L’Haÿ-les-Roses | Une ex-professeure de collège condamnée à 6 ans de prison

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Elle a été placée sous mandat de dépôt.
Illustration | Tribunal Judiciaire de Créteil
Une femme de 40 ans qui enseignait dans le Val-de-Marne comparaissait devant la cour criminelle de Créteil pour viols sur Théo, son ancien élève, désormais majeur.

Le garçon et son ancienne professeure étaient restés en contact, liés par une passion commune, le métal.

Théo se rend souvent chez Anne, chez qui il dort une dizaine de fois, et passe du temps avec ses enfants. L’aîné, qui porte le même prénom que la victime, a tout juste deux ans de plus que Théo.

Anne assure être devenue « un refuge », un « soutien moral » pour ce jeune homme qui traverse, comme elle à son âge, des moments difficiles. Il était « comme un quatrième enfant », dira un ancien compagnon d’Anne.

« Je me rapprochais de lui parce que je voulais le cajoler, le materner », explique l’accusée à la barre, qui se sentait « investie d’une mission ».

Un soir, ses enfants endormis, elle l’embrasse et lui impose des relations sexuelles. C’est le premier contact de l’adolescent avec la sexualité. Pendant la pénétration, il fixe le mur.

Un mercredi après-midi, à l’arrière d’une voiture, Anne lui impose une fellation. « C’est dégueulasse », réagit l’enfant, riant nerveusement, selon la mise en cause. « Je l’interprète comme une initiation », explique-t-elle.

« A posteriori j’aurais dû comprendre que c’était une manifestation de son mal-être, de son non-consentement »

, a-t-elle reconnu devant la cour.

Le jeune homme décrit six actes sexuels non-protégés au mois de septembre 2020. À plusieurs reprises, elle lui fait fumer du cannabis avant de le violer.

« Un instrument de la contrainte »

, a estimé la procureure, qui avait requis une peine de huit ans de prison avec mandat de dépôt.

Jamais, au cours de leur relation, elle ne lui a demandé son avis sur ces relations sexuelles. Et jamais Théo n’a osé les refuser.

« Par peur de lui faire de la peine »

, assure-t-il. Il rapportera qu’Anne, à la personnalité « borderline » et souffrant de troubles anxio-dépressifs, lui a confié qu’elle se suiciderait s’il n’existait pas, allant jusqu’à dire qu’elle emporterait son fils avec elle.

Un « chantage affectif », a estimé la procureure.

Malgré les avertissements de la mère de l’adolescent, qui lui ordonne de se tenir à distance, Anne a resserré son emprise.

En confiance, Théo lui fait part ses questionnements sur son identité sexuelle et de genre. Rapidement, elle le genre au féminin, l’appelle « Lydia », et l’informe sur la prise d’hormones féminines. Au cours de l’enquête, le garçon estime qu’Anne l’a encouragé en ce sens pour l’éloigner de sa famille et « mieux l’utiliser sexuellement ».

Les avocats des parties civiles ont insisté sur « la dangerosité » supposée de l’accusée.

Le conseil de Théo, Catherine Morel, dénonce le comportement « machiavélique » de la professeure, qui aurait fait assister Théo à des « rites sataniques », et note que le plus jeune enfant d’Anne porte le nom d’une figure « équivalente à Lucifer ».

« Je me sentais la personne qui pouvait le sauver », explique de son côté la femme de 40 ans, qui dit s’être « identifiée à ce jeune ».

« Quand il était dans des phases suicidaires, à mon sens, les parents ne réagissaient pas. Ça m’a rappelé mes parents. Je me suis dit : c’est moi qui peux l’aider »

, assure la mise en cause. Elle invoque le souvenir de son frère schizophrène, qui s’est suicidé alors qu’elle avait 16 ans.

Elle mentionne également le viol qu’elle aurait subi — puis occulté — à 18 ans, commis par deux hommes et pour lequel elle n’a pas porté plainte.

« Je me disais : qui va croire qu’on peut violer la petite grosse ? »

, rapporte l’accusée. « Un parcours de vie chaotique », appuie son avocate, Julie Cerman.

« Des films dans ma tête »

Anne a d’abord nié les faits, avant de reconnaître des relations consenties, assurant qu’elle « s’était laissée séduire ».

Ce n’est qu’avec du recul et des années de psychanalyse, dit-elle, qu’elle a pris conscience de la gravité de ses actes.

« J’ai réalisé que je me suis monté des films dans ma tête »

, confie-t-elle.

Elle dément en revanche formellement être une « pédophile », disant avoir été excitée par la personne et non « son apparence ».

« Ce passage a l’acte a été pour moi un moment de régression »

, explique la mise en cause, qui dit être « redevenue une gamine de 13 ans ».

« On était loin des parents, j’étais la personne qui pouvait le comprendre. Dans ma tête on était amoureux. »

« J’ai réalisé à quel point j’ai fait du mal (…) à quel point ça a été dur pour la famille »

, a conclu Anne, reconnaissant avoir été « toxique » et « nocive ».

À la barre, Théo, aujourd’hui âgé de 18 ans, a fait part de sa volonté de la voir incarcérée.

Avec ses parents, qui se tiennent à ses côtés, le jeune homme aux traits juvéniles tente de se reconstruire loin de la région parisienne. L’accusée, qui comparaissait libre, était retournée vivre sur son île de La Réunion natale. Elle a été écrouée.

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