Granville | L’oncle incestueux ayant fait plusieurs victimes condamné à 15 ans de prison

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Un homme jugé pour les viols ou agressions sexuelles de 7 enfants
Un homme de 49 ans comparaît, du 15 et 17 septembre 2021 aux Assises de la Manche, pour viols et agressions sexuelles sur 7 enfants de moins de 15 ans, dont ses petits-neveux.

Un homme de 49 ans, célibataire, comparaît entre le 15 et 17 septembre 2021 aux Assises de la Manche. Il est accusé de viols, d’agressions sexuelles commis chez lui ou au domicile de sa mère, entre 2014 et 2018, sur 7 enfants de moins de 15 ans, nés entre 2004 et 2009, dont 6 sont ses petits-neveux, enfants d’une de ses sœurs.

Il est aussi accusé de corruption de mineurs pour leur avoir montré les images pornographiques d’une chaîne de télévision, ce qu’il nie farouchement, malgré le témoignage unanime des gamins.

Le « tonton sympa »

C’est en juillet 2018 que, dans la famille, le drame subi par les enfants s’est révélé. Le père parle, devant la cour, et explique comment 5 des 6 enfants de son couple ont été victimes du « tonton sympa » auquel toute la famille faisait une confiance totale, permettant aux gamins d’aller passer des week-ends chez lui.

Au cours de ce soir de juillet, l’aîné des garçons, 14 ans, révèle que le « tonton sympa » le masturbait tout en se masturbant lui-même, et qu’il lui avait demandé de lui faire la même chose, ceci devant des images pornographiques défilant sur l’écran de télé.

Ce qu’ajoutait l’adolescent, c’est qu’il n’était pas le seul à subir ces agressions : ses frères et 2 de ses cousins avaient subi les mêmes sévices. L’homme les invitait à se coucher dans son lit, à y passer la nuit, et se livrait à ses exactions sur les petits qui n’osaient rien dire, dans la mesure où il leur faisait des cadeaux ou leur donnait de l’argent pour qu’ils gardent le secret.

Le père, dès le lendemain, est allé déposer plainte. L’oncle a été entendu, mis en examen, puis incarcéré le 27 juillet 2018, il y a 3 ans.

Trouver le courage de raconter l’indicible

Un jeune garçon s’avance à la barre, silhouette longiligne, fragile, de ses 15 ans, entre l’enfance qui l’a quitté et l’état d’homme encore lointain. Il est là, les yeux rougis d’avoir vu sa mère pleurer de n’avoir pas su le protéger des abominations de l’oncle « sympathique » qui pendant 4 années a fait de lui et de ses cousins des objets dociles au service de sa sexualité pour le moins déviante.

Courageux : imaginons-nous à 15 ans, dans la solennité d’une cour de justice, raconter nos blessures en concentrant sur soi les regards d’une dizaine de personnes. Sollicité par le président à faire le récit de ce qu’il avait subi, l’adolescent a décrit sobrement les sévices sexuels que lui et les 6 autres victimes ont supportés.

Les soirées de l’oncle sympa

Le grand-oncle auquel tous donnaient un sobriquet tiré de son prénom, accueillait les garçons, tous ou presque de la même famille, dans l’appartement de sa mère, leur arrière-grand-mère, où il avait sa chambre, ou bien chez lui, dans le même quartier.

J’étais souvent chez lui avec deux de mes cousins et un autre garçon, raconte l’adolescent. C’était le week-end ou pendant les vacances. Je l’aimais bien, il nous emmenait à la plage, au parc loisirs, il nous faisait des cadeaux, c’est lui qui m’a offert mon premier téléphone portable. J’aimais surtout retrouver mes cousins.

Après la sortie, les cousins se retrouvaient dans la chambre de l’oncle, autour d’une console de jeux, et après le repas, retour à la chambre pour regarder la télé. C’est à l’heure du coucher que les choses se gâtaient. Le garçon se souvient qu’un soir, le tonton avait mis un film sur l’écran montrant des gens se livrant à des jeux sexuels.

Si les enfants n’étaient que 2, ils couchaient dans le lit de l’oncle. S’il y avait un troisième, il était sur un matelas au sol.

Quand ça se passait chez Mémère, il fermait la porte de la chambre à clé.

Le souvenir d’un soir chez la grand-mère lui est revenu. Il avait 11 ans :

« J’étais en CM2. On était 3, il était nu, nous aussi. Il a commencé à toucher mon cousin puis mon copain. Il nous caressait à tour de rôle, il était en érection. Il m’a demandé de masturber mon cousin. »

L’adulte aimait ce spectacle, ça l’excitait. Comme ça l’excitait de voir les gamins s’adonner entre eux aux jeux sexuels auxquels il exigeait qu’ils se livrent :

« Faites-le et vous aurez une glace. »

« Je savais qu’il fallait parler »

Simplement, l’adolescent a décompté le nombre de fois où il a été victime de masturbations, une cinquantaine, et une vingtaine de fois où l’homme l’a obligé à lui faire une fellation.

C’est lui qui en a parlé le premier, ce soir de juillet 2018 qui allait enfin sortir des enfants du huis clos dans lequel leur prédateur les avait enfermés.

Dans ma tête, je savais qu’il fallait en parler.

Mais il y avait la peur, la peur de n’être pas compris, de se faire gronder par les parents. La honte aussi.

Et quand le président lui a demandé ce qu’il espérait de ce procès, il a répondu :

J’ai en tête tout ce que j’ai subi, tout ce que les autres ont subi, j’ai mal au cœur. C’est important qu’il reconnaisse ce qu’il a fait.

L’accusé nie une partie des faits

Côté accusé, on est loin de cette reconnaissance. Certes, il reconnaît s’être livré à des plaisirs sur 3 garçons, les plus âgés, parce ceux-là, pré-adolescents, l’attiraient : atteintes sexuelles, corruption en les forçant à se livrer à des exactions entre eux, et même les fellations (qu’il ne prend pas pour des pénétrations) donc des viols.

Mais pour les plus jeunes, il s’obstine : « je n’ai rien fait », jusqu’à l’incohérence. Rien à sa petite-nièce qui dit, avec les mots de ses 6 ans, qu’il lui a mis

« un doigt dans sa moule »,

rien à son petit-neveu né en 2007 qui refusait que l’oncle le touche et qui dit avoir eu

« son zizi aux fesses ».

Pour les 2 petits, le médecin légiste qui les a examinés, n’a pas exclu l’hypothèse d’une pénétration anale.

Et lorsque défilent sur l’écran quelques minutes des interrogatoires pleins d’émotion des tout petits qui disent aux policiers avec leur petit vocabulaire ce que leur oncle leur a fait, l’accusé regarde l’écran d’un œil froid, lui dont les larmes ne tarissaient pas quand il racontait les viols qu’il avait subis de son père ou de militaires lors de son service armé.

Le climat « incestuel » d’une famille, comme une malédiction

Mercredi 15 septembre 2021, au premier jour des Assises, le témoignage de l’aîné et d’un de ses frères a été entendu. Les autres enfants seront entendus ce jeudi. L’accusé conteste en partie leurs récits.

Ce premier jour du procès de cet homme a révélé le climat incestuel qui a gangrené cette famille sur 3 générations : l’aïeul qui abuse de son fils et d’une de ses petites-filles dans les années 75-80 ; le fils qui, 30 ans plus tard, s’en prend aux enfants de celle-ci, dont il fait usage comme objets sexuels sur une durée de quatre années jusqu’en 2018.

Interrogé sur son itinéraire de vie, l’accusé a dit que de son âge de 5 ans à ses 15 ans, il a été victime des sévices sexuels de son père. Jusqu’à son adolescence, il a couché dans le lit des parents, et c’est là qu’il subissait masturbations, baisers sur la bouche de la part du père, dans le dos de la mère.

Le père avait dit de garder le secret. Il n’a jamais rien dit, y compris lorsque les policiers l’ont interrogé en 2018 après avoir été dénoncé comme agresseur et violeur de l’un ou l’autre de ses petits-neveux. Peut-on le croire ?

C’est la maman des garçons agressés qui, à la barre, au bout d’une longue hésitation et un trouble évident, a fini par dire qu‘elle aussi avait été agressée par le père de l’accusé, c’est-à-dire son grand-père.

Elle non plus n’avait rien dit, du moins, lorsqu’elle avait voulu parler de sa souffrance. On ne l’avait pas écoutée. C’est lorsqu’elle a compris ce qui était arrivé à 5 de ses enfants que lui est remontée cette salissure ancienne. Aujourd’hui, ses enfants vont bien, mais pas elle :

Je vois les gestes dont ils ont été victimes, ça me poursuit. Je n’ai pas su les protéger, ça me fait trop mal.

Abusé à l’armée, en prison…

L’accusé est sa propre victime. Exemple : lors de son service militaire dans les chars, à Mourmelon (de sinistre mémoire), il dit avoir servi de larbin aux autres appelés de sa chambrée qui ont fini un jour par le coincer dans les douches et qui ont exercé sur lui leur virilité, à tour de rôle. Plausible.

Ceux qui sont en âge d’avoir connu la caserne obligatoire savent bien que des coqs de chambrée, dans leurs treillis moulés, imposaient dans leur carrée un ordre tyrannique à 5 contre 1, dont ils maintenaient la cohésion en désignant un souffre-douleur.

On a connu il y a déjà plus d’une décennie un fait semblable dans une caserne de l’agglo cherbourgeoise, un viol collectif sur un bidasse sans défense, dont le principal auteur est passé aux assises à Coutances. Lui, notre accusé, n’a osé rien dire à l’autorité militaire : il est resté 2 mois et il a été réformé pour dépression.

Et tout récemment, alors qu’il était en cellule à Coutances, il a été abusé par son codétenu, l’homme qui passait aux assises en début de semaine et qui a été condamné à 25 ans de réclusion criminelle pour viols de mineurs de moins de 15 ans. L’affaire sera jugée en décembre, au correctionnel.

Angoisse par rapport aux femmes

Les experts psychologues ont dressé de l’accusé un portrait hallucinant : un homme attaché à sa mère (décédée en 2020) d’un amour pathologique, que les femmes adultes angoissent, qui a peur de la sexualité, au point de rechercher chez les garçons prépubères qui lui ressemblent la satisfaction de ses besoins affectifs (le fait qu’il n’ait jamais commis d’acte sexuel complet n’est pas indifférent). Pour le Dr Buton, cet intérêt pour les enfants permet de le qualifier de pédophile.

Quant à son absence de caractère, lui-même dit que ça va mieux depuis qu’il a rencontré le psy qui le suit à la prison. Il s’affirme : mais, pour l’instant, c’est plutôt en durcissant sa contestation des témoignages des enfants qu’il l’exprime, jusqu’à contredire ses propres déclarations lors des auditions qui ont précédé le procès.

Si l’homme est condamné, quel sera son avenir au sortir de prison ?,

demandait mercredi le président à l’un des experts psychologues.

Pédophile, ça ne se soigne pas, l’attirance pour des gamins pré-pubères n’est pas une maladie. On ne va pas le changer. Mais il existe des stratégies d’évitement, notamment des thérapies de groupe, où des hommes comme lui travaillent en échange sur ce qu’ils sont et comment apprendre à passer à côté de leur addiction.

Et le psy de conclure :

« A sa sortie, il aura besoin d’être accompagné sur une longue durée. »

Après 3 jours de procès, le Vendredi 17 septembre 2021, la cour d’assises de la Manche a reconnu le Granvillais de 49 ans coupable de plusieurs viols et atteintes sexuelles sur mineurs et a été condamné à 15 ans de prison.

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