Disparition d’Estelle Mouzin | Michel Fourniret entendu par la juge Sabine Khéris

Le tueur en série est entendu ce mercredi par la justice dans le dossier Estelle Mouzin, disparue en 2003. Les confidences de son ex-épouse et de nouveaux témoignages ont relancé la piste Fourniret.

Des dépositions récentes laissent entendre que Michel Fourniret aurait pu repérer les lieux avant la disparition d’Estelle Mouzin. LP/Olivier Lejeune

 

Une petite phrase pour tout changer, et faire vaciller un monstre de froideur. Quelques mots sibyllins pour briser la logique silencieuse d’un tueur qui ne se livre jamais, n’avoue que lorsqu’il est acculé. Jeudi dernier, Monique Olivier a craquelé la défense de Michel Fourniret dans le dossier Estelle Mouzin.

Depuis la disparition de la fillette de 9 ans, le 9 janvier 2003 à Guermantes (Seine-et-Marne), jamais le septuagénaire, longtemps suspecté, parfois entendu, n’a laissé entrevoir la possibilité d’aveux. Mais sa situation a changé.

Le 21 novembre, Monique Olivier a parlé, détricoté l’alibi de son ex-mari. Ce fameux coup de fil du 9 janvier à 20h08 depuis Sart-Custine (Belgique), qui rendait impossible la présence de l’Ogre des Ardennes en région parisienne, Monique Olivier a avoué l’avoir passé à sa demande.

Entendu ce mercredi par la juge Sabine Khéris pour un interrogatoire de première comparution, Fourniret va donc devoir s’expliquer sur son emploi du temps ce funeste jour d’hiver. Il risque une nouvelle mise en examen.

« C’est désormais Monique Olivier qui donne les cartes »

Reste à savoir désormais si le tueur, déjà condamné pour huit meurtres, va permettre à la justice de « retrouver Estelle », souhait le plus cher de la famille Mouzin.

« C’est désormais Monique Olivier qui donne les cartes, et ça, Michel Fourniret ne le supporte pas, estime le psychologue Jean-Luc Ployé ( auteur de « L’approche du Mal », avec Mathieu Livoreil, aux éditions Grasset ), qui a expertisé le couple à de nombreuses reprises. Il devrait donc tenter reprendre la main. À sa manière, sans donner toutes les réponses. »

Dans toutes les affaires judiciaires le mettant en cause, l’Ogre des Ardennes « ne s’est confié que lorsque sa compagne avait donné des clés aux enquêteurs », insiste Me Richard Delgenes, l’avocat historique de Monique Olivier.

C’est elle qui, après 120 interrogatoires auprès des policiers belges, avait reconnu les meurtres pour lesquels le couple a été condamné à perpétuité en 2008. C’est aussi elle qui admettra l’implication du couple dans le meurtre de Farida Hammiche.

« Sa compagne le met en difficulté, il a de bons rapports avec la juge, c’est effectivement la meilleure configuration pour qu’il parle », estime Me Didier Seban, l’avocat d’Eric Mouzin.

Pour cela, il faudrait encore que la mémoire de Michel Fourniret, parfois sélective, ne lui joue pas des tours.

Le tueur en série est, depuis plusieurs années, atteint de la maladie d’Alzheimer.

« Il alterne les périodes de lucidité et le flou total », confie un enquêteur qui l’a croisé il y a peu.

« Lors de son procès en 2018, il avait des absences », se souvient Me Grégory Vavasseur, son avocat aux assises.

« Je me souviens être allé le voir dans les geôles du tribunal, il ne savait plus où il était. Et à cet instant, il n’avait aucun intérêt à faire semblant. »

« Des témoignages faisant état de la présence de Fourniret à Guermantes »

La dégradation de l’état de santé de Michel Fourniret explique d’ailleurs l’empressement de la juge Khéris à entendre le tueur.

« Il faut aller vite, il a vieilli », confirme Me Delgenes.

Conscient de cette personnalité complexe, de ces trous de mémoires – surjoués ou non – Eric Mouzin, le père d’Estelle, avoue « ne pas attendre grand-chose de cet homme. Bien sûr, les éléments livrés par Monique Olivier sont intéressants, mais j’attends surtout de l’enquête… Même si du temps a été perdu, j’ai confiance… »

Les confidences de Monique Olivier ne sont pas les seuls atouts de la juge Khéris, qui a confié la poursuite des investigations aux gendarmes de la section de recherches de Dijon.

« La juge a des témoignages faisant état de la présence de Fourniret à Guermantes, soulignent des sources concordantes. Bien sûr c’est à prendre avec des pincettes après 16 ans, mais ça semble sérieux. »

Ces dépositions récentes laissent même entendre que Fourniret aurait pu repérer les lieux pendant deux jours avant la disparition de la fillette le 9 janvier 2003.

Selon les conseils de la famille Mouzin, « les éléments sont réunis pour incriminer Fourniret, ce que nous demandons de plusieurs années ».

Source : Le Parisien

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