Le Havre | Les échanges dérangeants entre un homme et un ado
- La Prison avec sursis... C'est quoi ?
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- 07/12/2025
- 20:30
À peine quelques jours après le vote du Sénat pour inscrire le consentement dans le code pénal, le tribunal du Havre a effectivement été confronté à une difficile définition du consentement.
Mardi 4 novembre 2025, un homme de 30 ans a été jugé pour agression sexuelle et corruption d’un mineur de plus de 15 ans, reconnu en situation de handicap mental.
Des faits datant de 2022. Aucun des deux n’était présent lors de l’audience.
Fétichistes des couches
C’est la mère du jeune homme, âgé de 16 ans au moment des faits, qui s’est rendue au commissariat du Havre.
Son fils avait reçu des colis remplis de couches-culottes, body pour adultes, biberons, sucettes et autres items de ce genre.
L’enquête a révélé que ce colis avait été envoyé par un homme basé du côté de Limoges (Haute-Vienne), déjà jugé pour ces faits.
Mais cet échange postal a mis la puce à l’oreille des enquêteurs qui ont remonté la piste jusqu’à un autre homme, habitant cette fois-ci à Gonfreville-l’Orcher, près du Havre.
Lui et le jeune ado se sont connus sur les réseaux sociaux.
Tous deux partagent une passion commune, un fétichisme AB-DL (adult babies-diaper lover, c’est-à-dire adultes bébés adorateurs de couches), lié aux couches-culottes, biberons et autres objets habituellement dédiés aux bébés, portés pour des jeux à caractère sexuel.
Après de longs échanges de messages, ils se sont rencontrés par trois fois.
Lors des échanges, le mineur envoie notamment des photos de lui dans ces couches-culottes.
Lors d’une de ces rencontres, il aurait été masturbé.
« Est-ce que je pourrai te langer la prochaine fois ? »
L’homme, âgé de 27 ans à l’époque, nie les faits.
Lorsqu’on retrouve des couches chez lui, il affirme avoir des fuites urinaires depuis l’adolescence.
Les enquêteurs ont cependant confirmé les dates à l’aide des téléphones et des messages échangés.
Au total, ce sont 579 appels relevés pendant deux semaines.
Parmi ces nombreux échanges, beaucoup étaient à caractère sexuel.
« Est-ce que tu veux toucher mon petit corps ? »
« Le petit zizi était bien au chaud dans sa couche »
« Veux tu me voir en couche ? »
« Est-ce que je pourrai te langer la prochaine fois ? »
« Les choses l’ont rapidement dépassé »
L’avocate défendant les intérêts du mineur consent que celui-ci était d’accord avec ce qu’il s’est passé, mais elle rappelle le contexte.
Il n’avait jamais eu de relation sexuelle, se questionnait sur son homosexualité.
Lui-même, pour décrire son handicap, me dit qu’il ne perçoit pas le danger.
Il se montre d’une grande naïveté, ne se demande pas comment sont perçues les choses en face.
Effectivement, il est d’accord pour avoir des échanges par messages, il est réceptif aux échanges, mais il me l’a dit, les choses l’ont rapidement dépassé.
Mais on n’est jamais dans un rapport d’égal à égal.
L’un apprend tout de sa sexualité, face à quelqu’un qui semble avoir une expérience.
Il a été pris de court par ce qu’il s’est passé, il n’a pas su dire non et lorsqu’il ne répond plus, ne donne plus de nouvelles, l’adulte le relance, insiste :
« On se voit deux fois, tu rafles le butin, pas très correct et mal élevé.»
Pour elle, l’agression est caractérisée :
« Il n’était pas consentant, car il y a une forme de contrainte ».
L’avocate demande 5 000 euros de dédommagement.
Le ministère public reconnaît également qu’il n’y a pas de doute sur l’identité du prévenu, malgré sa négation des faits.
« La question qui va se poser c’est celle du consentement, de l’intention. »
Il reconnaît l’influence du premier majeur jugé par ailleurs dans l’aspect de « corruption », sur la volonté de corrompre « à des pratiques sexuelles, un peu particulières ».
« À mon sens, il n’y a pas suffisamment d’éléments pour dire qu’il a forcé le consentement ou bien que l’adulte avait conscience de l’absence de consentement ».
Il demande donc la relaxe sur les faits d’agression sexuelle.
S’agissant des faits de corruption, il réquisitionne une peine de 3 ans d’emprisonnement, avec un sursis de deux ans, une obligation de soins psychiatriques, une interdiction de contact avec la victime et une interdiction de travailler avec des mineurs.
L’avocate de la défense cherche à justifier sa négation des faits.
« Il est compliqué d’assumer son homosexualité, il va marteler à chaque fois aux policiers qu’il est hétérosexuel, qu’il ne connaît pas ces pratiques, difficiles à assumer. »
Y compris ces messages de SMS qu’il a nié.
On peut expliquer ce positionnement mais ce sont des SMS suffisamment clairs pour dire que cette relation était pleinement consentie , estime-t-elle.
De même elle affirme que le prévenu n’avait pas connaissance du handicap de la victime, ni de son âge.
« Corrompu, oui, mais par l’autre majeur auparavant, qui lui adressait des colis, à son domicile », déclare-t-elle avant de demander une relaxe.
L’homme a par ailleurs déjà mis en place un suivi psychiatrique spontané et n’a pas eu de contacts avec la victime.
Le tribunal a suivi les réquisitions et accordé la relaxe pour l’atteinte sexuelle, mais le prévenu a été jugé coupable sur les faits de corruption de mineur.
Il devra s’acquitter d’une peine de 10 mois d’emprisonnement entièrement accompagnée d’un sursis de deux ans, mais également effectuer un suivi psychiatrique.
Il lui est interdit d’entrer en contact ou de se présenter chez la victime, qu’il doit indemniser à hauteur de 1500 euros.
Il a l’interdiction d’effectuer toute activité avec des mineurs pendant 5 ans.
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