3ème procès d’Outreau | Compte rendu Jour 4

3ème Procès Outreau – Résumé du 22/05/2015

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Le dossier Outreau, c’est plus de 30 000 Côtes de dossiers, soit plus ou moins une dizaine de cartons.

9h45 Témoignage de Mme Jolie, assistante sociale

Elle s’occupe des assistantes maternelles qui ont en charge les enfants Delay.

Elle commence son témoignage en expliquant que les enfants se sont exprimés petit à petit.

Le président de la cour : «est-ce qu’il y a eu concertation des assistantes maternelles afin de recouper les informations?
N’avez-vous pas échangé des informations qui auraient pu polluer l’enquête?»
(Sous-entendu que les assistantes maternelles auraient pu mettre des idées et des noms dans la tête des enfants)

Mme Jolie: «Nous faisions remonter toutes les informations que les enfants nous transmettaient, ils avaient besoin d’aide et de soutien», elle rajoutera: «Je me souviens que la mère Delay était très manipulatrice, elle aimait semer le trouble.
Elle n’était pas quelqu’un de sincère, c’est une mère indigne à la personnalité complexe, elle a l’art et la manière de faire en sorte qu’on ne sache plus.»

Concernant le père Delay, Mme Joly dira qu’elle voyait un père en retrait et pas dans l’optique de retrouver les enfants.
Elle ajoutera que les enfants Delay ont mis du temps à comprendre réellement ce qui s’était passé après avoir été broyés par les avocats des accusés.

Avocats de la partie civile: «Ont-ils été assez protégés?»

Mme Jolie: «Je pense qu’on a fait tout ce qu’on pouvait faire.»

Elle expliquera que les enfants ont été assez écoutés, mais pas préparés pour le procès.

NDLR : Nous remarquons que la défense et la cour laissent sous-entendre que les assistantes maternelles auraient commis des erreurs.

Forcé de constater que les formations des assistantes maternelles, les services sociaux et les services de police mêlés à l’affaire étaient peu formés et disposaient de peu de moyens ni même de protocole particulier.
Témoignage de Mr Duneuve, chef de service éducatif du conseil général.

Accompagnateur éducatif des 4 enfants Delay d’octobre 1998 à octobre 2001, il expliquera que quand les enfants étaient en sécurité, ils se confiaient.
Il dira qu’il y aura eu beaucoup d’échanges entre les assistantes maternelles et qu’elles auront menées plusieurs investigations.

Le président fera remarquer qu’effectivement beaucoup d’échanges ont eu lieu entre les assistantes maternelles qui avaient en charge la fratrie.

Avocat de la partie civile : «Y’avait-il une particularité à Outreau?»

Mr Duneuve : il donne des détails géographiques à propos de Boulogne-sur-Mer, Outreau…

Avocat de la partie civile : «la particularité d’Outreau, c’est que 80% des dossiers sont des abus sexuels.»

Mr Duneuve dira ne jamais avoir remarqué cela et il précisera ne pas se souvenir de grand-chose sur ce dossier.
La seule chose dont il se souvienne, c’est que Jonathan voulait parler et que Dimitri avait peur.

Avocat de la partie civile : «Où étaient les adultes pour protéger les enfants à par les assistantes maternelles?»

Mr Duneuve : «Des mesures sont prises pour protéger les enfants et pour stopper les droits d’hébergements ou de visites.»

Me Forster lui lira une partie du dossier de Chérif qui indique des comportements très inquiétants.
« Chérif est violent, irritable, il urine sur des jeux ce qui est un trouble éventuellement dû à des abus sexuels. »

Avocat de la partie civile : «Quand est-ce que le pédopsychiatre devait intervenir?
Quand un enfant a ces comportements avec un éventuel trouble ou traumatisme dû à des abus ne doit-on pas prendre des mesures d’urgence?»

Mr Duneuve : « … »

Témoignage d’un magistrat intervenu lors de la commission parlementaire de janvier 2006

Le président : « Est-ce que les parents Delay-Badaoui étaient au courant du commencement de l’enquête ? »

Le magistrat : « Je n’ai pas lu les notes, mais bien évidemment les parents étaient au courant. »

Un peu plus de deux mois avant leurs incarcérations, soit le 21 décembre 2000, les parents ont été prévenus par courrier du placement des enfants, après qu’ils aient témoigné de sévices et de viols…

Cela permettra au couple Delay-Badaoui de détruire des preuves et de prévenir leurs complices.

Le magistrat avouera que la chronologie des faits et la mise en place de certaines actions étaient dramatiques.
Le président citera une côte du dossier, dans laquelle Myriam Badaoui déclare avoir reconnu des enfants de la ville de Wimereux sur des photos que la police lui a présentées.

Elle dira les avoir déjà vus précédemment dans des albums photos de pédopornographie.
On parle alors d’une jeune fille Priscillia.

Le président questionne Daniel Legrand : «connaissez-vous une dénommée Priscillia dans votre famille?»

Daniel Legrand : «non, pas à ma connaissance.»

Le président questionne la mère de Daniel Legrand : «connaissez-vous une dénommée Priscillia dans votre famille?»

La mère de Daniel Legrand : «non, pas à ma connaissance.»

Témoignage de Mr Duval greffier travaillant à l’époque avec Mr Burgaud

Il commencera son audition spontanément en expliquant qu’il n’a pas grand-chose à dire, que les faits sont anciens et qu’il ne sait pas pourquoi il est là.
Il ajoutera qu’il n’a rien d’autre à dire et qu’il ne comprend pas pourquoi il doit comparaître devant la cour alors que ça a été son seul poste dans sa carrière de greffier.

NDLR : Mr Duval a eu une formation de greffier pendant une semaine par un collègue et une autre formation de quelques jours un peu avant cette affaire.

Le président : «Y’avait-il une bonne entente entre vous et Mr Burgaud?»

Mr Duval : «(avec un long soupir) plus ou moins…»

Le président : «Avez-vous fait remarquer à Mr Burgaud que vous n’aviez pas la même compréhension des choses?»

Mr Duval : «pas à ma connaissance, les actes étaient régulièrement faits.»

Le président : «est-ce que les témoignages et les interrogatoires étaient compliqués lors des procès-verbaux?»

Mr Duval : il évoque un jour où il a été particulièrement difficile de retranscrire des confrontations car l’abbé Dominique Wiel chantait la Marseillaise…

Le président : « un jour Daniel Legrand est venu dans votre bureau pour faire des aveux ? »

Mr Duval : amnésie soudaine… (Les aveux de Daniel Legrand ne sont pourtant pas habituels)

Les avocats de la défense : « Est-ce vrai que l’on vous a retrouvé en train de pleurer à côté de la photocopieuse ? »

Mr Duval : « Oui »

Les avocats de la défense : « le juge Burgaud avait-il des conversations avec les prévenues avant les auditions. »

Mr Duval : « non, pas à ma connaissance »

Il se souvient que les procès-verbaux étaient bien rédigés en questions-réponses.

Les avocats de la défense : « Avez-vous des regrets ? »

Mr Duval : « Non. »

15 heures 20 : Témoignage du juge Burgaud,

 

Juge d’instruction à Boulogne-sur-Mer de septembre 2000 à août 2002, il a été saisi de l’affaire Outreau par le procureur de février 2001 à août 2002.
À son départ, le dossier était toujours en cours. À savoir que 50% des dossiers qu’il traitait était des cas de pédocriminalité.

Développant pendant plus d’une heure la manière dont il dut instruire le dossier, il décrira une instruction pesante et sous tension à cause des médias et notamment à cause de la lettre d’aveux de Daniel Legrand envoyé à France 3.
Il relèvera aussi que les examens révéleront des stigmates importants, bien que cela soit assez rare.

D’après les informations qu’il avait eues, le commissariat de Boulogne-sur-Mer était spécialisé dans les écoutes dans le cadre d’abus sur mineurs, or les résultats d’enquêtes et les témoignages apportés par les policiers la veille au tribunal démontreront le contraire.

Point important, le couple Delay-Badaoui a été prévenu la veille de leur placement en garde à vue.
Ce qui aura permis à Thierry Delay de prévenir d’autres protagonistes ainsi qu’un complice chargé de faire disparaître les preuves.
Surtout celles avec les traces d’urine.

Sera ensuite évoqué la grande difficulté à prendre les auditions des enfants du fait de leurs jeunes âges (11 ans, 9 ans, 7 ans et 5 ans).
Il tâchera donc de se mettre à leurs portées des afin d’établir au mieux leurs déclarations.
Il précisera qu’en juillet 2000, Dimitri parlera d’un Dany Legrand en Belgique.

Le juge Burgaud entreprendra alors des investigations dans ce sens et il obtiendra de la police belge une information
concernant un jeune homme du nom de Daniel Legrand, interpellé pour vol et utilisation frauduleuse de chèques.
Il abordera aussi les aveux que Daniel Legrand a fait à trois reprises, concernant de faits survenus entre ses 15 et 19 ans.

Mis en difficulté plusieurs fois à plusieurs reprises, il dira au juge Burgaud qu’il n’a plus qu’à reconnaître les faits et qu’il souhaite parler du plus important pour ne pas prendre pour les autres.
Lors de ses aveux il s’excusera plusieurs fois pour le mal qu’il a fait aux victimes.

Le juge Burgaud dira qu’il avait l’air sincère et que ça venait de sa propre initiative et que Daniel Legrand ne subissait aucune pression.

Du fond de sa cellule Daniel Legrand écrira au juge une lettre d’aveux de plusieurs pages qu’il enverra également à France 3.
Il exclura son père des faits reprochés et il fournira des détails qui ne pouvaient pas être inventés.
Des détails qui corroborent avec les témoignages des enfants et des autres mis en cause.
Le juge croira ses aveux, contenu de la sincérité de ses dires.

3

Plus tard, Daniel Legrand se rétractera après avoir reçu des menaces en prison.

En effet, dès que l’affaire passa dans les journaux télévisés ses codétenus venaient lui glisser « des mots doux » derrière sa porte de sa cellule.

Le président : « pourquoi il n’y a pas de date précisant la période des faits ? »

Réponse du juge : « Je souhaitais laisser parler les enfants à la première audition pour reprendre en détail ultérieurement », il rajoute:
« les enfants étant très petit, ils n’ont pas le même sens de la temporalité que les adultes.»

Le président lui précisera qu’il y avait plusieurs fautes dans l’instruction du juge : le manque de date des faits, les noms qui n’avaient peut-être pas la bonne orthographe et les planches de photos présentées aux enfants qui étaient préparés par les policiers (dont le policier Bouyard).

Le président : « peut-être que les aveux ont été faits pour qu’il puisse sortir plus rapidement de détention comme une autre mise en cause Aurélie Grenon ? »

Le juge : « surprenant ! Au vu de la gravité, dénoncer aux minima aurait été plus judicieux ! »

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Le juge Burgaud dira que Myriam Badaoui dénonçait un réseau, qu’elle parlait d’enfants en Belgique.
Elle disait qu’il fallait retrouver l’homme qui tient le sex-shop et elle parlera de Legrand père et fils, en décrivant leurs voitures et leurs vêtements.

Le président étonné que Mme Badaoui parle de la Belgique et de Daniel Legrand,

Le juge Burgaud : « il n’y a pas eu de noms de soufflés, ni de questions camouflées. »

Le président : « «Avez-vous fait une promesse de libération à Myriam Badaoui ? »

Le juge Burgaud : « non aucune promesse de libération et je n’ai jamais soumis de noms.
J’ai retranscrit très précisément mes questions et leurs réponses afin de coller au maximum avec les déclarations des témoins ou accusés.
On m’a d’ailleurs reproché que ça manquait de précisions, mais c’était leurs déclarations. »

Le président : « est-ce que vous avez soumis des réponses ? »

Le juge Burgaud : « non jamais, mon but était la manifestation de la vérité.»

Le président : « Est-ce que les assistantes maternelles étaient présentes lors des auditions des enfants ? »

Le juge Burgaud : « Oui, j’ai pensé que c’était bien qu’elles accompagnent les enfants pour les rassurer mais elles n’intervenaient pas. »

NDLR: Le témoignage du juge Burgaud nous a paru le plus honnête et sincère de tout les témoignages durant les trois semaines du procès, pourtant pour beaucoup “c’est la faute à Burgaud”..

 

Fin de la quatrième journée

L’équipe Wanted Pedo

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