Chine | Les orphelinats mouroirs du régime chinois. Selon l’organisation humanitaire HRWA, 50% des enfants abandonnés seraient voués à la mort.

Des enfants aux yeux hagards, ligotés à leurs lits, entourés de couches-culottes, cachés sous des couvertures, rongés par des affections cutanées et souffrant à l’évidence de malnutrition, sont abandonnés à la mort dans un orphelinat de Shanghai.

Diffusé mardi soir, le témoignage convaincant d’une équipe de la télévision britannique Channel 4 a accusé une nouvelle fois la politique antinataliste des autorités chinoises.

Avant même de voir le reportage, le gouvernement de Pékin s’est empressé de qualifier «sans aucun fondement» l’existence de telle «chambre de la mort» pour les enfants abandonnés. Jusqu’au dernier moment, l’ambassade en Grande-Bretagne a fait pression sur Channel 4 pour que le document ne soit pas diffusé. A Shanghai, l’institut incriminé a aussitôt ouvert ses portes aux journalistes occidentaux pour leur montrer des bébés choyés et en bonne santé dans un orphelinat apparemment nettoyé, décoré, et même équipé d’ordinateurs flambant neuf.

Cette apparente mise en scène n’a pas pour autant suffi à persuader les organisations humanitaires internationales d’une situation idyllique dans les orphelinats chinois.

Un récent rapport du groupe américain Human Rights Watch/Asia (HRWA), que l’équipe de télévision a largement utilisé, vient encore de dénoncer ces «morts par défaut» et la constante «négligence» des responsables de ces instituts et de l’Etat à l’égard des orphelins, le plus souvent des filles et des handicapés.

Selon HRWA, l’orphelinat de Shanghai a enregistré un taux de mortalité de près de 90% à la fin des années 80. Officiellement, il n’y aurait que 46.000 orphelins dans l’ensemble du pays (pour 1,2 milliard de Chinois). Mais 50% d’entre eux seraient voués à la mort. Ce chiffre impressionnant, dans un pays qui a ratifié la Charte internationale des droits de l’enfant en 1991, ne trouve dans l’histoire récente qu’une comparaison: les orphelinats mouroirs découverts en Roumanie lors de la chute de Ceausescu en 1989.

«Le gouvernement chinois place au sommet de ses priorités humanitaires le droit à la subsistance. En fait, les autorités éliminent ses citoyens les moins armés ­les bébés et les enfants délaissés par leurs parents­ en les négligeant et en les affamant», a commenté Robin Munro, coauteur du rapport.

Ces nouvelles dénonciations tombent à un moment délicat dans les relations sino-britanniques. Malcolm Rifkind, ministre des Affaires étrangères, est actuellement à Pékin pour des entretiens cruciaux sur l’avenir de Hong-kong après sa restitution à la Chine en 1997. Ces premières rencontres avec son homologue chinois et le Premier ministre Li Peng ont été empoisonnées par la question.

«Il faut mener sur le terrain une enquête pointilleuse afin de définir si l’Etat est ou non impliqué dans ses pratiques», assure pour sa part Amnesty international, qui vient d’envoyer une lettre aux autorités chinoises.

La politique de l’«enfant unique», imposée par les autorités de Pékin depuis 1979 pour juguler sa forte natalité, est bien évidemment au centre de ce problème. Les abandons d’enfant et les infanticides, dénoncés depuis plusieurs années, semblent aujourd’hui s’accroître dans les zones urbaines, cœur de l’actuel développement économique chinois. Les enfants, et surtout les filles, n’y sont pas les bienvenus.

Source : liberation.fr

 

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