Saint-Nazaire | La fillette subissait les agressions sexuelles du compagnon de sa grand-mère

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Pédocriminel En liberté

« Un dérapage comme cela, ça peut arriver à tout le monde »
Une quinzaine d’années après les faits, un sexagénaire a été condamné pour agressions sexuelles sur une de ses petites-filles, alors qu’elle était en vacances chez lui.

Elle a aujourd’hui 25 ans. Ce mardi 7 novembre 2023, lorsque la jeune femme s’avance en pleurs à la barre du tribunal correctionnel de Saint-Nazaire pour décrire les agressions sexuelles que lui a fait subir l’ex-compagnon de sa grand-mère (aujourd’hui en Ehpad), elle ose regarder ce dernier, et lui remémorer ses agissements et les souffrances qui en ont découlé.

Elle n’a porté plainte qu’en mai 2021.

En 2007, la maman reste veuve avec ses deux filles. Depuis toujours, les vacances d’été des petites-filles se passent à la ferme du prévenu située dans le pays de Retz, aujourd’hui âgé de 64 ans, où lui et sa compagne accueillent également des fillettes du Secours catholique.

Les faits se sont arrêtés, lorsque, ayant grandi, elle a pu lui tenir tête en lui lançant : « Ta gueule ! »

« Obnubilé par le sexe », témoigne la sœur de la victime

Lors du procès, le président, Stéphane Benmimoune, décrit trois scènes.

Alors qu’elle a sept-huit ans, celui qu’elle considère comme son grand-père, lui demande de s’asseoir sur ses genoux et se livre à des actes que la décence ne nous incite pas à décrire.

Une autre fois, dans le grenier il baisse son pantalon et celui de sa victime et fait des « choses qu’elle ne comprend pas ».

Le président poursuit :

« Vous étiez entré dans sa chambre et vous la caressiez sous son pyjama lorsqu’elle s’est réveillée ».

Sa sœur en avait été témoin. Entendue, cette dernière décrit un homme « obnubilé par le sexe », mais dit ne pas se souvenir d’actes sur elle.

« C’est notre secret »

À chaque fois, l’adulte disait à l’enfant de ne surtout pas en parler :

« C’est un secret entre nous ».

À la barre, il dit qu’il l’aimait beaucoup, que c’était « son rayon de soleil », lui qui n’a pas eu d’enfant.

Parlant beaucoup de lui, évoquant l’incendie de sa ferme, le cancer de son frère avec qui il était associé, comme éléments déclencheurs, il déclare :

« Elle m’a fait du bien quand elle m’a dénoncé ».

Mais il ne reconnaît pas tout, loin de là, répétant à plusieurs reprises :

« Ce n’est pas vrai ».

Il admet avoir, une dizaine de fois, frotté son sexe sur les fesses nues de la fillette. Se disant « révolté envers lui-même », il ajoute :

« Avant, aux yeux de la loi, je ne reconnaissais pas une agression sexuelle, depuis que j’ai un suivi, oui ».

« Un dérapage comme cela, ça peut arriver à tout le monde »

Il heurte toutefois les juges lorsqu’il ajoute :

« Un dérapage comme cela, ça peut arriver à tout le monde ».

Ce qui ajoute à « la banalisation » relevée par le président.

À maintes reprises, le retraité affirme :

« J’aurais voulu lui parler… »

La jeune fille a porté plainte le 22 mai 2001, sachant que 20 jours plus tôt, elle avait appelé le prévenu au téléphone, et enregistré la conversation.

Le président la fait écouter à l’assemblée.

Tous les visages, et notamment ceux des élèves de première venus assister à l’audience, se glacent.

Aux « Tu te rends compte de ce que tu m’as fait ? Tu as tout gâché… », il répond :

« Je suis tellement proche de toi… je ne pensais pas te faire du mal à ce point-là ».

Aux interrogations du président, il rétorque:

« Je ne peux pas revenir en arrière ».

« Une maman qui s’en veut »

Comme le prévenu serine « je ne lui en voudrai jamais », Me Blanchet s’emporte :

« Et pour cause, elle est victime ».

Il est surpris d’entendre également :

« Ce n’était pas moi, c’était un autre ».

L’avocat lui répond :

« Non, c’était bien vous, et vous allez en répondre ».

L’avocat de la jeune fille défend aussi la maman, qui, présente à l’audience, essuie discrètement ses larmes :

« Elle s’en veut. Sa fille fuyait ses câlins, elle pensait que son comportement avait changé du fait du décès de son papa, elle était loin de se douter de cela ».

Après avoir entendu les déclarations de la jeune fille, ses cauchemars, son rapport difficile avec son corps, la procureure, Marie Deschamps, réagit vivement :

« Cette jeune fille a supporté ce poids pendant des années, elle a vécu avec ces faits et subi un lourd traumatisme ».

Elle s’étonne que le prévenu n’ait mis en place des soins qu’en mars 2023, alors que les faits ont été dénoncés en 2021.

Trois ans de prison dont deux avec sursis

Tâche difficile que celle de Me Maud Lesève, avocate de la défense, qui précise d’abord que son client :

« Ne lui en veut pas… d’avoir eu le courage de parler ».

Elle n’adhère pas à la notion de « banalisation » et revient sur la période difficile traversée par le sexagénaire. Elle souligne « son courage d’assumer en partie des faits anciens », et juge la peine requise excessive.

Cette peine de cinq ans, dont trois ans avec sursis probatoire, le tribunal l’a ramenée à trois ans, dont deux avec sursis probatoire de deux ans, pour une période de faits retenue entre 2006 et 2008.

Le sexagénaire a interdiction de tout contact avec la jeune fille et sa maman. Il devra verser 1500 € à la maman, 8000 € à la victime pour leur préjudice moral, et 1500 € de frais de justice.

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