Caudry | De 14 à 18 ans de réclusion criminelle pour tortures et viols sur une fillette

non

Un ménage à trois aux assises du Nord pour tortures, viols et maltraitance sur une enfant
Trois Caudrésiens sont mis en examen pour viols, maltraitance, actes de torture et barbarie sur une enfant. Un procès de sept jours s’est ouvert aux assises du Nord dès le mercredi 21 septembre. L’ensemble des accusés ont reconnu les faits.

Trois Caudrésiens, tous parents et vivant dans le même foyer, accusés d’actes de torture et de barbarie, viols et agressions sexuelles, ainsi que de maltraitance commis à l’encontre d’une fillette de 2012 à 2016.

Parmi le trio, la mère de Louise1, cette enfant métisse victime de sévices jusqu’à ses cinq ans.

Elle et sa fille étaient suivies par les services sociaux depuis 2011.

Tout démarre lorsque le père de Louise, qui en avait la garde, est interpellé par des traces de coups dès 2013, au retour d’un week-end chez sa mère2.

« Ma compagne de l’époque changeait sa couche, lorsqu’elle m’a dit qu’il y avait quelque chose de pas normal ».

Une plainte est déposée, des certificats médicaux produits. La procédure est classée sans suite.

Le père, lui, poursuit ses démarches auprès du juge aux affaires familiales, où l’on s’inquiète de violence.

Les révélations viennent des trois accusés, lorsqu’ils sont placés en garde à vue, puis mis en examen en 2018.

Les investigations démontrent que la mère de Louise s’est domiciliée chez un couple de Caudrésiens, parents de trois garçons3 .

Un «  trouple » s’y est formé. Là-bas, la fillette y aurait subi des actes d’humiliation et «  violences extrêmes » comme des «  fessées mitraillette » ou des douches froides.

Elle aurait été projetée contre un mur, poussée dans les escaliers de la gare de Lille, sa tête plongée dans les WC.

Visée par des surnoms racistes, elle aurait été «  frottée avec de la javel pour qu’elle devienne blanche ».

Des viols et agressions sexuelles, avec complicité, sont également reconnus.

Certains faits ont été attestés par la grand-mère, et le frère de l’homme du trouple, ainsi qu’un des compagnons de la mère de la petite fille.

Le 7 décembre 2021, eux et deux autres témoins ont été condamnés pour non-dénonciation par le tribunal de Cambrai.

Le père de l’accusé comparaîtra en janvier 2023 pour agressions sexuelles sur Louise.

« Une affaire qui illustre parfaitement la misère sociale avec une famille recomposée laissée pour compte »,

commente Me Dominguez, avocat de la mère des deux garçons.

Celle-ci est « dans le repentir, elle a beaucoup travaillé sur elle ».

Le compagnon du « trouple » embrasse la même posture,

« c’est quelqu’un qui a reconnu les faits et a contribué à la manifestation de la vérité »,

indique son conseil Me Maxence Denis.

La mère de Louise et le couple risquent jusqu’à trente ans de réclusion criminelle.

1. Prénom d’emprunt

2. Nous ne sommes pas parvenus à joindre Me Demory et Me Dartigeas, respectivement avocats de la mère de Louise et des trois mineurs.

3. Deux des enfants mineurs sont parties civiles dans ce dossier, victimes de maltraitance pendant la même période de prévention.

 

Une pré-adolescente sans soutien psychologique à la veille du procès

L’échange se tient dans un hall d’immeuble, pour protéger Louise1.

En fin de semaine dernière,

« son avocat est venu la chercher. Il a posé des questions, elle a bien répondu, explique son père.

Le lendemain, elle n’a pas écouté en classe, et elle a fait tomber le travail d’un autre élève. »

Un comportement inhabituel pour l’enfant, aujourd’hui âgée de 11 ans et scolarisée en classe de sixième.

« Elle est très intelligente. J’ai pris rendez-vous avec la principale [lundi 19 septembre]. [Louise] était contente que je le fasse. »

L’idée étant de sensibiliser le personnel au dossier particulier de l’enfant pour l’accompagner dans sa scolarité.

À la veille du procès, où elle devra témoigner, la pré-ado n’a bénéficié d’aucun soutien psychologique.

La famille n’en a pas trouvé.

« Il lui faut un psychologue spécialisé pour lui parler de sexe.

Après il sera trop tard », s’inquiète le père qui « veut qu’elle soit bien dans sa tête ».

Louise ignore même le physique de sa mère, en raison d’une interdiction de contact.

Le suivi psy, « ça a été demandé à chaque fois devant le juge des enfants.

Quatre ans que j’essaie d’en trouver par le biais des services, et il y a eu le Covid »,

atteste son conseil Me Giraud.

Elle aborde la puberté, ça va être une période difficile pour elle. »

La famille, aux ressources limitées, ne peut se tourner vers le privé.

Le père n’assistera pas à l’intégralité des débats, redoutant de terribles révélations.

Louise n’y viendra que pour sa déposition.

« On ne peut pas avoir de la colère à vie. Si j’ai cette haine, je vais leur sauter dessus.

Tout ce que je veux, c’est que ma fille aille bien, et travaille bien à l’école. »

Louise ambitionne deux carrières : devenir sage-femme « ou parler au nom des enfants ».

Aux quatrième et cinquième jours du procès aux assises, des experts psychologues et psychiatres ont abordé les personnalités du ménage à trois caudrésien pour tenter de comprendre comment ces dérives extrêmes ont pu arriver.

Le foyer de ce ménage à trois, c’est « une cour de maternelle, avec quelque chose d’infantile et d’immature sur le plan affectif.

Avec l’enfant qui dérange car il demande aux adultes de poser des limites et de dire ce qui n’est pas bien »,

dessine une experte.

Des sévices minimisés par trois adultes du début de l’enquête jusqu’à l’audience.

Un cocktail explosif de trois personnalités sans troubles mentaux ou pathologies identifiés, créatifs dans leur rôle de tortionnaires, la faisant même participer à une « orgie ».

 

Du plaisir à faire souffrir

D’abord, la génitrice de Louise (1), elle-même victime des violences de sa mère et abusée par son père.

En témoigne son comportement d’enfant sexué et agressif pendant ses placements en foyers.

Un lien « sadique et masochiste contre elle-même » serait né en raison de son « incapacité à gérer et différencier les émotions ».

Elle a reproduit sur sa fille la violence subie au même âge, lui infligeant douches froides et coups peu après sa naissance.

Consciente de « l’inadaptation et de la transgression du comportement », elle vivrait son incarcération comme « une injustice », trop envahie par sa propre souffrance d’enfant pour ressentir de l’empathie envers sa fille.

Un « lien malsain et toxique » l’aurait lié au couple, sans qu’elle essaye de s’extraire alors qu’elle en avait les moyens.

L’inceste plane aussi dans l’enfance de G.B. homme de ce triolisme, avec un père condamné et deux sœurs victimes.

Le Caudrésien, qui dit regretter sa rencontre avec J.T., aurait accru la consommation d’alcool et les coups sur ses deux compagnes au fil des ans.

Violences sur ses fils (commises aussi par J.T.), tortures et abus sexuels, il reconnaîtra une excitation pour la fillette, «  une proie facile par sa proximité ». Il en éprouve peu de culpabilité, désireux d’officialiser son union avec M.S.

Cette dernière, définie comme une mère auto-centrée sur elle-même avec une « débilité légère », subissait le ménage à trois.

Influençable, elle se serait pervertie au contact de son compagnon. Ne supportant pas J.T., cette « fausse naïve » a violé et torturé Louise par vengeance, par plaisir et par racisme.

Incapable d’empathie pour l’enfant puisque haïssant les noirs.

Une experte a souligné l’importance de la décision de justice, puisqu’elle rétablira la gravité et l’interdit des faits sur le plan symbolique.

Nécessaire pour aider les jeunes victimes aujourd’hui détruites à s’en sortir, et amener leurs bourreaux à accéder à la culpabilité.

Née en 2011 à Cambrai, elle est élevée par sa mère J. T., après sa rupture avec un immigré congolais.

Celui-ci s’inquiète rapidement de signes de maltraitance sur leur enfant. Dès 2012, il enchaîne plaintes, signalements, saisies du juge aux affaires familiales avec l’appui de la famille de son ancienne compagne.

Cette dernière, violentée par sa mère et pervertie par son père, est en difficulté pour s’occuper d’elle, accompagnée de façon massive par des intervenants sociaux.

 

Pas d’appel de la défense

En 2012, aussi, elle rencontre G. B. sur Internet. Lui-même élevé dans une famille incestueuse, il fait régner un climat pernicieux et violent dans son foyer.

M. S., particulièrement influençable, se voit imposer un triolisme avec une femme qu’elle n’aime pas.

Les trois parents abusent sexuellement de la fillette, qui subit douches froides, tête dans les WC, simulation de noyade, maintien éveillée la nuit ou encore pluies de coups.

Leur « souffre-douleur », disent-ils en garde à vue, y reconnaissant un certain plaisir.

Un «  jouet, objet d’expérimentation, cobaye  », a résumé l’avocate générale lors de ses réquisitions, devant des proches de J. T et G. B., depuis condamnés pour non-dénonciation et dont Me Giraud, conseil du père, s’est émue de la « lâcheté ».

La délivrance survient en 2017 grâce au rapport détaillé d’une enquêtrice sociale, demandé par un juge aux affaires familiales régulièrement sollicité par le père de la fillette.

Les gardes à vue mèneront aux aveux fournis des trois Caudrésiens.

Pas de révélation ou d’émotion particulière lors des sept jours d’audience si ce n’est la confirmation de leur active participation.

La cour d’assises du Nord a condamné G. B. à 18 ans de réclusion criminelle(2), assorti d’un suivi socio-judiciaire de 5 ans, sa compagne à 14 ans, avec suivi socio-judiciaire de 3 ans, et la mère de la fillette à 16 ans, avec suivi socio-judiciaire de 5 ans.

Les trois ont été déchus de l’autorité parentale sur l’ensemble de leurs enfants.

Des peines plus légères que celles de 16 à 23 ans requises par le ministère public (qui ne s’est pas exprimé sur un appel), et énoncées en présence des familles des trois condamnés.

1. Prénom d’emprunt 2. Les suivis socio-judiciaires comprennent des injonctions de soin (à l’exception de J.T.), d’exercer une activité professionnelle ou une formation, des dédommagements, ainsi que les interdictions de contact entre co-accusés et les victimes, et d’exercer définitivement toute activité professionnelle ou bénévole impliquant des contacts avec des mineurs. Tous sont inscrits au fichier des délinquants sexuels.

Source(s):