Yvelines | Soumis au “monde des ténèbres”, il viole une fillette de 11 ans: Dix ans de réclusion criminelle

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“Aujourd’hui, je suis devant la justice, pas devant le monde des ténèbres.”
Un homme de 38 ans a été jugé par la cour criminelle de Versailles, suite au viol d’une enfant de 11 ans. Un procès au-dessus duquel planaient des marabouts et des sorciers.

Cette fois, Papa Dadou, c’est son surnom, ne s’est pas soumis aux rituels des marabouts et autres prophétesses.

Mais plutôt aux obligations de la cour criminelle de Versailles.

Cet homme de 38 ans, originaire du Congo, était accusé d’avoir violé une enfant de 11 ans, la fille de son ex-compagne.

Des faits qui se sont déroulés entre décembre 2020 et juillet 2021, à Poissy et Carrières-sous-Poissy (Yvelines).

Avec cet aspect très sordide : si certains attouchements se sont déroulés dans le huis clos d’un appartement, la plupart ont eu lieu dans la voiture de l’homme. Sur le parking d’un centre commercial.

Ces jeudi 17 et vendredi 18 novembre 2022, l’homme est apparu serein face à la cour.

Répondant de bonne grâce à toutes les questions. Face à une jeune victime habillée en rose, visage fermé, recroquevillée sur sa chaise.

L’affaire a été révélée le 12 juillet dernier, lorsque la mère de Virginie* pousse la porte du commissariat de Poissy.

Elle raconte avoir découvert des photos et une vidéo pornographiques dans le téléphone de sa fille. Le tout a transité par le téléphone son ex-conjoint, par WhatsApp.

Entendue, la jeune adolescente va expliquer avoir eu plusieurs relations sexuelles avec celui qu’elle appelle « Papa Dadou Mavie. »

En analysant l’appareil, les enquêteurs vont découvrir des messages à forte connotation sexuelle.

Les prières de la nuit

Papa Dadou, va rapidement reconnaître les relations avec la jeune fille de 11 ans. Il va expliquer qu’il s’agit d’un échange de bons procédés.

« Il dit qu’il l’embrassait et lui apportait des relations sexuelles en échange d’informations sur sa mère.

Il soutient aussi que cela lui permettait de se protéger de la sorcellerie de celle-ci, des prières de la nuit contre lui.

Dans ce cadre, il n’estimait pas avoir violé l’adolescente qu’il estimait être consentante et satisfaite. »

Lors des premières auditions.

Une idée qui ressurgira dans l’instruction. Virginie y avouait une forme de consentement.

Impossible à admettre du côté des experts.

« Elle n’a pas pu consentir de manière éclairée à un rapport sexuel »,

tranche une psychiatre.

Rupture des repères, des règles et des interdits

Le récit des événements fait clairement ressortir une rupture complète des repères moraux et sociaux, du respect et de la connaissance des règles et des interdits.

Il fait aussi apparaître une omniprésence de certaines croyances.

« Cet homme a plus peur des marabouts et de leurs pouvoirs que de la loi française. »

Un policiers entendu par la cour.

Cette peur remonte à l’enfance de l’accusé, né le 12 juillet 1984 à Lubumbashi, en République démocratique du Congo.

Trafic d’organes et sacrifice

Deuxième enfant d’une fratrie de neuf, il a vécu des événements compliqués.

Son frère aîné avait disparu, enlevé par des militaires qui faisaient du trafic d’organes.

Sa mère avait alors décidé de le sacrifier pendant un rituel avec un marabout, car « c’était l’enfant le plus sage ». Échec.

Papa Doudou avait été chassé de la famille. Par deux fois. Il avait trouvé refuge chez ses grands-parents.

Empoisonné au Brésil

Parti au Brésil, il avait subi un empoisonnement avec un engrais chimique versé dans ses aliments. Il avait décidé de s’installer en France en 2008, comme mécanicien.

Ces événements ont profondément marqué l’accusé, comme le rappelle l’expert qui l’a entendu.

« Le mis en cause reconnaît une responsabilité dans les faits mais il dit qu’il a été manipulé par l’action maléfique d’un marabout, de puissances occultes. »

« Je suis devant la justice, pas devant le monde des ténèbres »

Au pied du mur, Papa Dadou confirme.

« Ce que j’ai vécu en Afrique m’a déclenché beaucoup de choses.

Quand elle m’a parlé des prières que faisait sa mère, mon ex, j’ai eu peur. J’ai repensé à la sorcellerie.

Je voulais la voir pour avoir des informations sur ces rituels.

Toute ma vie, j’ai été victime de mauvais sorts par des marabouts commandités.

Je pensais qu’une fille de 11 ans était apte à donner son consentement. Je ne savais pas que la loi française l’interdisait.

Mon corps faisait mais ma tête ne voulait pas.

Aujourd’hui, je suis devant la justice, pas devant le monde des ténèbres.”

L’accusé.

Elle écrit ses réponses

L’audition de Virginie a été un long chemin de croix. Pendant près de deux heures, l’enfant n’a réussi à répondre que par « oui » ou par « non ».

Elle a finalement décidé d’écrire ses réponses, assise comme une écolière au bureau réservé à l’huissier.

La tête appuyée sur sa main gauche.

Très difficilement, la cour arrache quelques mots.

« C’est difficile d’en parler. J’ai honte de ce qui s’est passé. Lui est en prison.

Et si on n’avait pas fait ça, il ne serait pas là. C’est pas bien.

Parce que lui, c’est un adulte et moi je suis un enfant. Il savait que ce n’était pas normal.

Je ne voulais pas que ça continue. Je suis triste parce qu’il est en prison. »

Virginie, la victime.

À ces mots, l’avocate générale bondit.

« Virginie… Il y a une loi en France qui dit que quand on est un enfant, on ne peut pas avoir de relations avec un adulte.

Et c’est à l’adulte de le savoir.

Ce n’est pas toi qui l’as envoyé en prison.

Mais le juge qui a signé son ordre d’incarcération. Et ce qu’il t’a fait. »

Interrogé sur les faits, Papa Dadou exprime ses regrets.

« Je suis trop sale. Il fallait que je refuse. Maintenant que je sais la gravité, je vais être puni par les juges.

Et c’est normal. Mais il y avait les sorciers. Tu ne les vois pas, mais eux, ils te voient.

On me juge ici, mais mes photos sont là-bas… Le risque pour moi, c’était et c’est toujours de mourir.

Vous n’y croyez pas, mais moi j’y crois à ces choses de la sorcellerie. »

La victime.

Vendredi soir, la cour a prononcé une peine de 10 années de réclusion criminelle, assortie d’un suivi socio-judiciaire pendant 5 ans. L’avocate générale avait requis 12 ans.

Cécile Naze-Teulié, l’avocate de l’accusé, a indiqué que Papa Dadou n’allait pas faire appel de la décision.

* Le prénom a été modifié.

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