Donde Vamos | Recadrage après la fiction de France 2 sur l’affaire d’Outreau
- La Prison avec sursis... C'est quoi ?
oui
Pédocriminel En liberté
- 19/01/2023
- 19:23
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Mots clés :
- Acquittement, Affaire d'Outreau, Agression Sexuelle sur Mineur, Belgique, Corruption de Mineur, Daniel Legrand, Dominique Wiel, Donde Vamos, Eric Dupont Moretti, France, Franck Lavier, Jonathan Delay, Lobby Pédocriminel, Myriam Badaoui, Pédo En Liberté, Pédocriminalité, Production de Pédopornographie, Prostitution de Mineurs, Réseaux Pédocriminels, Thierry Delay, Viol sur Mineur
Face aux offensives mensongères sur l’affaire dite d’Outreau, il est crucial de faire régulièrement de la pédagogie, de la réinformation sur cette affaire qui s’est conclue par deux vérités judiciaires contradictoires: celle d’un acquittement quasi général des adultes dénoncés par les enfants d’un côté, et de l’autre celle des 12 enfants reconnus victimes à l’issue du procès en appel.
Bizarrement, les médias mainstream et les autorités semblent n’en voir qu’une seule: il est donc crucial de rappeler l’autre vérité judiciaire, d’autant plus que depuis outreau le nombre de condamnations pour des faits de pédocriminalité ne cesse de baisser.
Une très brève chronologie de l’affaire d’Outreau – et ses suites
Pour rappeler brièvement ce qu’il s’est passé depuis 20 ans maintenant, voilà une chronologie rapide de l’affaire :
2001 : L’affaire éclate dans un quartier d’Outreau où plusieurs habitants, dont Thierry Delay et Myriam Badaoui, sont accusés par plusieurs enfants de violences sexuelles répétées et certains sont arrêtés. Les couples organisent des partouzes, s’échangent les enfants, d’après ce que les enfants ont dit alors qu’ils étaient placés.
On parle vite de plusieurs dizaines d’enfants et de plusieurs d’adultes concernés, dans toutes les catégories sociales. Assez vite il est question de voyages en Belgique pour des partouzes et de plusieurs meurtres d’enfants. Les faits auraient commencé en 1995.
Les médias commencent à s’en mêler, et soulignent l’horreur de la situation jusqu’à ce qu’il soit question de Belgique et de meurtres.
2004 : Procès en première instance en mai, avec 17 accusés seulement, dont 7 sont acquittés et 10 condamnés à des peines généralement modérées pour les faits reprochés. 16 enfants sont reconnus victimes.
Avant le procès les médias, derrière Florence Aubenas notamment, qui à peine revenue de sa prise d’otage a récupéré le dossier, dit-elle, l’aurait lu en deux ou trois mois à peine et a écrit un bouquin dans lequel elle défend les accusés et décrédibilise la parole des enfants, ont fermement défendu les accusés en donnant constamment la parole à leurs avocats.
On a vu des “documentaires”, des dizaines d’articles, des livres, qui tous disaient qu’aucun réseau pédocriminel n’existait à Outreau, que les enfants disaient n’importe quoi.
L’élément clé du procès a été la rétractation aussi soudaine que médiatisée de Myriam Badaoui qui, après avoir parlé d’un réseau pédocriminel impliquant les acquittés, a décidé de nier en bloc et là elle a été immédiatement crue par tout le monde : juges, avocats, médias, autorités politiques.
En parallèle d’autres adultes du quartier ont été jugés dans des procédures séparées, et acquittés discrètement. Il s’agissait des mêmes faits, dans le même quartier, au même moment, avec des gens qui se connaissaient. A tel point qu’on s’est demandé combien de réseau pédocriminels se croisaient dans le secteur.
Wiel qui avait pris 7 ans a été libéré sous contrôle judiciaire dès le 20 juillet 2004, et Lavier qui avait pris 6 ans a été libéré le 22. Des détentions particulièrement courtes.
2005 : procès en appel en novembre, seulement 4 adultes sont condamnés, les 6 autres sont acquittés [1]. 12 enfants issus de 4 fratries différentes sont reconnus victimes.
L’ “expert” Paul Benussan, qui n’a jamais vu aucun des enfants, est venu expliquer à la barre, à la demande des avocats des accusés, que les enfants étaient des menteurs.
Le 6 décembre, juste après le verdict, les 13 acquittés ont été reçus en grande pompe à Matignon par Villepin. Ils recevront des indemnités records, du jamais vu dans l’histoire judiciaire française. Même ceux qui n’ont pas été en prison comme Karine D. ont touché une somme bien supérieure à ce que les enfants victimes ont obtenu.
2007 : Daniel Legrand est arrêté près de Dunkerque, au retour d’Ostende, par la douane. Il se balade avec 130 g d’héroïne qu’il avait avalée et cachée dans son slip.
“Il s’agirait de son quatrième voyage d’approvisionnement en Belgique depuis octobre 2006. M. Legrand devait être remis en liberté sous contrôle judiciaire en attendant de comparaître devant le tribunal correctionnel”.
Il a pris un an de prison dont 9 mois avec sursis pour “transport et importation” (pas la vente ni l’achat, donc), ce qui n’est pas cher payé du tout pour ce type de trafic.
2011 : Badaoui sort de prison, manifestement après un relooking et probablement de la chirurgie esthétique.
2012 : Les Lavier prennent 10 et 8 mois pour violences habituelles sur mineur. Grâce à leur avocat Dupont Moretti ils ont été relaxés des charges de corruption de mineur pour les (ou la) vidéos[2] dans lesquelles ils étaient à poil dans des positions suggestives devant leurs enfants.
Selon France 3 :
“Le tribunal correctionnel de Boulogne-sur-Mer a estimé que si ces derniers faits étaient moralement répréhensibles, l’infraction pénale n’était pas constituée, car la volonté de corrompre les mineurs n’était pas prouvée”. *
Quatre de leurs proches, également poursuivis pour corruption de mineurs, ont été eux aussi relaxés par le tribunal.
Pourtant, il a été montré au procès que les enfants étaient gravement maltraités, que le couple les enfermait dans des chambres vides et les surveillait par caméra de vidéosurveillance. Deux de leurs enfants âgés de 3 et 6 ans s’étaient enfuis pour retourner chez l’assistante maternelle qui les avait gardés pendant le procès.
2015 : Procès à Rennes d’un des acquittés, Daniel Legrand fils, pour les faits commis lorsqu’il était mineur. Défendu pendant 3 semaines par plusieurs avocats médiatiques comme Dupont Moretti, Berton, Delarue fils, Vigier, il a été acquitté. Ses avocats n’ont même eu besoin de plaiser : l’avocat général l’a fait à leur place invoquant la théorie pédocriminelle des “faux souvenirs”.
2016 : Franck Lavier, un des acquittés dont l’une des filles est reconnue victime en appel[3], est mis en examen pour viol et agressions sexuelles sur une autre de ses filles qui a porté plainte contre lui à 17 ans. Il n’a toujours pas été jugé parce que depuis 6 ans tout est fait pour minimiser les faits et on a appris en novembre 2022 qu’il était finalement renvoyé en correctionnelle et que les faits de viol ne sont pas retenus[4].
On note que les Lavier sont les grands absents de la fiction de France 2. c’est bien dommage, ils avaient beaucoup de choses à dire. Ont-ils refusé ou ne les a-t-on pas invités?
Voilà pour le bref résumé des faits.
Depuis 2001, on assiste régulièrement (en réalité à chaque fois qu’un procès lié à l’affaire va se dérouler) à des offensives médiatiques pour tenter de défendre la théorie de l’absence de réseau à Outreau, cela en général à coups de productions télévisuelles qui relèvent de la fiction larmoyante mais nous sont présentées comme des documentaires ou des faits réels. Aucune ne s’en approche, tant la partialité du propos est flagrante.
La fameuse fiction de l’acquitté Alain Marécaux, dans laquelle l’acteur Philippe Torreton incarne un personnage “innocent” confronté à un horrible juge qui lui en veut personnellement, n’en est qu’un exemple, tout comme cette fiction en 4 épisodes de Georges Huercano, responsable des co-productions de RTL Belgium, pourtant classée dans les “documentaires” sur le site de France 2.
Il faut noter que Jonathan Delay, qui témoigne dans le film, a porté plainte pour diffamation et abus de confiance contre la production qui apparemment n’avait pas prévenu de son parti pris.
Une opinion publique totalement manipulée :
Aujourd’hui encore, beaucoup de gens croient de bonne foi que les victimes d’Outreau, ce sont les acquittés. Ils n’ont entendu parler que d’eux, et nombreux sont ceux qui ignorent même l’existence de victimes reconnues chez les enfants, ces enfants qui ont été systématiquement présentés comme des menteurs par la défense.
Les enfants, dont 12 ont bien été reconnus victimes en appel, sont totalement oubliés depuis le début de cette affaire.
La série de France 2 – qu’ils ont encore osé classer dans la catégorie “documentaires”- ne déroge pas à cette règle.
Pour comprendre comment toute une partie de l’histoire peut être occultée, la partie immergée de l’iceberg, celle qui mène à des pistes glauques loin du narratif officiel bien rassurant sur les pauvres acquittés brisés par une bande d’enfents menteurs qui ont vilement manipulé le juge, plusieurs éléments sont à prendre en compte :
Les enfants victimes étaient représentés par seulement 2 avocats payés par le conseil général, qui ne s’exprimaient quasiment pas dans les médias. Dont l’un a été appelé par Wiel pour le défendre.
Chaque accusé avait un avocat, souvent une pointure locales comme Dupont-Moretti, Berton, Delarue père, Roy-Nansion, qui eux s’exprimaient en permanence dans les médias en attaquant les enfants et l’instruction.
Le pouvoir politique voulait supprimer les juges d’instruction, il fallait donc taper sur le juge Burgaud et sa procédure. Il n’y avait aucune place pour la parole des enfants dans ce narratif.
Le retournement médiatique a été flagrant dès qu’il a été question de réseau organisé vers la Belgique, de trafic de films pédopornos, et des meurtres de 4 à 6 enfants. A partir de là, l’objectif des médias jusque-là neutres et se limitant à du commentaire des évolutions de la procédure, était clairement d’étouffer l’affaire.
On a vu s’activer tout le lobby pédocriminel français et même une partie de celui de Belgique pour faire taire les enfants, et cela dure encore. Puisque parmi les enfants victimes, deux ont eu le courage de dénoncer les faits même une fois adultes. Et ils ont eu face à eux une barrière de silence puis des attaques dont certaines ont été particulièrement violentes.
Le seul documentaire qui a défendu la parole des enfants, “Outreau, l’autre vérité”, réalisé par Serge Garde, a été boycotté par la télé française, y compris la télé publique qui diffuse toutes les émissions défendant les acquittés. Il a été censure des dizaines de fois sur Youtube: c’est le documentaire interdit en france bien qu’il ait été diffusé sur la télé belge et la télé suisse, notamment. Nos voisins ont le droit de savoir, mais pas le citoyen français qui doit continuer à croire que les réseaux pédocriminels, à l’instar du fameux nuage de Tchernobyl, s’arrêtent à nos frontières.
Presque tous les livres qui défendent la parole des enfants, je pense à ceux de Jacques Thomet (“Retour à Outreau. Contre-enquête sur une manipulation pédocriminelle”), ou “Outreau, angles morts, ce que les Français n’ont pas pu savoir” de Jacques Delivré et Jacques Cuvillier (que je recommande chaudement pour mieux comprendre cette affaire), sont publiés par la bande.
Il est clair qu’au niveau des autorités, on ne veut pas entendre autre chose que l’innocence des adultes, condition sine qua non pour nier l’existence d’un réseau pédocriminel.
Pourquoi ont-ils presque tous nié en bloc ?
Si on reprend la suite des événements, le couple Delay-Badaoui était suivi par les services sociaux depuis 1992.
En février 2000 elle a demandé le placement de ses enfants, et c’est là qu’ils ont commencé à parler en citant déjà plusieurs adultes, condamnés ou acquittés. Ils parlent de viols qui auraient commencé brutalement le 25 décembre 1995 quand les parents Delay ont « offert » des cassettes pornos à leurs fils avant de leur demander de faire pareil que sur la vidéo.
Une enquête a donc été ouverte, et dès le mois de décembre 2000, Delay était au courant. Et le 28 décembre 2000 ils ont carrément reçu une lettre du juge des enfants leur expliquant que les enfants leur ont été retirés pour des soupçons d’agressions sexuelles.
Que s’est-il passé ensuite ? Dans une audition Badaoui a expliqué :
“Lorsqu’on l’a su mon mari a même appelé Daniel Legrand père. J’ai même été frappée car mon mari disait que c’était de ma faute car s’ils n’avaient pas été placés, ils n’auraient pas parlé”.
Elle a redit plus tard que c’est Legrand père qui a incité tout le monde à se taire et à ne pas parler de certains protagonistes.
Le jour où ils ont reçu cette lettre, elle dit que toutes les preuves ont été détruites, les objets sexuels compromettants ont été brûlés dans la baignoire et remplacés par des nouveaux sans ADN. Ce sont ceux-là qui ont été retrouvés par les enquêteurs, et dont l’analyse n’a logiquement rien donné.
Dans une autre audition, Badaoui a dit aussi que :
“Les cassettes sont parties en Belgique, ils n’ont rien laissé chez moi. Quand j’ai eu la lettre du juge précisant que je n’avais plus le droit d’avoir les enfants, tout est parti”.
Le couple n’a été arrêté que le 20 février 2001. Delay n’aura qu’une seule version : Il nie en bloc, déclare :
“Je ne fréquente personne, personne ne vient chez moi”, et c’est ce refrain qui a été repris par tous les accusés excepté Badaoui et couple Grenon-Delplanque.
Quand ils ont été arrêtés, les téléphones des accusés étaient neufs, ne comportaient que quelques numéros ou n’avaient pas servi depuis des mois.
Premiers commentaires sur la fiction de France 2
Dans la série de France 2, 92% du temps de parole est réservé aux acquittés et à leurs avocats. Cela montre le parti pris : celui de ne tenir compte que d’une partie de la vérité judiciaire, celle sur les acquittements, et d’oublier, celle des 12 enfants reconnus victimes.
Il y a deux victimes qui s’expriment, dont l’une est le fils de Marécaux et déclare qu’il ne s’est rien passé. L’autre est Jonathan Delay, à qui les réalisateurs avaient semble-t-il assuré que le “documentaire” serait équitable avec un temps de parole égal entre victimes et acquittés. Cela n’a pas été le cas, même si on sent bien que les auteurs ont essayé de laisser croire à une forme de neutralité derrière leur mise en scène.
Ce film avait pour conseiller technique Georges Huercano Hidalgo de la chaîne RTL TVI en Belgique, qui a fait partie de l’équipe de journalistes belges venus désamorcer l’affaire lorsqu’elle a commencé à partir sur un réseau en lien avec la Belgique.
Voyons ce qu’il en est sur ces près de 4 h de série présentée comme un “docu-fiction” mais qui n’a rien du documentaire tant il est scénarisé et tant les informations présentées ont été triées pour servir la thèse des avocats de la défense, qui ne correspond qu’à une partie de la vérité judiciaire.
Quant à la vraie vérité, dans cette affaire personne ne l’a à part les organisateurs de ce réseau censé, donc, ne pas exister.
Pleurons avec les acquittés
1er épisode, premières secondes : on est déjà en train de pleurer sur le sort des acquittés. On a compris qu’encore une fois, les seules victimes prises en compte seront les adultes. En fait, les 4 épisodes sont à l’avenant.
2e minute : Le curé Wiel apparaît sur un plateau télé géant qui reproduit des appartements, et qui vient nous expliquer qu’il est innocent. A l’écouter, il fréquentait de très loin le couple Delay-Badaoui, mais il admet qu’il recevait des enfants chez lui tous les jours -ce qu’il continue à faire avec des migrants comme il l’a expliqué dans la presse.
Et il ne peut s’empêcher de dire que D., un des frères Delay, était menteur bien qu’il a été reconnu victime en appel, notamment de faits de proxénétisme. D’ailleurs il a carrément écrit un bouquin pour le dire haut et fort.
La caution morale de cette fiction est la présence de Jonathan Delay, victime reconnue comme telle à l’issue du procès. Sur les témoignages des enfants, on aura en tout et pour tout 5 minutes à peine. On n’aura donc pas l’essentiel, ni même la substance.
Quand vient le tour du couple Grenon –Delplanque, qui a quand-même eu le mérite d’avouer une partie des faits dénoncés par les enfants, et a été condamné à des peines dérisoires en appel, leur avocate de l’époque les présente comme un gentil petit couple. Le film montre leurs aveux, largement minimisés par leur avocate et par la mise en scène, qui balaie rapidement cette séquence.
Vient Thierry Dausque, qui continue à nier (évidemment puisqu’il a toujours nié, comme Delay et les autres). Il a pourtant été accusé par plusieurs enfants, pas seulement les Delay, par le couple Grenon-Delplanque et même Lavier a confirmé qu’il était souvent chez les Delay. Mais ce n’est pas dans le film, bien-sûr.
Les enfants de sa compagne Monique F. ont été placés en juin 2001.
Puis c’est le tour de Jean-Marc Couvelard, qui ne parle pas donc on passe sa mère qui explique qu’il n’a pas pu commettre des viols des enfants en raison de son handicap. Le film ne parle que des accusations des frères Delay mais dans la procédure Couvelard a été accusé par plusieurs enfants, de fratries différentes.
2 mn sont ensuite consacrées à la première audition de la quarantaine d’enfants cités par les frères Delay, principalement D., qui disent tous que leurs parents sont gentils, que les Delay sont gentils et qu’il ne leur est rien arrivé. On s’étend beaucoup sur cette première audition, les autres, dans lesquelles beaucoup d’enfants parlent, seront à peine évoquées en 4h.
Le film évoque ensuite les premiers aveux de Myriam Badaoui sur les films pédopornos, le sex shop, le réseau pédophile, et sa lettre écrite depuis la prison à Dominique Wiel qui, on le rappelle, dit qu’il ne les fréquentait pas. Elle raconte que des films étaient tournés avec les enfants.
Le film ne s’attarde pas sur les aveux et ne parle pas de la pétition lancée dans le quartier en février 2000 pour que les frères Delay reviennent chez leurs parents, signée par Wiel et Lavier notamment, ni de l’aide apportée par Wiel à Delay pour lui apprendre à jardiner, ni de cette voisine qui confirme qu’il allait chez les Delay.
C’est Badaoui en effet qui la première a parlé de la Belgique, témoignage confirmé par ses fils et les filles d’un couple d’acquittés. L’enquête sur les lieux, avec une reconnaissance des maisons par deux frères Delay, a été assez succinctes et n’a rien donné.
Daniel Legrand, stupidité machiavélique?
C’est ensuite l’affaire des Legrand, Daniel Legrand père et Daniel Legrand fils, qui seraient arrivés dans l’histoire par erreur, en raison d’une homonymie avec le propriétaire d’une des fermes où des films auraient été tournés. Bien que ne tenant pas debout, cette théorie a fait le tour des médias mainstream.
Daniel Legrand recommence son couplet sur sa carrière dans le foot prometteuse brisée par l’affaire Outreau, et son chèr père aimant. Qui, selon le couple Grenon Delplanque, les a menacés et a participé aux faits. Legrand fils explique qu’il ne connaît personne à Outreau (il a donc reconnu Wiel sur photo par erreur, selon lui).
Par exemple le 5 octobre 2001 A. Grenon, qui a reconnu Daniel Legrand fils sur photo, a déclaré :
“La veille [des partouzes] Thierry Delay ou Myriam Delay nous disait que l’on pouvait passer le lendemain chez eux. Nous arrivons chez M et Mme Delay et nous payons la somme que Thierry Delay et Daniel Legrand nous demandaient. Nous nous déshabillons dans la chambre de M. et Mme Delay ou la chambre de leurs enfants (…) La télé est allumée et des films pornographiques passaient (…)
Là, les adultes pouvaient choisir les enfants parmi ceux qui étaient présents et nous pouvions aller dans un coin de la pièce sur un canapé, une chaise ou par terre et nous pouvions avoir des relations sexuelles avec les enfants”.
Des propos confirmés ensuite par Delplanque lors de son audition.
Et puis il y a le taxi Martel, un autre acquitté qui n’apparaît pas dans le film, qui selon plusieurs témoignages emmenait enfants et adultes en Belgique à l’occasion, et dit avoir pris Daniel legrand fils avec d’autres personnes dans le quartier de la Tout du Renard à Outreau où vivait tout le monde sauf les Legrand, qui vivaient dans une autre ville.
On évoque rapidement les aveux circonstanciés de Legrand, pour dire qu’il aurait tout inventé.
Avant de parler du meurtre, il avait commencé à parler de son implication dans les viols contre rémunération en argent ou en cannabis, expliquant être allé 10 à 15 fois chez les Delay jsqu’au début de l’année 2000, quand le scandale a éclaté. Il a précisé que des films et des photos étaient faits. On reviendra plus tard sur le cas des Legrand.
Marecaux a ce moment aussi, pour décrire sa merveilleuse situation avant l’affaire, et son fils François-Xavier confirme. Ils expliquent l’arrestation, le choc (on connait : il a écrit un bouquin et fait un film là-dessus), et le fiston raconte comment cette affaire l’a broyé. Il reviendra régulièrement au fil des épisodes, pour rappeler à quel point il a été maltraité et à quel point il a souffert. Le film ne parle pas de l’audition du 15 mai 2002 dans laquelle le fils Marécaux parle de faits bien plus précis et plus graves que la m”achine à bisous” dont il est question dans la fiction de France 2, ni du témoignage de sa soeur.
Et évidemment il ne parle pas des aveux de Marécaux en plein tribunal, admettant avoir dépassé les limites avec son fils. Mais le tribunal, bienveillant, a trouvé opportun de ne pas acter ces paroles.
Jamais on ne dira que parmi les dossiers de son étude il y en avait un concernant le couple Delay-Badaoui, dont l’ardoise a été miraculeusement effacée.
Badaoui a expliqué que les viols des enfants ont commencé après qu’il soit venu chez eux pour réaliser l’inventaire des meubles (qui n’ont jamais été pris) et qu’il ait trouve un “arrangement” avec Thierry Delay.
On entend tout de même les témoignages de deux garçons qui ont confirmé les accusations concernant Dominique Wiel, d’un autre qui a confirmé les films tournés par Myriam Badaoui contre rémunération. Car Wiel a été accusé par Myriam Badoui et par ses enfants, ainsi que par le couple Grenon- Delplanque et par au moins trois garçons dont l’un a expliqé que déjà avant que l’affaire n’explose, les enfants parlaient entre eux des “manière” (les attouchements) de Wiel quand les enfants allaient chez lui. Un autre a raconté la participation du curé au partouzes, qui étaient filmées avec la caméra de Delay.
Même un adolescent de 18 ans est venu le dénoncer à la police quand il en a entendu parler dans la presse.
Les aveux de Daniel Legrand fils sont un grand moment du film, et on reprend la sa théorie comme quoi il a tout inventé pour sortir de prison puisque A. Grenon qui avait avoué venait d’obtenir une liberté conditionnelle.
Il n’avoue pas immédiatement sa présence lors d’un meurtre d’enfant, mais commence par son implication dans les partouzes des Delay. Il explique que comme il n’a pas été libéré il a voulu “faire éclater une bombe” en avouant avoir été présent lors du meurtre d’une fillette par Thierry Delay dans l’appartement familial. Il a écrit à France 3 et au juge pour expliquer la scène. Rappelons que ce même Daniel legrand se plaint encore d’avoir été aligné dans les médias.
Myriam Badaoui confirme, après, certes, lecture de la lettre d’aveux de Legrand fils. Ces aveux ont aussi été confirmés par Jonathan Delay, qui n’a pas eu lecture de la lettre et confirme le déroulé des faits ainsi que la plupart des détails donnés par Legrand et Badaoui. Et la fille d’un couple d’acquittés a aussi parlé du meurtre d’une petite fille belge de 5 ou 6 ans, qui a précisé :
“Je sais que c’est une petite fille belge car ma mère m’a dit qu’une petite fille belge allait être violée ce soir”.
De plus, Legrand a commencé à parler de ce meurtre lors d’une expertise psychiatrique au cours de laquelle il a aussi expliqué être accro au shit depuis ses 15 ans et à l’héroïne qu’il fume, depuis 2 ans ce qui entraînait des symptômes de manque.
Il a même expliqué à l’expert qu’il participait aux partouzes chez les Delay pour l’argent. Mais ce n’est pas mentionné dans le film, qui préfère se concentrer sur les fouilles infructueuses pour trouver le corps de la fillette à l’endroit désigné par le fils Delay. Fouilles réalisées devant les caméras, comme il se doit, ce qui a permis de dénoncer une enquête coûteuse et inutile.
Là-dessus, le fils Legrand, qui n’est décidément pas une lumière, explique que ses aveux machiavéliques visaient à faire tomber l’enquête “comme un château de cartes” puisque d’après lui les enquêteurs ne trouveraient pas le corps.
Pourtant le 19 février 2002 dans le bureau du juge Burgaud, qui lui lui demande pourquoi il a fait ça, Legrand a répondu sans hésiter :
“Pour dire la vérité, pour que cela se sache. J’avais dans l’enveloppe mon mandat de dépôt pour pas que ça passe pour un canular”.
Il dit que c’est lui seul qui a pris cette initiative, car il voulait “que les autres paient pour ce qu’ils ont fait”, et qu’il n’a pas agi sous la contrainte. Il dit qu’il a menti lors de la confrontation quand il a innocenté Martel (qui n’apparaît pas dans le film de France 2) et Wiel :
“Ce n’est pas vrai Myriam et Thierry ne m’ont pas dit de dénoncer des gens. Au contraire ils m’ont dit qu’il ne fallait rien dire”.
Tout cela n’est pas dans cette fiction partisane, dont les auteurs soit n’ont pas lu le dossier, soit n’ont jamais cherché à faire la part des choses.
Il faut aussi souligner que dans ce film, la famille Legrand passe pour une famille modèle : rien sur les attouchements commis sur les petits cousins, les exhibitions sexuelles, les accusations de viols contre Legrand père et fils par un enfant de la famille. Pas un mot.
Au sujet de ces aveux, il y a eu un grand moment au procès de Daniel Legrand à Rennes, quand l’avocat de Jonathan lui a demandé comment il avait pu imaginer un scénario qui correspondait aussi bien aux déclarations de Badaoui et de Jonathan, et qu’il a répondu qu’il est “rentré dans la tête de Myriam Badaoui”. Nous étions chez les extralucides, ce qui n’a pas du tout interpellé le tribunal.
Les propagandistes réécrivent l’histoire
Le film montre bien que ce sont les journalistes belges qui ont commencé à désamorcer l’affaire en 2001 avec des reportages et articles laissant entendre que toutes les accusations des enfants étaient surréalistes et surtout, que de réseau pédocriminel il n’y avait point.
Car au début de l’affaire les médias français sont dans le sensationnel et relatent les arrestations, les accusations sans les remettre en cause, peut-être même avec une certaine complaisance.
Ce sont les journalistes belges qui ont marqué le virage à 180°, pour décrédibiliser les enfants.
Puis des ténors du barreau du Nord : les Delarue père et fils, Roy-Nansion, Berton, Dupond Moretti, arrivent comme par magie dans le dossier, pour défendre des gens aux minimas sociaux et à l’aide juridictionnelle. Jamais on ne leur a demandé comment ils sont arrivés là.
De fait, après l’affaire Dutroux la Belgique maîtrise parfaitement l’étouffement des dossiers de réseaux pédocriminels, fussent-ils tentaculaires. Et les liens entre cette affaire Outreau et la Belgique ne devaient pas satisfaire ces pourfendeurs de théories sur les réseaux pédos.
On tape encore sur les expertises, sans s’étaler parce qu’elles sont bien embêtantes : 7 experts ont estimé que les propos des enfants tenaient la route. Mais dans les médias, les avocats des accusés, ducon, pardon Dupont Moretti le premier, les ont violemment attaqués, n’hésitant pas à propager une série de mensonges éhontés.
Enfin, le dernier épisode revient sur les deux procès, en 2004 et 2005.
Là encore, on aura à 95% la version des acquittés. Au final il faut retenir que seuls ceux qui ont avoué ont été condamnés parce qu’à un moment Myriam Badaoui s’est rétractée en disant que les futurs acquittés étaient tous innocents, et là tout le monde a décidé de la croire.
Ce revirement soudain n’était probablement pas le fruit du hasard, et on donnerait cher pour avoir savoir si un avocat des accusés est venu la voir la veille dans sa cellule. Ce que l’on sait, par contre, c’est qu’elle a bénéficié d’un traitement extrêmement favorable en prison, dont elle est sortie dès 2011 alors qu’elle avait pris 15 ans.
Badaoui a été jusqu’à dire à l’audience du procès en première instance qu’elle ne connaissait pas Marécaux, et c’est passé. Alors que les enfants avaient été clairs, elle a innocenté les futurs acquittés. Puis le couple Grenon Delplanque s’est aussi rétracté et a eu une peine minimale (4 et 6 ans) pour les faits dont il était question.
Quand le lendemain Badaoui a redit que les enfants disaient la vérité, là plus personne ne la croyait, évidemment. Les avocats de la défense ont tout fait pour que l’opinion publique en reste là.
Roy-Nansion admet qu’elle a forcé son client à dire qu’il avait menti en accusant les futurs acquittés. C’est intéressant, parce que jusque-là il confirmait les propos d’A Grenon, de Badaoui et des enfants.
On ne parle pas des 17 avocats des accusés qui défilaient pendant des heures pour interroger les enfants, les faire plier, les avocats expliquent qu’ils y ont peut-être été un peu fort, mais qu’il fallait le faire.
On en parle pas des 16 enfants reconnus victimes à l’issue du procès en 1ère instance, ni du traitement des enfants victimes après le jugement.
Le film s’étend de longues minutes (au moins 15) sur la tristesse des condamnés en première instance, comme Wiel qui a pris 7 ans mais a été libéré juste après le procès, Marécaux qui a pris 18 mois pour attouchements sur son fils, Dausque et Legrand fils surtout, et la joie des acquittés.
Puis on passe au 2e procès, en appel qui a fini par 6 nouveaux acquittements, 1 an après le premier procès. Le seul objectif était d’amener les enfants à se rétracter, ce que trois enfants qui accusaient Wiel ont fait. Badaoui et A. Grenon ont dit que les autres étaient innocents, et qu’il n’y avait que 4 coupables, ce que Thierry Delay a confirmé. Bref, circulez y’a rien à voir, et surtout pas un réseau connecté à la Belgique.
Un procès où l’avocat général s’est excusé publiquement pour les acquittés AVANT que le jugement soit rendu, quand le jury partait délibérer.
Le film ne fait aucun commentaire sur les 12 enfants reconnus victimes à l’issue de ce procès à décharge.
Le film ne parle pas d’un rapport très intéressant paru en 2007, après le procès en appel, mais il aurait dû amener les autorités à se poser des questions : le rapport de l’IGAS remis au ministre de la santé Philippe Bas sur l’historique médical de 14 des 17 enfants présentés au procès.
Ce document de l’Inspection générale des affaires sociales passé totalement inaperçu dans les médias sauf un, dit que :
“Pour cinq d’entre eux, dont les parents ont été reconnus innocents, l’IGAS relève des “indices évocateurs d’abus sexuels”.
Il ne s’agit pas de preuves, cite encore le rapport, mais seulement de signaux d’alerte qui justifient d’être pris en compte au nom de la protection de l’enfance. Autre point qui sème le doute : l’IGAS précise que l’institution judiciaire, lors de l’instruction de l’affaire d’Outreau, n’aurait pas recueilli, dans son intégralité, les documents de la PMI.
Le rapport conclut en tout cas qu’”une surveillance attentive et continue des enfants est préconisée”. Ce ne sera évidemment pas fait.
On ne parle pas non plus des 5 lettres écrites par une des filles Lavier à une copine, dans lesquelles elle disait avoir assisté au meurtre d’un enfant, qui ont été envoyées au tribunal par les assistantes maternelles qui les gardaient début 2002 mais ne sont jamais arrivées dans le dossier en raison d’un “problème d’aiguillage” apparemment.
Rien non plus sur le procès de Daniel Legrand en 2015 ou sur les pérégrinations judiciaires du couple Lavier.
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Voilà pour les grandes lignes, les réactions à chaud après avoir supporté les 4 épisodes de la série. A la fin des 4 heures on s’interroge : quel était le but de cette série réalisée à grand frais ?
On peut d’office éliminer la recherche de la vérité. Probablement, pour désamorcer certains points-clés qui commencent à interroger l’opinion publique : les aveux de certains accusés, le meurtre de la fillette, les 12 enfants victimes, les recoupements dans les témoignages des enfants et des adultes qui ont parlé…
Dans une prochaine partie, nous reviendrons plus en détail sur les accusations des enfants, caviardées dans cette fiction lamentable, sur ce délire selon lequel personne ne se connaît dans ce dossier, sur les meurtres d’enfants car dans la réalité il est question de plusieurs meurtres d’enfants dans ce dossier, sur la propagande du lobby pédocriminel à Outreau et depuis Outreau, et l’importance de l’opinion publique. Il est temps d’informer sérieusement sur cette affaire, car elle sert de chape de plomb pour enterrer la parole des enfants.
[1] Dominique Wiel, 67 ans, l’huissier de justice Alain Marécaux, 41 ans, Daniel Legrand, 24 ans, Franck et Sandrine Lavier, 27 et 28 ans, Thierry Dausque, 33 ans, qui avaient donc été condamnés en première instance.
[2] Un article du Point expliquait en 2011 : “En mai, le couple et quatre de ses proches avaient été placés en garde à vue, et leurs ordinateurs saisis. Ce matériel informatique, analysé par la direction interrégionale de la police judiciaire, a livré de nombreuses photos et vidéos qui font état d’autres faits s’apparentant à de la corruption de mineurs (…) Ces soirées festives ont eu lieu lors des deux ou trois dernières années. Selon nos informations, les photos et vidéos mettraient en scène Sandrine, Franck Lavier et leurs proches, à demi ou complètement nus, mimant des actes sexuels devant de jeunes enfants”. Et les chambres toutes rangées et pleines de jouets qu’on voyait dans les reportages complaisants tournés chez les Lavier avant ce procès n’avaient rien à voir avec les “mouroirs” décrits lors de l’audience, équipés de caméras de vidéosurveillance.
En 2011 quand l’affaire des maltraitances / corruption de mineurs a été connue, la mère de Franck Lavier avait déclaré : “Moi je demande que la justice soit faite et qu’ils aillent en prison pour le mal qu’ils ont fait à mes petits enfants”. Après le jugement elle a dit être “déçue” de cette “peine bien légère au regard des preuves et du résultat des examens médicaux”. Elle avait même ajouté que “Depuis l’affaire d’Outreau, Sandrine et Franck sont de toutes façons protégés”
[3] En première instance les deux filles ainées du couple ont été reconnues victimes mais l’une s’est rétractée après avoir repris contact avec ses parents.
[4] En novembre 2021, pourtant, il était bien question, après moult tergiversations, de l’envoyer aux assises.
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