Rognac | Un équithérapeute prend trois ans pour agressions sexuelles sur mineures
- La Prison avec sursis... C'est quoi ?
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- 31/10/2025
- 22:15
Sur son site internet, il vantait les vertus de l’équithérapie pour “apaiser les blessures de l’âme grâce au contact avec les chevaux”.
Chemise bleue à manches courtes, jean clair et baskets blanches, Martial B. se présente devant le tribunal correctionnel d’Aix comme un homme brisé.
À cause de ces accusations, il n’a plus le droit d’exercer son métier et le lien avec une partie de sa famille a été rompu.
Une posture insupportable pour les victimes et leurs familles. Depuis 2021, il est mis en examen pour des faits d’attouchements sur trois jeunes filles, toutes rencontrées dans le cadre des soins en équithérapie qu’il dispensait dans son centre équestre à Rognac.
L’audience a déroulé le fil d’un dossier marqué par des années de souffrance et de lourdes séquelles psychologiques.
“Ma fille de cœur”
L’affaire éclate en juillet 2020, quand le parquet d’Aix est saisi de la plainte des mères de Lorène* et d’Emilie*.
Lorène, passionnée de chevaux depuis l’enfance, fréquentait le centre depuis 2018.
À cette époque, elle avait 11 ans. Fragilisée par la séparation de ses parents et plusieurs deuils familiaux, elle s’était rapprochée de Martial B., qui l’appelait sa “fille de cœur”.
Elle raconte des câlins insistants, des mains sur sa poitrine, des baisers dans le cou, une proximité ambiguë au fil des mois.
Ses automutilations, ses hospitalisations répétées et son décrochage scolaire alerteront ses proches.
Emilie, traverse elle aussi une période difficile. Suite à la séparation de ses parents, elle est hébergée plusieurs mois avec sa mère dans un préfabriqué du centre équestre.
Elle décrit un homme omniprésent, qui la réveillait le matin, lui envoyait des messages d’amour :
“Je sais que ce n’est pas la normalité, tu n’as que 15 ans mais voilà, je suis amoureux de toi.”
Martial B. avait 45 ans au moment de l’envoi de ce SMS, en 2019. À l’audience, il reconnaît avoir envoyé plusieurs messages :
“Je lui ai dit ‘je t’aime’ comme je le dis à ma fille. J’ai pu faire un transfert de la relation que je n’ai pas eu avec ma fille aînée”, justifie-t-il timidement.
“Vous considérez que la mère d’Emilie est défaillante et vous vous immiscez dans sa vie, constate la magistrate. Est-ce le rôle d’un thérapeute ?”
Martial B. reconnaît des câlins, des baisers, mais maintient qu’il s’agissait d’affection paternelle.
Eglantine*, troisième plaignante, rencontrée au centre en 2019, se souvient aussi d’avances appuyées, de gestes déplacés à cheval.
Elle parlera d’un “mentor” qui cherchait une compagne de son âge malgré leurs trente ans d’écart.
Elle s’était elle-même rendue au commissariat pour témoigner des gestes déplacés auxquels elle avait assisté sur Lorène et Emilie, avant que les agents ne lui signifient, qu’au vu de ce qu’elle racontait, elle aussi était une victime.
Témoignages accablants
Les enfants de l’accusé eux-mêmes sont venus décrire une atmosphère malsaine.
Son fils a constaté une proximité excessive avec Emilie. Maëlle*, sa fille aînée, a filmé une scène où son père embrasse Lorène dans le cou.
Elle rapporte des propos graveleux et estime que “toutes les adolescentes fragiles qui présentaient des difficultés avec leur père et qui sont passées par le centre ont connu le même schéma”.
Seule la benjamine, Marion*, défend son père envers et contre tous, jusque dans la salle d’audience. “Je vais péter un câble”, lance-t-elle en quittant la salle d’audience précipitamment, jugeant l’attitude de la présidente de l’audience trop hostile envers son géniteur.
À la barre, Lorène, aujourd’hui majeure, demande à lire la lettre qu’elle a écrite pour cette audience qu’elle attendait depuis de longues années.
Toute vêtue de noir, tremblante, elle raconte :
“Monsieur B. a détruit mon enfance, mon adolescence et le début de ma vie d’adulte. Il a détruit aussi mon entourage, entre les hospitalisations, les crises, les cachets, la colère ainsi que l’arrêt de ma scolarité.”
Les larmes envahissent les yeux de Lorène et ceux de sa famille dans la salle.
À aucun moment victimes et accusé n’échangent un regard. Emilie, cheveux verts, reste silencieuse mais son avocate, Me Boniface, décrit aussi une adolescente brisée, enchaînant hospitalisations, traitements lourds et tentatives de suicide.
“Elle était allée dans ce centre pour avancer…”, rappelle-t-elle.
Les avocates des parties civiles soulignent la répétition des mêmes mécanismes : flatteries, cadeaux, emprise psychologique, gestes équivoques.
“Sa posture, c’est celle du sauveur incompris, mais il n’a jamais sauvé personne”, tonne Me Loizzo, conseil de Lorène.
Condamné à de la prison avec sursis
Les psychiatres décrivent un homme intrusif, qui ne comprend pas la gravité des faits et souligne le risque de réitération.
Le procureur dénonce un climat graveleux, un phénomène d’emprise autour des chevaux.
Depuis le début de l’enquête jusqu’à aujourd’hui, pour lui c’est l’exagération de jeunes filles, et un complot mais il y a des témoins et ce sont sa propre famille. Il requiert trois à quatre ans de prison, dont une partie ferme, avec interdiction de travailler auprès de mineurs.
Pour son avocat, Me Garcia,
“Martial B. a certes eu des comportements inadaptés mais pas d’intentions sexuelles”.
Elle décrit un homme dépressif, mal préparé à son rôle d’accompagnant.
“Il a été un père de substitution, maladroit, naïf, mais pas un prédateur.”
Le tribunal relaxe Martial B. pour les faits antérieurs à août 2019 et le déclare coupable d’agressions sexuelles pour le surplus.
Il est condamné à trois ans de prison avec sursis probatoire pendant deux ans. Il a l’interdiction d’entrer en contact avec les victimes, d’exercer une activité avec des mineurs pendant cinq ans et devra indemniser les parties civiles.
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