité que puisse être comparé le ressenti entre les clientes qui ont porté plainte et les autres.
Me Belou se plaint que ne soit pas pris en compte l’élément intentionnel de K. qui dans sa pratique des massages affirme n’avoir jamais eu conscience de commettre des atteintes sexuelles.
L’avocat s’étonne de ce type de massages intégral sur corps nu.
« C’est tout de même particulier ; on est dans un autre monde lorsqu’on accepte ce type de massage ! » s’exclame-t-il.
L’avocat hausse le ton pour rappeler que ce n’est pas son client qui a déshabillé ces femmes.
A ses yeux, le temps va arriver où ce type de massage ne sera plus possible de la part d’un homme.
L’avocat martèle le fait qu’il y a une grande part de ressenti dans ce type de massage.
Il cite le cas de Mme Rey Salmon, pédiatre et médecin légiste, visée par une plainte pour agression sexuelle lors d’un examen gynécologique en 2019, alors « qu’elle est connue pour être la toute première pédiatre légiste de France, à l’origine de l’ouverture de la première unité médico-judiciaire pour mineurs ».
Selon maître Belou:
« il n’est pas sûr que K. ait eu conscience de commettre une infraction pénale, alors qu’il est écrit sur l’affiche à l’entrée de l’institut».
« Chaque partie du corps est soigneusement massée »…
« On sait où on va, c’est écrit ! » s’exclame Me Belou.
L’avocat plaide la relaxe de K.
Le tribunal condamne K.
Après en avoir délibéré, le tribunal a reconnu K. coupable des faits pour lesquels il est poursuivi et l’a condamné à :
– 15 mois de prison avec sursis,
– inscription au Fijais (Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes),
– 5 ans d’inéligibilité,
– 5 ans d’interdiction d’exercer une activité le mettant en lien avec des mineurs,
– 5 ans d’interdiction d’activité professionnelle dans le domaine du massage,
– à verser 6650 € réparti entre les différentes victimes qui avaient sollicité des dommages et intérêts.
Le tribunal a estimé que les massages ont été commis avec arrière-pensée d’ordre sexuel et qu’il n’était pas possible d’agir ainsi sans le consentement des victimes, ce qui constitue une agression sexuelle.
K. dispose d’un délai de 10 jours pour interjeter appel.
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