Une étude britannique révèle qu’un nombre croissant d’enfants, essentiellement des filles, sont poussés à utiliser leur corps et à se filmer en direct avec leur portable.

Les chiffres donnent froid dans le dos. Dans une enquête menée sur un laps de temps de trois mois seulement, l’organisation britannique Internet Watch Foundation (IWF) a repéré plus de 2000 images et vidéos d’abus sexuels d’enfants commis en live streaming.

Les trois-quarts des images récoltées par les abuseurs ont fini sur des forums dédiés au téléchargement payant de vidéos d’abus sexuels d’enfants. Image: Richard Brocken/Plainpicture

Dans la majorité des cas (96%), il s’agit d’un enfant, agissant seul, qui a été poussé à utiliser son propre corps et à se filmer avec un téléphone mobile, une tablette ou une webcam à la maison. Le phénomène concerne des enfants âgés de moins de 13 ans (98%), et à une large majorité des jeunes filles (96%). La plupart ont entre 11 et 13 ans (69%).

Les auteurs de l’étude d’IWF affirment avoir été choqués par une telle découverte.

«Le rapport porte sur plus de 2000 cas d’abus sexuels dans lesquels les enfants sont conditionnés, contraints ou poussés par chantage à se filmer eux-mêmes.

Les arrière-plans des vidéos montrent que les victimes étaient dans leur lieu de vie ordinaire, une chambre à coucher ou une salle de bains», explique Susie Hargreaves, directrice d’IWF.

Aucun adulte n’apparaît sur ces images.

Les chercheurs pensent dès lors que les enfants ont été poussés à se mettre en scène par un interlocuteur – un adulte qui peut se faire passer pour une fille de 12 ans par exemple – rencontré sur les plates-formes virtuelles.

Mais ils se disent conscients des limites de leur étude.

Celle-ci ne cerne pas, notamment, les motivations qui poussent les enfants à créer des contenus sexuels.

Ni jusqu’à quel point ils ont été contraints de le faire, ni les modes opératoires utilisés.

La pression des «likes»

Dans une autre étude publiée en 2017 par l’ONG américaine Thor, il apparaît que les abuseurs exploitent le désir de reconnaissance sur les réseaux sociaux, les enfants recherchant un maximum de «likes» pour telle ou telle action commise.

La recherche d’IWF «montre une nouvelle tendance inquiétante en matière d’abus d’enfants.

Ce type d’images où l’on voit des enfants conditionnés à s’adonner à des actes sexuels en live streaming représentent aujourd’hui la majeure partie des nouvelles images et vidéos que l’IWF voit», commente Sarah Smith, responsable de projets à l’IWF.

Elle précise que ce type d’images «autoproduites» représente désormais plus d’un tiers des signalements qui lui sont rapportés.

Les trois-quarts des images récoltées par les abuseurs ont fini sur des forums dédiés au téléchargement payant de vidéos d’abus sexuels d’enfants.

L’IWF espère mettre en garde les parents et des éducateurs contre ce type d’abus, et recommande aux plates-formes permettant le téléchargement et l’échange de vidéos et d’images de mettre en place des garde-fous et des outils de surveillance.

Fedpol à l’affût

Le phénomène de «sextorsion» n’épargne pas la Suisse, mais l’Office fédéral de la police (Fedpol) n’a pas connaissance d’une évolution particulière de ce type d’abus auprès des enfants et des adolescents, relève Thomas Dayer, porte-parole de Fedpol.

«Ces pratiques se situent au cœur des dangers qui menacent les mineurs sur Internet, et le travail de sensibilisation sur le fait que la Toile est remplie de personnes indésirables est évidemment essentiel», dit-il.

Fedpol peut en revanche chiffrer à 25 à 35 signalements par an sur les cas d’enfants victimes de réseaux criminels organisés, principalement en Asie, contraints à des actes sexuels devant des webcams.

Les images pédopornographiques sont proposées en live streaming aux clients pédophiles.

Le 29 mai dernier, un homme de 30 ans a été condamné à Zurich pour avoir visionné par Skype, à plus de 70 reprises, des abus sexuels commis en direct sur des enfants victimes de traite aux Philippines.

Il s’agissait de filles âgées de 4 à 15 ans.

En février, un Lucernois avait été condamné pour le même type de délit.

Source : 24 heures

Source(s):