Agen | Six ans de prison pour le prédateur multirécidiviste

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« Je voulais tout effacer car j’ai compris » dit-il à la barre, pensant pouvoir convaincre
« Il faut que ce monsieur sache que les enfants sont des enfants pour de vrai, qu’ils sont enfermés des week-ends, qu’ils sont des victimes. Les pornographes vont de plus en plus loin face à la demande. Et les victimes sont de plus en plus jeunes. »

En se retournant vers la présidente de la Mouette (protection de l’enfance) Annie Gourgue, Stéphane, la quarantaine, a eu ces mots terribles qui finalement ont fait sourire :

« je veux bien entrer dans votre association Madame pour vous aider dans ce que vous faites. »

Un comble.

Quelques minutes après, jugé en comparution immédiate, il a écopé de six ans de prison ferme, assortis d’un suivi sociojudiciaire pendant six ans, d’une double interdiction : pas d’activité professionnelle en lien avec les mineurs, et pas de voyage à l’étranger pendant cinq ans. Pour importation, détention, et consultation habituelles d’images pédopornographiques.

Enquête poussée

Les policiers du SPJ (service de police judiciaire) d’Agen ont été chargés de l’enquête, dans le cadre d’un coup de filet national au sein du monde sordide des pédopornographes à l’automne.

Le 15 novembre, le dénommé Stéphane est placé une première fois en garde à vue. Son matériel informatique est saisi, et le SPJ y retrouve la trace d’un petit millier de documents photos et vidéos, d’échanges sur l’application Whatsapp.

Ils constatent aussi que les recherches par mots-clés sont fréquentes et prennent tous la même direction : les jeunes filles mineures âgées, souvent âgées entre 5 et 12 ans. Le contenu des vidéos est innommable.

Ils s’intéressent aussi au passé récent ou ancien de cet Agenais.

Il a été condamné en 2014 puis en 2017 pour des agissements identiques. Ils découvrent aussi qu’il s’est marié au Burkina-Faso avec une Burkinabe, et que son attirance pour les fillettes et ados de ce pays est marquée. Il laisse une trace judiciaire au Burkina Faso, déjà.

Mercredi, alors qu’il a pris un billet d’avion pour y retourner, il est interpellé avant son départ, et de nouveau placé en garde à vue dans les locaux du commissariat d’Agen.

Ce vendredi, pendant trois heures, les juges du tribunal correctionnel n’ont pas fait l’impasse sur les détails sordides des échanges qu’il pouvait avoir sur les réseaux sociaux.

L’enquête des policiers du SPJ révèle également qu’il avait tenté de rejoindre les rangs d’une église évangéliste protestante d’Agen. Le pasteur lui a demandé dans un premier temps de s’écarter des jeunes filles pouvant la fréquenter, avant de lui demander de ne plus y venir. Son profil avait déjà inquiété d’autres responsables de ce culte dans l’Agenais.

« c’est dégueulasse, assumez ! »

Passé au grill des questions des magistrats, Stéphane est resté évasif, comme absent des débats et semblant hors-sol face aux accusations.

Le 15 novembre dernier, à l’issue d’une garde à vue dont il connaît les raisons, il rachète ordinateur et téléphone portable.

Les policiers retrouvent une nouvelle fois la trace de fichiers pédopornographiques, en moins grand nombre.

« Je voulais tout effacer car j’ai compris » dit-il à la barre, pensant pouvoir convaincre. « Je ne suis pas un prédateur sexuel. »

Le président d’audience hausse le ton :

« Vous nous prenez pour des imbéciles. C’est n’importe quoi ! Vous êtes un prédateur, c’est dégueulasse. Assumez ! »

L’expertise psychiatrique confirme.

« Dépression psychiatrique avec tendance pédophilique », « carences affectives »

, dit l’expert.

La Mouette, association de protection de l’enfance, s’est constituée partie civile.

« Qu’il soit récidiviste me fait hurler »

, lâche Annie Gourgue sa présidente.

« Il faut que ce monsieur sache que les enfants sont des enfants pour de vrai, qu’ils sont enfermés des week-ends, qu’ils sont des victimes. Les pornographes vont de plus en plus loin face à la demande. Et les victimes sont de plus en plus jeunes. »

Pour le ministère public, la vice-procureure Stéphanie Rabat le décrit comme un « acteur du petit marché de l’horreur et de l’immondice » et demande cinq ans de prison.

« C’est une menace, un danger. Il doit être neutralisé car c’est un prédateur. »

« Il a besoin d’un sevrage »

Pour sa défense, Me Grolleau estime qu’il a « besoin d’un sevrage, et que le sevrage qu’on lui a imposé en prison une première fois n’a servi à rien. Il a besoin de réaliser que ce sont des enfants mais il commence à reconnaître le problème. »

L’avocate agenaise a par ailleurs signifié à Stéphane qu’elle n’entendait pas le défendre s’il décidait de faire appel de la décision.

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