Bapaume | Agressions sexuelles présumées, 5 ans requis contre l’agent d’entretien de la maison de l’enfant

Très longue audience, mardi, devant le tribunal correctionnel d’Arras. Huit heures pour étudier tout le dossier où treize enfants disent avoir été victimes d’agressions sexuelles de la part de l’agent d’entretien, et également conducteur de bus, de la maison de l’enfant à Bapaume. Le délibéré sera rendu le 7 mars.

La maison de l’enfant à Bapaume est un centre où sont placés les filles et garçons entre 4 et 18 ans.

La maison de l’enfant, à Bapaume, est un centre où sont placés les filles et garçons entre 4 et 18 ans. Des enfants en difficulté qui ont connu des problèmes de violences ou d’éducation dans leur famille. Certains y restent quelques mois, d’autres des années. C. D, un homme aujourd’hui âgé de 46 ans, y est un peu l’homme à tout faire.

Les travaux, l’entretien et les trajets en bus pour raccompagner les enfants dans leur famille depuis 1996… C’est notamment à l’intérieur de ces bus, quand il était seul avec des enfants, qu’il aurait commis des agressions sexuelles entre 2009 et 2012. Dans des couloirs de l’établissement également. Demandant aux enfants de lui frotter le sexe avec leurs mains.

« Je suis dans cette structure depuis vingt ans. Je n’ai jamais eu un geste déplacé. »

Pendant cette audience longue de huit heures, C. D. a tout nié, de son homosexualité aux agressions sexuelles sur les enfants.

«  Je n’ai jamais rien fait à ces gamins. Je suis dans cette structure depuis vingt ans. Je n’ai jamais eu un geste déplacé. Depuis le début de ce dossier, je suis sur la défensive. Je ne vis plus depuis quatre ans. On entend uniquement la voix des enfants.  » C. D. se base sur une procédure de 2011 où il a été relaxé pour une agression sexuelle sur un mineur handicapé de 14 ans.

Treize témoignages d’enfants

Concernant la maison de l’enfant, les premières révélations de quatre enfants remontent à un repas, en octobre 2012, avec une éducatrice. Un enfant mime le geste que demande de lui faire C. D. et le nomme clairement, «  celui qui fait des travaux.  » Suite à ces révélations, une soixantaine d’enfants seront auditionnés par la gendarmerie. Au total, treize témoignages évoqueront des agressions sexuelles de la part du conducteur de bus.

« Ces faits sont détestables car il avait créé un lien de confiance avec les enfants. »

La présidente Hibon détaille avec minutie les treize témoignages des enfants âgés en moyenne entre 8 et 14 ans. On retrouve les mêmes propos.

«  Il me demandait de lui frotter le sexe, de le chatouiller dans le bas du pantalon de lui toucher le «fifi».  » Pour Élise Bozzolo, «  les enfants sont précis sur le temps et le ressenti. Ces faits sont détestables car il avait créé un lien de confiance avec eux. Aucun n’a dit qu’il ne l’aimait pas.  »

Les sites pédopornographiques et de vidéos pornos gays, retrouvés dans l’historique de son ordinateur, ne jouent pas en sa faveur.

«  J’ai eu du mal à me remettre de la rupture avec une compagne que j’ai eu pendant quelques années. Je me suis posé la question sur ma sexualité mais je ne suis pas homo.  » Pour les experts psychiatriques, «  l’accumulation des plaintes tend vers une orientation pédophile. Il prend l’ascendance sur des pré-ados pour assouvir ses pulsions. Il n’a aucune prise de conscience de la souffrance de l’autre.  » C. D. reste stoïque à la barre. «  Je n’ai pas ce style-là.  »

L’affaire a été mise en délibéré au 7 mars. Cinq ans de prison ont été requis contre l’agent d’entretien et conducteur de bus de la maison de l’enfant.

La voix du Nord

Les différentes réquisitions et plaidoiries ont été longues dans cette affaire. Deux heures rien que pour celle de Me Contrafatto, très remontée pour la défense.

«  Tout est à charge contre mon client. Cela empêche une certaine sérénité des débats. Avez-vous relu l’instruction avec des questions de huit lignes ? On dirait du Proust. C’est incompréhensible.  »

L’avocate se base sur les auditions des enfants et du personnel de la maison de l’enfant.

«  Quarante-deux filles ou garçons disent n’avoir rien à reprocher à mon client. Dans son entourage professionnel, aucune personne ne dit du mal de lui. Elles sont dubitatives ou n’y croient pas du tout. À l’exception de l’éducatrice qui a fait démarrer ce dossier.  »

Autre son de cloche évidemment du côté du parquet. Avec une Élise Bozzolo en colère pour démarrer ses réquisitions.

«  Placer des enfants dans une structure comme à Bapaume n’est pas une sanction mais une chance offerte pour se reconstruire. Cette affaire d’agressions sexuelles est le pire de ce que je peux attendre quand je décide un placement. C’est une trahison pour moi. C. D. se pose en victime. Il jette à la face de treize gamins qu’ils sont des menteurs. Alors que sa dangerosité reste entière.  »

Pour Me Pagin, avocate d’une grande partie des enfants et de l’Association d’aide aux victimes et information judiciaire (AVIJ),

«  les enfants sont une proie facile. Encore davantage quand ils sont fragiles dans une institution comme celle de Bapaume. Un enfant a eu le courage de parler et cela a fait un effet boules de neige avec les autres témoignages. On ne sort pas indemne d’une telle histoire.  » L’avocate des parties civiles monterait bien un film avec ce dossier. «  Mais aucun scénariste n’en voudrait. Car on connaît le coupable dès le début de l’histoire.  »

Source : lavoixdunord.fr

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