
Angers | 32 000 victimes au sein de l’Institution du Bon Pasteur
- La Prison avec sursis... C'est quoi ?
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- 13/06/2025
- 18:22
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Les chiffres sont glaçants.
Entre les années 1940 et 1980, environ 35 000 à 40 000 jeunes filles ont été placées dans les institutions du Bon Pasteur en France, souvent sur décision judiciaire.
32 000 victimes, plus de 300 témoignages
Selon l’historien David Niget, spécialiste de la justice des mineurs, environ 80 % d’entre elles auraient subi des violences physiques, psychologiques ou des conditions de travail forcé. Soit 32 000 filles.
À ce jour, l’association “Les Filles du Bon Pasteur” a recueilli plus de 300 témoignages de femmes dénonçant les sévices subis dans ces établissements.
Un forum en ligne dédié à ces anciennes pensionnaires compte plus de 800 membres, ce qui indique que le nombre de victimes pourrait être bien plus élevé.
La mobilisation pour la reconnaissance de ces victimes continue de croître.
En mars 2025, Éveline Le Bris, présidente de l’association, a témoigné devant une commission d’enquête parlementaire sur les violences dans les établissements scolaires.
Les victimes réclament des excuses officielles de la part de l’État et de la congrégation, ainsi que des réparations pour les préjudices subis.
Et pourtant la congrégation de Notre Dame de Charité du Bon Pasteur reste indifférente. Tout comme la Justice. Tout comme le ministre des cultes.
“Nous exigeons la dissolution de cette congrégation”
Ce mercredi 4 juin, quinze personnes sont présentes devant le monastère Notre-Dame-de charité du Bon pasteur, des victimes de l’institut, des Angevins, mais aussi Arnaud Gallais cofondateur de Mouv’enfants et membre démissionnaire de la Civise (Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants).
Victime de pédocriminel et d’inceste, il a été violé entre l’âge de 8 et 11 ans par un oncle, prêtre missionnaire.
Il a le verbe en colère, parle vite, pressé de ne rien voir bouger ou si peu. Il a aussi cette détermination et cet engagement, celui de s’en sortir, de retisser l’estime de soi.
Pour cela, il a choisi le combat collectif, les coups de gueule et les mots qui cognent.
“Par dignité pour les victimes, nous exigeons la dissolution de cette congrégation. Faisons de ce lieu d’Angers un mémorial de lutte contre les violences faites aux enfants “, réclament les manifestants.
“Nous exigeons que le boulevard du Bon Pasteur soit renommé et que toutes références à cette communauté soient retirées. Pas d’hommage pour les bourreaux”. Arnaud Gallais
“Nous avons écrit en ce sens à la ville d’Angers et au ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau”, précise t-il.
Leurs courriers pour l’instant sont restés lettre morte.
Devant le monastère, les militants reproduisent une scène de crime.
Sur le sol, des vêtements et des objets d’enfants.
Et sur la porte, un collage qui rappelle l’enfer derrière ces murs :
-“Enfants enfermées, exploitées, brisées = crime contre l’humanité.” “Stop impunité” “Stop prescription”, “Que fait la Justice ? ” “La prescription profite aux agresseurs et à leurs complices”, peut-on lire sur les pancartes brandies.
“Les victimes sont seules, face à un pouvoir qui ne fait rien, on a l’impression d’être des citoyens de deuxième zone. Donc, on laisse ces femmes dans le désarroi, en misant sur le temps qui passe, en se disant que ces personnes vont finir par mourir. Et effectivement, c’est ce qui se passe de plus en plus puisque les faits ont été commis entre 1940 et 1980, il y en a un certain nombre qui ne peuvent plus témoigner aujourd’hui, ça, c’est sûr. Nous, on est là pour toutes celles qui restent”, insiste Arnaud Gallais.
Les victimes du Bon Pasteur sont pour lui un exemple symptomatique,
“Vu l’ampleur, en fait, des dégâts, qui devraient, quand même au bout d’un moment, interpeller les pouvoirs publics pour qu’on soit en capacité d’en retenir quelque chose, réparer, certes, individuellement, les personnes qui sont encore en vie, aujourd’hui, mais surtout, qu’est-ce qu’on fait ? On se dit qu’il faut penser à une réparation collective. Aujourd’hui, rien ne nous permet de dire que ça n’existera plus. C’est insupportable.”
“Notre boulot à nous, c’est de tout faire, faire du bruit, faire un tapage pour être en capacité de dire qu’il s’est bien passé quelque chose. On demande à l’État d’agir, on demande à la justice d’agir”
Éradiquer la pédocriminalité, “une question de volonté et de moyens”
Alors que le président de la République a affirmé que la protection de l’enfance est la priorité du quinquennat comme grande cause nationale, “nous demandons à ce que la lutte contre la pédocriminalité soit la priorité du Ministère de la Justice”.
“En France, on s’en fout des enfants. Si François Bayrou avait été mêlé à une affaire de comptes cachés au Caïman, il ne serait plus Premier ministre. Il a menti, il a couvert des faits de violences et de violences sexuelles sur les enfants. Il est toujours en poste. Ça montre bien qu’on s’en tape”. Arnaud Gallais
Pour les militants, mettre en place une culture de la protection des enfants est une “urgence”.
Et cela passe par 5 mesures phares : la reconnaissance par les institutions de l’amnésie traumatique, l’imprescriptibilité pour tous les crimes et les agressions sexuels sur mineurs, des moyens importants contre la cyberpédocriminalité, des sanctions pour la non-dénonciation qui doit être imprescriptible, et la mise en place de prévention efficace en milieu scolaire dès l’école maternelle.
“On se dit que les récentes affaires devraient nous interpeller, il y a les complices, ce sont des personnes qui n’ont pas dénoncé, ils sont toujours tranquillement aux manettes. Ces personnes-là ne sont jamais inquiétées. On l’a vu avec l’Abbé Pierre, on le voit avec Bétharram, on le voit dans le cadre du village d’Enfant de Riaumont, enfin bref, on pourrait multiplier les exemples”, énumère Arnaud Gallais.
“Les commissions qui sont mises en place le sont par les organisations elles-mêmes, ces organisations qui ont les mains pleines de sang, nous, on demande une vraie justice, digne de ce nom, qui vienne évidemment apporter une réponse à ce qui s’est passé et qui vienne condamner les institutions qui sont complices”, ajoute-t-il. On se fout du monde dans ce pays ! C’est insupportable !”
Le cofondateur de Mouv’enfants voudrait aussi que l’on parle de “réparation collective.”
“C’est quoi ? C’est ce qu’ont fait les Australiens en 2019, à savoir des réunions publiques, réunions publiques où on présente les rapports des commissions vérités, on dit voilà ce qui s’est passé, voilà ce que la commission vérité a fait, etc. On met sur le devant de la scène des victimes, des personnes, des institutions, voire des agresseurs pour effectivement qu’on soit en capacité de leur demander de rendre des comptes. Aujourd’hui, en France, on ne fait pas ça du tout”, explique le militant de la protection des enfants victimes.
“Il faut valoriser la parole des victimes en créant des commissions départementales avec une prise en charge territoriale, une vraie politique publique”. Arnaud Gallais
Des chiffres alarmants
Les statistiques font froid dans le dos.
Selon Mouv’enfants, “en France, une victime d’inceste sur 2 à moins de neuf ans, 10 % des enfants seraient touchés, six victimes sur dix ne sont pas entendues, 50 % font une tentative de suicide.”
Le comité des droits de l’enfant de l’ONU demandait le 6 novembre 2020 à la France que l’Église ne soit pas juge et partie.
La France devait au 31 octobre 2021 apporter des réponses sur les processus de reconnaissance et de réparation mis en place, sur les soins apportés aux victimes, sur un dénombrement du nombre de faits prescrits et les solutions mises en place pour que l’accueil des enfants se fasse aujourd’hui et demain dans de bonnes conditions.
La France n’a à ce jour pas répondu.
“La France, c’est le pays des droits de l’homme, ce n’est pas forcément le pays des droits des femmes, et c’est encore moins le pays des droits des enfants. C’est ça que ça veut dire, “, conclut Arnaud Gallais.
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