Auxerre | 16 mois ferme pour l’agression sexuelle d’une adolescente de 16 ans dans la rue
- La Prison avec sursis... C'est quoi ?
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- 01/03/2021
- 19:15
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Le 13 janvier 2021, une adolescente de 16 ans a été victime d’une agression sexuelle à la descente de son bus, alors qu’elle se rendait à son stage dans une crèche.
Vers 8 heures, elle s’est installée sous l’abribus Vauviers pour manger un biscuit, avenue de la Résistance à Auxerre, avant de prendre son poste.
Un homme l’a alors abordée.
Il a, dans un premier temps, tenté de l’embrasser en essayant d’enlever son masque.
Dans un coin de l’arrêt de bus, l’agresseur, qui “empestait l’alcool”, lui a touché la poitrine à deux reprises, puis les cuisses.
La jeune femme s’est débattue et lui a échappé alors qu’il tentait de lui toucher le sexe.
Dans sa fuite elle s’est blessée au coude en se dégageant, ce qui lui a valu quatre jours d’ITT.
Reconnu sur tapissage
Lorsqu’elle a déposé plainte, l’adolescente a dressé un portrait précis de son agresseur : “30-35 ans, 1,80 m, de type nord-africain, très maigre“.
L’après-midi même, les policiers interpellent Tarik Boultame, connu des services.
Celui-ci a été reconnu sur tapissage photographique par la jeune femme et il le sera une seconde fois, derrière le miroir sans tain.
“Qu’est-ce que cela vous inspire?” demande le président Ducoudray au prévenu.
“Rien”, répond ce dernier.
Autre fait troublant, lors de son interpellation, le prévenu a pris la fuite.
Au domicile de sa mère, qui a temporisé au moment d’ouvrir aux fonctionnaires, il a quitté la pièce dans laquelle il se trouvait par la fenêtre.
“Le film que vous étiez en train de visionner sur un ordinateur tournait encore et la fenêtre était ouverte“, rappelle Didier Ducoudray.
“Je ne me rappelle pas m’être enfui, je n’étais pas là“, balaie furtivement Tarik Boultame.
Une attitude inquiétante
Le matin des faits, le prévenu s’était rendu chez son frère qui avait besoin de son aide pour accueillir des ouvriers, pendant qu’il travaillait.
Le téléphone du frère a en effet borné au cours de la matinée sur un trajet qui laisse penser qu’il est bien venu chercher Tarik afin de le ramener à son appartement, avenue Ingres.
“Il y a un bus à 7h52. S’il va à l’arrêt de bus et revient chez son frère, ça ne peut pas coller.
Il y une impossibilité matérielle à ce que les deux [le prévenu et la victime, n.d.l.r] se soient rencontrés“, soulève Me Florian Grigis, avocat de la défense.
Mais le téléphone du prévenu, qui ne s’est allumé que vers 10 heures ce matin-là, bornant à l’adresse de son frère, ne permet pas de savoir où il se trouvait au moment des faits à 8 heures.
Enfin, en garde à vue, le comportement du prévenu a interpellé.
“C’est bien fait pour sa gueule, ça la mate !
Elle aurait dû se faire violer, ça lui aurait fait du bien”, a-t-il répondu aux enquêteurs.
Devant les juges, il a relativisé son propos :
“Je disais ça comme ça, parce que j’étais énervé…
Dans la société c’est comme ça, elles font les belles, vous savez bien.”
Sa réponse a fait bondir Me Antoine Audard , avocat de la partie civile :
“Ça laisse présager du rapport qu’il peut avoir aux femmes, et l’intérêt qu’il leur porte.”
Les réquisitions
Me Antoine Audard, a estimé que l’identification par deux fois de l’agresseur sur tapissage “ne laissent que peu de place aux doutes“.
Il a rappelé que la victime souffrait aujourd’hui de syndrome dépressif et que “ce traumatisme l’handicape dans sa vie de tous les jours“.
Il a demandé 1.000 euros de préjudice corporel et 6.000 euros de préjudice moral.
Le ministère public, qualifiant les faits de “très graves” a pointé les phrases atroces prononcées par le prévenu, en audition :
“Comment un jeune homme au XXIe siècle en France, peut tenir de tels propos concernant une adolescente qui s’est faite agresser ?“, s’est interrogée la substitute Annaëlle Jacquard.
Elle a requis une peine de deux ans de prison, dont huit mois assortis d’un sursis probatoire (mise à l’épreuve de deux ans avec obligation de soins en addictologie, suivi psychiatrique ou psychologique, interdiction de rentrer en contact avec la victime, réparation des dommages.).
Pour la partie ferme, elle a demandé le maintien en détention.
Me Florian Grigis pour la défense a souligné “le doute et l’approximation” qui subsistaient dans ce dossier.
Après avoir évoqué les horaires qui pour lui ne “collaient pas“, il a tenté de démontrer que la description faite par la victime n’était pas si précise.
“La reconnaissance formelle par la victime, je n’y crois pas trop. Il n’a jamais été constaté que mon client boite comme elle l’a affirmé, aucune paire de baskets blanches Air force one n’a été retrouvée mais des baskets à 80% noires. Et la veste Nike non plus.”
Il a souligné les faiblesses de “ce dossier plus que bancal” : pas de témoins, les caméras de vidéosurveillance pas exploitées…
“La loi vous oblige à condamner quelqu’un uniquement si vous êtes sûrs à 100 %, pas 99.
Or des raisons de douter, il y en a… Je demande la relaxe.”
La décision
Après un long délibéré de près d’une heure, le tribunal a rendu son jugement.
“Vous êtes déclaré coupable des faits reprochés et condamné en répression à deux ans de prison dont huit mois avec sursis probatoire (mise à l’épreuve de deux ans avec soins addictologiques, psychologiques, interdiction de rentrer en contact avec la victime ou sa famille, paiement des sommes dues au trésor public)” a déclaré le président Didier Ducoudray.
Le maintien en détention a été ordonné pour la partie ferme, soit 16 mois.
Le prévenu devra indemniser la victime à hauteur de 400 euros pour le préjudice corporel, 2.000 euros pour le préjudice moral et 600 euros pour les frais de procédure.
L’audience a été renvoyée sur intérêts civils au 11 mai s’agissant de la constitution de partie civile de la CPAM.
Tarik Boultame sera désormais inscrit au Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes.
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