Montblanc | Verdict implacable pour la mère d’Amandine la prison à perpétuité

non

20 ans de réclusion pour le beau-père
Au terme d’une semaine de procès éprouvante et d’un réquisitoire implacable, Sandrine Pissarra 54 ans, la mère d’Amandine a été condamnée à la perpétuité, assortie d’une peine de sûreté de 20 ans, pour avoir provoqué la mort de sa fille. Le beau-père, Jean-Michel Cros 50 ans, écope, lui, de 20 ans.

Le calvaire d’Amandine, 13 ans ” Un film d’horreur. Elle est morte de faim enfermée dans un cachot ”

L’adolescente est morte en août 2020 à Montblanc près de Béziers après avoir été affamée et enfermée plusieurs mois dans un placard tout en étant filmée par une caméra de surveillance. À sa mort, elle pesait 28 kilos pour 1m55.

À partir de lundi, sa mère est jugée pour actes de torture Les maltraitances contre Amandine avaient fait l’objet de plusieurs signalements et trois saisines du juge des enfants qui n’ont abouti à aucune mesure permettant de protéger l’adolescente.

La mère encourt la réclusion criminelle à perpétuité et le beau-père 30 ans de prison.

C’est une plongée dans l’horreur. L’indicible. L’inconcevable. Le calvaire et la mort d’Amandine.

L’adolescente de 13 ans privée de nourriture et de soins est morte de faim, après avoir été enfermée dans un placard, pendant plusieurs mois dans la maison occupée par sa mère, ses frères et sœurs et son beau-père le 06 août 2020 à Montblanc, dans l’Hérault.

Le jour de sa mort, voyant qu’elle était mal en point, la mère et le beau-père d’Amandine auraient tenté de lui faire avaler une compote, puis une boisson hyperprotéinée et un morceau de sucre. Des aliments vomis par la jeune fille qui a ensuite cessé de respirer. À sa mort, elle pesait 28 kilos pour1m55.

Luc Abratkiewicz, Avocat du père d’Amandine, partie civile déclare :

“En 32 ans de carrière, je n’ai jamais vu une affaire aussi odieuse. Je n’ai jamais vu ça. On est horrifiés face aux images de cette jeune fille dénutrie, couverte de plaies infectées qui ont provoqué une septicémie (empoisonnement du sang)”.

L’avocat pénaliste montpelliérain pourtant habitué aux dossiers criminels les plus sordides est horrifié.

“Amandine était tellement dénutrie qu’à la fin, elle ne pouvait plus bouger, son corps était couvert d’escarres. C’est un film d’horreur. Ça dépasse l’entendement. Comment a-t-on pu faire souffrir un enfant à ce point ? Où est l’humanité ? C’est d’un sadisme innommable. Ils l’ont tuée à petit feu.”

“Elle est morte dans un cachot.” poursuit Me Luc Abratkiewicz, Avocat du père d’Amandine, partie civile

Filmée

Le calvaire et l’agonie de la jeune fille ont été filmés par une caméra de surveillance placée dans le cagibi où elle était enfermée nue et affamée.

Des images d’horreur dignes des camps de concentration récupérées par les enquêteurs dans le portable du beau-père et la tablette de la mère de l’enfant martyr.

Sandrine Pissara, sa mère, 55 ans et Jean-Michel Cros, 50 ans, son beau-père doivent être jugés par la cour d’assises de l’Hérault à Montpellier à partir de lundi 20 janvier.

Actes de torture ou de barbarie

La mère d’Amandine, ancienne serveuse reconvertie en “prothésiste ongulaire”, est renvoyée devant la cour d’assises pour « actes de torture ou de barbarie ayant entraîné la mort sans intention de la donner » pour avoir notamment « affamé » sa fille entre le début du premier confinement, le 17 mars 2020, et son décès, le 6 août de la même année. Elle encourt la réclusion à perpétuité.

“Manipulatrice” et “violente”

Sandrine Pissara, qui a eu huit enfants est décrite comme “violente, manipulatrice, dépensière et menteuse”, selon ses ex-compagnons.

Elle est accusée de maltraitances par plusieurs de ses autres enfants. Pour celles qui ont conduit à la mort d’Amandine, elle a toujours nié les faits, se décrivant même comme une mère “aimante” face à une adolescente “voleuse” et “capricieuse” qui avait des troubles alimentaires.

“Elle conteste toutes les accusations et les actes de barbarie. Elle s’en expliquera au procès.” déclare Me Jean-Marc Darrigade, avocat de Sandrine Pissarra

Jean-Michel Cros, son compagnon depuis 2016 sera aussi sur le banc des accusés. Pour avoir « privé de soins ou d’aliments » sa belle-fille et n’avoir rien fait pour la “sauver d’une mort certaine ” il risque 30 ans de réclusion.

Souffre-douleur

L’enquête révèle cependant qu’Amandine a été maltraitée à partir de ses deux ans et demi.

Décrite comme “le vilain petit canard” de la famille elle a toujours été le souffre-douleur d’une mère qui n’a pas épargné ses autres enfants mais qui détestait Amandine encore plus à cause de sa ressemblance avec son père.

Une détestation que l’accusée aurait, selon les experts, transposée sur la jeune fille.

Plus tard, sa mère pouvait lui infliger d’interminables punitions d’écriture qui pouvaient durer toute la journée, et la priver de nourriture parfois pendant plusieurs jours.

Amandine était réduite au primaire à voler les goûters de ses camarades où ceux qu’elle trouvait dans la poubelle.

Interne au collège peu avant sa mort, une des amies de l’adolescente rapporte qu’à l’internat “elle mangeait pour dix. À la veille du week-end elle pleurait souvent car elle ne voulait pas rentrer chez elle”.

À partir du 17 mars 2020, date du premier confinement, elle n’est plus allée au collège. Elle n’y est pas retournée à sa réouverture en mai. Elle est morte trois mois plus tard.

Signalements

Les maltraitances contre Amandine avaient fait l’objet de plusieurs signalements et trois saisines du juge des enfants qui n’ont abouti à aucune mesure permettant de protéger l’adolescente.

“Quand bien même les process ont été suivis, cela n’a rien empêché. Il va falloir analyser les process de détection de la maltraitance pour améliorer les choses, indique Me Véronique Boulay, Avocat de l’Enfant bleu – Enfance Maltraitée, partie civile

Détecter les conflits de loyauté des enfants envers les parents maltraitants, mettre en place plus de visites des inopinées des services sociaux…”, poursuit Me Véronique Boulay pour “L’Enfant Bleu – Enfance Maltraitée”, partie civile avec le père d’Amandine, son frère et la sœur de la jeune victime.

Source

Amandine, 13 ans, torturée et affamée par sa mère

y a-t-il eu des failles dans la protection de l’enfance du département de l’Hérault ?

Malgré le huis clos familial funeste pour la préadolescente, le calvaire d’Amandine, morte de faim à l’été 2020, n’était pas inconnu.

Des signalements en pagaille, trois saisines du juge des enfants, un rapport alarmant du collège un an avant le drame, dont on ignore s’il avait été transmis à l’Inspection académique…

« Ce dossier est tout simplement ahurissant », estime Isabelle Debré, présidente de l’Enfant Bleu, l’une des quatre associations de protection de l’enfance qui se sont constituées partie civile pour identifier les dysfonctionnements ayant conduit au décès d’Amandine.

« Ce qui est singulier dans ce dossier, c’est l’âge de cette petite, morte à treize ans alors qu’elle était scolarisée en internat, que les alertes étaient remontées… Il y avait tout ce qu’il fallait pour la sauver. En plus de trente ans, je n’ai jamais vu cela. »

Même consternation du côté de l’association Innocence en Danger, qui souligne pourtant la réactivité des personnels scolaires et périscolaires, auteurs de trois signalements entre 2010 et 2014.

Amandine est encore en maternelle quand l’école s’inquiète d’égratignures et d’ecchymoses sur son corps.

Sa mère, Sandrine Pissarra, se montre coopérante, et parvient à éteindre les inquiétudes en acceptant de faire suivre Amandine par un pédopsychiatre.

Nouvelle alerte l’année suivante, mais là encore, le juge des enfants estime la situation sous contrôle.

Le même magistrat est à nouveau saisi alors qu’Amandine, en CE1, présente des traces de coups et fouille les poubelles pour manger… Elle confie alors être victime de violences, mais se rétracte.

Ses frères et sœurs, par crainte d’être séparés et encore plus maltraités, jouent la partition du bonheur, dictée par Sandrine Pissarra. Laquelle produit un certificat médical justifiant les bleus et les pertes de cheveux de sa fille.

Les services du procureur, saisis, décideront de classer l’affaire.

« Comme souvent dans ce type de dossier, il apparaît que l’institution judiciaire n’a pas su identifier la gravité de la situation », regrette Me Nathalie Bucquet, avocate qui représentera l’association Innocence en Danger lors du procès.

« Ce n’est pas qu’un dossier de maltraitance, on parle ici de tortures »

« Sandrine Pissarra apparaît comme une authentique charmeuse, qui a su donner le change. Les enquêtes des services sociaux n’avaient alors rien apporté de spécifique, défend de son côté une source judiciaire. Dans les années 2010, le collectif n’a peut-être pas été assez attentif, mais on ignore si des décisions contraires auraient préservé Amandine, bien plus tard, des actes qu’elle a subis à partir de mars 2020 et qui ont entraîné son décès. »

« Il me semble difficile d’imputer une responsabilité manifeste à l’institution, abonde Me Florian Médico, avocat du père d’Amandine, également trompé par les manigances de son ex-compagne. Ce n’est pas qu’un dossier de maltraitance, on parle ici de tortures, mises en place à la faveur du confinement et qui en l’espace de trois mois ont abouti à la mort d’une enfant. »

Pour les associations, l’argument de la fatalité, même en présence d’un adulte manipulateur, reste inaudible. Elles appellent depuis des années à la création d’un fichier qui centraliserait tous les types d’alerte « pour une intervention efficace en fonction de la convergence d’éléments : signalements de l’Éducation nationale, des médecins, plaintes et mains courantes, mesures d’assistance éducative, absences et changements d’établissement scolaire… mais aussi de façon anonyme les amis, dont certains n’ont pas témoigné à la demande d’Amandine », liste Me Bucquet.

« Entre la protection des données, l’argument classique, et la protection des enfants, le choix me semble évident », tacle ainsi Isabelle Debré.

Source

Au procès du calvaire d’Amandine, morte à 13 ans, sa mère tente de se disculper : « J’étais dépassée »

Jugée pour tortures sur sa fille, Sandrine Pissarra a nié à l’ouverture de l’audience l’avoir affamée et maltraitée. Son compagnon, en pleurs, s’est montré incapable d’expliquer son inaction coupable.

Le voilà donc, ce duo de bourreaux dont « l’alliance diabolique », selon les termes d’un psychiatre, avait commis l’impensable : enfermer une enfant de 13 ans dans un débarras jusqu’à la laisser mourir de faim.

Le 6 août 2020, à l’issue d’une lente agonie ayant prospéré à la faveur du confinement lié à la pandémie de Covid, Amandine avait été découverte, inanimée et méconnaissable, dans leur maison à Montblanc (Hérault).

Ce lundi 20 janvier, Sandrine Pissarra et son compagnon de l’époque Jean-Michel Cros prennent place dans le box des accusés de la cour d’assises de l’Hérault pour y rendre des comptes :

« tortures ou acte de barbarie ayant entraîné la mort », faits passibles de perpétuité pour elle ; « privation de soins », trente ans encourus, pour lui.

Avec ses longs cheveux châtains lâchés sur son pull noir, son allure naturelle, son ton presque enfantin en décalage avec ses 54 ans, on peine d’emblée à retrouver chez cette mère de huit enfants, prothésiste ongulaire de métier, le portrait au vitriol d’une femme « charmeuse, manipulatrice, dominatrice, vénale et violente ».

Le résumé des faits entrepris dans la foulée par le président de la cour, dans lequel s’empilent les mots « brimades », « punitions », « humiliations », « déchaînement de coups », « privations » et même « châtiments alimentaires » compense largement.

A ses côtés, ébranlé, Jean-Michel Cros essuie ses larmes. Cheveux clairsemés, barbe poivre et sel et ventre bedonnant, l’homme « gentil, travailleur et naïf » de 49 ans a tout du « nounours » qui, pour autant, a docilement secondé sa compagne dans son entreprise mortifère. Et ce, alors même qu’il considérait Amandine comme sa propre fille, persiste-t-il à dire.

« Et si je dis que vous avez préféré détourner les yeux ? »

Mais comment diable est-ce possible, semble s’interroger le président de la cour ?

Dans le déni, Sandrine Pissarra n’a jamais concédé la moindre violence sur ses enfants, encore moins reconnu avoir enfermé ou affamé Amandine. Son compagnon, lui, a émis ses regrets de n’avoir pas vu… alors même qu’il avait posé une caméra pour surveiller Amandine depuis son téléphone, et un verrou sur la porte de son cachot.

Dans ce dossier où tout est odieux, Éric Emmanuelidis attaque bille en tête, une colère sourde dans la voix.

« Alors, qu’est-ce que vous avez vu ? »

« Je, je… bredouille l’accusé, pris à froid. J’ai vu Amandine faire des lignes, subir les colères de sa mère, mais pas de violences physiques. J’ai pas vu… »

« Comment ça ? »

« Je ne sais pas, je ne peux pas expliquer », pleurniche-t-il.

« Mais ça saute aux yeux ! On a les photos de la rentrée scolaire, c’est une petite jolie, magnifique, et on a aussi les photos finales. Et pourquoi elle ne mangeait pas ? »

Patron d’un centre de contrôle technique, l’accusé se retranche derrière ses horaires tardifs.

« Je croyais qu’elle mangeait. »

« Monsieur, si elle mangeait, elle n’aurait pas pesé 28 kg. »

Effacé et incapable de dire non, Jean-Michel Cros concède qu’il craignait les foudres de sa compagne, envers laquelle il se trouvait « dans un état de sujétion totale », décryptera un peu plus tard l’experte psychologue.

Une emprise dont il avait cherché à se défaire en 2017, conscient des excès de Sandrine Pissarra sur ses enfants. Pour finalement céder à son chantage affectif et accéder à toutes ses demandes, notamment financer ses opérations de chirurgie esthétique, et agir « comme un robot ».

Une cécité qui, peut-être, lui convenait aussi. Avec Sandrine Pissarra, l’accusé accédait à une vie de famille, ce dont il avait toujours rêvé.

« Et si je dis que vous avez préféré détourner les yeux ? s’enquiert Éric Emmanuelidis.

Vous aviez peur de perdre qui ? » « Les enfants ». « Donc vous en avez sacrifié une ? »

Silence.

« Monsieur, Amandine était tellement faible qu’elle ne pouvait plus bouger, à tel point qu’elle avait des escarres. Qu’est-ce qu’il vous fallait de plus ? »

« C’était une enfant compliquée »

L’interrogatoire se poursuit avec Sandrine Pissarra, qui tient la même ligne, en pire.

« Je ne peux pas vous expliquer de quoi elle est morte », entame-t-elle.

« Le légiste a répondu : elle est morte de faim et d’une septicémie, la coupe, glacial, le magistrat. Vous refusiez de la nourrir ? »

« Non, c’est pas le cas. » Amandine était anorexique, a-t-elle toujours clamé.

« Elle s’est laissée mourir, alors ? » ironise le président.

Les accusés ont toujours dit avoir tardivement remarqué son état, sans penser l’emmener à l’hôpital.

« Elle refusait. »

« Et alors ? Elle a 13 ans ! »

Sandrine Pissarra, qui avait affirmé à la psychologue ne pas se sentir comme une « mauvaise mère », justifie ses cruelles punitions. Les lignes, qu’Amandine devait copier jusqu’à épuisement ?

« C’était une enfant compliquée. »

« C’est-à-dire ? Elle volait, elle mentait. »

« Et elle volait quoi chez vous, pendant le confinement ? »

Le président relit le dernier SMS envoyé à l’une de ses amies, le 30 avril, dans lequel Amandine raconte avoir dérobé des œufs et du pain, affamée, mais aussi sa certitude d’être punie.

D’après sa mère, c’est pourtant parce qu’elle en avait « envie » qu’Amandine se trouvait dans le débarras.

« Nue ? Elle avait envie ? » s’étouffe le président.

« J’étais dépassée », finit par lâcher Sandrine Pissarra, qui dit avoir aimé sa fille.

Ce que la psychologue traduit plutôt par de la haine, envers cette petite fille qui ressemblait tant à son père, un homme honni par l’accusée.

« Vous conviendrez madame, qu’il existe plein de couples divorcés. Ça ne finit pas toujours par une enfant qui meurt affamée avec des plaies purulentes. On est peut-être au-delà du simple dépassement ?

Vous, vous reconnaissez une faute ? » « De ne pas avoir su voir, de ne pas avoir pu réagir. »

Source

Lors du procès de Sandrine Pissarra, jugée pour avoir affamé et torturé sa fille Amandine jusqu’à sa mort en août 2020, deux experts ont livré leur analyse de la personnalité de l’accusée.

Selon eux, la mère d’Amandine présente des traits narcissiques marqués, une incapacité à l’autocritique et une absence totale d’empathie.

Amandine, 13 ans, est morte le 6 août 2020 après avoir été enfermée et affamée depuis le début du confinement, le 17 mars.

Sa mère, Sandrine Pissarra, comparait depuis ce lundi 20 janvier devant la cour d’Assises de Montpellier pour actes de torture ou de barbarie ayant entraîné la mort sans intention de la donner.

Elle risque la prison à perpétuité. Lors de cette première journée d’audience, après la prise de parole des accusés, deux experts se sont succédé à la barre.

Marie-Chantal Cathala, experte psychologue, et le docteur Pascal Bernardin, expert psychiatre sont d’accord sur leur analyse : Sandrine Pissarra a une personnalité narcissique et ne fait preuve ni d’empathie ni de compassion.

“Enfermée dans une toute puissance maternelle”

Selon la psychologue, qui a rencontré la mise en cause quatre fois en six mois, Sandrine Pissarra “est autoritaire, autocentrée, impulsive. Elle est dans l’incapacité à porter un jugement autocritique”.

La mère d’Amandine est également “enfermée dans une toute puissance maternelle. Sa perception de l’éducation est fondée sur la violence et l’autoritarisme”. Elle fait preuve de “sadisme maternel assez prononcé”.

Son homologue psychiatre fait une analyse similaire :

Sandrine Pissarra est “incapable de se remettre en cause, son aptitude à l’autocritique est totalement défaillante, elle a des difficultés à établir des relations de réciprocité”.

C’est une femme qui “privilégie l’avoir, le faire et l’apparence, sait tout mieux que tout le monde, qui peut tout faire pour ne pas se sentir vulnérable”.

Et d’ajouter :

“Son excès de narcissisme, poussé à l’extrême, peut aller jusqu’à la perversité.”

“Elle reste persuadée qu’elle a été une bonne mère”

Cette personnalité, c’est “Amandine qui a été le récipient de tout ça. Cela vient de la grossesse difficile” et vécue seule, de l’accouchement prématuré et de la rupture très difficile avec le père de la jeune fille, qu’elle semble n’avoir jamais pardonné.

“Elle fera de cet homme une image diabolique, elle dit que c’est un pervers narcissique”, ajoute le docteur Bernardin.

Marie-Chantal Cathala ajoute qu’Amandine “est devenue la représentation diabolique de son père au quotidien. Il y a eu un déplacement de cette haine sur le corps de l’enfant”.

Au quatrième entretien avec l’experte, Sandrine Pissarra a admis “avoir conscience que sa fille pouvait mourir”, néanmoins, “elle reste persuadée qu’elle a été une bonne mère”.

Selon l’experte, l’accusée “s’est dit dépassée par Amandine depuis ses deux ans et demi, elle disait qu’elle avait le vice de voler les jouets de sa sœur et les goûters à l’école, qu’elle était suivie par un psychiatre”. Sur ce sujet, le Dr Bernardin ajoute :

“Elle fait un catalogue des troubles d’Amandine sans y percevoir de signes de détresse” de la petite.

Sandrine Pissarra est, selon les experts, “porteuse d’un déni mais exempte de tout délire”, responsable des ses actes, donc.

Source

Au procès du calvaire d’Amandine, la mère, Sandrine Pissarra, 54 ans, sort de son déni – « Oui, je reconnais les faits »

Il aura fallu attendre plus de quatre ans et deux jours de procès pour qu’enfin, la forteresse Sandrine Pissarra ne se fendille.

Jugée depuis lundi pour « tortures ou acte de barbarie ayant entraîné la mort sans intention de la donner » sur sa fille Amandine, morte de faim à 13 ans dans un débarras de leur maison de Montblanc (Hérault) le 6 août 2020, cette femme a livré, ce mardi, et pour la première fois, des aveux.

Il est 19h30 passées quand à l’issue d’une journée qui l’a vue décrite comme une despote par à peu près tous les témoins, dont deux de ses enfants, la cour d’assises de l’Hérault décide de la confronter à sa propre violence.

Celle qu’elle nie jusqu’à l’absurde, persistant à dire qu’elle n’a jamais frappé ni privé de nourriture Amandine, pourtant décrite par tous comme son « souffre-douleur »

L’enregistrement de la voisine diffusé pendant l’audience

Dans la matinée, les photos de l’enfant prises lors de sa découverte, son petit corps décharné posé à même le sol couleur rouge sang, ses yeux caverneux et son visage couvert de plaies avaient été projetées.

La salle en était restée saisie. Pas elle. D’une voix égale, Sandrine Pissarra avait maintenu ses dénégations, ses « je sais pas » et « je ne me rappelle plus », comme aveugle à cette horreur sur grand écran.

C’est par une bande-son que revient alors l’effroi. Un enregistrement réalisé à l’été 2019 par une jeune voisine du couple, choquée des cris et des maltraitances qu’elle avait déjà entendus, au point de décider, cette fois, de les documenter. Pas assez, malheureusement, pour convaincre ses parents de prévenir les autorités…

Dans le silence de la cour d’assises, résonnent alors les hurlements d’Amandine. La qualité médiocre de l’enregistrement n’enlève rien à son atrocité.

Jean-Michel Cros, l’ex-compagnon de Sandrine Pissarra, jugé à ses côtés pour « privation de soins », met ses mains sur les oreilles.

« Aïe, aïe, aïe », « J’ai rien fait, non madame ! » distingue-t-on

c’est ainsi que sa mère avait demandé qu’elle l’appelle. Ses cris d’épouvante tranchent avec le calme de Sandrine Pissarra, imperturbable :

« Tu vas voir », « J’te jure », et même « Je vais te crever », d’après la retranscription effectuée par les gendarmes.

L’écoute, éprouvante, s’achève. Le président de la cour demande alors à l’accusée de se lever.

« Reconnaissez-vous les violences commises sur votre fille entre 2014 et 2020 ? » questionne une nouvelle fois Éric Emannuelidis.

« Oui », lâche alors Sandrine Pissarra, d’une petite voix aiguë. Une brèche est ouverte, le président s’y engouffre.

« Reconnaissez-vous les actes de torture et barbarie, c’est-à-dire le fait de l’avoir tenue dénudée, affamée, reléguée pendant des semaines dans une pièce sans que personne ne puisse accéder à elle ? »

« Oui, je le reconnais ».

« Vous reconnaissez les faits ? » s’étonne presque le magistrat, qui depuis lundi se heurte à un mur.

« Oui, je reconnais les violences », poursuit l’accusée.

« Mais est-ce que vous reconnaissez les humiliations ? Je ne veux pas arracher des choses que vous ne voulez pas dire… donc vous reconnaissez les tortures et barbarie ? »

« Oui. »

Sandrine Pissarra est en larmes. Enfin. Le président creuse le sillon.

« Expliquez-nous… »

Mais c’est sans doute encore trop pour l’accusée qui, malgré quatre entretiens avec l’experte psychologue, n’avait fait qu’amorcer un début de remise en question.

« Je sais pas », bredouille-t-elle.

« C’est la première fois que je vous vois pleurer », remarque le magistrat.

Le compagnon explique être « passé à côté »

Le président se tourne alors vers le deuxième acteur de ce calvaire, celui qui s’est exécuté pour poser un verrou et une caméra dans la pièce dans laquelle Amandine avait été jetée aux oubliettes, sans jamais s’opposer à sa compagne.

Sans pouvoir expliquer non plus un tel aveuglement, une telle inertie. Lui aussi reconnaît les faits, ce qui le distingue de son ex-compagne.

« J’ai une culpabilité énorme. Je suis passé à côté de tellement de choses », souffle-t-il, de son fort accent méridional.

« Est-ce qu’on peut émettre l’hypothèse que vous vous êtes habitué ? » s’interroge le président, en écho aux enfants de Sandrine Pissarra qui avaient fini par penser, tant qu’ils étaient enfants, que leur vie faite de violences était, peut-être, normale.

« C’est possible. Oui, sur la longueur, je me suis habitué. »

Sauf que Jean-Michel Cros, lui, était un adulte, semble suggérer le président.

« Monsieur, ça a duré des semaines, le temps de l’amaigrissement et qu’apparaissent des escarres. Comment avez-vous fait pour ne pas réagir face à cette agonie ? »

« Je le déplore complètement. Avec le recul, avec le travail de la psy, je sais que j’avais très peur de madame, de son comportement, de ses colères. J’avais l’impression d’être un enfant, je baissais les yeux quand elle criait, je me revois baisser les yeux, et je pense que cette peur… »

« Juste un mot, le coupe le président. Vous vous seriez arrêté dix minutes à la gendarmerie en sortant de votre centre de contrôle technique, les gendarmes seraient venus, ils auraient ouvert la porte fermée à clé, et ils l’auraient sauvée. Ça vous aurait pris cinq minutes, monsieur. »

L’accusé sanglote. Beaucoup.

« Je sais. Je n’ai pas d’excuse. »

Source

« Je suis en colère contre cette femme » – au procès du calvaire d’Amandine, des alertes restées sans réponse

Un dossier avait été rédigé par le collège de l’adolescente de 13 ans un an avant sa mort, sans pour autant donner lieu à signalement. L’une des nombreuses occasions manquées de la sauver de sa mère, qui l’a laissée mourir de faim en 2020.

Elle est sans doute la seule à avoir véritablement perçu qu’Amandine était en danger. Et, quatre ans plus tard, savoir que cette petite fille de 13 ans et demi est finalement morte seule, dénutrie, mise au rebut dans le débarras de sa maison de Montblanc (Hérault), la bouleverse encore.

Anne-Claire L. était la conseillère principale d’éducation (CPE) du collège fréquenté par Amandine en classe de 5e, un an avant son décès, le 6 août 2020.

Devant la cour d’assises de l’Hérault qui juge jusqu’à vendredi Sandrine Pissarra, sa mère, pour « tortures et actes de barbarie ayant entraîné la mort » et Jean-Michel Cros, son beau-père, pour « privation de soins », cette professionnelle de l’éducation retrace avec acuité, ce mardi 21 janvier, les alertes qui avaient jalonné cette année scolaire.

Celles-ci avaient démarré dès le mois de novembre 2018, alors qu’au retour d’un week-end, Amandine avait réintégré l’internat avec un bleu à l’œil. La petite sert alors une explication étonnante, mais supplie :

« Surtout, n’en parlez pas à ma mère ».

Ce que fait pourtant l’infirmière du collège, qui va donner crédit à la version parentale. Dans la foulée, Sandrine Pissarra adresse à l’établissement un courrier que la CPE qualifie de « dégradant », décrivant Amandine comme « arrogante, voleuse et menteuse ».

« Je l’ai rappelée pour lui dire que je n’avais pas du tout noté ça, que ça se passait bien ».

Amandine est bien un peu rebelle, mais Anne-Claire L. se montre rassurante.

« Ne la félicitez pas », lui rétorque froidement la mère.

C’est alors que survient un vol à l’internat. La fillette fait partie des suspects.

« Ne cherchez pas, c’est elle », répond Sandrine Pissarra par SMS, bientôt convoquée au collège pour un entretien.

« Et là, Amandine va vivre une heure et quart de calvaire », raconte la CPE. Sa voix se brise.

« Elle tremblait, elle était terrorisée par sa mère, dans un état de stress hallucinant », se remémore-t-elle, émue.

Contacté, l’établissement fréquenté l’année précédente par Amandine, dans les Pyrénées-Orientales, confirme ses impressions :

Sandrine Pissarra ne vient pas chercher sa fille quand elle est malade, ne lui ramène pas son manteau si elle l’a oublié, en plein hiver.

Les signaux d’alerte s’accumulent. Après des bêtises, la fillette est, plusieurs fois, retrouvée cachée sous son lit. À l’infirmière du collège, elle prétend que c’est un jeu. Elle la croit. Anne-Claire L., elle, en pleure à la barre.

« Un enfant qui ne se sent pas menacé ne dort pas sous son lit ! »

Et puis, Amandine va faire des révélations à ses camarades : les punitions sans fin, les privations de nourriture – une assiette de haricots verts quand le reste de la famille mange pizzas et frites – voire rien du tout.

Convoquée pour un entretien en présence de l’assistante sociale, Sandrine Pissarra se montre hautaine, sûre d’elle, a réponse à tout.

Elle nie toute maltraitance, justifie les légumes verts par l’obésité du petit dernier et un régime familial, menace de porter plainte contre les camarades de sa fille, qui auraient tout inventé.

Amandine abonde, soumise.

« Sa mère faisait les questions et les réponses, la dénigrait. J’ai un mauvais comportement, j’ai un mauvais comportement. Amandine ne faisait que répéter ça. Elle marmonnait, dans un état de sidération, ses larmes coulaient…

Et sa mère qui disait ”tu te souviens qu’on a fait ça. Hein Amandine ?” Ça a été une heure trente de ”hein Amandine ?” » rejoue Anne-Claire L., révoltée.

La CPE remarque aussi ses pieds « dans un état dramatique », non soignés. Mais ni l’assistante sociale, ni l’infirmière du collège, ne partagent son inquiétude. Le pédopsychiatre qui suit Amandine depuis la petite enfance les a rassurées : c’est une adolescente qui teste les règles, tout simplement.

« Je n’ai jamais vu quelqu’un d’aussi dénigrant psychologiquement avec son enfant »

Anne-Claire L., elle, rédige deux rapports coup sur coup. Mais se heurte au scepticisme de ses collègues –

« je n’ai rien vu qui laissait penser à de la maltraitance » confirme l’infirmière.

La CPE doit insister pour que ses écrits soient transmis à l’Inspection académique, qui pourtant, n’en fera rien. Et ce, alors même que les écoles d’Amandine, à trois reprises entre 2010 et 2014, avaient déjà fait des signalements.

« Qu’est-ce que l’accusée vous inspire ? », finit par lui demander le président de la cour, sensible à son émotion.

« Honnêtement ? Un profond dégoût.

Je suis en colère contre cette femme, dès le début elle m’inspirait de la malveillance.

Je n’ai jamais vu quelqu’un d’aussi dénigrant psychologiquement avec son enfant.

Des parents dépassés, on en voit. Des parents maltraitants aussi. En général, ils se cachent. Pas là ».

L’année scolaire touche à sa fin. Sandrine Pissarra informe Anne-Claire L. que sa fille va changer d’établissement… et même de département.

« C’est typique des parents maltraitants, ils savent que le temps que les services sociaux se mettent en branle… », décrypte la CPE.

À l’été 2019, les sévices se poursuivent, captés par une petite voisine qui les enregistrera à l’aide de son téléphone portable.

Une bande-son si terrible que, mardi dans la soirée, après l’avoir entendue, Sandrine Pissarra a enfin reconnu, en larmes, ce qu’elle niait depuis quatre ans : humiliations, coups, enfermement durant des mois et privations de nourriture sur Amandine.

Mais ces voisins n’alerteront personne, n’écouteront même pas la bande, qui restera un an sans jamais être exploitée.

Pour sa dernière confidente, « c’était un rayon de soleil »

Dans son nouveau collège, à la rentrée 2019, Amandine s’intègre, se fait des amis, et même un petit copain.

« Elle était gaie, joyeuse, elle riait tout le temps. C’était un rayon de soleil », témoigne à la barre Justine, dont elle était alors inséparable.

Quand le confinement lié à la pandémie de Covid démarre, elle devient, sans le savoir, sa dernière confidente.

Dans les rares échanges retrouvés – l’adolescente est alors aussi interdite de téléphone, et écrit en cachette – elle confie être privée de nourriture, notamment pour avoir dérobé… du pain et des œufs.

« Quand on va se revoir tu seras fine comme une feuille de papier », plaisante sa copine.

« Ooooh oui. J’ai déjà maigri », lui répond Amandine, ponctuant son message d’un emoji qui pleure.

L’échange se poursuit sur le confinement, et leur hâte de se retrouver. Ce sera son dernier signe de vie.

« Elle était heureuse… Je ne m’attendais pas du tout à ça », dit celle qui, désormais âgée de 18 ans, se repend de n’avoir pas compris.

« Aujourd’hui, je me dis que j’étais jeune et bête, qu’elle m’envoyait des signaux et que j’aurais dû réagir », lâche-t-elle, soudain plus sombre.

Le président soupire.

« Peut-être qu’un adulte, surtout, aurait pu le faire… »

Source

« Comme si ma sœur n’avait jamais existé » – au procès de la mort d’Amandine, la fratrie à la barre

Les frères et sœurs de la fillette, morte de faim à 13 ans, ont livré devant la cour d’assises de l’Hérault le récit d’un système d’emprise mis en place par leur mère, où coups et privations étaient la norme, et dont les plus jeunes peinent encore à s’extraire.

C’est la mort de leur sœur dont il est question depuis lundi devant la cour d’assises de l’Hérault, mais Sandrine Pissarra, leur mère, pourrait tout aussi bien être jugée pour les sévices qu’elle leur a infligés à tous.

« Se faire frapper, c’était normal », ont résumé les frères et sœurs d’Amandine, véritables rescapés de ce huis clos de toute-puissance et de cruauté qui avait été fatal à la fillette de 13 ans, enfermée et affamée jusqu’au trépas, le 6 août 2020.

Mais les coups de louches, de balai, de pied et de poing, les étranglements, les tâches ménagères dès cinq heures chaque matin, les humiliations, les privations d’eau et de nourriture durant des jours ne font jamais tant souffrir que parce qu’ils sont commis par ceux censés aimer et protéger : les parents.

Même ceux qui ne disent jamais « je t’aime », et ne font des câlins qu’à Noël parce qu’ils sont ivres, comme Sandrine Pissarra.

Même les bourreaux comme elle, jugée pour « tortures ou acte de barbarie », aux côtés de son compagnon Jean-Michel Cros, qui avait laissé faire.

« C’est triste à dire, mais je l’aimerai toujours… » en pleure d’ailleurs sa fille Ambre, ce mercredi 22 janvier, encore incapable, plus de quatre ans après le drame, de résoudre ce conflit de loyauté.

« Elle dormait dans le cagibi, sinon, on la voyait toute nue faire le ménage »

La veille, les deux grands enfants de Sandrine Pissarra l’avaient publiquement reniée, lucides quant au « totalitarisme familial » qu’elle avait mis en place, selon l’expression du président de la cour, Éric Emmanuelidis.

Un système d’endoctrinement dont on mesure les dégâts en entendant Ambre, 19 ans, raconter à la barre le calvaire d’Amandine d’un ton presque enjoué et d’une voix très enfantine, comme une petite fille raconterait sa journée d’école.

« Maman était de plus en plus agressive durant le confinement (lié à la pandémie de Covid). On ne voyait pas souvent ma petite sœur, nous, on était beaucoup dehors. Elle dormait dans le cagibi, sinon, on la voyait toute nue faire le ménage », raconte-t-elle à toute vitesse.

« Pourquoi toute nue ? » la stoppe le président.

« Ben, pour éviter qu’elle vole des choses, des goûters, qu’elle les mette dans sa poche », répond-elle, comme une évidence.

Elles n’avaient qu’un an d’écart, mais hormis le fait qu’Amandine était maltraitée, mal-aimée depuis toujours, la jeune fille n’a finalement que peu de souvenirs à livrer.

Y compris sur cette période, durant laquelle la fillette semblait, bien avant sa mort, avoir déjà été effacée.

« Nous, on faisait nos vies, et elle, elle était en bas. Sur la fin, c’était comme ça », lâche-t-elle.

Grâce à une caméra posée dans le débarras et reliée à une tablette, Sandrine Pissarra surveillait sa fille « en faisant du tricot ».

Ambre, complètement aliénée à la parole de sa mère, n’y faisait « pas attention ».

« J’ai été un peu égoïste, ça ne m’intéressait pas de regarder. » « On n’a pas vu la dégradation au niveau du poids, on faisait plus la différence », assure toutefois la jeune fille, qui, parfois, jouait au kapo à la demande de Sandrine Pissarra.

« Je leur ai dit : laissez tomber, elle est morte »

« En fait, je venais l’aider à faire ses lignes plus vite. Parfois, maman lui disait : Si tu fais 25 pages, tu pourras manger ».

Avec son petit frère, Ambre rend visite parfois à sa sœur pour lui prêter un téléphone et qu’elle puisse écrire à ses amies. Ethan, lui, alors âgé de dix ans, se souvient lui avoir donné à manger en douce. De rares épisodes de clairvoyance, dans ce fol engrenage.

« Mais les coups, vous les entendiez ? » s’enquiert le président, dérouté par ce récit tragique, énoncé sans affect apparent.

« Ah oui, oui », reconnaît-elle, tout en étant incapable de dater les faits, victime d’un « black-out », à l’évidence dû au traumatisme.

Ce 6 août 2020, c’est à elle qu’on demande, alors qu’elle n’a que quinze ans, de laver et habiller Amandine, déjà réduite à l’état de cadavre.

Authentique, reconstruit ou encore empreint des mensonges de sa mère, son récit est quoi qu’il arrive glaçant.

« Quand je lui ai enlevé le T-shirt, décrit-elle, j’ai pu constater son état. Je me suis dit : Ah ouais, là, c’est chaud. Je l’ai assise dans la douche, elle a essayé de me parler, mais je ne comprenais pas ce qu’elle disait. »

Sa mère veut emmener Amandine aux urgences, mais il est déjà trop tard.

« Je l’ai posée sur le lit, elle a moussé de la bouche et s’est mise à faire des convulsions. Je leur ai dit :

Laissez tomber, elle est morte. Ses yeux étaient tout noirs, tout vides ».

« J’espérais juste que maman sorte de prison, je ne voulais pas la décevoir »

En bon petit soldat, comme tous l’avaient déjà fait lors des enquêtes sociales diligentées des années plus tôt, et qui n’ont jamais abouti, elle va mentir aux enquêteurs, et réciter le discours de sa mère sur une prétendue anorexie d’Amandine.

« J’espérais juste que maman sorte de prison, je ne voulais pas la décevoir », fond-elle en larmes, bousculée par le président de la cour.

« Quel est votre préjudice ? » l’attaque-t-il sèchement.

« Je veux qu’elle paie pour la mort de ma petite sœur », marmonne-t-elle, heurtée.

Son avocate vient alors à son secours. D’un ton doux, Me Maëlle Martin-Veleine parvient à assécher ses larmes.

« Les jours suivant, vous étiez comme anesthésiée ? ».

« C’est ça, y avait plus rien ».

« Y avait-il de la place pour votre douleur de petite fille, pour le deuil ? »

« Non, on ne pouvait pas parler d’Amandine ».

Quelques minutes plus tard, son petit frère Ethan témoignera du même enfer, et d’une maturité certaine, malgré ses quinze ans. Lui qui dit encore aimer sa mère, « mais moins qu’avant », fait ce constat terrible.

« Après la mort d’Amandine, je me suis demandé qui serait le prochain. J’étais triste, mais ma mère était soulagée. C’est comme si ma sœur n’avait jamais existé. »

Source

Amandine, morte de faim à 13 ans – les remords et la douleur de Frédéric Florès, son père partie civile au procès. Son père est un policier également auteur de violences contre ses enfants lorsqu’il était encore en couple avec Sandrine Pissarro.

Quand Frédéric Florès a reçu, “vers 22 heures”, le coup de fil lui annonçant la mort d’Amandine, cela faisait trois longues années qu’il n’avait pas vu ses enfants.

Empêché de le faire, selon lui, par son ex-femme, Sandrine Pissara jugée pour “acte de torture et de barbarie”, qui faisait systématiquement barrage.

“Elle m’avait blacklisté” précise-t-il aux jurés de la cour d’assises, mais pour les deux enfants qui lui restent, Ambre, 18 ans, et Ethan, 15 ans, c’est lui qui les a abandonnés et aujourd’hui, parties civiles comme lui et présents au procès, ils ne lui parlent plus.

“Vous êtes un père qui a perdu sa fille dans des conditions atroces”- Le président

À l’Institut médico-légal de Montpellier en tout cas, et malgré l’état terrifiant de sa fille, “en tant que père”, il l’a “reconnue tout de suite” se rappelle-t-il, la gorge nouée par des sanglots.

Il est resté “une heure” auprès de la dépouille meurtrie de son enfant parce que, malgré cette “scène de frayeur”, il savait que c’était la dernière fois qu’il la voyait.

Pressé de questions sur les années passées, il parle de ses remords qui le submergent :

“j’ai l’impression d’avoir fermé les yeux sur des choses, il y a une partie de moi qui a honte”.

Frédéric Florès s’en veut de n’avoir pas su tenir compte des signes qui montraient que, 10 ans avant sa mort, Amadine était déjà maltraitée si l’on en croit ses bleus, ses absences à l’école et ses troubles du comportement qui étaient consignés dans des notes par ses enseignants de maternelle.

“Si je l’avais vue maigrir comme ça, j’aurai réagi”- Le père

Tout en martelant que ce procès n’est pas le sien, le président de la cour observe que le père n’est pas exempt de tout reproche puisqu’à cette époque-là, lui-même, l’ancien policier, a été l’auteur de violences : Amandine enfermée dans un placard, Cassandra dans la cave, coup de poing au visage de Jérémy.

“Ce ne sont pas des méthodes d’éducation très ordinaires” lui fait remarquer le magistrat.

Frédéric Florès se sent profondément désolé, il s’en est déjà excusé devant la cour et auprès des intéressés.

Sous la coupe de sa femme

Avec le recul, il réalise qu’il était “sous l’emprise” de Sandrine Pissara, une femme de 54 ans présentée par ses proches comme vénale, manipulatrice, menteuse, froide et violente.

À ces mots, on pense inévitablement à son co-accusé Jean-Michel Cros, le beau-père de 49 ans que tout le monde décrit un “homme généreux”, “calme”, “un nounours”, mais qui a commis un crime pour lequel il encourt aujourd’hui 30 ans de prison.

“Ce qui est quand même assez fou à ce stade, c’est que le seul sentiment de culpabilité qui ressort, c’est du côté de la partie civile” relève Me Florian Medico, un des avocats de Frédéric Florès, “mon client est très conscient de ses propres failles et des raisons pour lesquelles ces failles existent”.

Les enseignants et les médecins “ont fait le job” (mais pas la JAF et l’experte-psychologue)

À l’examen minutieux de ce drame, le président Éric Emmanuelidis estime que “les enseignants ont fait le job” tout comme les médecins.

Une enquête pour maltraitance a été ouverte 2014, puis classée sans suite l’année suivante par la Juge aux affaires familiales qui s’est appuyée sur le rapport de l’experte psychologue.

Cette dernière a estimé, entre autre, que Sandrine Pissara était très à l’aise pour parler de ses enfants et que leur relation était chaleureuse. Commentaire acerbe du président :

“On ne peut pas dire qu’elle ait eu beaucoup de nez”.

Source

« Elle répétait : je vais mourir » : au procès du calvaire d’Amandine, le témoignage choc d’une surveillante de son collège

Une ancienne employée de l’établissement où la jeune adolescente était scolarisée en 2020 a raconté, ce jeudi devant la cour d’assises de l’Hérault, les suppliques de l’élève, terrifiée à l’idée de repartir chez sa mère à l’annonce du confinement.

Une alerte de plus restée sans effet.

Combien d’alertes ignorées ? Combien de ratés dans le suivi de la famille ?

Au procès de Sandrine Pissarra, jugée depuis lundi pour « tortures ou acte de barbarie ayant entraîné la mort sans intention de la donner » sur sa fille, aux côtés de son compagnon Jean-Michel Cros, qui répond lui de « privation de soins ou d’aliments », on ne compte plus les occasions manquées de sauver Amandine.

Souffre-douleur de sa mère depuis toujours, l’enfant de 13 ans avait été enfermée, frappée, et affamée jusqu’à en mourir, le 6 août 2020 à Montblanc (Hérault).

Trois signalements avaient été effectués entre 2010 et 2014, le dernier donnant même lieu à une enquête de gendarmerie.

Un rapport alarmant de la CPE (conseillère principale d’éducation) du collège d’Amandine l’année précédent sa mort, n’avait même pas donné lieu à une « information préoccupante » pour saisir les services sociaux, alors même que l’inspection académique avait connaissance des précédentes alertes, émises par des professeurs des écoles, déjà catastrophés à l’époque.

Des voisins du couple Pissarra/Cros, qui entendent cris et coups à l’été 2019, enregistrés par leur fille, sans qu’ils ne jugent opportun de prévenir les autorités…

Mardi soir, cette animatrice de cantine et son mari ont quitté la salle de la cour d’assises de l’Hérault pour ne pas entendre la bande-son qui allait être diffusée.

Celle-ci est si terrible qu’elle en a arraché des aveux à Sandrine Pissarra, qui jusque-là niait tout. Une femme tyrannique et une manipulatrice de haut vol, presque un gourou, qui a su se jouer de tous. Mais tout de même.

Il aura fallu ce procès et sa médiatisation intense pour que, ce jeudi 23 janvier au matin, un témoin surprise se manifeste. Lola G. était surveillante d’internat dans le dernier collège fréquenté par Amandine en 2019-2020, à Sigean (Aude) — pour ventiler les soupçons, sa mère en changeait à chaque rentrée.

La jeune femme se souvient d’une enfant « très ouverte avec ses amis, elle en avait beaucoup », mais méfiante à l’égard des adultes.

« Elle était terrorisée à la moindre mauvaise note, elle volait à la cantine… »

Plusieurs signaux l’avaient alertée, dès la rentrée de septembre.

« Elle n’était jamais en manches courtes même quand il faisait chaud, elle était terrorisée à la moindre mauvaise note, elle volait à la cantine… »

Une gamine rieuse et joyeuse, ont témoigné d’autres camarades, capable aussi de faire de son humour une arme pour faire en sorte que jamais, surtout, on n’appelle sa mère.

« Je lui ai demandé : mais Amandine, ça ne se fait pas de voler comme ça… tu ne manges pas à la maison ? », raconte la surveillante.

On se figure enfin cette enfant en vie, pétillante, par ce seul trait d’esprit.

« Elle m’a répondu : si, mais il faut bien nourrir ce cerveau de génie. Elle prenait tout à la rigolade, elle était très drôle. »

Si Lola G. a pris le soin de se signaler à la cour d’assises de l’Hérault, c’est parce qu’elle est l’une des dernières personnes à avoir vu Amandine en vie.

Parce qu’elle se souvient avec acuité de ce soir du jeudi 12 mars 2020 : la France est alors à un point de bascule, gagnée par la pandémie de Covid. La surveillante installe les enfants dans la salle de télévision, pour écouter l’allocution d’Emmanuel Macron.

« Elle s’est effondrée au sol »

« Quand le président a annoncé que le collège allait fermer, les garçons se sont mis à crier de joie. Pour eux, c’était les vacances. Amandine, elle, s’est effondrée au sol. Je lui ai demandé ce qu’il se passait et elle m’a dit :

je vais mourir. Elle n’arrivait même pas à respirer, elle pleurait et répétait en boucle : je vais mourir, je vais mourir, je vais mourir… Je ne vais pas tenir, aide-moi, ne m’abandonne pas. »

La jeune femme fond en larmes à la barre. La salle d’audience aussi.

« J’avais 22 ans, je ne savais pas quoi faire, lâche-t-elle, la voix brisée. Les autres petites pleuraient aussi. Elles avaient l’air au courant, elles lui disaient : tu viendras chez moi une semaine, puis tu iras chez moi… »

Lola G. parvient, à grand-peine, à calmer Amandine et à la coucher. Dès le lendemain, elle avise la CPE pour l’avertir.

« Elle m’a dit qu’elle allait gérer, que l’assistante sociale était déjà au courant. J’ai dit au revoir à Amandine, et c’est la dernière fois que je l’ai vue. »

Le confinement se déroule sans aucune nouvelle de la petite fille.

Le 7 mai, le collège rouvre, mais pas l’internat, pour raisons sanitaires. La petite ne réapparaît pas, ne rend toujours aucune évaluation, aucun devoir.

« Il restait ses affaires, ses draps. On a essayé de joindre la mère, en vain, raconte encore Lola. Ses copines avaient des messages qui disaient qu’elle ne mangeait pas et qu’elle faisait le ménage chez elle. »

Les gendarmes prendront bien attache avec le collège durant l’enquête. Ce dernier répondra qu’aucun incident n’avait été porté à sa connaissance.

Source

Procès du calvaire d’Amandine – « Je suis un monstre, mais je n’ai vécu que dans la violence »

Après avoir reconnu les faits mardi alors qu’elle les niait depuis toujours, Sandrine Pissarra a rétropédalé lors de son interrogatoire, n’admettant que des violences sur sa fille, enfermée et morte de faim en 2020, et se plaçant elle-même en victime.

Son compagnon n’a guère su expliquer sa propre inertie.

Comment a-t-il pu laisser faire ? Comment Jean-Michel Cros, 49 ans, un homme décrit par son entourage comme un homme bon, un « nounours », a-t-il pu s’aveugler au point de laisser celle qu’il considérait comme sa fille mourir de faim sous son propre toit, à Montblanc (Hérault) ?

« Je mérite d’être là. Je donnerais ma vie contre celle d’Amandine », se flagelle, ce jeudi 22 janvier, l’ancien compagnon de Sandrine Pissarra.

Mais quatre ans après le décès de la fillette de 13 ans, morte en août 2020 de dénutrition et d’une septicémie en raison d’escarres qui s’étaient infectées dans le cagibi où elle était enfermée, l’homme n’a toujours pas d’explication.

« Je ne sais pas comment j’ai pu occulter à ce point et ne pas réagir, je ne le conçois pas », répète-t-il devant la cour d’assises de l’Hérault, où il encourt trente ans de prison pour « privation de soins ou d’aliments ».

Lui assure n’avoir jamais été témoin de violences physiques, mais, dès 2018, de brimades et de cris quotidiens sur Amandine, déjà réduite à manger une barquette de céleri ou des haricots verts dans son coin, sur ordre de sa mère.

Totalement inféodé à Sandrine Pissarra, son compagnon adhère progressivement à son discours paranoïaque sur le père des enfants, qu’elle a chassé de leur vie, et sur le caractère quasi-diabolique qu’elle attribue à sa fille.

« Je crois que j’avais fini par m’en faire une réalité », avoue-t-il, évoquant une ambiance quasi-sectaire.

« La veille encore, on aurait pu la sauver ! »

Avec le confinement, les punitions et privations s’aggravent et vont crescendo dans l’été, sans qu’il n’ose s’opposer.

« Je me sentais impuissant. Je ne faisais plus rien sans permission, j’en étais arrivé à ce point… », assure cet homme effacé qui avait la « boule au ventre » en rentrant chez lui le soir.

Il pose des caméras dans le cagibi, un verrou sur la porte, mais jure qu’il pensait qu’Amandine mangeait et sortait.

« Je ne la voyais quasiment jamais, je n’avais pas le droit », justifie-t-il pour expliquer qu’il n’ait pas remarqué sa dégradation physique, jusqu’à la veille de sa mort en consultant la vidéosurveillance depuis son portable.

« J’étais à la rivière avec les enfants, replace-t-il, et je vois Amandine au sol au pied du tabouret qui cherche à se relever… »

La petite agonise, mais le couple n’appelle pas les secours.

« Sandrine m’a dit qu’elle faisait de l’anorexie et qu’elle avait peur des hôpitaux, je l’ai crue ».

« La veille encore, on aurait pu la sauver ! » le tance le président de la cour, qui demande alors de faire projeter deux captures d’écran retrouvées sur les téléphones de la famille.

La première montre Amandine, nue, la peau sur les os, recroquevillée sur elle-même et les genoux sur un rouleau de linoléum – énième variante d’une punition fétiche de sa mère.

« Comment on peut faire ça à une enfant, c’est dégueulasse… » s’effondre Jean-Michel Cros, qui assure n’avoir jamais vu ces images.

La seconde évoque l’univers concentrationnaire : Amandine, squelettique, se tient debout, adossée à une pile de cartons.

« C’est le 27 juillet, il lui reste dix jours de vie. Regardez ! À côté d’elle il y a des vêtements de ski, elle n’ose même pas s’habiller », fulmine le président.

« C’est inhumain, inhumain… » agonise l’accusé.

« Elle vous a défiée, et vous n’aimez pas ça… »

Sandrine Pissarra est à son tour extraite du box, pour être interrogée à la barre.

« Expliquez-nous », la lance le président.

Alors qu’elle avait reconnu les faits de « tortures ou actes de barbarie ayant entraîné la mort » mardi soir, après avoir écouté l’enregistrement d’une voisine où elle hurle sur Amandine, qui la supplie d’arrêter ses coups, Sandrine Pissarra fait machine arrière.

Elle reconnaît bien quelques violences – « des gifles, oui. Tirer les cheveux, ça m’est arrivé » – et ce qu’elle persiste à appeler des punitions : faire des lignes jusqu’à épuisement dans le débarras.

Revenue de son internat à la faveur du confinement, Amandine aurait refusé de faire ses devoirs, avance-t-elle.

« Elle vous a défiée, et vous n’aimez pas ça… », suggère le président.

« C’est ça. »

La fillette finit par passer ses journées enfermées, sans aucune justification.

« Vous la punissiez de quoi ? » « De tout. » « Vous la punissiez d’exister ? » enrage le président.

« Non, non… »

« Que voyez-vous en elle madame : un ennemi, un adversaire ? Quelle est cette rage qui vous anime ? Ça dure des années, sur tous les enfants… ».

De sa petite voix, ton égal, Sandrine Pissarra cherche une porte de sortie.

« Je ne sais pas. Les traumatismes de mon enfance, sûrement. La ressemblance d’Amandine avec son père, sans doute ».

Plus tôt dans la matinée, l’accusée avait livré le récit, tu jusqu’ici « par honte », d’une enfance passée dans le dénuement, faite de coups et de brimades de la part de sa mère, une femme dépressive et colérique dont elle ne s’est jamais sentie aimée.

« Je sais ce que c’est que de s’endormir le ventre vide », avait-elle osé, tandis qu’Amandine, assure-t-elle encore, « mangeait ce qu’elle voulait ».

« Elle crevait de faim ! s’insurge le président. Et comment en arrive-t-on à ce qu’elle pèse 28 kg alors ? »

« J’ai fermé les yeux sur son état… je n’ai pas su réagir », bredouille-t-elle.

« Vous vouliez qu’elle meure ? »

« Ah non, tout ce que vous voulez mais pas ça, se met-elle à pleurer. Jamais je n’ai voulu sa mort »

« Qui lui a fait ses ongles, madame ? »

C’est pourtant ce qui va se produire le 6 août 2020, une journée qu’elle raconte de manière mécanique, reprenant ses déclarations de garde à vue.

Constatant son état, elle aurait supplié Amandine d’avaler quelques cuillérées de compote, puis une boisson hyperprotéinée achetée à la pharmacie par Jean-Michel Cros, sous peine d’appeler les pompiers.

« Elle m’a dit non maman, pas l’hôpital », jure-t-elle.

Amandine est ensuite douchée et habillée par Ambre, sa grande sœur, mais convulse, et meurt.

Les pompiers ne sont appelés que deux heures plus tard, ce que personne – ni l’accusée, ni Jean-Michel Cros, ni Ambre – n’est capable d’expliquer.

Jean-Marie Beney, avocat général, embraie d’un ton calme, bienveillant.

« Vous avancez par moments, madame. Et puis, quand on rentre dans le dur, vous reculez… »

Sur ce temps de latence, l’expérimenté magistrat a bien une idée.

« Peut-être fallait-il la rendre la plus présentable possible ? »

Mais Sandrine Pissarra ne se souvient pas.

Ni de qui l’a montée prendre sa douche, alors qu’elle n’avait plus de force, ni qu’on lui ait appliqué de la pommade sur ses plaies, ni même de ses mains impeccables, qui interpelleront le légiste.

« Qui lui a fait ses ongles, madame ? », demande le magistrat.

« Je ne sais pas ».

« Rappelez-moi votre profession ? »

« Prothésiste ongulaire ».

« Mardi vous avez reconnu pour la première fois, pose en défense Me Jean-Marc Darrigade, l’un de ses avocats. Peut-être était-ce aussi la première fois que vous vous les étiez avoués à vous-mêmes ? »

« Oui », souffle Sandrine Pissarra, qui admet avoir su qu’elle était un danger pour sa fille, mais blâme ses ex-compagnons, et même ses autres enfants, « alors que tous savaient que j’avais subi des maltraitances ».

« J’ai appelé à l’aide… en recevant les services sociaux », tente-t-elle encore, alors qu’elle terrorisait ses enfants pour qu’ils se taisent, car il était « impensable » qu’ils soient placés.

Une inversion des rôles qui montre l’immense chemin qui lui reste à parcourir, jusqu’à ce mea culpa final :

« Je suis comme on le décrit, j’en ai honte. Je suis un monstre, je suis monstrueuse, mais je n’ai jamais vécu que dans la violence. Et ça fait quelqu’un comme moi… »

Mardi, Jérémy, l’un de ses grands enfants, qui avait coupé les ponts à 18 ans et s’est reconstruit grâce à un long travail psychologique, avait déjà posé sa sentence.

« Je la déteste, mais l’enfermer à perpétuité ne suffira pas. Je veux qu’elle soit soignée, et il y a vraiment un gros travail ».

Source

« Vous avez pénétré dans l’horreur, l’impensable, l’indicible » : verdict implacable pour la mère d’Amandine

Au terme d’une semaine de procès éprouvante et d’un réquisitoire implacable, Sandrine Pissarra, 54 ans, la mère d’Amandine a été condamnée à la perpétuité, assortie d’une peine de sûreté de 20 ans, pour avoir provoqué la mort de sa fille.

Le beau-père, Jean-Michel Cros, 50 ans, écope, lui, de 20 ans de réclusion au lieu des 18 ans requis.

Sandrine Pissarra a annoncé qu’elle ne fera pas appel pour préserver ses enfants d’un deuxième procès.

Le beau-père se donne quelques jours de réflexion. Il a 10 jours pour former appel.

Le voyage au bout de l’enfer d’Amandine, morte de faim à 13 ans, martyrisée à domicile, a connu son épilogue ce vendredi de la main des jurés la cour d’assises de l’Hérault : sa mère, Sandrine Pissarra, 54 ans, a été condamnée à la perpétuité, assortie d’une peine de sûreté de 20 ans.

La peine maximale, conforme aux réquisitions de l’avocat général Jean-Marie Beynet, qui avait dénoncé un peu plus tôt « une dictature familiale » orchestrée par l’accusée.

Une mère qui avait laissé mourir de faim son enfant, dans un petit cachot aménagé avec vidéosurveillance dans leur maison de Montblanc, près de Béziers (Hérault).

Cette dictature avait été dévoilée par les gendarmes huit mois après l’agonie finale de la jeune fille, survenue le 6 août 2020.

Sandrine Pissarra avait été mise en examen pour des actes de tortures et de barbarie, privation de soins et d’alimentation ayant entraîné la mort sans intention de la donner.

Vingt ans de réclusion pour le beau-père

Son compagnon de l’époque, Jean-Michel Cros, 50 ans, présenté comme un « bon gars », est considéré comme le principal « collabo, le factotum du chaos de cette tyrannie personnelle mortifère », selon les mots durs de l’avocat général.

Il écope de vingt ans de réclusion, contre une réquisition de dix-huit ans.

« Vous avez pénétré dans l’horreur, l’impensable, l’indicible. Le système Pissarra, c’est un monde inimaginable, mis en place au cours d’années de violences physiques et psychologiques et même de torture blanche, qui consiste à isoler totalement la personne, à détruire sa personnalité », a argumenté l’avocat général en 45 minutes pour tracer la destination judiciaire, la perpétuité, encouragé par les quatre journées d’audience passées à tourner les pages du « livre des horreurs », clouant sur place celles et ceux qui ont traversé depuis lundi la salle des audiences.

« Il s’est passé quelque chose pendant ce procès. Sandrine Pissarra a avoué ce qui est inavouable.

Elle s’est elle-même qualifiée de monstrueuse, ce qui n’est pas le cas.

Elle a reconnu sa responsabilité après avoir nié pendant trois ans », a plaidé son avocat, Me Darrigade, exhortant à ne pas prononcer une peine d’exclusion définitive.

Dans le box, vers 17 heures, Sandrine Pissarra a encaissé le verdict sans broncher ni signe visible d’émotion.

« Elle ne fera pas appel de cette décision. Elle veut préserver ses enfants d’un second procès. C’est une nouvelle route qui s’ouvre devant elle. Je regrette que différents évènements et signalements n’aient pas permis d’enrayer le mécanisme avant cette extrémité », a précisé son défenseur,

alors que Me Grégoire Mercier, l’avocat de Jean-Marc Cros, se donne quelques jours de réflexion avec son client pour envisager ou pas de faire appel.

Son père va se consacrer « à sa mémoire »

Frédéric Florès, le père d’Amandine, a quitté la salle d’audience chancelant, usé par ces cinq journées de forte intensité.

« Je vais, je dois me consacrer à la mémoire d’Amandine après cette épreuve », a-t-il glissé dans un souffle.

« Il n’était pas venu ici pour la vengeance mais la justice et la vérité », a complété son conseil, Me Luc Abratkiewicz qui, jeudi soir, avait rendu un poignant hommage à Amandine, « une belle jeune personne.

Une bonne élève malgré le chaos de sa vie. Elle rêvait de devenir infirmière, selon une confidence d’une camarade.

Elle était drôle, aimée de ses amis, rayonnante loin de la maison de la haine et du cagibi de la honte.

Son image vibrera longtemps dans l’esprit de ceux qui ont croisé sa vie ou son histoire. »

Source

Enfance en Danger

Enfance en Danger

Enfance en Danger

Enfance en Danger

Enfance en Danger

Enfance en Danger

Enfance en Danger

Enfance en Danger

 

Source(s):